1. Introduction
La dernière
décennie a vu s’accélérer le développement des
environnements d’apprentissage assisté par ordinateur (Azevedo et Hadwin, 2005),
face à une demande croissante de contenu attractif et accessible au plus
grand nombre. Le développement de ces environnements fait écho
à l’exposition sans cesse grandissante aux interfaces
numériques et constitue un contexte propice à la personnalisation
de l’apprentissage (Lavoué et Rinaudo, 2012) et à son autorégulation (Schunk et Zimmerman, 2013).
Parallèlement, les travaux de recherche montrent l’importance de la
confiance lors de l’activité d’apprentissage (Lee, 2007).
C’est un élément central dans le triptyque
Apprenant-Outil-Enseignant, notamment en raison de son rôle essentiel dans
la motivation des apprenants (Ennen et al., 2015).
Les émotions générées en contexte
d’apprentissage sont aussi à considérer.
D’après les résultats de Eligio et al. (Eligio et al., 2012),
dans un contexte de jeu, lorsque les apprenants ont la possibilité
d’échanger et de communiquer quant à leur ressenti
émotionnel, une augmentation de la performance est observée,
concomitante à la génération d’émotions
positives et de l’empathie. Les recherches concernant l’influence
positive de la confiance sur le bien-être (Helliwell et Huang, 2011) vont également dans ce sens, bien que les émotions en jeu ne
soient pas clairement identifiées.
Alors même que cette notion de confiance est rarement
appréhendée dans les recherches menées en pédagogie
numérique (Chae et al., 2016), (Lee, 2007), les
scientifiques signalent depuis plusieurs années l’urgence de
considérer l’impact des émotions sur les apprentissages.
Certains auteurs mettent en avant la possibilité que les émotions
positives puissent avoir un effet positif sur l’apprentissage (Pekrun et al., 2002).
Dans cette étude, nous souhaitons donc explorer les liens susceptibles
d'exister entre la confiance qu’il est possible d’induire dans un
dispositif d’apprentissage médiatisé, les émotions
qu’il permet de générer et son impact sur une
activité d’apprentissage. Pour cela, nous présentons dans un
premier temps les concepts étudiés pour préciser notre
questionnement et dans un deuxième temps, l’expérimentation
mise en œuvre pour le mettre à l’épreuve. Les
données récoltées lors de cette expérimentation nous
amènent enfin à valider certaines de nos suppositions mais aussi
à réfléchir à des préconisations en termes de
conception des dispositifs.
2. Cadre théorique
2.1. La notion de confiance : du physique au virtuel, de
l’inné à l’acquis
La notion de confiance, du latin confidere : cum, « avec » et fidere « fier », peut paraître simple à
appréhender, intuitive, et présente dans le quotidien de tous. De
nombreuses disciplines telles que la sociologie, le marketing, la philosophie,
la finance ou encore la psychologie portent un regard spécifique sur la
notion de confiance, ce qui rend complexe la possibilité de faire
émerger une définition consensuelle. Parmi les nombreux auteurs (Alvarez et al., 2003), (Rousseau et al., 1998) qui ont tenté de trouver un point de convergence entre les
définitions possibles de ce terme (plus de 70), nous retenons en
particulier celle que proposent Mayer et al., que nous avons
traduite : il s’agit d’une « volonté
d’une personne d’être vulnérable aux actions
d’une autre personne en ayant la conviction que cette dernière
effectuera une action importante pour le trustor, indépendamment
de l’habileté du trustor à contrôler les
actions de l’autre personne » (Mayer et al., 1995, p. 712).
En effet, cette définition, qui se veut générale et
probablement plus consensuelle, implique que la personne appelée trustor accorde sa confiance et remet quelque chose d’important
pour elle au trustee (objet de la confiance, pouvant être un
individu, un groupe d’individus, une organisation ou une institution) se
fie à lui et s’abandonne ainsi à sa fiabilité (Lewis et Weigert, 1985).
La confiance serait donc à l’origine d’une prise de risque (Mayer et al., 1995) même si celle-ci reste tout de même modérée et sans
conséquence grave pour le trustor. A noter également que la
relation de confiance peut être considérée comme un
continuum (Bauer et Fatke, 2014) allant de la méfiance (valeur 0) à la confiance totale (valeur
10). La confiance et la méfiance seraient donc indissociables et
l’absence totale de confiance correspondrait au plus haut niveau de
méfiance. Sabel (Sabel, 1993) évoque aussi la possibilité d’un apprentissage de la
confiance, comme si le fait de créer des liens de confiance fructueux
devait faciliter et stimuler la création de liens nouveaux (Rettinger et al., 2011).
Naoui et Zaiem (Naoui et Zaiem, 2015) ont tenté de trouver un lien entre la confiance dite
« classique » et la confiance dite « en
ligne » ou « e-confiance », soit cette même
confiance médiée par une interface numérique
connectée à internet. A travers une méta-analyse, ils ont
pu mettre en évidence des points communs : toutes les approches
appréhendent la confiance lors de situations incertaines ou
risquées et il y a toujours une personne, appelée trustor,
et un objet de la confiance, appelé trustee. Weckert (Weckert, 2005) va même jusqu’à transposer la confiance dite classique
à la confiance dans le domaine du numérique dans toutes ses
dimensions. Les recherches relatives au concept de l’e-confiance (Weckert, 2005) se focalisent, pour la plupart, sur les transactions commerciales en ligne.
Néanmoins, l’outil Internet ne se résume pas uniquement au
commerce électronique. Internet est un média incontournable de
communication qui peut contenir aussi bien des sites à vocation
commerciale qu’informative. De plus en plus, Internet prend une place
centrale dans le travail collaboratif et permet notamment de travailler selon
une modalité synchrone (Passig et Schwartz, 2007).
Il s’avère donc essentiel de tenir compte de la nature du
dispositif (réseau social, module e-learning) dans l’étude
de la confiance des utilisateurs et l’impact de cette confiance sur les
activités d’apprentissage.
Plus spécifiquement, la propension à la confiance (Mayer et al., 1995), (Uslaner, 2002),
appelée aussi confiance généralisée (CG) propre
à chaque individu (Yamagishi et Yamagishi, 1994),
mérite d’être considérée. Celle-ci consiste en
une prédisposition généralisée à faire
confiance, quel que soit le contexte rencontré ou les individus
concernés. Elle est durable dans le temps et basée sur des
expériences de vie mais aussi sur le tempérament de
l’individu, ainsi que sur des facteurs génétiques et
biologiques dans une certaine mesure. La CG serait ainsi à
l’origine de l’établissement de toute relation de confiance
durable. Selon Mayer et al. (Mayer et al., 1995, p. 712),
cette « volonté générale de faire confiance aux
autres » augmente le niveau mesurable de confiance avant même
d’avoir des informations sur le trustee. Elle est typiquement
mesurée à travers l’échelle STS (Social Trust
Survey) proposée par Rosenberg (Rosenberg, 1956) qui permet de discriminer les individus ayant un niveau de CG
élevé de ceux ayant un niveau de CG faible.
D’après Paxton et Glanville (Paxton et Glanville, 2015),
la CG est malléable, et s’adapte aux contraintes de
l’environnement. Cet environnement peut être
caractérisé comme suscitant de la confiance ou de la
méfiance d’après la perception que tout individu peut avoir
des actions d’autrui et de leurs conséquences. La notion de CG
s’avère essentielle dans notre vie quotidienne car elle indiquerait
que chaque expérience vécue pourrait avoir un impact
conséquent sur notre manière d’appréhender la
confiance. Une expérience qui mettrait à l’épreuve
notre confiance pourrait impacter durablement notre CG. En effet, en fonction de
la nature des interactions, ces auteurs rapportent une altération
possible du niveau de CG. Ils parlent dans ce cas de confiance-état, ce
qui contredit la notion de confiance-trait, stable et indépendante de
l’environnement (Uslaner, 2002).
Paxton et Glanville (Paxton et Glanville, 2015) ont par ailleurs souligné l’importance de considérer la
façon dont l’environnement et le niveau de CG de l’individu
s’articulent pour créer un contexte congruent versus non
congruent d’interactions. La confiance étant basée sur un
apprentissage (Sabel, 1993) à partir d’interactions sociales (Powell, 1996),
elle est établie lorsque les conditions sont favorables et serait
également influencée par la présence
d’émotions dans l’environnement (Dunn et Schweitzer, 2005), (Myers et Tingley, 2017).
