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Apports d’une simulation narrative pour
l’acquisition de compétences sociales
Nicolas SZILAS (TECFA-FPSE, Université de Genève), Jean DUMAS
(FPSE, Université de Genève), Urs RICHLE, Nicolas HABONNEAU
(TECFA-FPSE, Université de Genève)
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RÉSUMÉ : Nous
nous intéressons au soutien psychologique d’adolescents dont
l’un des parents a été victime d’un traumatisme
crânien. Nous proposons d’aider ces jeunes à acquérir
certaines compétences sociales utiles dans leur quotidien à
l’aide d’une simulation narrative, une solution innovante qui met
l’apprenant dans une situation crédible et l’implique dans
une histoire. Après une description des aspects technologiques et
méthodologiques de cette simulation narrative, nous en présentons
une évaluation, à base de questionnaires et d’analyse de
logs, sur 22 sujets de la population cible utilisant le logiciel sur une seule
session. Parmi les résultats, l’utilisabilité, la
curiosité envers les événements de l’histoire, et le
flow ont été positivement évalués.
MOTS CLÉS : Simulation
narrative, récit interactif, drame interactif, jeux sérieux,
traumatisme crânien. |
Contribution of a narrative simulation to the ac-quisition of social skills |
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ABSTRACT : This
paper concerns the psychological assistance for youth with one parent suffering
from a traumatic brain injury. It consists of a narrative simulation, an
innovative solution for helping them to acquire some of the social skills needed
in their situation. A technical and methodological description of the narrative
simulation is followed by its evaluation, based on a questionnaire and a log
analysis on 22 subjects concerned by the project, who used the software during
one session. Among results, usability, curiosity and flow have been positively
evaluated.
KEYWORDS : Narrative
simulation, Interactive Narrative, Interactive Drama, Serious Games, Traumatic
Brain Injury. |
1. Contexte
Le projet de recherche
décrit dans cet article vise à aider des enfants et adolescents
dont l'un des parents souffre d'un traumatisme crânien. Alors que de
nombreuses initiatives existent pour aider le patient
cérébro-lésé, peu se préoccupent de la
situation psychologique de leurs enfants. Ces derniers sont confrontés,
du jour au lendemain, à un quotidien difficile, où ils doivent
apprendre à vivre avec un parent pouvant être dépressif,
agressif, amnésique, aux prises à des changements d'humeur
fréquents et parfois aussi physiquement handicapé (Kneafsey et Gawthorpe, 2004), (Swift et al., 2003).
Les professionnels de la santé recommandent une prise en charge des
adolescents à travers des rencontres individuelles ou en groupes avec un
thérapeute (Kreutzer et al., 2002), (Wade et al., 2006),
solution délicate dans la pratique, car ces adolescents manquent de
disponibilité et restent trop souvent isolés et
désarmés. Ainsi, des services en ligne ont été
créés pour aider les proches aidants des personnes atteintes
d’un traumatisme crânien, comme WE CARE (Rotondi et al., 2005) ou FPS (Wade et al., 2006).
Cependant, ces services s’appuient sur une pédagogie classique
plutôt passive, sans mettre l’utilisateur en situation.
Notre projet vise à offrir une assistance informatisée qui
exploite au mieux les possibilités informatiques
d’aujourd’hui, notamment en matière de mise en situation
fortement interactive de l’apprenant. Comme nous le détaillerons
dans la suite de cet article, cette assistance prend la forme d’une
simulation narrative, conçue pour être intégrée
à terme dans une plateforme en ligne, afin d’assurer des
débriefings et un coaching à distance.
2. Des scénarios balisés aux simulations narratives
L’apprentissage dans des situations
d’interaction sociale complexes, qui nécessitent des prises de
décision délicates, a été le champ
d’application de nombreux logiciels, notamment des « serious
games » tels que Happy Night (“Happy Night”, 2017) pour la prévention de comportements dangereux liés à
l'alcool chez les jeunes, EHPAD'PANIC (“EHPAD’PANIC”, 2017) et EHPAD (Allain et Szilas, 2012) pour former le personnel qui accompagne les personnages âgées, ou
encore At-risk in the ED (“At-risk in the ED”, 2017) pour former à l'accueil en urgence dans les hôpitaux. Quelques
études académiques ont aussi porté sur des logiciels de ce
type, comme par exemple HeartSense pour la prévention des
accidents cardiaques (Silverman et al., 2003) ou GHD Game pour la sensibilisation aux questions d'hygiène des
mains (Molnar et al., 2012).
Ces jeux pédagogiques offrent une interaction assez
limitée : confronté à une situation,
l’utilisateur doit choisir parmi quelques options proposées, et
reçoit un feedback, immédiat ou différé, par rapport
à son choix. Si cela peut suffire dans certains scénarios
pédagogiques, dans le cadre d’apprentissages autour de situations
sociales plus complexes, on souhaite mettre l'utilisateur dans une situation
authentique, c’est-à-dire plus proche des situations dans
lesquelles il devra mobiliser les connaissances acquises, ce qui implique une
certaine liberté d'action dans une simulation sociale (Gredler, 2004),
selon une approche constructiviste de l'apprentissage. Si les jeux cités
ci-dessus restent dans des situations très balisées, c’est
que la technologie sous-jacente est limitée, fondée sur le
récit à embranchements : l'interaction se traduit par une
bifurcation dans la linéarité du récit, qui amène
à écrire plusieurs branches narratives selon les choix de
l'utilisateur. Au niveau de l'écriture globale du récit, cela
correspond à écrire un grand arbre narratif, illustrant tous les
chemins narratifs possibles, éventuellement assorti de conditions. Or, ce
principe ne permet pas de forte interactivité, car le nombre de branches
à prévoir augmente de manière exponentielle avec le nombre
de choix (Crawford, 2012), (Rankin, 1995), (Szilas, 1999), (Szilas, 2003).
Les recherches issues de l’Intelligence Artificielle menées
depuis la fin des années 1990 en récit interactif (appelé
parfois aussi « drame interactif ») ont abordé
précisément cette question. Différentes approches et
systèmes ont été proposés pour rendre le
récit plus interactif, tout en maintenant la cohérence du
récit mais sans imposer un travail d'écriture impossible :
modélisation de personnages autonomes (Aylett et al., 2005),
modélisation de théories narratives ou dramaturgiques (Sgouros, 1999), (Szilas, 1999), (Barber et Kudenko, 2007),
combinaison d'agents conversationnels et de scripts (Mateas et Stern, 2003),
réseaux bayésiens (Mott et Lester, 2006),
planification automatique (Young et al., 2004), (Pizzi et al., 2007).
Si nombre de ces systèmes ne sont pas spécifiquement
dédiés à l’apprentissage, certains d’entre eux
ont été utilisés dans un contexte pédagogique,
notamment ceux concernant les apprentissages de comportements sociaux.
C’est le cas de FearNot! (Aylett et al., 2005),
destinée à la problématique du harcèlement à
l’école (« bullying »), ou de Thespian utilisé notamment pour la formation interculturelle des
soldats étatsuniens (Si et Marsella, 2014).
Nous appelons ces systèmes des simulations narratives. En tant que
simulations, elles permettent de placer l’apprenant dans une étude
de cas dynamique, dans laquelle il prend un rôle authentique bien
défini et interagit avec un modèle de la réalité (Gredler, 2004), (Rieber, 2002).
