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Architecture et modèles génériques pour
la génération adaptative des scénarios de jeux
sérieux. Application : Jeu d’évaluation et de
rééducation cognitives
Karim SEHABA (LIRIS, Lyon 2), Aarij Mahmood HUSSAAN (IQRA
University, Pakistan)
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RÉSUMÉ : Notre
travail de recherche porte sur les jeux sérieux adaptatifs.
Précisément, il vise le développement d’une
plate-forme générique et évolutive permettant la
génération de scénarios adaptés aux
caractéristiques et besoins des utilisateurs. Pour cela, nous avons
proposé une architecture permettant d’organiser les connaissances
du domaine en trois couches : concepts du domaine, ressources
pédagogiques et ressources du jeu. Les traces d’interaction sont
utilisées pour faire évoluer le profil de l’utilisateur
à partir de ses performances. L’architecture ainsi que ses
modèles associés ont été développés
dans la plate-forme GOALS (Generator Of Adaptive Learning Scenarios). Afin de
valider nos contributions, nous avons évalué GOALS dans plusieurs
expérimentations dans le cadre du projet CLES (Cognitive Linguistic
Elements Stimulations). Ce projet, en partenariat avec plusieurs équipes
spécialisées dans les jeux, l’ergonomie des IHM et les
mécanismes cognitifs, porte sur le développement d’un jeu
sérieux pour l’évaluation et la rééducation
cognitives.
MOTS CLÉS : Sérious game, scénario,
générateur adaptatif, trace, situation de handicap.
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Architecture and models for adaptive generation of serious game scenarios. Application : Serious Game for Cognitive Rehabilitation |
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ABSTRACT : Our
research work focuses on adaptive serious games. More precisely, our work aims
at the development of a generic and evolutive platform, which allows the
generation of pedagogical scenarios adapted to the characteristics and needs of
users. For that purpose, we have proposed an architecture that organizes the
domain knowledge in three layers: domain concepts, pedagogical resources and
game resources. The interaction traces are used in order to update the learner
profile. The architecture and its associated models were developed into the
platform GOALS (Generator of Adaptive Learning Scenarios). To validate our
contributions, we have evaluated GOALS in various experimentations in the
context of project CLES (Cognitive Linguistic Elements Stimulations). This
project, in partnership with many teams specializing in video games, ergonomics
of HCI and cognitive mechanisms, focuses on the development of a serious game
for the cognitive stimulation.
KEYWORDS : Serious games, scenario, adaptive generator, trace, handicap |
1. Introduction
Un jeu sérieux est
défini comme étant un défi intellectuel lancé sur un
dispositif numérique selon des règles spécifiques. Selon (Zyda, 2005), tout
jeu vidéo conçu avec un objectif autre que le simple
divertissement peut être considéré comme un jeu
sérieux. Les jeux sérieux ont été utilisés
dans plusieurs domaines tels que la santé (Green et al., 2010),
la sécurité, le recrutement (Susi, 2007),
etc.
Nous nous intéressons dans un cet article à un type particulier
de jeux sérieux : les jeux d’apprentissage (learning
game). Il s’agit des jeux qui utilisent le divertissement comme valeur
ajoutée pour favoriser l’apprentissage. Ainsi, ce type de jeux rend
l’apprentissage plus attractif et amusant à travers des
défis ludiques qui suscitent la motivation et l’engagement des
apprenants. Dans ce cadre, notre travail porte sur la génération
automatique de scénarios pédagogiques dans les jeux
d’apprentissage. La notion de scénario pédagogique a
plusieurs acceptions (Peter et Vantroys, 2005) (Schneider et al., 2003) (Pernin et Lejeune, 2006).
Par scénario, nous entendons une suite d’activités
pédagogiques, intégrées dans une activité ludique,
permettant à l’apprenant d’atteindre un ou plusieurs
objectifs d’apprentissage. Dans la majorité des jeux
d’apprentissage actuels, le scénario de jeu est identique quelque
soit l’apprenant, ses spécificités et ses objectifs
pédagogiques. Ces jeux souffrent de nombreux problèmes car
ils ne s’adaptent pas aux profils et besoins de leurs utilisateurs.
L’objectif général de notre recherche est de
définir des modèles de représentation et de raisonnement
permettant la génération adaptative de scénario
pédagogique dans le cadre des jeux d’apprentissage. Il s’agit
de faciliter l’intégration des scénarios dans les jeux
vidéo. Les scénarios générés doivent tenir
compte du profil de l’utilisateur, ses objectifs d’apprentissage
ainsi que ses traces d’interaction. Afin de réaliser cet objectif,
nous avons retenu deux propriétés : généricité et évolutivité.
Par généricité, nous entendons la capacité du
générateur à être indépendant du domaine
d’application, donc en mesure d’être utilisé dans
plusieurs domaines et plusieurs jeux sérieux. En effet, les jeux
sérieux dont les aspects ludiques sont fortement couplés aux
éléments pédagogiques présentent plusieurs
inconvénients. Ces approches ne supportent pas la réutilisation
d’un même jeu dans plusieurs domaines d’apprentissage et
vice-versa. Egalement, tout changement dans les connaissances du domaine
d’apprentissage implique des modifications des éléments du
jeu, ce qui peut être très contraignant pour les concepteurs. Pour
répondre à ces limites, nous proposons une architecture
générique permettant d’organiser les connaissances du
domaine en trois couches : concepts du domaine, ressources pédagogiques
et ressources du jeu. Cette organisation permet, d’une part, de faire
évoluer les éléments d’une couche donnée sans
remettre en cause les éléments des autres couches, d’autre
part de mettre en relation les mêmes connaissances du domaine avec
différents jeux.
L’évolutivité est la capacité du
générateur à faire évoluer ses connaissances
à partir de ses interactions avec les utilisateurs. Dans la
majorité des jeux actuels, les interactions entre le apprenants et le jeu
sont prédéfinies par le concepteur durant la phase de conception
selon un certain nombre d’hypothèses. Ces jeux ne tiennent pas
compte de l'historique de l’utilisateur et de son évolution. Ils
souffrent ainsi de nombreux inconvénients, car ils ne s'adaptent pas
facilement aux différentes situations rencontrées dans la
pratique. En outre, la conception d'un jeu disposant, avant sa mise en
œuvre, d’une représentation complète des besoins et
spécificités de ses utilisateurs n'est pas chose facile pour le
concepteur. Pour combler ces lacunes, notre approche consiste à exploiter
les traces d’interaction afin de mettre à jour le profil de
l’utilisateur et les connaissances du domaine. D’une manière
générale, une trace (Clauzel et al., 2009) est définie comme un historique des actions de l’utilisateur
collectées à partir de son interaction avec le système
informatique.