En particulier, la propension d’un individu à établir un
lien de confiance envers un autre individu peut être influencée par
le comportement de cet individu et éventuellement par
l’émotion dérivée de son expression faciale (Campellone et Kring, 2013).
Autrement dit, un comportement qui serait en congruence avec
l’émotion véhiculée aurait pour effet de renforcer la
confiance dans un contexte favorable.
Parce que les échanges humains sont de plus en plus
médiatisés par les ordinateurs, il s’avère essentiel
de considérer l’importance de la confiance d’un point de vue
individuel (CG) et situationnel (confiance liée à
l’environnement), notamment dans le cadre de l’apprentissage. Outre
le fait de considérer la confiance comme une disposition individuelle ou
comme une propriété émergeant de l’environnement, il
s’agit là de mieux comprendre le phénomène de
congruence entre le niveau de CG et l’environnement avec
l’idée que cette combinaison pourrait favoriser
l’apprentissage, et ce d’autant plus que l’environnement
suscite des émotions positives.
2.2. Les émotions et les apprentissages
Les connaissances scientifiques sur les émotions sont
aujourd’hui nombreuses. Il est admis qu’elles sont
caractérisées par des réactions ou changements
d’états physiologiques et psychologiques, d’une durée
relativement courte, en réponse à une situation spécifique (Keltner et Gross, 1999).
Ekman (Ekman, 1973) postule que les émotions peuvent être véhiculées par
les expressions faciales, et ceci indépendamment de la culture. Il a pour
cela établi un système de codage d’actions faciales
appelé Facial Action Coding System ou FACS (Ekman et Friesen, 1978).
A travers ce système de codage, nous pouvons traduire les expressions
faciales en émotions de base (Ekman, 1994) qui
constituent les émotions primaires (i.e., joie, colère, tristesse,
dégoût, surprise et peur). D’après les
résultats de travaux antérieurs, les émotions peuvent
être véhiculées par des photographies (Lang et al., 1997) et exercer un effet sur la confiance en fonction de leur valence (Dunn et Schweitzer, 2005).
Parmi les émotions primaires, la joie est un marqueur de la confiance (Bewsell, 2012) et le dégoût est un marqueur fort de la méfiance (Kugler et al., 2020).
Les émotions, en raison de leur importance pour le caractère
adaptatif des êtres humains et de leur présence dans un grand
nombre de situations, sont essentielles dans le processus d’apprentissage (Um et al., 2012).
En effet, ces auteurs mettent en avant la possibilité que les
émotions positives aient un effet positif sur l’apprentissage
– voir aussi (Pekrun et al., 2002).
Dans ce sens, les caractéristiques de la situation vont influencer les
émotions ressenties qui peuvent être bénéfiques pour
les émotions positives et délétères pour les
émotions négatives sur l’apprentissage et l’engagement (Pekrun et al., 2011).
La prise en compte des émotions serait ainsi d’une importance
centrale pour la construction d’outils pédagogiques utilisant les
technologies positives (Riva et al., 2012).
D’après ces auteurs, les technologies positives s’appuient
sur les travaux dans le champ de la psychologie positive (Seligman et Csikszentmihalyi, 2014).
En effet, il serait possible, à travers certains facteurs,
d’influencer la qualité perçue de l’expérience,
avec l’objectif sous-jacent d’améliorer le bien-être et
d’augmenter la motivation chez les individus. Trois types de technologies
positives ont été catégorisées :
- hédoniques (induction d’expériences positives et
plaisantes) ;
- eudémoniques (soutien des individus pour accomplir des
expériences engageantes et valorisantes) ;
- sociales (favoriser les liens sociaux entre individus, groupes et
organisations).
Ces technologies, de par leur visée, sont étroitement
liées à l’étude des émotions dans le cadre
d’un apprentissage médiatisé par ordinateur.
Les émotions, bien que par nature brèves, sont susceptibles de
modifier la perception d’une situation, allant jusqu’à
exercer un effet sur la confiance perçue ou encore sur
l’apprentissage. Aujourd’hui, il n’est pas risqué
d’avancer que les émotions positives peuvent être propices
à l’apprentissage notamment en raison d’un engagement plus
important de l’apprenant, ce qui s’avère essentiel pour
cultiver la persévérance et la résistance à
l’échec (Blanc et Brigaud, sous presse), (Syssau et al.,
sous presse). Elles auraient également un rôle dans
l’établissement de liens de confiance, ceux-ci étant le
résultat d’expériences positives
répétées avec une personne ou un objet. En effet, la
robustesse du lien de confiance serait généralement liée
à la qualité des expériences passées mais aussi
à l’intensité des émotions positives ressenties
pendant l’interaction.
A notre connaissance, aucune étude n’a jusqu’ici
considéré les liens existant dans une situation
d’apprentissage entre attention, ressenti émotionnel et confiance.
Pourtant, des éléments robustes permettent d’inférer
l’existence de ces liens qui restent à confirmer, sachant
d’une part que le lien entre émotion et confiance a
été identifié à plusieurs reprises (Bewsell, 2012) ; (Dunn et Schweitzer, 2005) ; (Kugler et al., 2020) et d’autre part que le lien entre ressenti émotionnel et attention
visuelle a lui aussi été souligné (Kolinsky et al., 2010), (Luminet, 2002).
Dans la lignée de ces différents travaux, notre étude vise
ainsi à considérer, ensemble, dans une situation
d’apprentissage sur ordinateur, attention, ressenti émotionnel et
confiance. Les évolutions technologiques nous amènent à
envisager l’utilisation des mesures en oculométrie comme moyen
d’appréhender au plus près la situation
d’apprentissage. En effet, ces mesures rendent possible
l’enregistrement concomitant de divers stimuli visuels pendant une
tâche d’apprentissage médiatisée. Notons que
l’utilisation de l’oculométrie s’est
avérée prometteuse dans le domaine de l’apprentissage (Lai et al., 2013),
les travaux de Van Gog et Scheiter (Van Gog et Scheiter, 2010) ayant notamment montré que l’étude des mouvements oculaires
pouvait permettre d’examiner mais aussi d’améliorer
l’apprentissage multimédia. Ceci est également valable
lorsque l’émotion est intégrée à la situation
d’apprentissage (Park et al., 2015), (Stark et al., 2018).
Ainsi, ce choix de prendre en compte les mesures oculométriques accentue
la robustesse de notre étude et complète le recueil d’autres
mesures qui contribuent à une interprétation plus fine des
résultats.
2.3. Problématique
La littérature scientifique nous conduit à formuler la
problématique suivante : un environnement confiant peut-il aider
l’apprenant à générer des émotions positives
et donc à être plus efficace dans ses activités
d’apprentissage, et ce d’autant plus que son niveau de CG est
faible ? Pour mettre à l’épreuve cette hypothèse
nous avons choisi d’observer l’apprentissage sous l’angle
d’un jeu économique médiatisé par ordinateur et pour
lequel l’interface fournit des éléments visuels capables
d’induire une émotion positive versus négative
à l’individu et ainsi d’instaurer un climat de confiance versus un climat de méfiance. Cette situation
d’apprentissage implique une prise de décision de la part de
l'apprenant. Cette activité a été utilisée par
Paxton et Glanville (Paxton et Glanville, 2015) dans leur étude sur la confiance. Reproduire en partie leur
expérimentation nous permet ainsi de nous assurer de la validité
scientifique du dispositif mis en œuvre. Par ailleurs, la prise de
décision a pour avantage d’être possiblement explorée
à partir de la modulation des temps de réponse qui constituent des
marqueurs de l’apprentissage (Kyllonen et al., 1991) au même titre que l’adaptation progressive d’une
réponse par rapport au contexte (Rosenthal et Zimmerman, 2014).