Même si nous nous focaliserons sur la simulation elle-même
(l’artefact), une simulation éducative s’inscrit toujours
dans un contexte plus large, une séquence pédagogique, dans
laquelle la préparation (avant) (Kriz, 2010), le
guidage (pendant) (De Jong et Van Joolingen, 1998) et le débriefing (après) (Fanning et Gaba, 2007) jouent un rôle prépondérant. Au niveau théorique, ces
simulations éducatives relèvent d’une pédagogie
active dans laquelle les apprenants peuvent expérimenter,
découvrir par eux-mêmes certaines caractéristiques de la
réalité modélisée, et ainsi échapper à
la limite fondamentale des approches frontales (un cours, un texte, une
vidéo) où la connaissance est montrée à
l’apprenant sans lui donner les outils pour construire lui-même sa
connaissance. Au niveau expérimental, l’efficacité de cette
approche constructiviste des simulations s’avère finalement
complexe à mettre en évidence (Rieber, 2002).
Néanmoins, c’est dans ce cadre que nous nous plaçons,
étant données les limitations actuelles des approches alternatives
existantes, mentionnées ci-dessus.
Ce cadre théorique de la simulation nous amènerait
naturellement à viser une simulation sociale, dans laquelle
l’apprenant interagirait avec un modèle des interactions
psycho-sociales entre les membres d’une famille présentant les
caractéristiques propres à notre contexte. Or nous proposons une
simulation narrative. Bien qu’il y ait une tendance dans la
communauté de recherche en drame interactif à glisser d’une
notion vers l’autre, c’est-à-dire à considérer
que la simulation de personnages socialement riches soit en gros
équivalente à produire un récit interactif
— voir par exemple comment est abordée cette question dans les
systèmes Thespian (Si et Marsella, 2014) et Promweek (McCoy et al., 2011) —
nous abordons la dimension narrative en elle-même. En tant que
récit (interactif), une simulation narrative possède des
caractéristiques propres : éléments structuraux
typiques — séquence narrative (Adam, 1994),
fonctions narratives (Propp, 1928),
etc. —, dimension discursive (intention communicative du
récit) et globalement un focus sur l’effet produit chez
l’utilisateur. Sur le plan théorique, nous nous appuyons sur
l’hypothèse que le récit est un outil pédagogique
efficace, voire un mode fondamental d’encodage de l’information (Bruner, 1991).
Cette hypothèse, largement suivie dans la pratique enseignante (Jackson, 1995) ou même marketing avec le Storytelling, a aussi été
corroborée par des expériences en laboratoire montrant
qu’une structure narrative favorise la rétention
d’information (Thorndyke, 1977).
Ainsi, nos travaux font l’hypothèse que la nature narrative de
l’expérience interactive va augmenter l’impact de la
simulation. En complément des questions de mémorisation des
événements, deux caractéristiques fondamentales du
récit sont susceptibles d’aider l’apprentissage :
d’une part le récit engage son public, l’immerge dans une
histoire dans laquelle il reste très concentré, en produisant une
large palette d’émotions ; d’autre part, dans sa
dimension discursive, le récit est message (Adam, 1994) et
donc constitue un moyen, indirect mais efficace, d’avoir un impact sur un
public.
Enfin, la dimension ludique d’une simulation narrative est aussi
susceptible d’augmenter l’engagement de l’apprenant (Jones, 1998), (Malone et Lepper, 1987).
Toutefois, cette dimension n’est pas le moteur de notre recherche, car
s’il y a jeu dans une simulation narrative, c’est davantage par la
combinaison de deux facteurs, l’engagement par le récit et le
sentiment de contrôle sur ce récit
— « narrative agency » (Murray, 1997) —
que par l’ajout de fonctionnalités typiquement ludiques telles que
des scores ou de la compétition. Dans la pratique,
c’est-à-dire dans l’acceptation sociale du terme de
« jeu », une simulation narrative sera
considérée comme un jeu, au même titre qu’un jeu
d’aventure. De plus, étant donné notre public cible,
l’aspect « jeu vidéo » sera recherché
(voir la section suivante).
Nos travaux vont donc consister à construire une simulation narrative
qui immerge l’apprenant dans une situation familiale authentique, riche en
interaction, et utiliser pour cela une approche technologique avancée,
décrite dans la section suivante.
3. Innovation technologique : simulation narrative en 3D
Notre approche technologique vise plusieurs
objectifs. Comme expliqué ci-dessus, dans un contexte narratif, nous
voulons gagner en authenticité en sortant du carcan des approches par
embranchement pour donner à l'apprenant plus de liberté d'action
sur son environnement d'apprentissage. De plus, étant donné notre
public cible, nous souhaitons motiver l'apprenant en lui présentant un
environnement d'apprentissage qui rappelle le jeu vidéo. Il ne s'agit pas
ici de refaire un véritable jeu vidéo et ainsi concurrencer les
jeux commerciaux qui font partie intégrante de la vie de bon nombre
d’adolescents, mais de proposer une expérience qui, dans ses
principes, reprend certains codes du jeu vidéo, notamment en
matière d'interaction : quêtes de personnages, navigation en
3D. Plus que rendre l'apprentissage amusant — « making
learning fun » (Malone et Lepper, 1987) —,
il s'agit ici de rendre l'apprentissage cohérent avec les média
consommés par le jeune.
3.1. Le moteur narratif
Le projet s'est appuyé sur un moteur narratif déjà
développé dans notre équipe, nommé IDtension,
qui permet de générer une suite d'événements
narratifs en fonction des actions d'un utilisateur. Le fonctionnement de ce
moteur a été détaillé ailleurs (Szilas, 2003), (Szilas, 2007),
mais nous en rappelons quatre principes fondateurs.
- Les actions sont décrites sous forme prédicative. Le
moteur narratif est ainsi, dans une large mesure, indépendant du mode de
représentation à l'écran (texte, 3D, etc.). Grâce
à ce principe, le moteur fonctionne en deux langues (français,
anglais).
- Les actions sont décomposées en deux niveaux :
un acte narratif générique (Informer, Dissuader, Demander de
l’aide, etc.) et des éléments spécifiques à
l'histoire : personnages, objectifs, tâches (moyens d'atteindre les
objectifs), obstacles (événements conduisant à
l'échec d'une tâche) et valeurs (axes éthiques
altérant les jugements et actions des personnages). L'articulation de ces
deux niveaux permet une grande variabilité des actions
générées.
- Une logique narrative génère toutes les actions
possibles à un moment donné, selon un ensemble de règles de
production.
- Les actions des personnages non joueurs (PNJ) sont
sélectionnées par un modèle de l'utilisateur, qui estime
l'impact sur l'utilisateur de chaque action possible, selon un certain nombre de
critères narratifs : cohérence de l'action par rapport aux
objectifs et valeurs du personnage qui l'entreprend, pertinence de l'action dans
le contexte, adéquation de l'action à la complexité
actuelle de l'intrigue et enfin potentialité de l'action à
générer un conflit dramatique par rapport aux valeurs du
récit.
IDtension a donc été conçu d'une manière
radicalement différente des approches par embranchement
mentionnées ci-dessus. Par rapport aux autres travaux du domaine qui eux
aussi s’appuient sur des techniques d’Intelligence Artificielle (Aylett et al., 2005), (Barber et Kudenko, 2007), (Mateas et Stern, 2003), (Pizzi et al., 2007), (Young et al., 2004),
IDtension présente l'avantage de proposer en permanence un grand nombre
d'actions possibles à l'utilisateur, typiquement plusieurs dizaines (Szilas, 2007), (Szilas et Ilea, 2014).
Le coût à payer pour cette diversité est que
l'expérience narrative peut parfois paraître plus décousue
et les actions individuelles moins bien exprimées (Szilas, 2014).
Loin d'être donnée comme un entrant fixe du projet, cette
technologie a été améliorée en continu durant le
projet. Trois améliorations principales ont été
apportées, pour mieux répondre aux besoins de
l’écriture scénaristique.