Notre travail de recherche s’inscrit dans le cadre du projet CLES
(Cognitive Linguistic Elements Stimulations) dont l’objectif est de
développer un jeu sérieux pour l’évaluation et la
rééducation des troubles cognitifs. Il s’agit des troubles
de perception, d’attention, de mémoire, de langage oral et
écrit, de raisonnement logique, de visuo-spatial et de compétences
transversales. Précisément, le projet CLES vise, d’une part,
à réaliser pour chaque pathologie une brique logicielle qui soit
ciblée sur une lacune bien précise tout en optimisant, à
travers des techniques de jeux vidéo, leur ergonomie cognitive.
D’autre part, il s’agit de développer un module permettant de
générer des parcours de jeux personnalisés à
chaque patient en l’orientant suivant ses difficultés et ses
progrès.
Cet article est organisé comme suit : la section 2 présente un
état de l’art sur les générateurs de scénarios
dans le cadre des jeux sérieux et des environnements informatiques pour
l’apprentissage humain en général. La section 3
décrit le projet CLES dans lequel se situe notre travail. Cette section
présente le contexte et l’objectif de ce projet, le principe de
fonctionnement du jeu développé et quelques exemples
d’exercices, sous forme de mini-jeux, de stimulation cognitive. Les
sections 4 et 5 détaillent l’architecture générale du
générateur, ses modèles ainsi que son fonctionnement. La
section 6 illustre l'utilisation de ces modèles à travers la
modélisation des connaissances du projet CLES. La section 7
s'intéresse aux évaluations de nos contributions. L’objectif
de ces évaluations est de valider les modèles de connaissances que
nous avons proposés ainsi que d’étudier l’impact des
scénarios générés par plate-forme GOALS
(Generator Of Adaptive Learning Scenarios) sur les apprenants. Pour
chacun de ces deux objectifs, un protocole d’évaluation et les
résultats d’une expérimentation seront
détaillés. Enfin, la section 8 présente une conclusion et
quelques perspectives.
2. Etat de l’art
2.1. Générateur de scénarios dans les jeux
La génération de scénarios dans
les jeux sérieux a fait l’objet de plusieurs recherches (Carron, Marty, France, et al., 2007)(Bikovska et Merkuryeva, 2007)(Bieliková et al., 2008; Moreno-Ger, Burgos, et al., 2007). (Carron et al., 2008) propose un environnement d’apprentissage basé sur une
représentation graphique des activités éducatives. Il
s’agit d’un donjon pédagogique permettant à chaque
apprenant de collecter des connaissances relatives à
l’activité d’apprentissage. Les traces d’interaction
sont utilisées afin de permettre à l’enseignant de
contrôler et de réguler le déroulement du scénario.
Ce contrôle peut se faire en temps réel par l’enseignant.
(Bikovska et Merkuryeva, 2007) propose une méthodologie de formalisation et de génération
de scénarios dédiée aux jeux d’entreprise. Le
scénario, représenté sous forme d’un arbre, peut
être paramétré manuellement ou automatiquement afin de
régler son niveau de difficulté. Dans (Hodhod et al., 2009),
les auteurs présentent un jeu sérieux dédié à
l’enseignement de l’éthique. Ce jeu est destiné aux
élèves entre 8 et 11 ans. La génération de
scénarios est basée sur une planification STRIPS (STanford
Research Institute Problem Solver). Le système développé,
appelé AEINS1, est capable
d’analyser les actions des utilisateurs afin de contrôler et de
personnaliser dynamiquement le scénario d’apprentissage.
(Moreno-Ger, Sierra, et al., 2007) propose une approche de scénarisation à base de documents. Le
principe consiste à décrire le scénario de jeu dans un
langage, appelé e-game, basé sur une représentation
XML. Les auteurs ont ensuite développé le langage e-adventure (Moreno-Ger, Burgos, Martinezortiz, et al., 2008; Moreno-Ger, Burgos, Martínez-Ortiz, et al., 2008; Moreno-Ger, Burgos, et al., 2007).
Ce dernier permet une génération dynamique des scénarios
à partir des chemins prédéfinis a priori par un
expert du domaine. La génération ici consiste à
sélectionner le bon chemin sur la base d’un pré-test auquel
les élèves doivent répondre.
Le système SMILE2 (Bieliková et al., 2008) permet aux enseignants de créer des scénarios de jeu d’une
manière simple et intuitive. Il s’agit d’associer à
chaque objectif pédagogique les chemins qui permettent de
l’atteindre. Néanmoins, ce système nécessite un
important effort de modélisation.
(Marne et al., 2013) propose un modèle permettant d'aider le tuteur à adapter le
scénario du jeu à ses besoins spécifiques. Le
scénario dans ce modèle est découpé en
séquences d'activités définies par des objectifs
pédagogiques et ludiques. Ces activités comportent des états d’entrées (caractérisés par des
prérequis pédagogiques et ludiques) capables de déclencher
un mode précis, et des états de sortie (caractérisés également par des objectifs
pédagogiques et ludiques). Ainsi, ce modèle permet de construire
des parcours avec des branchements de précédence plus ou moins
complexes. La connaissance des objectifs atteints et des prérequis sur
les aspects ludiques et pédagogiques permet de maintenir la
cohérence des parcours.
2.2. Générateur de scénarios dans les EIAH
(Vassileva et Deters, 1998a) propose un outil de génération de scénarios adaptatifs
appelé « Dynamic Courseware Generator ». En fonction
des objectifs pédagogiques et du profil de l’apprenant, ce
générateur, basé sur un planificateur intelligent,
identifie l’ensemble des chemins qui relient les concepts maitrisés
par l’apprenant et les concepts cibles. Ensuite, il sélectionne
parmi tous les chemins possibles une suite de concepts. Cette dernière
est mise en relation avec des ressources pédagogiques.
Le moteur d’adaptation d’AHA! (De Bra et Calvi, 1998; De Bra et Ruiter, 2001) permet de guider l’utilisateur dans sa navigation hypertextuelle. Pour
cela, à partir du modèle utilisateur, ce système
détermine les fragments qui devraient être montrés
à l’utilisateur. Il s’agit des liens hypertextes et des
informations les plus pertinentes pour l’utilisateur.
Pixed3 (J. Heraud et al., 2004; J. Heraud et Mille, 2000) est basé sur la réutilisation de scénarios. Il s’agit
de proposer aux apprenants, consultant un cours en ligne, de réutiliser
les parcours d’apprentissage d’autres apprenants.
L’utilisation de Pixed peut se faire selon trois modes : linéaire,
assisté et libre. Dans le mode linéaire, le système choisit
les concepts (appelés notions) à apprendre, les mets dans
le bon ordre, puis il les associe aux ressources pédagogiques. Le mode
assisté propose à l’apprenant un chemin linéaire
où l’apprenant a la possibilité de choisir des concepts
proches de ceux du chemin linéaire. Dans le mode libre, l’apprenant
peut choisir les concepts qui l’intéressent ainsi que les
ressources pédagogiques associées.