Autrement dit, une diminution progressive du temps de réponse au fil des
tours de jeu ainsi qu’une évolution de la réponse
apportée selon le contexte sont autant d’indices de
l’apprentissage en cours. D’autres indicateurs
s’avèrent tout aussi intéressants à considérer
pour capter l’apprentissage en cours, avec notamment les profils
d’exploration oculaire de l’environnement d’apprentissage et
les expressions faciales produites en temps réel qui traduisent le
ressenti émotionnel des participants. La combinaison de ces indices de
différentes natures offre l’opportunité
d’appréhender, sous de multiples angles, comment la situation
d’apprentissage est modulée par la confiance, avec une mesure de
l’attention et de l’émotion pour mieux cerner les
mécanismes sous-jacents à la décision.
3. Méthode
3.1. Participants
Soixante-quatorze participants (48 hommes et 26
femmes ; âge moyen : 20,6 ; écart-type : 2,8)
ont volontairement pris part à cette étude. Tous ont rempli un
formulaire de consentement et leur recrutement s’est déroulé
au sein de l’IUT de Montpellier-Sète à
l’Université de Montpellier, en France. Selon leur niveau de CG,
les participants ont été exposés à l’un des
deux environnements (Confiant vs Méfiant), cette affectation ayant fait
l’objet d’un contrebalancement pour favoriser une répartition
équilibrée des différents profils de CG sur les deux
environnements à comparer. Pour précision, un test de la somme des
rangs Wilcoxon a permis de confirmer la présence d’une
différence significative entre les deux profils de CG (CG+ correspondant
à un niveau de CG élevé, et CG- correspondant à un
niveau de CG faible), avec comme score moyen 6,69 (0,92) pour CG+ et 3,63 (0,97)
pour CG-, p < .001.
3.2. Matériel
Afin de mesurer la CG, nous avons utilisé l’échelle STS (Rosenberg, 1956) qui est la mesure la plus fréquemment utilisée notamment parce
qu’elle présente l’avantage d’être
générale et possiblement adaptée à de multiples
contextes (Alós-Ferrer et Farolfi, 2019), (Bauer et Freitag, 2018).
Cette échelle est composée de deux items. Le premier item
consistait en l’affirmation suivante : « On peut faire
confiance à la plupart des gens ». Le deuxième item
était formulé comme suit : « Vous ne pouvez pas
vous permettre d’être trop prudent dans vos relations avec les
gens ». Ces deux items étaient systématiquement
présentés dans cet ordre-ci. Les participants devaient indiquer
leur degré d’accord avec ces deux affirmations sur une
échelle en 11 points, le score 0 correspondant à « Je ne
suis pas du tout d’accord » et le score 10 correspondant
à « Je suis tout à fait d’accord ». La
moyenne de ces deux scores nous permettait de nous appuyer sur la
catégorisation définie par Paxton et Glanville (Paxton et Glanville, 2015) :
les participants ayant un score de 6 ou plus avaient un niveau de CG
élevé (CG+) et les participants ayant un score de 5 ou moins
avaient un niveau de CG faible (CG-).
En outre, nous avons utilisé le jeu de la confiance (Berg et al., 1995) repris par Paxton et Glanville (Paxton et Glanville, 2015) pour concevoir une situation d’interaction médiatisée par
ordinateur. Dans sa version originale, le jeu de la confiance (aussi connu sous
le nom de « dilemme du prisonnier ») consiste à
prendre des décisions économiques sous forme de jeu de paris avec
un partenaire, l’objectif étant de gagner le plus d’argent
possible. Les gains potentiels sont dépendants des décisions
prises par les partenaires : ils ont le choix entre donner de
l’argent, en renvoyer ou le garder. Les joueurs sont associés par
paires anonymes. Le participant possède une somme de départ et
peut être affecté à la place de premier ou deuxième
joueur (pour les besoins de notre expérience, le participant est
systématiquement affecté à la place de deuxième
joueur). Un tour de jeu se définit de la manière suivante :
le premier joueur décide d’envoyer une somme d’argent au
deuxième joueur, en sachant que la somme qu’il envoie sera
systématiquement triplée par l’expérimentateur (dans
notre protocole, la somme envoyée par le premier joueur est fixée
au préalable). Le deuxième joueur (i.e., le participant)
reçoit la somme du premier joueur et décide soit de retourner,
soit de garder la somme reçue. Dix tours sont joués avec un
premier joueur différent attribué à chaque tour,
constituant ainsi dix paires de joueurs différentes. Contrairement
à la version du jeu utilisée par Berg et ses collaborateurs (Berg et al., 1995),
celle de Paxton et Glanville (Paxton et Glanville, 2015) est informatisée et a pour objectif de faire croire au participant que la
passation se fait, à distance, en interaction avec un autre joueur.
Nous avons modifié ce jeu, en tenant compte des recommandations
avisées de ces auteurs afin de contourner les limites
évoquées, à savoir l’ajout à chaque tour du
prénom et de la photographie du joueur associé afin de donner un
caractère plus réaliste à l’interaction.
L’objectif de ce jeu est d’amener le joueur à prendre une
décision d’échange économique en fonction de
l’environnement dont nous avons fait varier certains paramètres
pour comparer deux versions : un environnement confiant versus un
environnement méfiant.
Un environnement qualifié de confiant montrait un tableau de
synthèse des dix tours joués par les quatre autres paires de
joueurs précédant l’arrivée du participant
(affecté donc à la cinquième paire). Ce tableau mettait en
évidence des échanges de sommes d’argent relativement
importantes (6€ en moyenne) avec des retours sur investissement toujours
supérieurs à la somme envoyée par le premier joueur. Dans
cet environnement et pour chaque tour, l’interface montrait la
photographie du joueur, son prénom et la somme envoyée
(plutôt élevée) par ce joueur. La photographie avait pour
effet attendu d’induire un climat de confiance à travers des
expressions faciales positives, des couleurs vives, une haute luminosité
et une posture ouverte. Entre chaque tour, un tableau récapitulatif des
actions des autres paires de joueurs était présenté, ainsi
qu’un tableau de synthèse des dix tours joués par les autres
joueurs en fin de partie.
L’autre environnement, qualifié de méfiant, montrait une
synthèse des dix premiers tours mettant en évidence peu ou pas
d’échanges de la part du premier joueur (1€ en moyenne), et
quasiment aucun retour sur investissement. L’interface présentait
les mêmes éléments visuels que pour l’environnement
confiant, à la différence que la photographie avait pour effet
attendu d’induire un climat de méfiance à travers des
expressions faciales neutres ou négatives, des couleurs froides, une
faible luminosité et une posture fermée, sachant que la somme
reçue était très faible voire nulle.
Pour examiner en détail le lien entre émotion et CG, nous avons
utilisé deux jeux de photographies, l’un composé de
photographies d’individus souriants et l’autre composé
d’individus dont les expressions faciales ne traduisent aucun ressenti
positif. Ces photographies ont été sélectionnées sur
la base des résultats d’une expérience pilote pour laquelle
nous avons repris des paramètres d’intérêt
définis par Bonnefon et al. (Bonnefon et al., 2013).
En effet, à l’aide d’une échelle de Likert en 8
points, nous avons demandé à 92 participants
d’évaluer ces photographies d’individus selon le niveau de
confiance, l’intelligence perçue, l’attirance,
l’agressivité et la valence associée. Cette étude
préalable a permis de constituer deux ensembles de photographies qui se
distinguent uniquement quant à la valence émotionnelle
suscitée : positive versus négative.
S’agissant du prénom indiqué pour personnifier les
joueurs, nous avons pris soin de respecter une concordance avec
l’appartenance ethnique des individus photographiés. Nous nous
sommes également assurés en amont de la neutralité de ces
prénoms, en utilisant les mêmes paramètres que ceux
utilisés pour évaluer les photographies.
Précisons que nous avons fourni des jetons aux participants pour leur
permettre de s’appuyer sur un support physique susceptible de les aider
dans la gestion des sommes d’argent et ainsi éviter les erreurs
quant à la somme restante disponible après chaque tour.
Pour finir, afin de recueillir les impressions des participants quant aux
caractéristiques de la tâche à laquelle ils ont
été soumis, les questions suivantes leur étaient
posées à l’issue de la passation sur un court temps
d’échange : « Dans l’ensemble, comment
avez-vous perçu la tâche ? » ; « Vous
a-t-elle parue plutôt ludique ou plutôt
ennuyeuse ? » ; « D’après vous, un
autre joueur était-il systématiquement impliqué de
l’autre côté de l’écran ? ».