- De nouveaux actes narratifs génériques ont
été ajoutés au moteur, pour étendre le
mécanisme de délégation, qui permet à un personnage
d’en aider un autre en prenant en charge son objectif : en plus de
l'acte de demande d'aide, celui de proposition d'aide a été
introduit, ce qui revient à ajouter trois prédicats (pour
proposer, accepter et refuser l'aide) et l'ensemble des règles qui s'y
rattachent.
- Gestion de la complexité : l'idée sous-jacente
est de réguler la complexité globale du récit, afin que
l'histoire à un moment donné ne soit ni trop simple (un seul
personnage actif, une seule quête), ni trop complexe (de multiples
quêtes en parallèle qui submergeraient l'apprenant). Pour mieux
gérer ce critère narratif, nous avons ainsi introduit la notion de
noyau, une unité large du récit constituée d'un objectif
entrant et d'un objectif sortant. Ce noyau, quand il s'active, couvre toutes les
actions qui découlent de l'activation de l'objectif entrant. Il se
désactive quand l'objectif sortant est atteint. Ainsi, le système
va réguler le nombre de noyaux actifs à un moment donné du
récit. Si celui-ci est en dessous d'un certain seuil, le moteur va lancer
un nouvel objectif dans le jeu, appelé objectif libre. Cette même
action ne serait pas déclenchée si le récit était
au-dessus du seuil de complexité.
- Simultanéité : dans un environnement texte, les
actions narratives peuvent être représentées de
manière séquentielle tandis que dans un environnement
tri-dimensionnel, les actions se passent en parallèle. Nous avons donc
permis ce parallélisme des actions narratives, tout en limitant à
deux le nombre d'actions en parallèle possibles. Cela s'accompagne d'une
gestion des ressources, afin qu'un personnage ne soit pas impliqué dans
deux actions narratives en même temps (poser une question à un
personnage et en même temps répondre à un autre).
3.2. Environnement 3D
Aujourd'hui, la réalisation d'un environnement 3D passe
généralement par un moteur de jeu, qui prend en charge la gestion
des objets graphiques, l'exécution des animations, le « path
planning » pour les personnages, la gestion des caméras,
etc. Nous avons choisi le moteur Unity. Nous détaillons ci-dessous
le design de l’interaction utilisateur. Ce dernier joue le rôle
d’un personnage du récit afin d’atteindre un but fixé
par le jeu (voir la section 4.2). Il contrôle donc ce personnage, le
déplace dans l'environnement 3D et peut interagir avec les personnages
(dialogues) et quelques objets du jeu. Nous avons opté à ce niveau
pour une vue à la troisième personne plutôt qu'une vue
subjective (caméra au niveau des yeux du personnage), car il nous a
semblé important de laisser une certaine distance entre l'apprenant et
l'adolescent qu'il contrôle. Un choix similaire est décrit dans (Marsella et al., 2000).
Le contrôle du personnage se fait par les flèches pour la
direction, tandis que la caméra peut être orientée,
horizontalement seulement, par la souris. Cette combinaison clavier/souris
correspond bien aux habitudes des « gamers », mais
n'est pas évidente pour les joueurs moins aguerris. Nous avons donc
ajouté un deuxième mode d'interaction, plus proche des jeux « point and click » : l'utilisateur peut cliquer sur
le sol pour se déplacer, ou sur un personnage pour venir interagir avec
lui. Tout déplacement engagé de cette manière peut
être annulé par l'utilisateur.
Quand on s'approche d'un personnage donné, une icône sous forme
de portrait de ce dernier descend du haut de l'écran : il faut
cliquer dessus pour passer dans le mode dialogue. Deux informations
complémentaires figurent sur cette icône (voir, sur chacune des
deux copies d’écran de la Fig. 3, la zone centrale
supérieure) : 1) le nombre d'actions possibles avec le personnage,
ce qui permet d'anticiper l'interaction avec le personnage et surtout de mettre
en exergue une caractéristique importante de l'environnement, à
savoir la grande quantité d'actions possibles ; 2)
l’état émotionnel, visualisé par un portrait neutre
qui laisse la place à un portrait en colère (voir Fig. 3,
copie d’écran du haut). Cette seconde information n’a
été utilisée que pour un personnage dans le scénario
développé.
D'autres icônes, sur les côtés cette fois-ci, permettent
d'informer l'utilisateur qu'une action narrative se déroule hors de son
champ de vision, à droite si l'icône est à droite, à
gauche dans le cas contraire. Si on clique sur cette icône, la
caméra se réoriente vers l'action auparavant hors-champ.
Quand ils ne sont pas impliqués dans une action narrative,
c'est-à-dire une action décidée par le moteur narratif, les
PNJ exécutent des animations « de remplacement », comme par
exemple faire un tour de la pièce en s'arrêtant en quelques
endroits, pour regarder un tableau, la télévision, etc.
Enfin, une des difficultés ergonomiques importantes pour notre
approche est la gestion de la grande quantité de choix. Sans avoir
entièrement résolu cette question, nous avons opté pour un
classement des actions possibles selon leur pertinence dans le contexte actuel.
Ainsi, les actions qui sont les plus appropriées dans la situation
courante seront en tête de liste. Ce choix n'est pas neutre et modifie
sensiblement le déroulement de la session d'apprentissage, puisque les
actions jugées appropriées, placées en tête de liste,
seront davantage sélectionnées.
3.3. Architecture
Deux principes ont guidé notre conception de l'architecture
technique : la modularité entre la gestion narrative et la
présentation/interaction et l’accès en ligne. Pour cela,
nous avons développé une architecture comprenant :
- le moteur narratif qui tourne sur un serveur ;
- un module appelé « théâtre » pour la
3D et l’interaction, qui tourne sur le navigateur du poste client via le
plugin Unity ;
- un module pour le partage des données, qui tourne sur le
serveur.
Ces 3 modules communiquent via sockets et le protocole TCP. Cette
architecture permet non seulement le déploiement de l’application
mais de plus la centralisation des logs, pour des analyses ultérieures,
analyses qui sont mentionnées en Section 5 mais qui ont été
développées davantage ailleurs (Szilas et Ilea, 2014).
4. Conception narrative
4.1. Méthodologie de co-conception
La conception narrative (écriture
elle-même, choix graphiques, choix de mise en scène,
paramétrage du moteur, etc.) est au coeur de ce type de projet dès
lors que l'on souhaite réaliser un récit interactif allant
au-delà du simple prototype technique. Sur le plan méthodologique
— qui reste une dimension essentielle dans cette
conception —, nous avons constaté que la démarche
classique, qui consiste à fournir à l’auteur un moteur
narratif fini, doté de ses outils auteurs, ne fonctionnait pas. En effet,
les demandes scénaristiques appelaient régulièrement des
changements du moteur narratif lui-même, freinant ainsi les
velléités de l’équipe technique à construire
un outil auteur. Ainsi, le moteur narratif a évolué au cours du
projet, pas seulement pour les aspects de débogage, mais sur ses
fonctionnalités (voir section 3.1). Nous avons donc été
amenés à suivre une approche de co-design, et même de double
co-design, centrée non seulement sur l’utilisateur final (plusieurs
prototypes successifs ont été développés) mais aussi
sur l’auteur. Cette approche semble inhérente au récit
« fortement interactif », pour lequel le système
visé ne peut pas être défini par un cahier des charges
précis, puisque l’expérience utilisateur qui pourra
être atteinte est en grande partie inconnue (Szilas, 2015).