Le projet de recherche WINDS (Web-based Intelligent Design and Tutoring
System) (Kravcik et Specht, 2004; Specht et al., 2001a) porte sur la construction d’un environnement d’apprentissage
intégrant un système tutoriel intelligent, un système de
gestion de cours et un ensemble d’outils coopératifs. Dans ce
cadre, l’environnement ALE (Adaptive Learning Environment) permet de
produire des cours personnalisés, basés sur des hypermédias
éducatifs adaptatifs, en fonction de l'état courant de
l'apprenant, ses préférences et son style d'apprentissage.
ActiveMath (Libbrecht et al., 2001) est un système d'apprentissage en ligne qui génère
dynamiquement des cours (de mathématique) interactifs adaptés aux
objectifs, préférences, capacités et connaissances de
l'élève. Les objets d’apprentissage sont
représentés dans un format XML. Pour chaque utilisateur, un
contenu approprié est sélectionné à partir d'une
base de connaissances selon des règles pédagogiques. Le cours est
ensuite présenté à l'utilisateur via un navigateur Web.
Le générateur de scénarios de la plate-forme Paigos (Ullrich et Melis, 2010) est basé sur un planificateur HTN. La planification est effectuée
en appliquant des méthodes sur des tâches principales pour les
décomposer en sous-tâches, puis en appliquant des opérateurs
sur des tâches primitives (tâches réalisables par des
opérateurs) pour produire des actions.
2.3. Synthèse
Dans le domaine des EIAH, les générateurs de scénarios
sont caractérisés par leur capacité à produire des
suites d’activités pédagogiques personnalisées
à chaque utilisateur. Pour cela, ces générateurs prennent
en compte les connaissances du domaine ainsi que le profil de
l’utilisateur. Certains de ces générateurs, notamment (De Bra et Calvi, 1998; De Bra et Ruiter, 2001; J.-M. Heraud et Mille, n.d.; Vassileva et Deters, 1998b),
sont génériques, néanmoins leur utilisation pour des jeux
d’apprentissage nécessite un effort considérable dans la
mesure où ils ne prennent pas en compte les aspects ludiques.
Dans le cadre des jeux d’apprentissage, les approches de
génération de scénarios étudiées
modélisent les ressources de jeux et leurs relations avec les ressources
pédagogiques, néanmoins certaines de ces approches sont
dépendantes du domaine d’application
((Chang et Chou, 2008) ou (Hodhod et al., 2009))
ou nécessitent le contrôle de l’utilisateur humain dans le
processus de génération
((Bieliková et al., 2008; Carron, Marty, et Heraud, 2007; Chang et Chou, 2008).
Le contrôle manuel peut être très contraignant dans des jeux
en ligne où le nombre d’utilisateurs est généralement
très important (tel que c’est le cas dans le projet CLES).
Les approches proposées dans (Hodhod et al., 2009) (Moreno-Ger, Sierra, et al., 2007) sont capables de générer dynamiquement des scénarios
personnalisés. Ces générateurs sont basés sur des
systèmes à base de règles (Hodhod et al., 2009) ou des scénarios prédéfinis (Moreno-Ger, Sierra, et al., 2007),
elles nécessitent donc un effort important de modélisation.
Egalement, la mise à jour des connaissances est difficile.
Le tableau 1 montre une synthèse comparative des différents
systèmes que nous avons étudiés par rapport aux
critères retenus : (1) Généricité : la
capacité du générateur à être
indépendant du domaine d'application ; (2) Évolutivité
: sa capacité à mettre à jour ses connaissances à
partir de ses interactions.
Références |
Généricité |
Evolutivité |
Dynamic Courseware Generator (DCG) (Vassileva, 1995) |
Oui |
Oui |
AHA ! (De Bra et Calvi, 1998; De Bra et Ruiter, 2001) |
Oui |
Non |
ACE (Specht et Oppermann, 1998) |
Oui |
Oui |
WINDS (Kravcik et Specht, 2004; Specht et al., 2001b) |
Oui |
Oui |
ActiveMaths (Libbrecht et al., 2001) |
Oui |
Non |
(Karampiperis et Sampson, 2005) |
Oui |
Oui |
(Bouzeghoub et al., 2005; Duitama et al., 2005) |
Oui |
Non |
PAIGOS (Ullrich et Melis, 2009; Ullrich, 2007) |
Oui |
Oui |
SeLeNe (Keenoy et al., 2004) |
Oui |
Non |
PIXED (J. Heraud et al., 2004; J. Heraud et Mille, 2000) |
Oui |
Non |
(Marne et al., 2013) |
Oui |
Non |
Tableau 1: Synthèse comparative des
générateurs existants
3. Projet CLES
Dans cette section, nous présentons
brièvement le projet CLES dans lequel se situe notre travail. Ensuite,
nous décrivons le principe du jeu Tom Oconnor développé
dans ce projet ainsi que quelques activités éducatives, sous forme
de mini-jeux.
3.1. Description du projet
L’évaluation et la rééducation des troubles
cognitifs ont fait l’objet de plusieurs travaux de recherche. Ces travaux,
généralement basés sur des tests cliniques, portent sur
différentes fonctions cognitives telles que la mémoire de travail (Diamond et Goldman-Rakic, 1989),
l’attention (Manly et al., 2001),
la perception auditive (Mody et al., 1997),
etc. Avec l’avènement de l’informatique, se sont
développées des solutions numériques de remédiation
cognitive et linguistique. Ainsi, les auteurs dans (Garcia-Palacios et al., 2002) utilisent un système de réalité virtuelle pour le
traitement des personnes atteintes de claustrophobie. LAGUNTXO (Conde et al., 2009) est un système d’apprentissage à base de règles dont
l’objectif est de faciliter l’intégration des personnes en
situation de handicap cognitif dans les environnements de travail. Tutor
Informatico est un système destiné aux personnes souffrant du
syndrome de Down. Ce système, basé sur les nouvelles technologies
mobiles, permet d’aider ces personnes à surmonter leur handicap et
à acquérir davantage d'autonomie. (Sehaba et al., 2005) propose un système à base de jeux ludo-éducatifs pour
l’aide à la structuration des enfants autistes.
Ces systèmes ont l’avantage d’être plus flexibles et
facilement accessibles. Ils sont également capables d’enregistrer
les traces des utilisateurs, ce qui permet aux praticiens de suivre les
réalisations et l’évolution de leurs patients (Sehaba, 2005).
Cependant, la plupart de ces systèmes ne s’adaptent pas aux
spécificités et besoins de chaque utilisateur. Cette adaptation
est particulièrement importante dans ce contexte dans la mesure où
les personnes en situation de handicap cognitif n’ont pas les mêmes
compétences, capacités ou préférences.
Afin de répondre à cette limite, le projet CLES (Cognitive
Linguistic Elements Stimulations) a été proposé.