3.3. Procédure
La passation de l’expérience était individuelle et durait
en moyenne 15 minutes. Après avoir signé le formulaire de
consentement, un court calibrage de l’oculomètre était
réalisé. A partir de cette étape, les mouvements oculaires
étaient enregistrés. Puis, le niveau de CG des participants
était évalué rapidement via les deux items de
l'échelle STS (Rosenberg, 1956) afin de les catégoriser en deux groupes (Confiant / CG+ versus Méfiant / CG-) et de soumettre la moitié
de chacun de ces deux groupes à un environnement de jeu confiant,
l’autre moitié à un environnement méfiant. Les
instructions et les règles du jeu étaient ensuite
précisées via un écran d’introduction (voir Figure
1).
Figure 1 • Écran
d’instructions et des règles du jeu
Nous avons demandé aux participants d’être le plus naturel
possible et de procéder comme s’ils étaient en situation de
face à face avec l’autre joueur tout en rappelant que nous restions
à disposition en cas de problème ou de question. Les participants
disposaient d’un tableau récapitulatif des 10 tours qui avaient
été joués avant qu’ils ne rejoignent la partie, puis
commençaient le jeu. Les participants étaient
systématiquement placés dans le rôle du deuxième
joueur (ils devaient donc prendre la décision de retourner de
l’argent ou de le garder). Selon l’environnement dans lequel ils
étaient placés, ils pouvaient soit recevoir de l’argent du
premier joueur (i.e., environnement confiant) soit ne rien recevoir (i.e.,
environnement méfiant). Si tel était le cas, le jeu ne leur
permettait pas d’en envoyer. Lorsqu’ils étaient en position
de retourner de l’argent, ils devaient utiliser l’échelle
affichée à l’écran pour indiquer la somme
retournée. A la fin de chaque tour, un tableau récapitulatif
était présenté aux participants. Ce tableau leur
résumait les actions des autres paires de joueurs pendant le dernier
tour. Cette procédure se répétait ainsi pendant 10 tours au
total, jusqu’à atteindre un dernier tableau récapitulatif
des dix tours joués qui était présenté aux
participants en fin de passation. La somme retournée, le temps de
décision, le ressenti émotionnel et les mouvements oculaires des
participants étaient enregistrés tout au long de leur progression
dans le jeu. Une fois la tâche terminée, un temps
d’échange était organisé avec chaque participant afin
de recueillir leurs impressions au travers des trois questions ouvertes que nous
avons précisées plus haut.
3.4. Apparatus
Pour les besoins de cette étude, nous avons utilisé la
plateforme biométrique iMotions®
(https://imotions.com/facial-expressions) équipée des modules
Affectiva® et Tobii Studio® dans sa version 7.2, installée sur un
ordinateur portable HP doté des caractéristiques techniques
recommandées pour présenter nos stimuli et collecter les
données.
Le module Affectiva® (iMotions, 2015) nous a permis de collecter des données concernant la mesure des
expressions faciales et l’état émotionnel des participants
à travers la caméra web de l’ordinateur. Ce module, capable
d’automatiser le traitement des actions faciales (FACS) nous permet de
quantifier la présence des six émotions primaires associées
à des combinaisons particulières des actions faciales
détectées. Le module Affectiva® fournit également une
mesure globale de la valence émotionnelle qui peut aussi être
quantifiée. Ce module a déjà été
validé comme étant capable de détecter des émotions
autant à partir d’images statiques (Stöckli et al., 2018) qu’à partir de vidéos (Taggart et al., 2016).
Le module Tobii Studio®, intégré à iMotions® et
connecté à un oculomètre de marque Tobii® modèle
X2-60, dont la fréquence est de 60Hz, nous a permis de collecter des
mesures concernant les mouvements oculaires des participants. En particulier,
nous nous sommes intéressés à certains indicateurs
susceptibles de révéler au travers des mouvements oculaires des
participants leur compréhension de la situation de jeu et
l’engagement attentionnel sur des zones d’intérêt
précises (i.e., AOI). Précisément, pour les besoins de
notre étude nous avons sélectionné trois indicateurs qui
sont mentionnés ci-après.
1) Le temps de la première fixation (TPF) correspond au temps (en
secondes) écoulé avant qu’un participant ne fixe une zone
d’intérêt après le début de
l’enregistrement (Snyder et al., 2015).
C’est un indicateur utile pour examiner l’allocation de
l’attention initiale non orientée (Corbetta et Shulman, 2002) liée à la saillance visuelle de l’élément (Yantis et Egeth, 1999).
Généralement, lorsque sa valeur est faible, cela signifie
qu’il s’agit d’une fixation immédiate, dès
l’apparition de l’image (Naspetti et al., 2016) et indique un niveau attentionnel et de concentration élevé (Thiessen et al., 2014).
2) Le ratio de fixations représente le temps passé à
fixer la zone d’intérêt rapporté au temps total de
passation. Il s’agit ici d’une allocation consciente et explicite de
l’attention qui permet d’identifier un élément
déterminant à la prise de décision (Fiedler et Glöckner, 2012).
Ce marqueur témoigne d’un haut niveau attentionnel (Pan et al., 2004).
3) Le nombre de revisites correspond au nombre de fois qu’une zone
d’intérêt a été revisitée et à un
réengagement de l’attention sur une zone vue
précédemment. D’après Russo et Leclerc (Russo et Leclerc, 1994),
une revisite pourrait signifier le début d’une étape de
traitement évaluatif. Autrement dit, la prise en compte de cette zone
d’intérêt serait modulée par sa saillance pour
réduire l’hésitation dans le processus de
décision.
Nous avons utilisé la fonction « Survey » du
logiciel iMotions® pour conduire cette expérimentation, en
présentant le jeu de la confiance dans sa version informatisée. La
somme que les participants souhaitent renvoyer devait être
précisée à l’aide de l’échelle qui
figurait à l’écran. Les participants disposaient du
prénom de l’autre joueur, d’une photo et de la somme
reçue (voir Figure 2). La somme retournée était
enregistrée tout comme le temps de décision, en parallèle
des mesures oculaires et affectives.
Figure 2 • Exemple de tour dans
l’environnement confiant
3.5. Prédictions
Dans la situation de jeu médiatisée par ordinateur, les
participants étaient supposés apprendre à adapter leurs
réponses selon les éléments de contexte mais aussi selon
leur propre ressenti. Pour vérifier qu’il y avait bien un processus
d’apprentissage, nous avons d’abord vérifié que le
temps de jeu diminuait au fil des tours.
Par ailleurs, et en lien avec notre hypothèse générale,
l’environnement, inducteur d’émotions, devrait avoir un effet
sur l’apprentissage qui intervient dans la situation de jeu. Si tel est le
cas, nous nous attendions à observer, dans l’environnement
confiant :
- une diminution du temps de décision (la décision étant
supposée plus facile) ;
- une hausse progressive de la somme retournée ;
- une exploration plus précoce de la photographie (AOI 1) et de la
somme reçue (AOI 2) ;
- un ressenti émotionnel positif associé.
A l’opposé, l’environnement méfiant devrait
induire :
- une baisse progressive de la somme retournée ;
- une augmentation du temps de décision (la décision
étant supposée plus difficile ;
- une exploration plus longue de la photographie (AOI 1) et de la somme
reçue (AOI 2) ;
- un ressenti émotionnel négatif.
Ces effets devraient être encore plus prononcés dans le cas
d’une congruence entre la confiance (ou méfiance) inspirée
par l’environnement avec le niveau de CG initial. Autrement dit, nous nous
attendions à observer un effet de la CG sur l’apprentissage mis en
œuvre dans la situation de jeu : ceux ayant un niveau de CG faible
devraient envoyer des sommes moins importantes et auraient des temps de
décision plus longs que ceux ayant un niveau de CG
élevé.