Ainsi, le projet a impliqué cinq personnes : un chercheur en
récit interactif, un ingénieur en informatique, un chercheur en
psychologie clinique, un écrivain, un développeur-graphiste. Il
convient d’analyser les collaborations entre ces personnes en termes de
rôles, car si une personne a généralement un rôle
principal, elle a aussi souvent un ou plusieurs rôles secondaires (Spierling et al., 2011).
Ainsi, à ces cinq personnes correspondent dans les grandes lignes les
cinq rôles suivants respectivement : concepteur du moteur narratif,
ingénieur (architecture, 3D), expert du domaine (ici, psychologie),
auteur narratif, auteur 3D (graphisme et comportements), auquel on ajoutera bien
sûr l’utilisateur final, l’apprenant. Ce dernier rôle
est tenu par les différents testeurs du système mais aussi par les
personnes citées ci-dessus lorsqu’elles testent le système.
La Figure 1 illustre les nombreuses interactions entre ces rôles. Les deux
boucles d’interaction les plus notables sont d’une part
l’interaction mentionnée ci-dessus entre l’auteur narratif et
le concepteur du moteur narratif et d’autre part l’interaction entre
l’auteur narratif et l’auteur 3D, le premier proposant des
actions/comportements de personnages au second, qui devait à son tour
limiter les ambitions du premier pour raison de faisabilité technique et
ressources limitées.
Figure 1 • Les différents
rôles dans la conception d’une simulation narrative et leurs
interactions
L'écrivain du projet a eu pour mission d'écrire, dans un format
technique et abstrait, du matériau narratif qui à la fois
représente la réalité quotidienne du public cible et
propose des situations intéressantes sur le plan pédagogique.
Avant d’exposer le fruit de ce travail (Section 4.3), précisons que
cette écriture est un jeu constant entre la réalité des
situations vécues et la fiction recréée pour les besoins de
la simulation narrative. Notre première démarche a
été de rassembler du matériau sur cette
réalité, à partir de trois sources : transcriptions de
discussions antérieures avec les jeunes concernés, rencontres avec
des jeunes lors de groupes de discussion organisés par des associations
d'aide et enfin interviews individuels avec des jeunes ayant un parent
cérébro-lésé. Malgré tout, ce matériau
s'est avéré insuffisant pour reconstruire un scénario
complet, ce qui a amené l'écrivain à inventer des
situations et événements. Au final, les situations narratives
proposées sont donc un mélange entre des éléments
réels et des éléments fictionnels.
En accompagnement de ce processus, l'expert du domaine a suivi de près
l'élaboration des scénarios, au départ pour transmettre les
éléments pédagogiques à insérer, puis pour
valider ou invalider les situations et les dialogues.
4.2. Le scénario
L’écriture narrative consiste à décrire,
indirectement, tout ce qui peut se passer dans le jeu, sous la forme de
données XML représentant les constituants du modèle
narratif (personnages, objectifs, tâches, obstacles, etc.). À
chacun d'eux sont associés des éléments de texte pour la
génération du dialogue, édités dans un tableur. Le
scénario ainsi élaboré s’intitule « Nothing For Dinner » (NFD). Ce contenu
narratif serait trop long à reproduire ici et difficile à
appréhender, mais nous pouvons le résumer comme suit.
Six personnages composent l'histoire : Frank, un adolescent de 16 ans
contrôlé par le joueur, Paul, son père atteint d'un
traumatisme crânien, Olivia la grand-mère, Lili, la jeune
sœur, Julia, une camarade de classe et Martina, la mère de Frank. Au
début de l'histoire, la famille est à la maison, sauf Martina, qui
a demandé à Frank de préparer le repas car elle arrivera
tard. Cette préparation du repas se traduit par un enchaînement de
plusieurs sous-objectifs : motiver Paul, couper les légumes, faire
cuire la soupe, mettre la table, appeler tout le monde à table et aller
à table. D’autres objectifs peuvent apparaître de
manière collatérale : calmer Paul (qui s'est
énervé, par exemple, si on a voulu faire le repas tout seul),
soigner Paul (qui s'est blessé en coupant les légumes), nettoyer
les débris de verre (quand Paul a cassé un bol), régler le
problème d'alcool (car Paul boit du vin alors qu'il est sous traitement).
Par ailleurs, trois événements (noyaux) vont surgir dans
l'histoire (dans un ordre variable), qui vont amener encore d'autres objectifs
en parallèle : Lili veut regarder un DVD mais n'y arrive pas, la
mère appelle au téléphone pour dire à Frank de faire
prendre ses médicaments à Paul, et Julia vient
récupérer son livre de physique. Cette dernière
sous-intrigue amène plusieurs nouveaux objectifs pour le joueur, comme
répondre aux questions de Paul sur Julia, réagir aux remarques
désobligeantes de Paul, expliquer à Julia la situation familiale.
La Figure 2 représente ces objectifs du scénario. La plupart sont
portés initialement par Frank, le personnage du joueur, sauf quand le
porteur de l’objectif est précisé entre parenthèses.
La lettre « D » indique que les objectifs peuvent être
délégués entre personnages. La ligne centrale
représente la composante linéaire du récit (à ce
niveau d’abstraction tout du moins), tandis que les « noyaux
libres » en haut du schéma sont déclenchés selon
des contraintes narratives (voir la section 3.1) et que les autres objectifs en
bas sont déclenchés selon des conditions sur le monde de
l’histoire.
Figure 2 • Représentation
simplifiée des objectifs du scénario (voir texte)
Cette structure en objectifs ne représente qu'une partie de
l'histoire, puisque chaque objectif peut être atteint par une tâche
ou plusieurs tâches alternatives. Par exemple, pour calmer Paul, on peut
soit crier plus fort que lui, soit le calmer en parlant posément, soit
partir en attendant qu'il se calme. Ces trois attitudes correspondent à
trois attitudes typiques répertoriées en psychologie
clinique : antisociale, prosociale, asociale (Dumas et Moreland, 2007) ;
c'est à ce niveau notamment qu'on insère le contenu
pédagogique. Si l'une des solutions est préconisée
(l'attitude prosociale correspondant ici au fait de parler posément), les
autres peuvent fonctionner aussi : crier plus fort que Paul a 20 % de
chance de fonctionner. Cet aspect probabiliste met en scène, de
manière certes un peu simpliste, le fait que la réalité est
complexe et imprévisible.
Figure 3 • Copies d'écrans de Nothing
For Dinner. En haut, la liste des actions possibles avec Paul, qui est
énervé (icône en haut). En bas, alors que Frank parle
à Olivia, d’autres conversations se déroulent en
parallèle (lignes plus étroites)
On rappellera enfin que, via la décomposition en deux niveaux
mentionnée en 3.1, les éléments narratifs écrits par
l’auteur se combinent avec les actes narratifs génériques
pour produire des actions spécifiques d'une grande variété.
Par exemple, quand Frank dit à sa grand-mère Olivia :
« grand-maman, j'aurais besoin de ton aide. Tu pourrais calmer Paul
? », cela correspond à l'application de l'action
générique « demander de l'aide » à la
tâche « calmer Paul ». Si Olivia accepte, l'objectif
de Frank de calmer Paul se recopie pour Olivia, tandis qu'il est mis en veille
chez Frank.
On le constate, le scénario possède une certaine
complexité, pour fournir un temps de jeu de 20 à 40 minutes. Mais
cette complexité est à relativiser : ces quelques
éléments narratifs, en se recombinant, produisent un grand nombre
de variantes d’histoire qu’il serait extrêmement fastidieux
à écrire explicitement. À l’inverse, un jeu comme Heavy Rain, qui fonctionne par embranchements, est décrit à
l’aide d’un scénario de 2000 pages. La Figure 3 reproduit
deux copies d’écrans de NFD.