L’objectif général de ce projet est de développer un
jeu sérieux adaptatif permettant l’évaluation et la
rééducation de huit fonctions cognitives (Hussaan et al., 2011) : perception, attention, mémoire, langage oral, langage écrit,
raisonnement logique, visuo-spatial et compétences transversales. Pour
cela, CLES vise, d’une part, à développer pour chacune de
ces fonctions plusieurs mini-jeux de stimulation cognitive. D’autre part,
à développer un générateur de scénario
adaptatif. Il s’agit ainsi de personnaliser le scénario de jeux
et son niveau de difficulté en fonction des capacités,
compétences et historique de chaque personne. En effet, le jeu
développé dans le cadre de ce projet est accessible en ligne et le
nombre de ses utilisateurs est trop important pour pouvoir envisager une
génération manuelle.
3.2. Principe du jeu Tom Oconnor
Le jeu sérieux développé dans le cadre de ce projet,
appelé Tom Oconnor et la statuette sacrée, est un jeu
d’aventure accessible en ligne. Le protagoniste de ce jeu est un
personnage nommé Tom dont la tâche est de chercher une
statuette sacrée dissimulée dans un manoir. En fonction des
sessions, ce personnage est placé successivement dans plusieurs
pièces du manoir. Chaque pièce contient plusieurs objets (chaise,
bureau, écran, etc.). Derrière certains de ces objets se cachent
des défis sous forme de mini-jeux. L’utilisateur doit
interagir avec ces objets pour lancer ces mini-jeux. Pour accéder
à d’autres pièces et avancer dans le jeu,
l’utilisateur doit lancer tous les mini-jeux de la pièce.
3.3. Exemples de mini-jeux
La figure 1 montre l’interface d’un mini-jeu sur la
mémoire appelé disparition grille. Ce jeu affiche une
série d’images que l’utilisateur doit mémoriser.
Après un laps de temps, les images disparaissent, l’utilisateur est
alors invité à les sélectionner parmi plusieurs
propositions. Ce jeu dispose de plusieurs paramètres : le nombre
d’images à mémoriser et leur complexité, la
durée d’affichage de ces images, le nombre de propositions et le
temps de réponse de l’utilisateur.
Figure 1 • Exemple d’un mini-jeu sur la
mémoire
La figure 2 présente une interface du jeu Objets
entremêlés à identifier. L’objectif de ce jeu est
de développer et d’évaluer la perception visuelle des
enfants entre 6 à 12 ans. Pour cela, ce jeu affiche à
l’écran un modèle contenant plusieurs objets
entremêlés et un ensemble d’objets simples. L’apprenant
doit identifier, parmi cet ensemble, les objets qui composent le modèle
dans un laps de temps bien déterminé. Les paramètres de ce
jeu sont le nombre et le type d’objet (chiffres, lettres, formes
géométriques, etc.), le nombre de propositions et le temps de
réponse. Les paramètres des mini-jeux permettent de régler
leurs niveaux de difficulté en fonction des capacités et des
besoins de chaque utilisateur.
Figure 2 • Exemple d’un mini-jeu sur la perception
visuelle
Pour chacune des huit fonctions cognitives, une douzaine de mini-jeux ont
été développés, chaque mini-jeu possède neuf
niveaux de difficulté. Le rôle du générateur de
parcours est de sélectionner, en fonction du profil de
l’utilisateur, ses traces et les objectifs thérapeutiques de la
session, les mini-jeux et leurs niveaux de difficulté, puis de les mettre
en relations avec les objets des différentes pièces du manoir.
4. Représentation des connaissances du domaine
4.1. Architecture générale
Comme le montre la figure 3, l’architecture du
système permet d’organiser les connaissances du domaine en trois
couches, à savoir :
1. Concepts du domaine : il s’agit d’une
représentation abstraite modélisant les connaissances du domaine
d’apprentissage sous forme de graphe de concepts. Par exemple, dans le
cadre du projet CLES, les concepts peuvent être : perception,
mémoire, raisonnement logique...
2. Ressources pédagogiques : il s’agit des
ressources qui permettent de véhiculer, de transmettre ou
d'appréhender les concepts du domaine. Par exemple : les jeux disparition grille et Objets entremêlés à
identifier, présentés dans la section
précédente, sont des ressources pédagogiques relatives aux
concepts mémoire et perception visuelle respectivement.
3. Ressources du jeu : elles représentent les objets du jeu
avec lesquels l’utilisateur peut interagir. Par exemple, les objets du jeu
Tom Oconnor derrière lesquels se cachent des défis sont des
ressources du jeu
Cette organisation permet de faire évoluer les éléments
d’une couche donnée sans remettre en cause les
éléments des autres couches. Egalement, elle permet de mettre en
relation les concepts d’un domaine donné avec différentes
ressources pédagogiques, de même que les relations entre les
ressources pédagogiques et de jeux.
Figure 3 • : Représentation des
connaissances
Dans les sous-sections suivantes, nous présentons les modèles
que nous proposons pour la modélisation des concepts, ressources
pédagogiques et ressources du jeu.
4.2. Modélisation des concepts
Comme son nom l’indique, la première couche contient les
concepts du domaine. Ces derniers sont organisés sous forme d’un
graphe sans cycle où les nœuds du graphe correspondent aux concepts,
et les liens entre les nœuds correspondent aux relations entre concepts.
Chaque concept est caractérisé par un identifiant unique et un
ensemble de propriétés (nom, description, auteur, etc.) et chaque
relation est caractérisée par son concept source, ses concepts
cibles, un ensemble de propriétés et une fonction permettant de
propager l’information dans le graphe afin de mettre à jour le
profil de l’utilisateur. Ce dernier est représenté par un
ensemble de propriétés de la forme « attribut, valeur »
où chaque attribut correspond à un concept du domaine et sa valeur correspond à la compétence de l’utilisateur
concernant ce concept.
Formellement, le modèle des concepts du domaine (CD) est
défini comme suit :CD= <N, L> où N et L représentent respectivement l’ensemble des concepts du
domaine pédagogique et l’ensemble des relations entre les
différents concepts. Pour chaque concept C ⊂ N: C = <id,
P> où id est un identifiant unique du concept C et P est un ensemble de propriétés décrivant le concept C. Ces propriétés sont sous la forme <attribut,
valeur> où attribut est le nom de la propriété et valeur est la description de la propriété. Par
exemple : < auteur, "Martin Michel">,
<date-de-création, "1-09-2013">, <description, "la
perception permet à un individu d’interpréter les signaux de
l’environnement perçus par ses sens...">.
De même, pour chaque relation R ⊂ L : R=<CFrom, T, RC+> où CFromest le
concept source de la relation. T est le type de la relation, avec : T = <Nom, Description, FType> où Nom est le
nom de la relation. Description une description textuelle de la
relation. FType est une fonction qui permet de calculer
les dépendances entre les concepts cibles CTo et leur
concept source CFrom. Cette fonction est utilisée pour
mettre à jour le profil de l’utilisateur à partir de ses
performances.
RC = <CTo, F, Value> où CTo est le concept cible dans la relation R. F et Valeur expriment l’impact de CTo sur CFrom. Elles sont utilisées par FType pour calculer les dépendances entre les concepts de la relation en
question.