4. Résultats
Le plan expérimental de cette étude
était composé de deux variables indépendantes, la
première étant le « niveau de CG »
correspondant à deux modalités : CG- (score de 5 ou moins
dans l’échelle STS) et CG+ (score au-dessus de 5). La
deuxième variable indépendante est le facteur
« Environnement » correspondant à deux
modalités : Environnement confiant (E+) et Environnement
méfiant (E-). Nous avons choisi de croiser ces deux variables de
manière à pouvoir comparer quatre conditions expérimentales
entre elles : « CG+ E+ », « CG+
E- », « CG- E- » et « CG-
E+ ». Nos variables dépendantes étaient les
suivantes : le temps de décision et la somme retournée,
auxquelles s’ajoutaient deux autres types de mesure tout aussi
informatives, à savoir des données oculométriques et des
données émotionnelles (c.-à-d. liées à la
mesure des expressions faciales).
Les analyses statistiques ont été réalisées
à partir du logiciel RStudio version 3.5.3 (RStudio Team, 2018).
Les moyennes des échantillons ne suivant pas la loi normale, nous avons
utilisé le test de la somme des rangs de Wilcoxon.
Précisons également que nous avons pondéré les
sommes retournées par les participants en convertissant la somme moyenne
donnée en euros en un pourcentage, l’objectif étant
d’apprécier la somme retournée d’après le solde
disponible. Cette conversion était indispensable pour permettre la
comparaison des deux environnements, les participants recevant des sommes plus
élevées dans l’environnement confiant comparé
à l’environnement méfiant.
Pour permettre de comparer les 4 conditions expérimentales entre
elles, nous avons sélectionné 3 tours de jeu spécifiques,
le tour 2, le tour 5 et le tour 8 (c.-à-d. TR2 ; TR5 et TR8). Ce
choix s’appuie sur deux raisons principales. La première est que
ces trois tours sont les plus représentatifs du parcours de jeu des
participants. En effet, au TR2, la phase de familiarisation et de
compréhension de l’environnement est terminée, le TR5
correspond à la moitié du parcours et le TR8 correspond au dernier
tour actif pour toutes les conditions expérimentales. La deuxième
raison est que les participants exposés à un environnement
méfiant ne sont pas en position de jouer pendant 5 tours sur 10, ce qui
les place en position d’observateurs seulement, et non en position de
décideurs.
4.1. Le temps passé à décider
Nous avons comparé l’évolution du temps de
décision par tour en fonction de l’environnement, et selon le
niveau de CG. Il apparaît que tous les participants diminuent leur temps
de décision au fur et à mesure des tours (TR2
(M = 27,02 ; ET = 2,93) versus TR5
(M = 17,80 ; ET = 1,64) :
p < .05 ; TR2 (M = 27,02 ; ET = 2,93) versus TR8 (M = 16,86 ; ET = 2,79) : p < .01), et ce quel que soit
l’environnement et le niveau de CG.
Si le temps de décision est une mesure assez générale
qui permet d’avoir une vue globale sur le processus de prise de
décision, il est probablement trop large pour révéler des
différences entre les deux environnements. En effet, le temps de
décision inclut le temps d’exposition et de traitement du stimulus
ainsi que le temps de réponse, qui correspond au temps entre le moment
où le participant a fait son choix et le temps d'exécution de
l’action. Les mesures oculométriques qui sont
détaillées plus loin fournissent des indications plus fines qui
nous aideront à mieux comprendre et analyser la situation.
4.2. Les sommes retournées
Nous avons comparé les moyennes des pourcentages de sommes
retournées (sur le solde disponible) pour chacun des trois tours
sélectionnés (voir Tableau 1) pour examiner
l’évolution de la somme retournée dans les
différentes conditions et donc en fonction de l’environnement.
Tableau 1 • Pourcentages moyens de sommes
retournées par tour et par condition
Environnement |
Niveau de CG |
Tour 2 |
Tour 5 |
Tour 8 |
Pourcentage moyen |
Confiant E+ |
CG+ |
44,4 % |
54,1 %* |
54,3 % |
51 % |
CG- |
33,5 % |
44,1 % |
46,3 %* |
41,3 %* |
Méfiant E- |
CG+ |
20,5 % |
20,4 % |
16 % |
19 %*** |
CG- |
20 % |
19 % |
13,5 %** |
17,5 %*** |
Les participants CG+ placés dans un environnement confiant ont
tendance à envoyer des sommes plus importantes dès le tour 5 (TR2 vs TR5 : p = .05*), alors qu’il faut attendre le
tour 8 pour les participants CG- (TR2 vs TR8 : p = .05*).
De plus, les participants CG- placés en environnement méfiant ont
tendance à envoyer des sommes de moins en moins importantes au fil des
tours (TR2 vs TR8 : p < .01** ; TR5 vs TR8 : p < .05*), alors que les participants CG+ placés
en environnement méfiant opèrent aussi une baisse mais moins
marquée puisque non significative.
La comparaison établie entre les 4 conditions expérimentales en
prenant en compte le pourcentage moyen des sommes retournées et ce pour
les trois tours confondus (i.e., TR2 ; TR5 ; TR8) révèle
la présence d’une différence significative entre CG+E+ et
CG-E+ (p < .05*). De plus, une différence significative est
observée entre la condition CG+E+ et CG+E- (p < .001***),
mais aussi entre la condition CG+E+ et CG-E- (p < .001***). Enfin,
une différence significative (p < .001***) est
observée entre CG-E+ et les deux autres conditions (CG+E- ;
CG-E-).
En résumé, les participants envoient des sommes plus
importantes lorsque leur niveau de CG est élevé et qu’ils
sont exposés à un environnement confiant que dans toutes les
autres conditions. Ils donnent également plus en condition CG-E+ que dans
les deux autres conditions quand l’environnement est méfiant. De
manière générale, les participants exposés à
un environnement confiant ont tendance à envoyer des sommes plus
importantes que ceux exposés à un environnement méfiant. Le
poids de l’environnement est donc déterminant mais susceptible
d’être nuancé ou renforcé selon le niveau de CG.
4.3. L’exploration visuelle des zones
d’intérêt
L’analyse statistique des résultats visant à identifier
l’influence du niveau de CG sur l’exploration visuelle
n’étant pas concluante, seuls les résultats liés
à l’influence de l’environnement sur celle-ci sont
développés ci-après. Précisément, pour
explorer plus avant l’effet de l’environnement (confiant vs méfiant) sur l’exploration visuelle de l’interface de jeu
(voir Figure 3), nous avons analysé les mouvements oculaires des
participants (ratio de fixations, temps de la première fixation et nombre
de revisites) pour deux zones d’intérêt (c.-à-d. AOI)
en priorité : la photographie du joueur (AOI 1) et la somme
reçue en début de tour (AOI 2).
Figure 3 • Exemple de carte de chaleur
représentant les zones d’intérêt
4.4. L’exploration visuelle de la photographie du joueur
Comme illustré dans la figure 4, les participants exposés
à l’environnement confiant ne modifient pas leur ratio de fixations
pour la photographie au fil des tours. En revanche, les participants
placés dans l’environnement méfiant ont tendance à
diminuer leur ratio de fixations en fonction des tours (TR2 vs TR8 :
p = .08). Notons aussi qu’au TR2, les participants en
environnement méfiant fixent plus longuement la photographie que les
participants placés en environnement confiant
(p < .01**).
Figure 4 • Ratios de fixations pour la
photographie en fonction de l’environnement et par tour
La figure 5 montre que les participants exposés à un
environnement confiant diminuent leur TPF (temps de la première fixation)
pour la photographie (AOI 1) entre le TR2 et les deux tours suivants (TR2 vs
TR5 : p = .05* ; TR2 vs TR8 : p < .05*).
De plus, ils ont un TPF qui est plus long au TR2 que pour les participants en
environnement méfiant (p < .05*). Notons qu’aucune
différence significative n’est observée entre les tours en
environnement méfiant.
Figure 5 • TPF pour la photographie en fonction
de l’environnement et par tour
Si les participants placés en environnement confiant présentent
un patron de revisites inchangé sur les différents tours, les
participants placés en environnement méfiant ont tendance à
diminuer le nombre de revisites (TR2 vs TR8 : p = .06) au fil
des tours (voir Figure 6).