5. Évaluation
Pour des raisons pratiques (difficultés
à trouver suffisamment de sujets dans la population cible), une
évaluation clinique du produit mesurant le gain d’apprentissage,
n'a pas été possible. Néanmoins, nous avons souhaité
évaluer :
• les qualités expérientielles du produit : en tant que
récit interactif, indépendamment des questions d'apprentissage, la
simulation proposée a-t-elle des qualités suffisantes pour motiver
le jeune, sur les plans ludique, narratif, et interactif ?
• l'impact perçu : les utilisateurs ont-il l'impression que le
produit peut les aider à gérer les situations difficiles de leur
quotidien ? Comme facteur indirect d'apprentissage, nous avons aussi
souhaité évaluer si les situations reproduites dans la simulation
étaient familières ou plausibles.
5.1. Méthode
Les participants, au nombre de 22 (dont 11 filles), ont été
recrutés en Suisse romande (francophone), via différents
réseaux et associations. Tous étaient ou avaient été
récemment dans une situation analogue à la simulation, à
savoir dans une famille où un des membres (généralement le
père ou la mère) est cérébro-lésé,
suite à un traumatisme crânien ou une attaque
cérébrale. Leur âge variait entre 7 ans et 24 ans (M=17,5
ans ; σ=4.8). Leur participation était
rémunérée. Cette tranche d’âge est plus large
que la population initalement ciblée (adolescents), car nous manquions de
sujets dans la tranche initiale. On notera aussi que le deuxième enfant
le plus jeune avait déjà 10 ans.
Lors d'une session unique, le participant était accueilli
individuellement par l'expérimentateur, présent durant toute la
durée de l'expérience. Après avoir été
informé des buts de la recherche et signé le consentement, il
remplissait un premier questionnaire pour les données
démographiques, puis deux questionnaires psychologique : le Cognitive Emotional Regulation Questionnaire (CERQ),
destiné à mesurer les stratégies de régulation des
individus confrontés à un événement traumatique (Garnefski et Kraaij, 2001), (d’Acremont et Van der Linden, 2007),
composé de 36 questions, et le Strengths and Difficulties
Questionnaire (SDQ), destiné au dépistage
comportemental, composé de 25 questions (http://www.sdqinfo.org/). Une version du
questionnaire SDQ a aussi été administrée au parent
accompagnant, le cas échéant.
Ensuite, le sujet visionnait la vidéo d'aide à l'utilisation,
complétée par des explications de l'expérimentateur. Le
participant interagissait ensuite avec la simulation (version française)
pendant 30 minutes maximum, ou moins s'il avait atteint la fin du
scénario (tous les personnages assis qui commencent le repas). Certains
sujets pouvaient donc ne pas aller jusqu’au bout du scénario.
L'expérimentateur n'intervenait que sur des questions techniques ou
d'utilisation, mais répondait en évitement aux questions relatives
à l'histoire. Pendant ce temps-là, le parent bien portant,
s’il était présent, remplissait le questionnaire SDQ
destiné aux proches de l’adolescent concerné (parents,
professeurs, etc.). Enfin, le participant remplissait deux questionnaires,
décrits ci-dessous.
(1) Questionnaire IRIS adapté : Le questionnaire IRIS a été réalisé spécifiquement pour
évaluer les récits interactifs (Roth et al. , 2011), (Roth et al., 2012).
Il est constitué d'un certain nombre d'items, portant sur
différentes dimensions perceptives de ce type de produit :
utilisabilité, satisfaction, crédibilité des personnages,
autonomie (possibilités d'agir), curiosité, suspense, flow,
plaisir esthétique, enjoyment, affect (engagement affectif,
positif et négatif), identification. Chacun de ces items est construit
à l'aide de plusieurs questions, auxquelles le participant répond
via une échelle de Likert à 5 niveaux (pas du tout d'accord, pas
d'accord, un peu d'accord, d'accord, tout à fait d'accord). Ces
échelles ont été déjà utilisées sur
plusieurs récits interactifs et jeux vidéo. Pour cette
étude, le questionnaire IRIS a été doublement
adapté : d'une part, il a fallu le traduire en
français ; d'autre part, il a fallu l'adapter à une
population plus jeune et moins érudite que les étudiants
universitaires utilisés dans la majorité des expériences de
recherche en psychologie. Nous avons aussi ajouté à ce
questionnaire trois questions ouvertes générales sur leur
expérience : points forts, points faibles et suggestions
d'amélioration.
(2) Questionnaire d'impact : conçu spécifiquement
pour cette étude, il mesure la perception des participants concernant la
plausibilité des situations, leur familiarité avec les situations
expérimentées et leurs apprentissages (voir Tableau 2). Ce
questionnaire ne mesure donc pas l’apprentissage effectif, mais le sentiment d’apprentissage, c’est-à-dire la vision
subjective de l’apprenant sur son apprentissage. Cinq autres questions
concernent les causes perçues de cet apprentissage ou non apprentissage
(qualité des situations, qualité des dialogues, possibilité
de choix, utilisabilité, graphisme, sur une échelle de Likert
à 5 niveaux). En complément, des questions ouvertes avaient pour
objectif de collecter des informations qualitatives sur ces aspects liés
à l'impact.
Pour chaque question et item, nous avons calculé les moyennes et
écarts-types des scores entre 1 et 5. Pour les items, composés de
plusieurs questions, nous avons calculé le coefficient α de
Cronbach, pour vérifier la cohérence interne des items. Celle-ci
avait été établie par les créateurs du
questionnaire, mais notre adaptation du test pouvait la remettre en cause. Les
données des réponses ouvertes n’ont pas été
traitées statistiquement, mais elles ont servi lors de
l'interprétation des résultats.
En complément à ces analyses, le système a
enregistré des traces pour chaque session de jeu, et calculé 4
indicateurs à partir de ces traces :
- le nombre de choix proposés à l’utilisateur,
en moyenne pour toute la session ;
- le nombre total d’actions dans la session (actions du joueur
et des personnages non joueurs) ;
- le nombre d’actions du joueur dans la session ;
- la durée de jeu.
5.2. Résultats
5.2.1. Questionnaires psychologiques
Pour chacun des deux questionnaires psychologiques destinés à
l’utilisateur (CERQ et SDQ), des échelles ont été
construites pour caractériser l’adolescent selon un certain nombre
de critères (respectivement 9 et 5). De plus, des échelles plus
larges ont été construites concernant :
- gestion pro-sociale (prosocial coping) – 10
items du CERQ,
- gestion dysfonctionnelle (dysfunctional coping)
– 15 items du CERQ,
- maîtrise positive des émotions (positive emotion
regulation) – 20 items du SDQ,
- maîtrise négative des émotions (negative
emotion regulation).
Les cohérences internes de ces 4 indicateurs sont
présentées dans le Tableau 1. Trois de ces échelles ont une
cohérence satisfaisante, tandis qu’une d’entre elles a une
cohérente basse.
Tableau 1 • Résultats sur les
questionnaires CERQ et SDQ, pour 22 sujets
Item (questionnaire) |
Nb items |
α Cronbach |
Prosocial coping (SDQ) |
10 |
.54 |
Dysfunctional coping (SDQ) |
15 |
.81 |
Positive emotion regulation (CERQ) |
20 |
.72 |
Positive emotion regulation (CERQ) |
36 |
.76 |
Concernant les questionnaires pour le parent bien portant (SDQ), il a
été rempli par 15 participants sur 22, car les parents
n’accompagnaient pas systématiquement leurs enfants.
L’analyse de cohérence interne donne un coefficient α de
Cronbach de 0.551 pour l’échelle « prosocial
coping » (10 items) et de 0.790 pour l’échelle « dysfunctional coping » (15 items). Comme pour le
questionnaire destiné aux participants, l’échelle « prosocial coping » montre donc une faible
cohérence interne.