Dans le cadre du projet CLES, nous avons créé, à partir
des huit fonctions cognitives, plusieurs concepts. Nous avons également
créé plusieurs types de relations (Hussaan et al., 2011) à partir de la formalisation d’au-dessus. Pour l’exemple,
nous présentons quatre types de relation :
- Fait-partie (x, y1... yn) : indique
que les concepts cibles y1, y2,...
yn sont des sous-concepts du concept x. Par exemple,
Fait-partie (Perception, perception-auditive, perception-visuelle).
- Pré-requis (x,y) : indique que pour apprendre le
concept y il est nécessaire d’avoir une connaissance
suffisante du concept x. Par exemple, Pré-requis (perception
visuelle, langage écrit) signifie que le langage écrit
nécessite des capacités de perception visuelle.
- Type-de (x,y) : signifie que le concept y est
un type du concept x. Cette relation peut être
considérée comme une spécialisation.
- Parallèle (x, y) : indique que les concepts x et y doivent être dans un même scénario.
Autrement dit, si le générateur inclut un des deux concepts, il
doit forcément inclure l’autre.
4.3. Modélisation des ressources pédagogiques
La deuxième couche contient les ressources pédagogiques.
D’une manière générale, une ressource
pédagogique est une entité utilisée dans un processus
d'enseignement, de formation ou d'apprentissage permettant de véhiculer,
de transmettre ou d'appréhender des concepts pédagogiques. Les
ressources peuvent être de différentes natures : définition,
exemple, exercice, qcm, etc. Chaque ressource pédagogique est
définie par un identifiant unique, un type, des paramètres, une
fonction d’évaluation et un ensemble de caractéristiques
(nom de la ressource, son auteur, sa description, etc.). Comme le montre la
figure 3, chaque ressource pédagogique peut être en relation avec
un ou plusieurs concepts du domaine. Cette relation exprime que la ressource en
question permet d’appréhender le concept avec lequel elle est
liée.
Formellement, une ressource pédagogique (RP) est définie
comme suit :
RP : <id, Type, Paramètres,
Fonction-d’évaluation, Solution, Caractéristiques,
Concepts-en-relation>
- Id : un identifiant unique de la ressource
pédagogique ;
- Type : ce champ spécifie la nature de la
ressource pédagogique, qui peut être une description (définition, exemple, illustration, etc.), une démonstration (preuve, théorème, etc.) ou un test (exercice, problème, qcm, etc.) ;
- Paramètres : il s’agit des
paramètres qui fixent le niveau de difficulté de la ressource
pédagogique. La section 3.3 présente les paramètres des
mini-jeux « objets entremêlés à
identifier » et « identification
grille » ;
- Fonction-d’évaluation (optionnelle) :
elle concerne les ressources pédagogiques de type test. Elle est
utilisée pour évaluer la réponse de
l’apprenant ;
- Solution (optionnelle) : contient la réponse au
test des ressources pédagogiques de type test ;
- Caractéristiques : Il s’agit des
méta-informations concernant la ressource telle son auteur, sa date de
création, etc. ;
- Concepts-en-relation : contient la liste des concepts
en relation avec la ressource pédagogique en question. Pour chacun de ces
concepts, il est associé la compétence requise
(représentée par une valeur appartenant à
l’intervalle [0,1]) pour pouvoir accéder à la ressource.
Ainsi, cette liste est représentée comme suit :
<c1, compétence-requiseC1>,
<c2, compétence-requiseC2>... En plus, pour
chacun de ces concepts, on associe une valeur représentant l’impact
de la ressource sur le concept.
Dans le cadre du projet CLES, les mini-jeux du jeu Tom Oconnor sont des
ressources pédagogiques.
4.4. Modélisation des ressources du jeu
La troisième et dernière couche contient les ressources de
jeux. Il s’agit des objets statiques ou munis de comportement interactif
ou proactif. Dans notre modèle, nous ne considérons que les
ressources du jeu en relation avec les ressources pédagogiques. Chaque
ressource du jeu est définie par un identifiant, des relations avec les
ressources pédagogiques et un ensemble de caractéristiques.
Formellement, chaque ressource du jeu (RJ) est définie comme
suit :
RJ = <Id, Caractéristiques,
Relations-Pédagogiques>
Où,
- Id : un identifiant unique de la ressource du
jeu ;
- Caractéristiques : sont des
méta-informations concernant la ressource telles que son auteur, sa date
de création, son type, etc. ;
- Relations-Pédagogiques : contient toutes les
ressources pédagogiques en relation avec la ressource du jeu en
question.
Dans le cadre du projet CLES, les objets du jeu Tom Oconnor derrières
lesquels se cachent les mini-jeux sont représentés par des
ressources du jeu.
5. Principe du générateur de scénarios
Comme le montre la figure 4, la
génération de scénario passe par trois
étapes successives.
Il s’agit, à partir du profil de l’utilisateur et de ses
objectifs pédagogiques, de générer un scénario
conceptuel. Ce dernier est ensuite transformé en scénario
pédagogique. Pour cela, le générateur sélectionne
pour chaque concept du scénario conceptuel une ou plusieurs ressources en
relation avec celui-ci. Cette sélection tient compte du modèle
de présentation et des connaissances d’adaptation. Le
premier permet de structurer les ressources pédagogiques en fonction de
leur type. Les connaissances d’adaptation permettent de fixer le niveau de
difficulté pour chaque ressource du scénario pédagogique.
La troisième et dernière étape consiste à mettre en
relation les ressources du scénario pédagogique avec les
ressources de jeux en se basant sur le modèle de jeu.
Figure 4 • Principe du
générateur de scénarios
Dans les sous-sections suivantes, nous présentons le principe de
fonctionnement de chacune de ces trois étapes ainsi que le
mécanisme de mise à jour du profil.
5.1. Génération de scénario conceptuel
Dans un premier temps, l’expert du domaine alimente le système
par des connaissances du domaine et des profils utilisateurs (dans certains
domaines d’application, le profil peut être défini par
l’utilisateur lui-même). Durant chaque session, l’utilisateur
sélectionne les objectifs qu’il souhaite atteindre. Il s’agit
d’un certain nombre de concepts cibles parmi l’ensemble des
concepts de la première couche. En fonction de ces objectifs et du profil
de l’utilisateur, le générateur crée un
scénario conceptuel.