Figure 6 • Nombre de revisites pour la
photographie en fonction de l’environnement et par tour
En résumé, la CG n’est pas un facteur dont
l’influence est prépondérante dans la prise
d’informations visuelles. En revanche, le type d’environnement
conduit à observer des profils d’exploration différents.
L’environnement confiant est associé à un ratio de fixations
et à un nombre de revisites de la photographie constant entre les trois
tours et une diminution du temps de la première fixation entre le TR2 et
le TR5. En environnement méfiant, le ratio de fixations de la
photographie est plus élevé puis diminue au fil des tours, tout
comme le nombre de revisites et le TPF intervient beaucoup plus tôt au
TR2. Ces données oculométriques suggèrent donc que la
photographie n’a pas la même incidence dans le processus de
décision en environnement confiant versus en environnement
méfiant.
4.5. L’exploration visuelle de la somme reçue
S’agissant de l’information relative à la somme
reçue (AOI 2), deux principaux résultats émergent des
analyses réalisées. Si le ratio de fixations ne
révèle aucune différence significative entre les tours,
selon le type d’environnement, le TPF de cette zone
d’intérêt (voir Figure 7) indique que les participants
exposés à l’environnement confiant fixent la somme
reçue plus précocement, entre TR2 et TR5 (p < .01**),
tout comme les participants exposés à l’environnement
méfiant (TR2 vs TR5 : p < .05*). Par contre, les
participants en environnement confiant maintiennent ce comportement au TR8 (TR2 vs TR8 : p < .01**), ce qui n’est pas le cas des
participants exposés à l’environnement méfiant.
Figure 7 • TPF pour la somme reçue en
fonction de l’environnement et par tour
Comme le montre la figure 8, les participants dans l’environnement
confiant présentent une diminution du nombre de revisites entre TR2 et
TR8 (p < .05*) tout comme les participants dans
l’environnement méfiant (TR2 vs TR8 :
p < .01**).
Figure 8 • Nombre de revisites pour la somme
reçue en fonction de l’environnement et par tour
En résumé, si le ratio de fixations de la somme reçue ne
révèle aucune différence significative entre les tours
selon le type d’environnement, le TPF indique une fixation de cette
information plus précoce dès le TR5, qui perdure dans le temps
seulement en environnement confiant. S’agissant des revisites, elles sont
de moins en moins fréquentes indépendamment de
l’environnement. Ces données oculométriques
révèlent une différence subtile entre les deux
environnements qui indique une prise d’informations plus stabilisée
en environnement confiant.
4.6. Le ressenti émotionnel
Enfin, nous avons mené une analyse qualitative des données
recueillies à l’aide d’Affectiva® qui a permis
d'enregistrer les expressions faciales des participants et d’en
déduire une mesure de la valence émotionnelle positive avec un
focus plus particulier sur la joie ressentie. Ces données, recueillies au
fil des tours présentent un intérêt pour caractériser
plus précisément les différences entre environnement
confiant et environnement méfiant (voir Tableau 2).
Au plan de la valence émotionnelle positive, il semble que les
participants exposés à l’environnement confiant se
démarquent des participants exposés à l’environnement
méfiant à deux égards. Premièrement, le pourcentage
moyen d’expressions faciales positives est plus élevé en
environnement confiant (66 %) qu’en environnement méfiant
(17 %). Deuxièmement, si ce pourcentage d’expressions faciales
positives se maintient au fil des tours en environnement confiant (4 % de
différence entre TR2 et TR8), il diminue en environnement méfiant
dès le TR5 (baisse de 32 %).
Tableau 2 • Pourcentages moyens des expressions
faciales positives selon l’environnement et en fonction des tours
Environnement |
Tour 2 |
Tour 5 |
Tour 8 |
Pourcentage moyen |
Confiant |
70 % |
62 % |
66 % |
66 % |
Méfiant |
37 % |
5 % |
9 % |
17 % |
Plus précisément encore, d’après les mesures
prélevées à l’aide d’Affectiva®, le
ressenti de la joie semble traduire la même tendance : la joie semble
plus prégnante et relativement constante chez les participants
exposés à l’environnement confiant alors que ceux
placés en environnement méfiant voient leur ressenti de joie
diminuer de façon importante dès le TR5 (voir Figure 9).
Figure 9 • Émotion primaire de joie en
fonction des tours et de l’environnement
En résumé, le ressenti émotionnel des participants tel
qu’évalué par Affectiva® paraît plus marqué
positivement en environnement confiant qu’en environnement méfiant,
avec l’émotion de joie qui persiste au fil des tours seulement dans
l’environnement confiant.
5. Discussion
Notre expérimentation avait pour objectif
d’examiner si un environnement confiant supposé
générer des émotions positives peut aider l’apprenant
à être plus efficace dans ses activités
d’apprentissage (Pekrun et al., 2002).
Dans cette expérimentation, nous avons identifié deux groupes
de participants, l’un caractérisé par un niveau de confiance
généralisée élevé, l’autre étant
composé d’individus à faible niveau de confiance
généralisée. Ces participants ont réalisé un
jeu économique sur ordinateur dans lequel ils devaient prendre des
décisions (déterminer le montant à remettre en jeu à
partir d’une somme reçue) en fonction de la situation. Nous avons
fait varier l'environnement de jeu en modifiant les caractéristiques de
l’interface (photographie et prénom des joueurs) et
l’importance de la somme reçue (élevée vs faible).
Premièrement, nous avons constaté que le temps de
décision diminue au fil des tours, quelle que soit la condition et le
groupe. Nous pouvons donc penser que cette situation génère un
processus d’apprentissage chez les participants. Les participants ayant
été interrogés en fin de passation sur leur vécu de
l’expérience, l’analyse qualitative de leurs réponses
nous permet d’écarter l’idée que cette diminution
serait majoritairement due à un phénomène de lassitude en
raison de la répétition de la tâche. En effet, tous ont
rapporté avoir évalué la tâche comme étant
ludique.
Deuxièmement, l’exploitation de la grande diversité des
données permet de retirer deux principales contributions. La
première contribution est que le niveau de confiance
généralisée n’intervient que de façon
secondaire dans cette situation de jeu économique. La seconde est que le
type d’environnement (confiant vs méfiant) s’est
révélé être un facteur dont l’influence est
prépondérante sur les différentes modalités de
réalisation de l’activité d’apprentissage. Ces deux
contributions sont précisées ci-après.
5.1. L’effet du niveau de confiance généralisée
(CG) sur la réalisation de la tâche
La confiance généralisée n’a eu qu’un effet
secondaire sur la réalisation de la tâche qui n’est
réellement visible que sur le montant de la somme retournée au fil
des tours.
Ces résultats peuvent témoigner d’un effet mineur de la
confiance généralisée sur l’apprentissage.
L’étude des sommes retournées révèle un
renforcement de la nature de la décision qui est encore plus
adaptée au contexte et à l’environnement présent en
fonction du niveau de confiance généralisée. La confiance
généralisée, du fait de son caractère stable,
viendrait amplifier certaines prises de décision et comportements, mais
ne serait pas une variable déterminante du comportement humain (Uslaner, 2002).
Ces résultats, qui font apparaître une forme de stabilité et
de linéarité de la confiance généralisée ne
vont néanmoins pas dans le sens d’une vision malléable telle
qu’elle a été présentée par Paxton et
Glanville (Paxton et Glanville, 2015).
5.2. L’effet de l’environnement (confiant vs méfiant) sur
la réalisation de la tâche : apports des mesures cognitives et
affectives
5.2.1. L’environnement explicatif de la nature de la
décision
S’agissant des caractéristiques de l’environnement
(Confiant vs Méfiant), elles agissent sur la somme
retournée, avec un pourcentage plus important en environnement confiant
qu’en environnement méfiant. Lorsque le niveau de confiance
généralisée est congruent avec l’environnement
(CG+E+ ; CG-E-), les patrons de résultats observés sont
encore plus marqués, avec une influence conjointe de la confiance
généralisée et de l’environnement sur le processus de
décision. Dans le cas d’un environnement confiant, les individus
s’orientent vers une augmentation de la somme retournée, et cette
décision intervient d’autant plus précocement (dès le
cinquième tour) qu’ils présentent un niveau de confiance
généralisée élevé. Les participants ayant un
bas niveau de confiance généralisée en environnement
méfiant ont eux tendance à envoyer des sommes de moins en moins
importantes avec une baisse notable à partir du huitième tour. Ces
mêmes participants n’augmentent réellement la somme
retournée qu’à ce dernier tour dans un environnement
confiant.