5.2.2. Questionnaire IRIS
Les résultats concernant le questionnaire IRIS sont
présentés dans le Tableau 2. Sur les 10 items testés (35
questions), 8 ont une cohérence bonne ou acceptable (α de Cronbach
entre 0.61 et 0.87), tandis qu'un item a une cohérence moyenne (0.54 pour
l'autonomie) et un autre une cohérence très faible (0.25 pour la
crédibilité). Ce dernier item ne sera donc pas pris en compte dans
le cadre de cette étude. Sur les 9 items retenus, 6 ont une moyenne entre
3 et 4, correspondant à des réponses entre un peu d'accord et
d'accord, 2 (curiosité et utilisabilité) ont une moyenne
supérieure à 4 et un item (plaisir esthétique) a une
moyenne inférieure à 3.
Tableau 2 • Résultats sur le
questionnaire IRIS, pour 22 sujets
Item (nb questions) |
α Cronbach |
Min. |
Max. |
Moyenne |
Écart type |
Utilisabilité (3) |
.87 |
2.00 |
5.00 |
4.16 |
.91 |
Curiosité (3) |
.79 |
2.33 |
5.00 |
4.02 |
.76 |
Suspense (4) |
.74 |
1.50 |
4.25 |
3.26 |
.78 |
Flow (5) |
.61 |
2.20 |
4.60 |
3.41 |
.63 |
Plaisir esthétique (3) |
.76 |
1.00 |
4.00 |
2.73 |
.81 |
Enjoyment (2) |
.77 |
1.50 |
5.00 |
3.48 |
.88 |
Satisfaction (2) |
.62 |
1.50 |
5.00 |
3.61 |
.91 |
Identification (3) |
.63 |
1.00 |
4.00 |
3.11 |
.81 |
Crédibilité (2) |
.25 |
1.50 |
4.50 |
3.27 |
.83 |
Autonomie (2) |
.54 |
2.00 |
5.00 |
3.86 |
.79 |
Affect positif (3) |
.83 |
1.66 |
5.00 |
3.12 |
.83 |
Affect négatif (3) |
.66 |
1.00 |
3.33 |
1.82 |
.75 |
5.2.3. Questionnaire d’impact
Les résultats du questionnaire d'impact sont reproduits dans le
Tableau 3. Un participant a été retiré de cette analyse,
car il a coché des valeurs extrêmes sur les échelles (1 ou 5
sur 12 des 13 questions) et a commenté qu'il n'avait pas compris les
questions. Les participants restant ont jugé la simulation narrative
très plausible (4.21) et globalement plutôt éloignée
de leur situation réelle (2.67). Les deux scores concernant le sentiment
d'apprentissage sont moyens (3.10 et 2.67).
Tableau 3 • Résultats pour le
questionnaire d’impact pour 21 sujets
Question |
Min. |
Max. |
Moy. |
Écart type |
Les situations rencontrées dans l'histoire m'ont semblé
plausibles, ce qui se passe peut tout à fait arriver à de vrais
gens dans la vie |
3 |
5 |
4.24 |
.77 |
Les situations rencontrées me sont familières, proches de ce
que je vis à la maison |
1 |
5 |
2.67 |
.97 |
J'ai le sentiment d'avoir appris quelque-chose en jouant avec l'histoire de
Frank et de sa famille |
2 |
4 |
3.10 |
.89 |
Je pense pouvoir me servir de l'histoire de Frank et de sa famille pour
améliorer ma vie de tous les jours |
1 |
4 |
2.67 |
.97 |
5.2.4. Traces
Le tableau 4 résume les valeurs obtenues pour chacun des 4 indicateurs
issus des traces. Par ailleurs, sur les 22 sujets, 13 ont terminé le
scénario.
Tableau 4 • Indicateurs issus des
traces pour 22 sujets
Question |
Min. |
Max. |
Moy. |
Écart type |
Nombre de choix |
13.8 |
32.4 |
22.6 |
5.63 |
Nombre d’actions |
41 |
119 |
78.5 |
20.6 |
Nombre d’actions du joueur |
16 |
54 |
32.9 |
8.43 |
Durée (secondes) |
931 |
1874 |
1505 |
264 |
5.2.5. Corrélations
Nous avons calculé les corrélations entre le résultat du
questionnaire d’impact et les autres items (échelles IRIS et
indicateurs issus des traces) sur 21 sujets. Les données étant non
paramétriques, nous avons utilisé la corrélation de
Spearman. Le tableau croisé à 20 entrées ne sera pas
présenté ici, mais uniquement les sept corrélations
significatives, dans le Tableau 5.
Tableau 5 • Corrélations
concernant le questionnaire d’impact (21 sujets)
Question (impact) |
Item corrélé |
Corrélation |
Sig. |
Plausibilité |
Curiosité (IRIS) |
.460 |
.036 |
Plausibilité |
Satisfaction (IRIS) |
.559 |
.008 |
Familiarité |
Flow (IRIS) |
.531 |
.013 |
Familiarité |
Utilisabilité (IRIS) |
.487 |
.025 |
Sentiment d’apprentissage |
Qualité esthétique (IRIS) |
.625 |
.002 |
Sentiment d’apprentissage |
Nombre de choix (traces) |
.525 |
.014 |
Sentiment d’utilité |
Utilisabilité (IRIS) |
.560 |
.008 |
Nous avons aussi calculé les corrélations entre les
échelles issues des tests psychologiques (SDQ et CECR) et les autres
items (échelles IRIS et indicateurs issus des traces) sur 17
sujets, un certain nombre de sujets n’ayant pas rempli les questionnaires
concernés. Aucune corrélation significative n’a pu
être observée.
À noter que d’autres corrélations ont été
observées, mais elles ne concernent pas les liens entre les questions du
questionnaire d’impact et les autres échelles/indicateurs.
5.3. Discussion
Les résultats obtenus sur les échelles IRIS sont
très encourageants puisque sur les 9 items retenus, 7 ont un score
supérieur à 3 (« plutôt
d’accord »). Dans le Tableau 6, nous avons comparé les
scores obtenus, sur les items communs entre notre expérience sur Nothing For Dinner et d’autres études portant sur d'autres
récits interactifs : une scène du jeu vidéo commercial Farenheit (Roth et al., 2011), Façade, le premier « drame interactif »
jouable (Mateas et Stern, 2003), (Roth et al., 2011) et deux versions de EmoEmma, prototype de drame interactif en
environnement immersif de type CAVE (Pizzi et al., 2007), (Roth et al., 2012).
Même si aucun test de significativité n'a pu être fait, on
constate que pour 3 échelles sur 6 (curiosité, flow et plaisir
esthétique), NFD a obtenu un score plus haut que tous les autres
systèmes. Seul le suspense a un score plus faible. On relativisera
néanmoins cette comparaison, car les questionnaires utilisés sont
légèrement différents (traduction et adaptation à un
public moins érudit, voir plus haut).
Le score élevé sur l'utilisabilité est encourageant, car NFD propose un nombre important de choix à l'utilisateur (une
trentaine en moyenne) sous forme de menus, ce qui aurait pu le
défavoriser sur le plan ergonomique. Le fait que les utilisateurs
étaient des adolescents, généralement habitués aux
jeux vidéo, a certainement influencé ce critère.