Il s’agit de sélectionner les concepts du domaine, et leurs
niveaux respectifs, qui satisfassent la liste des concepts cibles Concept-cibles = {<concept-ciblei,
niveau-ciblei>}. Pour chaque concept cible concept-ciblei de cette liste, le générateur
compare le niveau cible (niveau-ciblei) avec le niveau de
l’utilisateur pour ce même concept. Si le niveau de
l’utilisateur est supérieur à celui du niveau requis, le
générateur ignore le concept concept-ciblei puis
traite le concept suivant concept-ciblei+1. Dans le cas
contraire, il détermine l’ensemble des concepts en relation avec le
concept concept-ciblei. La sélection de ces concepts
est définie en fonction du type de relation qui les lie avec concept-ciblei. En effet, nous avons défini pour chaque type de relation, une stratégie de sélection. Par
exemple, si l’utilisateur choisit le concept cible A et que ce dernier est
en relation de type prérequis avec un autre concept B
(prérequis (B, A)), alors le générateur va
vérifier si l’utilisateur maitrise suffisamment le concept B. Si ce
n’est pas le cas, il va l’ajouter dans le scénario
conceptuel.
Une fois que l’algorithme traite tous les concepts de la liste Concepts-cibles, il retourne un scénario conceptuel
répondant aux profil et objectifs de l’apprenant. Ce
scénario est ensuite envoyé au générateur de
scénario pédagogique. Le principe de fonctionnent de dernier est
présenté dans la section suivante.
5.2. Génération de scénario pédagogique
Le rôle du module «générateur de scénario
pédagogique » est de sélectionner pour chaque
concept du scénario conceptuel une ou plusieurs ressources
pédagogiques appropriées en tenant compte du module de
présentation, des connaissances d’adaptation et du profil de l’utilisateur. Le rôle du module de
présentation est d’organiser les ressources pédagogiques en
fonction de leurs types. Les connaissances d’adaptation, basées sur
un système à base de traces, permettent de fixer le niveau de
difficulté de chaque ressource pédagogique. Le profil de
l’utilisateur contient les compétences de l’utilisateur pour
les différents concepts du domaine ainsi que l’historique de ses
interactions stockées dans une base de traces.
Formellement, pour chaque concept ci du scénario
conceptuel, le générateur recherche les ressources
pédagogiques avec lesquelles ci est en relation et dont
le type correspond au modèle de présentation. Si
plusieurs ressources y existent, il sélectionne la ressource la moins
utilisée par l’utilisateur. Pour cela, il consulte les traces
d’interaction de l’utilisateur. Pour chaque ressource
pédagogique sélectionnée, l’algorithme fixe les
valeurs de ses paramètres à partir des connaissances
d’adaptation. Ces dernières sont représentées sous
forme de règles de la forme :
si ({compétence-concepti OP valeur}i=<N) alors {<paramJ=valeurJ> j<=M}
Où compétence-concepti est la
compétence de l’apprenant concernant le concepti, OP est un opérateur de comparaison (<, ≤, >, ≥,
=, !=), N est la cardinalité de Concepts-relation de
la ressource (correspond au nombre de concepts en relation avec la ressource
pédagogique) et M est la cardinalité des Paramètres de la ressource (correspond au nombre de
paramètres de la ressource pédagogique).
5.3. Génération de scénario de jeu
Le scénario pédagogique est, ensuite, envoyé au module
« générateur de scénarios de jeu ». Le
rôle de ce module est d’associer à chaque ressource
pédagogique une ou plusieurs ressources du jeu en se basant sur le
modèle du jeu sérieux.
Le choix de la ressource du jeu peut prendre en compte les
préférences de l’utilisateur et son historique.
Durant l’interaction entre l'utilisateur et le jeu, toutes les actions
de l'utilisateur sur les objets du jeu et les ressources pédagogiques
sont stockées dans des traces. Ces traces vont permettre au
générateur de faire évoluer le profil de
l’utilisateur en fonction de ses performances. Dans la section suivante,
nous présentons les mécanismes de mise à jour du
profil.
5.4. Traces d’interaction et mise à jour des connaissances
En plus des informations générales de l’utilisateur (nom,
prénom, date de naissances, organisation, etc.), le profil de
l’utilisateur est caractérisé par un ensemble de
propriétés de la forme <attribut, valeur> où attribut correspond à un concept du domaine et valeur au
niveau de maîtrise de l’utilisateur. Le profil contient aussi les traces d’interaction laissées par l’utilisateur.
D’une manière générale, une trace est
définie comme un ensemble d’observés temporellement
situés (Clauzel et al., 2011).
Les observés représentent les actions de l’utilisateur sur
l’environnement informatique. Dans notre contexte, une trace
représente l’activité de l’utilisateur sur un
scénario de jeu. Formellement, une trace T est représentée
comme suit :
T=< date-début, date-fin, méta-données,
o1, o2... on>
- date-début et date-fin sont la date et
l’heure de début et de fin de la trace respectivement ;
- méta-données : le modèle de
présentation et les objectifs pédagogiques de la
session ;
Chaque action de l’utilisateur sur une ressource du jeu est
représentée par un observé dans la trace. Formellement, un
observé oi est caractérisé par les
propriétés suivantes :
- Ressource du jeu : la ressource du jeu avec laquelle
l’utilisateur a interagi ;
- Ressource pédagogique : la ressource
pédagogique en relation avec la ressource du jeu ;
- Concept : le concept avec lequel la ressource
pédagogique est en relation ;
- Réponse de l’apprenant (optionnelle) : concerne
les ressources pédagogiques de type un test. Cette
propriété contient la réponse de
l’utilisateur ;
- Temps de réponse (optionnel): c’est la
durée entre la présentation de la ressource pédagogique, de
type test, et la réponse de l’apprenant ;
- Evaluation de la réponse utilisateur : Il
s’agit d’une fonction qui attribue une valeur (∈ [0,1])
à la réponse de l’utilisateur.
Dans les sous-sections suivantes, nous présentons le principe de mise
à jour du profil et des connaissances du domaine à partir des
traces. L’article (Hussaan & Sehaba, 2014) détaille notre approche de mise à jour à partir de
trace.
5.4.1. Mise à jour du profil
La mise à jour du profil de l’utilisateur se fait en fonction de
ses performances sur les ressources de type test. Le processus de mise
à jour repose sur trois étapes : (1) évaluation de la
réponse de l’utilisateur, (2) mesure de l’impact de la
réponse de l’utilisateur sur les concepts en relation avec la
ressource pédagogique en questions, puis (3) propagation de
l’information dans le réseau des concepts.
Durant la première étape, le système évalue la
réponse de l’utilisateur, sur les ressources de type test, en
prenant en compte le temps de réponse. Ensuite, il s’agit de
calculer l’impact de cette réponse sur les concepts auxquels la
ressource pédagogique est liée. Pour cela, le système prend
en compte l’évaluation de la réponse, calculé dans la
première étape, et le niveau de difficulté de la ressource.
La troisième étape consiste à propager
l’information dans le réseau de concepts à travers les
fonctions de dépendance FType. Rappelons que FType est une fonction qui permet de calculer les
dépendances entre les concepts cibles CTo et leur
concept source CFrom.