Ces comportements témoignent d’une prise de décision et
d’un apprentissage qui se ferait de manière progressive et tacite (Herschel et al., 2001).
Cet effet majeur de l’environnement sur la nature de la décision va
dans le sens d’une adaptation progressive de la réponse par rapport
au contexte (Rosenthal et Zimmerman, 2014).
5.2.2. L’environnement explicatif d’un traitement
spécifique de l’information
Si les temps de décision ne signalent pas de différence notable
entre environnement confiant et environnement méfiant, leur diminution au
fil des tours témoigne d’un apprentissage effectif pour tous les
participants, indépendamment de leur niveau de confiance
généralisée. Ces résultats sont à
l’image de ceux de Kyllonen et al. (Kyllonen et al., 1991) qui signalent un apprentissage général de la situation de jeu au
travers de la diminution des temps de décision.
A la différence des temps globaux de passation, les données
oculométriques mettent en évidence des différences entre
les deux types d’environnement notamment au regard des profils
d’exploration des deux zones d’intérêt que sont la
photographie du deuxième joueur et la somme reçue.
Précisément, dans l’environnement confiant, les
participants présentent un ratio de fixations et un nombre de revisites
de la photographie stable au fil des tours. Dans l’environnement
méfiant, les participants ont un ratio de fixations de la photographie
plus important (que ceux placés en environnement confiant) au
démarrage du jeu et un nombre de revisites qui a tendance à
diminuer au fil des tours. Le patron d’exploration de l’interface
est donc bien sensible aux caractéristiques de la photographie : si
l’autre joueur est associé à une photographie positive, les
stratégies d’exploration de l’interface paraissent plus
régulières et constantes dans le temps. En revanche, lorsque
l’autre joueur affiche une expression faciale plus neutre, les
participants ont un profil d’exploration qui varie au fil des tours avec
notamment une diminution pour les ratios de fixations, les TPF et les revisites.
D’après les travaux de Wästlund et al. (Wästlund et al., 2018),
ce désengagement progressif observé sur la photographie en
environnement méfiant pourrait être expliqué par
l’utilisation de la vision périphérique en priorité
pour le traitement de la situation en raison de la similarité des stimuli
(photographies semblables). En effet, les participants semblent employer une
stratégie d’exploration de plus en plus rapide et superficielle de
la photographie, qui pourrait correspondre à l’utilisation de la
vision périphérique au détriment de la vision centrale.
Selon ces auteurs, lorsque les patrons d’exploration visuelle renforcent
l’idée d’un recours à la vision
périphérique cela signifie aussi que la zone
d’intérêt est jugée comme étant non essentielle
à la prise de décision (diminution de la saillance) et/ou pourrait
traduire un évitement attentionnel de certains stimuli jugés
négatifs (Kolinsky et al., 2010), (Luminet, 2002).
Conformément aux résultats de Fiedler et Glöckner (Fiedler et Glöckner, 2012),
cette régularité dans le profil d’exploration dans
l’environnement confiant permet d’identifier la photographie comme
étant un élément déterminant à la prise de
décision. Ainsi, les participants en environnement confiant prendraient
systématiquement appui sur la photographie et donc sur les
caractéristiques de l’autre joueur pour choisir le comportement le
plus adapté, tout en gardant appui sur cette zone
d’intérêt au fil des tours pour se conforter dans leur
décision. Dans ce scénario, les participants privilégient
une décision basée sur le deuxième joueur
(élément saillant de l’environnement), contrairement aux
participants en environnement méfiant pour qui cette zone
d’intérêt n’est pas essentielle pour la prise de
décision, ou trop similaire au fil des tours.
Concernant la somme reçue, les participants fixent cette zone
d’intérêt de manière stable, indépendamment de
l’environnement. La stabilité observée dans la prise
d’information et le fait de ne pas nécessiter de consolidation
seraient dus à l’apprentissage de la situation de jeu.
Néanmoins, la saillance de cette zone est dépendante de
l’environnement. Dans l’environnement confiant, les participants
regardent cette zone de plus en plus précocement lors de
l’apparition de l’interface de jeu ce qui signale une plus grande
fluidité dans la prise d’information essentielle à la
décision. Ces résultats confortent l’idée que cette
zone est précocement prise en compte pour faciliter la décision,
ce qui est moins le cas dans l’environnement méfiant.
5.2.3. L’environnement explicatif de ressentis émotionnels
différents
Concernant le ressenti émotionnel des participants, en environnement
confiant, le pourcentage moyen d’expressions faciales positives est plus
élevé que celui des participants placés en environnement
méfiant, et cette observation s’avère stable dans le temps.
De plus, les expressions faciales positives des participants exposés
à l’environnement méfiant ont tendance à diminuer au
fil des tours. Le ressenti de la joie est révélateur d’un
même profil de résultats avec une prégnance et une
stabilité chez les participants dans l’environnement confiant et
une diminution de la joie pour ceux placés dans l’environnement
méfiant.
Le ressenti émotionnel est ainsi plus marqué positivement en
environnement confiant qu’en environnement méfiant, avec une
persistance de l’émotion de joie au fil des tours pour
l’environnement confiant. La présence de la joie pourrait avoir un
impact sur l’apprentissage (Pekrun et al., 2002) ce qui expliquerait le patron de résultats obtenu en matière de
prise de décision. L’influence de la joie, induite notamment au
travers de la photographie du deuxième joueur, pourrait amener les
participants à attribuer des sommes plus importantes. En environnement
méfiant, la diminution progressive de l’émotion de joie
pourrait être en partie à l’origine de la diminution de la
somme retournée. Ces résultats vont dans le sens des travaux de
Campellone et Kring (Campellone et Kring, 2013) qui ont notamment rapporté que la somme retournée par un joueur
est d’autant plus prédictible qu’il y a une congruence des
informations à disposition de ce joueur, à savoir une congruence
entre le comportement du premier joueur (c.-à-d. la somme envoyée)
et l’émotion véhiculée par le visage de ce
joueur.
Si notre étude est particulièrement informative, à
différents égards, elle comporte certaines limites qui doivent
être évoquées. Premièrement, les temps de
décision enregistrés sont probablement trop
généralistes car ils regroupent les temps d’observation des
informations fournies par l’interface et les temps de réponse. Une
mesure du temps de décision seul aurait été plus efficace
pour appréhender les différences possibles entre environnement
confiant et environnement méfiant. Deuxièmement, la
difficulté de la tâche gagnerait à être prise en
compte si l’on en croit les performances de certains participants qui ont
fait des erreurs quant à l’évaluation de la somme disponible
au moment de retourner de l’argent (c.-à-d. la somme
retournée dépassait le montant réellement disponible). Il
s’agit là d’un paramètre à considérer
sachant que la complexité des tours, l’intérêt pour la
tâche et le besoin de cognition n’ont pas été
évalués (Rudolph et al., 2018).
Outre ces éléments, une troisième limite concerne la mesure
de la confiance généralisée qui n’est intervenue
qu’au début de l’étude et dont
l’évolution au fil de la tâche n’a pas
été examinée, alors qu’un suivi de cette
caractéristique nous aurait renseignés quant à sa
stabilité ou son caractère changeant dans le temps. Une
dernière limite de cette étude, de nature méthodologique,
concerne l’objectif pédagogique lié au jeu économique
proposé. Même si l’activité demandée implique
un apprentissage, l’objectif d’apprendre n’est pas totalement
explicité, ce qui limite la portée des résultats et leur
généralisation à d’autres situations
d’apprentissage. Ces limites constituent autant de perspectives
prometteuses qu’il serait judicieux d’approfondir dans des
études futures. A titre d’exemple, en situation naturelle, un
parallèle pourrait être établi entre cette situation de jeu
et la problématique actuelle des « fake news ».
Comprendre ce qui se joue dans la confiance que les apprenants attribuent aux
ressources documentaires aiderait à la mise en œuvre de
scénarios pédagogiques utiles pour développer
l’esprit critique.