Un autre aspect important pour ce type de systèmes est
l’échelle dénommée « autonomie »,
qui correspond à la notion de « agency » dans
le domaine du récit interactif, à savoir la possibilité
d’influencer véritablement le déroulement de
l’histoire. On observe un score tout à fait acceptable, 3.86,
même si la fiabilité de cette échelle avec deux items est
basse (0.54). Pour l’un des deux items de cette échelle,
« J'ai remarqué qu’il y avait de nombreuses
possibilités d’influencer l'histoire », la moyenne des
réponses est de 4, ce qui signifie que les adolescents ont
été, en moyenne, d’accord avec l’affirmation
ci-dessus.
Tableau 6 • Comparaison de NFD avec différents systèmes évalués selon le
questionnaire IRIS (Roth et al., 2011, 2012)
Item |
NFD |
Farenheit |
Façade |
EmoEmma1 |
EmoEmma2 |
Curiosité |
4.02 |
3.58 |
3.49 |
3.59 |
3.86 |
Suspense |
3.26 |
3.33 |
3.5 |
3.61 |
3.49 |
Flow |
3.40 |
2.95 |
3 |
3.09 |
3.31 |
Esthétique |
2.73 |
2 |
2.45 |
2.33 |
2.44 |
Enjoyment |
3.48 |
2.94 |
2.86 |
3.68 |
3.69 |
Utilisabilité |
4.16 |
3.11 |
3.93 |
4.11 |
4.22 |
Concernant le questionnaire d'impact, la forte plausibilité retient
notre attention. Elle valide le processus d'écriture décrit en
section 4, puisque même si la plupart des événements sont
purement fictionnels, ils ne sont pas perçus comme tels. Le recours au
fictionnel, au départ lié au manque de données sur le
réel (section 4.2), s’avère, dans notre cas, tout aussi
efficace pour transmettre un sentiment de plausibilité. Cela illustre le
fait qu’une simulation pédagogique ne doit pas
nécessairement adopter une démarche systématique de
modélisation de l’expérience vécue par les
utilisateurs si elle veut paraître plausible. Ainsi, nous n’avons
pas eu besoin de programmer un modèle du patient ni un modèle
social d’interaction familiale pour mettre l’utilisateur dans un
environnement plausible.
Dans cette opposition fiction/réel, la fiction, assimilée dans
le sens commun au récit, est prise ici dans son sens de fiction
mimétique (Caïra, 2011),
dans la mesure où nous avons mis en évidence que les
événements représentés n’ont pas existé
(ou alors, ce serait « pure coïncidence »). Mais, dans
notre méthodologie de conception, la dimension narrative intervient
aussi : l’auteur avait pour mission de mettre en intrigue,
d’emporter l’apprenant dans une histoire. On peut émettre
l’hypothèse que c’est aussi cette dimension qui a
suscité le sentiment de plausibilité. Le récit, en tant que
constituant fondamental de notre mémoire, donne un sentiment de
réel même quand il est fictionnel.
On remarquera aussi dans nos résultats le contraste entre la forte
plausibilité et la familiarité plus faible (2.67). La simulation
narrative ne couvre donc qu'un ensemble réduit des situations que les
participants ont vécues. En observant les réponses aux questions
ouvertes correspondantes (« précisez quelles situations vous
sont/ne vous sont pas familières »), on constate cependant que
tous les sujets sauf un mentionnent des situations de la simulation qui leur
sont familières. Les situations non familières quant à
elles reflètent la diversité des situations réelles :
« la présence de la grand-mère à la
maison », « mon père ne boit pas
d'alcool », « que je doive m'occuper de tout »,
etc. Cette diversité est à mettre en relation avec l'écart
type élevé sur la familiarité (.966). On pourrait tenter
d’augmenter cette familiarité, en ajoutant du contenu (qui peut
être collecté auprès de sujets participants, selon une
approche centrée utilisateur) et en travaillant sur des mécanismes
de personnalisation. Mais selon nous, la plausibilité reste le
critère principal, puisqu’elle permet à l’apprenant
d’adhérer à la simulation et de s’y engager.
Les corrélations que l’on observe entre la plausibilité
et la curiosité, et surtout la satisfaction, tendent à montrer que
cette perception de la part des adolescents de la plausibilité des
situations rencontrées joue un rôle important dans leur perception
globale de l’expérience, puisque les participants qui
« ne croient pas » aux situations vécues tendent
à être ceux qui sont moins satisfaits. Cela rejoint l’un des
concepts fondateurs du domaine des agents conversationnels, la « believability », qui pose que pour rendre un
personnage expressif et crédible, il faut plutôt rechercher
à construire des personnages crédibles que réalistes (Loyall, 1997).
Nos résultats étendent ce principe aux situations
elles-mêmes, que la construction narrative a rendues expressives aux yeux
de l’utilisateur.
Le sentiment d'apprentissage reste cependant modéré (3.1/5). Il
est vrai qu'avec une seule session de 30 minutes, on ne peut pas
nécessairement s’attendre à obtenir un effet important. Pour
les 8 participants qui néanmoins ont répondu au moins
« un peu d'accord » à la question « J'ai le
sentiment d'avoir appris quelque-chose », il est intéressant de
relever les réponses à la question ouverte
complémentaire : « précisez ce que vous pensez
avoir appris. ». Certaines réponses se rapportent à des
éléments spécifiques à l'histoire en question sans
concerner directement le participant lui-même (par exemple « que
les papas peuvent être têtus longtemps »). À
l'inverse, une réponse évoque un impact personnel sur le
participant : « [...] Je devrais rester plus calme ». Enfin,
deux réponses correspondent à l'objectif pédagogique
fixé, en ce qui concerne le comportement prosocial (cf. Section 1) :
celle que nous venons de citer et « il faut toujours aider les
autres ». Il serait intéressant de comprendre ce qui
caractérise ces participants, question que l’on peut aborder en
analysant les corrélations entre le score donné à la
question ci-dessus sur le sentiment d’apprentissage et d’autres
critères de l’expérience interactive. Celui-ci
s’avère corrélé avec le nombre de choix
proposés en moyenne au participant. Rappelons ici que la simulation
proposée a cela d’unique qu’elle immerge le participant dans
un mode fictionnel dans lequel il a beaucoup de possibilités
d’action, en tout cas d’avantage que dans les jeux sérieux
habituels (Szilas, 2007), (Szilas et Ilea, 2014).
Sur l’ensemble des sessions pour les 22 sujets, ce sont en moyenne 22.7
choix possibles qui étaient proposés à l’utilisateur,
mais ce nombre varie entre les sessions, de 13.8 à 22.6, selon les
situations rencontrées par le joueur (voir le tableau 4). Par exemple, et
c’est le cas pour le participant qui a eu 13.8 choix en moyenne, le
participant a réussi à terminer le jeu sans qu’un noyau
riche en opportunités d’action ne se déclenche, la visite de
Julia. On peut donc interpréter la corrélation entre le sentiment
d’apprentissage et le nombre de choix moyen de différentes
manières : soit un large panel d’actions amène
l’apprenant davantage à s’interroger sur les options
possibles et donc à avoir le sentiment d’avoir appris
davantage ; soit, le nombre de choix étant lié aux parties du
scénario explorées (noyaux), c’est la présence ou non
de ces contenus qui est le facteur déterminant. Une analyse plus
poussée sur le contenu exploré par chacun des participants
pourrait permettre de répondre à cette question. Par ailleurs, la
corrélation positive observée entre le sentiment
d’apprentissage et l’appréciation des qualités
esthétiques de Nothing For Dinner n’était pas
attendue, sachant que d’autres qualités expérientielles
telles que la curiosité ou le flow n’ont pas montré de
corrélations avec le sentiment d’apprentissage, alors
qu’existeraient des interprétations souvent avancées pour
justifier de telles corrélations. On peut interpréter ce
résultat en considérant que les qualités esthétiques
d’un logiciel de formation ont un impact émotionnel sur
l’apprenant, dont on sait qu’il influence l’apprentissage (Mazzietti et Sander, 2015).