5.4.2. Mise à jour des connaissances du domaine
La mise à jour des connaissances du domaine consiste à ajouter
ou supprimer des concepts ou des relations à partir des traces
d’interaction. Pour cela, le principe de notre méthode,
détaillée dans (Hussaan & Sehaba, 2014),
est d’analyser les éléments observés des traces en
utilisant une méthode de classification basée sur trois
étapes :
1. Préparation des données : les données sont
représentées dans une matrice où les lignes correspondent
aux ressources pédagogiques, de type test, et les colonnes
correspondent aux évaluations des réponses de l'utilisateur.
Rappelons que la fonction d’évaluation retourne une valeur
appartenant à [0, 1].
2. Choix d'une fonction de distance: Il s'agit de sélectionner une
fonction de similarité permettant de mesurer la proximité des
évaluations des réponses utilisateurs. Nous avons utilisé
la distance de Manhattan.
3. Détermination du nombre de classes : afin de déterminer le
nombre de classes à partir des traces. Nous avons utilisé
l’algorithme K-Means avec différentes valeurs de K.
Le résultat de la classification peut permettre de créer de
nouveaux concepts ou d’en supprimer d’autres. La mise à jour
effective des connaissances ne peut se faire que sur validation de
l’expert.
6. Illustration : Modélisation des connaissances du projet
CLES
Rappelons que le jeu Tom O’connor et la
statuette sacrée, développé dans le cadre du projet CLES,
porte sur l’évaluation et la rééducation des troubles
cognitifs. Pour cela, ce jeu propose à l’utilisateur un ensemble de
mini-jeux de différents niveaux de difficulté où chaque
mini-jeu est ciblé sur une lacune bien précise. Pour lancer les
mini-jeux, l’utilisateur doit interagir avec certains objets du jeu.
Dans notre modèle de connaissances, les objets du jeu sont
représentés par des ressources du jeu. Les mini-jeux sont
représentés par des ressources pédagogiques et les
fonctions cognitives sont représentées par des concepts du
domaine.
Dans les prochaines sections, nous présentons la modélisation
des concepts et des ressources pédagogiques du projet CLES.
6.1. Modélisation des concepts
Le tableau 2 donne une description des fonctions cognitives du projet. Chaque
fonction peut avoir plusieurs sous-fonctions. Ainsi, nous avons
créé pour chaque fonction ou sous fonction un concept du domaine.
Ces concepts ont été ensuite mis en relations selon les types
suivants : prérequis, fait-partie, type-de et parallèle. Les
sémantiques de ces relations ont été
présentées dans la section 4.
Fonction
|
Description
|
Sous-fonctions
|
Perception
|
C’est la capacité d’interprétation des signaux de
l’environnement que l’individu perçoit avec ses sens.
|
visuelle, auditive, schéma corporel.
|
Attention
|
C’est la capacité de se concentrer sur quelque chose ou
quelqu’un pour recueillir des informations, les traiter puis effectuer une
tâche spécifique (Schacter et al., 2010).
|
Visuelle (barrage, séquence et complétude), auditive,
partagée.
|
Mémoire
|
la capacité d'absorber, de stocker et réutiliser des
informations (Schacter et al., 2010).
|
Visuelle, auditive, verbale, rappel.
|
Langage oral
|
C’est un système de symboles oraux utilisés par deux ou
plusieurs personnes à des fins de communication.
|
Réception, expression, compréhension, lexique, phonologique,
morphosyntaxe, dénomination évocation, fluence.
|
Langage écrit
|
C’est la capacité à récupérer et organiser
des symboles orthographiques de la mémoire et de transcrire cela...
|
Lecture, orthographe.
|
Raisonnement logique
|
C’est la capacité de raisonner à partir des jugements des
opérations concrètes de propositions verbales ou non verbales (Schmeichel et al., 2003).
|
|
Visuo-spacial
|
C’est la capacité d'explorer le champ visuel, pour
représenter l'espace, la coordination œil et la main, imaginez les
liens entre les éléments de l'environnement, et de se
déplacer dans le temps et dans l'espace.
|
|
Compétences transversale
|
C’est le jugement, pragmatique, inférence, planification,
vitesse de traitement de l’information.
|
|
Tableau 2 • Fonctions cognitives du
projet CLES
La figure 5 montre les concepts de base (correspondant aux huit fonctions
cognitives) et les relations, de type prérequis, qui existent en
eux. On peut distinguer trois niveaux de concepts. Le premier niveau contient
les concepts de base, à savoir : perception, attention et
visuo-spatial. Le deuxième niveau contient les concepts langage oral et
mémoire qui nécessitent des compétences de tous les
concepts de base. Le troisième niveau contient le langage écrit et
le raisonnement logique.
Figure 5 • Les concepts de base du
projet CLES
6.2. Modélisation des ressources pédagogiques
Nous avons créé 91 ressources que nous avons mises en relation
avec les concepts de la première couche. Les figures 6 et 7 montrent une
partie des concepts perception et mémoire ainsi que leurs
ressources pédagogiques associées.
Le concept perception est en relation, de type fait-partie, avec ses trois sous-concepts (visuelle, auditive et schéma corporel).
Chacun de ces sous-concepts est en relation avec une ou plusieurs ressources
pédagogiques. Par exemple, la perception visuelle (représentée par le concept Visuel en relation avec le
concept Perception) est en relation avec les ressources
représentant les mini-jeux complément d’images, discrimination et objets entremêlés à
identifier. Cette relation exprime le fait que ces mini-jeux permettent
d’évaluer et de stimuler la perception visuelle.
Le concept mémoire contient plusieurs sous-concepts dont
certains possèdent des sous-sous-concepts (par exemple :
mémoire->auditive->séquentiel). Toutes les relations entre
le concept mémoire et ses sous-concepts sont de type fait-partie.
Comme la perception, chaque concept de la première couche est
appréhendé par une ou plusieurs mini-jeux
représentés dans le modèle par des ressources
pédagogiques.
Figure 6 • Modélisation du
concept « perception »
Figure 7 • Modélisation du
concept « mémoire »
7. Evaluations
Afin de valider nos contributions, nous avons
développé GOALS. GOALS acronyme de Generator Of Adaptive
Learning Scenarios, est une plate-forme en ligne permettant de
générer des scénarios de jeu adaptés à chaque
utilisateur. Pour cela, GOALS permet à l’expert de
représenter les connaissances du domaine suivant les modèles que
nous avons présentés au-dessus. Les connaissances dans GOALS sont
organisées sous forme de projet. Un projet, relatif à un
domaine d’apprentissage donné, contient les connaissances du
domaine (modélisées en trois couches : concepts, ressources
pédagogiques, ressources du jeu), un ensemble d’apprenants
caractérisés par des profils, des modèles de
présentation et des connaissances d’adaptation.
L’objectif des évaluations est, d’une part, de valider les
modèles de notre générateur de scénarios,
d’autre part, d’étudier l’impact des scénarios
générés par GOALS sur les apprenants. Nous avons ainsi
défini deux protocoles d’évaluation que nous avons mis en
œuvre dans le cadre de deux expérimentations sur le terrain.