6. Conclusion
Cette étude apporte un éclairage sur
l’importance de considérer l’apprentissage mis en œuvre
dans un environnement informatisé sous l’angle du triptyque
attention, émotion et confiance. La présence de photographies de
personnes souriantes est un contexte propice à l’apprentissage,
avec un effet notable sur les processus de décision à
l’œuvre. La confiance généralisée,
caractéristique individuelle aisément mesurable chez les
individus, a pour sa part un effet secondaire sur l’apprentissage, sachant
qu’elle amplifie le phénomène observé dans le cas
d’une congruence de la confiance généralisée avec
l’environnement. La conception d'interfaces utilisant des technologies
positives gagnera à exploiter ces résultats.
La présence de la photographie est un paramètre non
négligeable dans l’environnement informatique dans lequel les
individus étaient amenés à prendre une décision. La
relation établie entre les joueurs, médiatisée par
l’ordinateur, invite à considérer nombre de
caractéristiques personnelles qui concourent à créer un
environnement plus ou moins confiant. Ces caractéristiques sont autant de
données que le participant va interpréter et intégrer comme
des éléments de proximité ou de distanciation sociale pour
adapter ses comportements en conséquence (Abric et al., 1967).
Autrement dit, la proximité sociale pourrait intervenir dans le niveau de
confiance accordée (Karsenty, 2011),
dans la mesure où l’établissement d’un lien de
confiance nécessite une proximité sociale importante. Si les
photographies et le prénom sont des éléments que nous avons
volontairement pris en compte, qu’en est-il des caractéristiques
inférées par le participant au sujet du deuxième joueur
telles que son âge, son origine sociale, sa probable orientation sexuelle
ou encore sa profession ? Ces informations permettraient implicitement de
créer une proximité ou une distanciation sociale susceptible
d’intervenir dans la relation et donc dans le climat de confiance
établi. La présence de photographies de personnes souriantes
permettant d’influencer l’apprentissage nous amène aussi
à nous interroger sur la question de l’étude des
émotions induites par le contenu de la photographie. La distinction entre
une personne humaine et un avatar dans un scénario pédagogique
constitue un autre prolongement possible de cette étude, sachant que
cette comparaison pourrait être particulièrement éclairante
sur les phénomènes de proximité et distanciation sociale en
contexte d’apprentissage. Tester des interfaces à visée
pédagogique mettant en jeu un avatar (Chae et al., 2016), (Chen et al., 2012) en lieu et place des photographies avec in fine la perspective de
susciter de la joie et d’instaurer un climat de confiance propice à
l’apprentissage (MacFadden, 2005),
tel est bien l’objectif stimulant des études futures.
Cette étude soulève également plusieurs questions
concernant le lien qu’entretiennent la confiance et
l’émotion : s’agit-il d’une relation
linéaire ou bien d’un cycle où confiance et émotion
s’influencent mutuellement ? Quels sont les interactions et
recouvrements possibles entre les niveaux cognitif et affectif ? La
situation de jeu avec les décisions qu’elle impose est-elle
génératrice d’émotions ou les émotions
dérivées de l’évaluation des caractéristiques
de l’interface influencent-elles la prise de décisions ?
Enfin, qu’en est-il du lien entre confiance, émotion et
motivation ? La motivation à apprendre serait-elle croissante
dès lors que des émotions positives sont
générées ? La confiance envers l’interface
serait-elle prédictive d’un meilleur engagement de
l’apprenant ? Dans un contexte éducatif où la crise
sanitaire liée au COVID-19 envisage le distanciel comme modalité
à privilégier pour assurer la continuité des enseignements,
il est crucial de savoir comment mobiliser l’intérêt des
apprenants. Toutes ces questions représentent des pistes prometteuses
pour les recherches à venir.
REMERCIEMENTS
Nous souhaitons remercier l’IUT de
Montpellier-Sète pour nous avoir accordé l’usage de leurs
locaux pour cette expérience et les nombreux étudiants qui se sont
portés volontaires ainsi qu’à la société
iMotions® pour la formation à leur logiciel. Nous remercions
également les partenaires du projet E-Confiance :
l’Université Paul Valéry Montpellier 3,
l’Université de Montpellier, le CNRS, la société
Pikcio, la Région Occitanie, l’Union Européenne, le
laboratoire Epsylon et le laboratoire LHUMAIN. Nous remercions Augustin AMIEL,
étudiant en Master à l’Université Paul Valéry
Montpellier 3 et stagiaire dans le cadre du projet E-Confiance, pour son travail
d’un point de vue technique ainsi que pour la pertinence de ses remarques
et ses apports. Ce travail de recherche a été financé par
le FEDER (Fonds Européen de Développement Régional) et la
Région Occitanie, contrat n°166795.
À
propos des auteurs
José SAMANIEGO est
étudiant en Doctorat de Psychologie aux laboratoires Epsylon (EA 4556) et
LHUMAIN (UR) de l’Université Paul Valéry Montpellier 3. Sa
thèse, intitulée « La confiance en ligne :
interfaces et prévention » est codirigée par
Stéphanie MAILLES-VIARD METZ et Nathalie BLANC. Ses travaux portent sur
l’importance de la confiance et des émotions dans les interfaces
numériques et s’inscrivent dans le cadre du projet E-Confiance,
dont l’enjeu sociétal est de créer des interfaces prenant
compte de la confiance et proposer des actions de prévention concernant
les pertes de données personnelles.
Adresse : Laboratoire EPSYLON,
Université Montpellier 3, route de Mende, 34199 Montpellier cedex 5,
Laboratoire LHUMAIN, Université Montpellier 3, route de Mende, 34199
Montpellier cedex 5
Courriel : jose.samaniego@etu.univ-montp3.fr
Toile : https://epsylon.www.univ-montp3.fr/fr/annuaire_recherche/jose-samaniego-cho
Stéphanie MAILLES-VIARD METZ est maîtresse de
conférences en Sciences de l’éducation, Psychologie et
Ergonomie cognitive à l'IUT de Montpellier Sète (France) et au
laboratoire LHUMAIN (UR) de l’Université Paul Valéry
Montpellier 3. Ses travaux portent principalement sur l'analyse des usages et la
proposition de nouveaux outils technologiques pour les acteurs de l'enseignement
(enseignants et étudiants) dans la conduite d'activités
spécifiques comme l'orientation, la collaboration et
l'auto-évaluation.
Adresse : Laboratoire LHUMAIN,
Université Montpellier 3, route de Mende, 34199 Montpellier cedex 5
Courriel : stephanie.metz@umontpellier.fr
Toile : https://lhumain.www.univ-montp3.fr/fr/mailles-viard-metz-stéphanie
Julien VIDAL est maître de conférences en
Psychologie au laboratoire Epsylon (EA 4556) de l’Université Paul
Valéry Montpellier 3. Ses travaux portent principalement sur les liens
entre représentations sociales et iconographie, sur l’influence de
la pensée sociale sur les communications publicitaires et sur les
processus socio-cognitifs mis en oeuvre dans le champ de la prévention
santé.
Adresse : Laboratoire EPSYLON,
Université Montpellier 3, route de Mende, 34199 Montpellier cedex 5
Courriel : julien.vidal@univ-montp3.fr
Toile : https://epsylon.www.univ-montp3.fr/fr/annuaire_recherche/julien-vidal
Nathalie BLANC est professeure en Psychologie au
laboratoire Epsylon (EA 4556) de l’Université Paul Valéry
Montpellier 3. Ses travaux portent principalement sur l’activité
cognitive de compréhension chez l’enfant dès
l’âge préscolaire à travers divers types de support
(e.g. dessin animé, dessin), et sur la dimension émotionnelle de
ces activités de compréhension. Ses travaux portent
également sur les campagnes publicitaires de prévention
santé chez l’adulte et du rôle de l’humour dans
celles-ci, notamment au niveau du lien entre émotion et cognition.
Adresse : Laboratoire EPSYLON,
Université Montpellier 3, route de Mende, 34199 Montpellier cedex 5
Courriel : nathalie.blanc@univ-montp3.fr
Toile : https://epsylon.www.univ-montp3.fr/fr/annuaire_recherche/nathalie-blanc
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