Cela tend ainsi à renforcer l’idée d’une
interdépendance forte entre les émotions et la cognition, en
matière d’apprentissage notamment. Les qualités
esthétiques auraient une influence sur la motivation, qui elle-même
favoriserait le sentiment d’apprentissage (que nous avons mesuré),
dont on suppose qu’il est lié à l’apprentissage
lui-même (que nous n’avons pas mesuré).
Le sentiment d’utilité, que nous avons mesuré au travers
de la question « Je pense pouvoir me servir de l'histoire de Frank et
de sa famille pour améliorer ma vie de tous les jours », est
resté faible (2.76/5). Pour les 4 participants qui ont répondu au
moins « d'accord » à la question plus centrée
sur le participant « Je pense pouvoir me servir de l'histoire de Frank
et de sa famille pour améliorer ma vie de tous les jours », on
observe de même leur réponse à la question ouverte
complémentaire. On constate que 3 d'entre eux mentionnent plutôt un
renforcement d'une connaissance existante (« C'est toujours bien de se
rappeler que... », « Continuer à... »,
« ça me fait réaliser encore plus que... »),
tandis que le 4ème reprend le constat cité ci-dessus
(« Je devrais rester un peu plus calme »). On peut alors
supposer que seuls les sujets déjà assez
« mûrs » sur la situation parviennent à avoir
le recul nécessaire pour percevoir l'apport de NFD, sauf si la
situation les a concernés directement (forte familiarité). Les 4
sujets en question ont d'ailleurs un âge supérieur à 16 ans.
L'ajout de la phase de débriefing pourrait aider les autres participants
à mieux extraire une connaissance générale à partir
des histoires particulières qu’ils ont vécues dans NFD. On constate par ailleurs que le sentiment d’utilité est
corrélé avec l’utilisabilité, mesurée par
questionnaire, mais pas avec d’autres mesures. À nouveau, ce
résultat est surprenant, dans la mesure où
l’utilisabilité est considérée comme un
prérequis aux autres qualités de l’expérience
mesurées par le questionnaire IRIS, notamment celles liées
à la dimension narrative (le suspense, la curiosité) et on aurait
pensé que celles-ci seraient davantage liées au sentiment
d’utilité, par le lien récit-apprentissage. On notera aussi
que l’utilisabilité mesurée est en moyenne
élevée, alors que le sentiment d’utilité est faible.
Il semblerait donc que l’utilisabilité du système soit un
paramètre très important pour optimiser l’utilité de
la simulation narrative, même si ce sont d’autres aspects qui
permettent réellement d’avoir un impact sur le comportement,
étant donné le faible score global du sentiment
d’utilité.
6. Conclusion
Nous avons présenté dans cet article
un nouveau type de simulations pédagogiques pour l'apprentissage de
comportements interpersonnels, favorisant une approche narrative et utilisant
une technologie avancée pour gérer la dynamique du récit.
La simulation narrative a été testée sur 22 sujets de la
population cible, qui ont évalué positivement leur
expérience de jeu. Le sentiment d'apprentissage quant à lui est
resté modéré. L'analyse qualitative des réponses aux
questions ouvertes montre d’une part une grande diversité des
impacts perçus et d’autre part suggère deux pistes
classiques d’amélioration : l’incorporation d’un
débriefing pour faire prendre conscience des apports
généraux de la simulation et la personnalisation des situations,
pour augmenter la familiarité. Par ailleurs, la richesse du récit
proposé semble avoir eu un impact allant au-delà des objectifs
pédagogiques initialement prévus. Cela nous amène à
suggérer qu’une analyse de l'effet d'apprentissage de ce type de
simulation doit inclure le maximum de dimensions.
Remerciements
Ces travaux de recherche ont été
financés par le Fonds National de la Recherche Suisse, via le projet
« TBI-SIM » (co-dirigé par J. Dumas et N.
Szilas).
À
propos des auteurs
Nicolas Szilas est ingénieur de l’ESIM (Ecole
Centrale Marseille) et docteur en Sciences Cognitives de l’INPG. Du public
au privé et vice-versa, il a acquis une compétence
pluridisciplinaire dans les domaines de l’Intelligence Artificielle, de
l’Interface Homme Machine et des jeux vidéo. En 1999, il lance
IDtension, un programme de recherche sur le Drame Interactif, qui devra devenir
son domaine d'excellence pour les années à venir. En 2006 il entre
au laboratoire TECFA de l'Université de Genève, où il
poursuit ces recherches au travers de plusieurs projets financés par
l'Europe ou la Suisse. Il s'intéresse particulièrement à
l'utilisation de ces systèmes à des fins d'apprentissage ou de
formation, au développement de modèles, outils et
méthodologies permettant à des auteurs de s'approprier ces
nouvelles technologies d'écriture, et enfin à leur
évaluation. Il s'intéresse également de près aux
jeux vidéo pédagogiques, domaine qu'il enseigne à
l'Université, notamment aux questions d'intégration des objectifs
pédagogiques dans la mécanique de jeu.
Adresse : TECFA – FPSE - Bd du
Pont-d'Arve, 40 - Université de Genève - CH 1211 Genève 4 -
SUISSE
Courriel : nicolas.szilas@unige.ch
Jean Dumas est docteur de psychologie clinique de
l’enfant et diplômé de l’American Board of Professional
Psychology. Il a travaillé près de 40 ans au Canada, aux
États-Unis, et en Suisse. A la fois chercheur et clinicien, il est un
spécialiste de la psychopathologie de l’enfant et de
l’adolescent. Il s’intéresse tout particulièrement aux
enfants présentant un trouble du comportement (par ex., trouble des
conduites, hyperactivité) et aux enfants anxieux, ainsi qu’à
leurs familles. Il s’intéresse également aux enfants et aux
adolescents dont un parent est atteint d’un traumatisme crânien, et
au développement de jeux vidéo interactifs pour les soutenir. Jean
Dumas partage ses activités professionnelles entre la recherche,
l’enseignement et l’intervention.
Adresse : FPSE - Bd du Pont-d'Arve, 40 -
Université de Genève - CH 1211 Genève 4 - SUISSE
Courriel : profdumas@outlook.com
Urs Richle est écrivain et ingénieur
média diplômé HES (Haute École
Spécialisée). Depuis 2006 il travaille en tant que collaborateur
scientifique à l’Université de Genève et en tant
qu’enseignant à l’Institut Littéraire Suisse au
Beaux-Arts de Berne. Avec Nicolas Szilas il a collaboré sur plusieurs
projets de recherche dans le domaine de la narration interactive. En tant
qu’écrivain, Urs Richle a publié plusieurs romans en langue
allemande. Dernière publication : Anaconda 0.2, Limmat Verlag,
2016.
Adresse : TECFA – FPSE - Bd du
Pont-d'Arve, 40 - Université de Genève - CH 1211 Genève 4
– SUISSE
Courriel : urs.richle@unige.ch
Nicolas Habonneau est un développeur/graphiste
indépendant. Son activité principale est la conception de
« serious game ». Dernièrement, il a contribué
au développement de Nothing for Dinner et Algebra Mystery pour le compte
de Nicolas Szilas du laboratoire TECFA de la Faculté de Psychologie et
des Sciences de l’Éducation de l'université de
Genève.
Aujourd'hui, Nicolas continue ce travail de conception dans sa propre
société et s'attèle aussi à la production de
contenus graphiques pour d'autres projets vidéoludiques. En
parallèle, il mène une activité d'écrivain de
science-fiction dans laquelle il tente de dresser le portrait d'un futur
probable de l'humanité.
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