7.1. Validation du générateur
7.1.1. Protocole d’évaluation
L’objectif de cette première évaluation est de
déterminer si :
- le générateur de scénarios fonctionne
correctement. Il s’agit de valider les stratégies de
sélection que nous avons définies pour les différents types
de relation.
- les connaissances que nous avons introduites dans le
système sont correctes.
Pour cela, notre protocole d’évaluation est basé sur une
méthode comparative qui consiste à comparer, pour les mêmes
profils et objectifs pédagogiques, les scénarios
créés manuellement par l’expert avec les scénarios
générés par GOALS. Cette évaluation a
été menée avec un expert orthophoniste, partenaire du
projet CLES.
Nous avons limité notre étude à la comparaison des
scénarios conceptuels et pédagogiques. Les scénarios du jeu
sérieux n’ont pas été considérés, car
dans le jeu Tom Occonor l’association entre les ressources
pédagogiques et les objets du jeu est faite d’une manière
arbitraire.
La figure 8 montre les différentes étapes du protocole
d’évaluation. Dans un premier temps, (1) l’expert
définit des profils types et fixe pour chacun de ces profils un certain
nombre d’objectifs éducatifs. Ensuite, pour chacun de ces cas,
l’expert crée manuellement un scénario (conceptuel et
pédagogique). Ce dernier est ensuite comparé, par l’expert,
avec le scénario généré par GOALS. Durant cette
étape de comparaison (2), l’expert est filmé et est
invité à verbaliser ses pensées.
A l’issue de cette comparaison, deux cas se présentent : soit
l’expert estime que les scénarios sont similaires, soit il les juge
différents. Dans le premier cas (3), le protocole prévoit une
évaluation avec des utilisateurs sur le terrain.
L’intérêt de cette évaluation est de
déterminer, à partir de l’analyse des traces
d’interaction, si les scénarios générés par le
système sont adaptés aux profils des utilisateurs.
Figure 8 • Expérimentation
1 : Protocole d’évaluation
Dans le cas où l’expert juge les scénarios
différents, on modifie les stratégies de sélection des
concepts et/ou les connaissances du domaine, puis on réitère le
protocole jusqu’à ce que les scénarios soient similaires.
7.1.2. Expérimentation et résultats
Avec l’aide de l’expert, nous avons défini les
connaissances du projet CLES. Pour la couche concepts du domaine, nous avons
créé 40 concepts et 44 relations. Pour la couche ressources
pédagogiques, 91 mini-jeux ont été
développés.
Ensuite, nous avons créé douze profils :
Age\profil |
Sans déficience |
Déficience de la perception |
Déficience de la mémoire |
Déficience du langage écrit |
8 ans |
Profil 1 |
Profil 2 |
Profil 3 |
Profil 4 |
12 ans |
Profil 5 |
Profil 6 |
Profil 7 |
Profil 8 |
14 ans |
Profil 9 |
Profil 10 |
Profil 11 |
Profil 12 |
Tableau 3 • Expérimentation
1 : Profils des participants
Pour chacun de ces profils, l’expert a défini les valeurs des
différents concepts et a fixé certains objectifs
thérapeutiques. Ensuite, nous avons introduit les connaissances et les
profils dans GOALS, puis généré pour chaque cas (profil +
objectif) un scénario. En parallèle, l’expert a
créé manuellement pour chacun de ces cas un scénario. Par
la suite, nous avons demandé à l’expert de comparer les deux
types de scénarios (expert / système).
Le tableau 4 montre deux exemples : le premier concerne des
scénarios, GOALS et expert, destinés à un enfant
âgé de 8 ans présentant une déficience de perception.
Les scénarios du deuxième exemple concernent un enfant de 14 ans
ayant des troubles de la mémoire. Dans le premier exemple, l'expert a
constaté que les deux scénarios (GOALS et experts) sont
similaires. En effet, soit les mini-jeux sélectionnés sont
identiques (par exemple, Bruit et Logatome), soit ils portent sur
la même fonction cognitive (par exemple, Objets
entremêlés, Compléments d’images et Discrimination qui concernent la perception visuelle). En outre, les
niveaux de difficulté des mini-jeux, GOALS et expert, sont identiques.
Exemple 1 |
Exemple 2 |
Profil
• Age de l’enfant : 8 ans
• Déficience de perception
• Objectif d’apprentissage : Perception |
Profil
• Age de l’enfant : 14 ans
• Déficience de mémoire
• Objectif d’apprentissage : mémoire |
GOALS |
Expert |
GOALS |
Expert |
Mini-jeu (niveau) |
Mini-jeu (niveau) |
Mini-jeu (niveau) |
Mini-jeu (niveau) |
Objets entremêlés (4) |
Complément d’images (4) |
Identification Grille (7) |
Reproduction grille (5) |
Complément d’images (4) |
Discrimination (4) |
Disparition (7) |
Identification (5) |
Bruit (6) |
Bruit (6) |
Mémoire verbale Support Visuel (8) |
Mémoire verbale - Visuel auditive (5) |
Logatome (6) |
Logatome (6) |
Empan Reproduction - A l'endroit (8) |
Mémoire verbale - Support visuel (5) |
Tableau 4 • Exemples de comparaison
de scénarios
Dans le deuxième exemple, les mini-jeux des deux scénarios sont
similaires, néanmoins les niveaux de difficulté sont
différents.
Figure 9 • Interface
d’Advene
Durant toute l’expérimentation, l’expert a
été filmé afin d’analyser ses réalisations a
posteriori. Ainsi, nous avons analysé environ 2 heures de vidéo en
utilisant Advene4(voir la figure 9).
Cette analyse nous a permis de détecter quelques erreurs concernant les
connaissances et le générateur. Nous avons ainsi ajouté un
nouveau concept, 5 relations entre concepts et un nouveau type de relation.
Concernant le fonctionnement du générateur, et comme le montrait
l’exemple 2 du tableau 4, les niveaux de difficulté de certains
mini-jeux issus du générateur GOALS ne correspondaient pas aux
niveaux des mini-jeux fixés par l’expert. L’origine de cette
erreur venait du fait que l’algorithme adopté par le
générateur ne prenait en compte que le profil de
l’utilisateur alors que l’expert prenait en compte
l’écart entre le profil et les objectifs de la session. Cette
erreur a été corrigée.
7.2. Impact des scénarios sur les apprenants
7.2.1. Protocole d’évaluation
Afin d'étudier l'impact des scénarios GOALS sur les apprenants,
nous avons défini un protocole (voir la figure 10) basé sur deux
groupes d'apprenants (A et B) et quatre étapes : pré-test, test,
post-test et analyse de résultats.
Figure 10 • Expérimentation
2 : Protocole d’évaluation
Durant la première étape, un même questionnaire est
soumis à tous les apprenants (groupes A et B). Ce pré-test permet
de connaître le niveau des apprenants. Durant la deuxième
étape, les apprenants du groupe A utilisent des scénarios
générés par
GOALS et les apprenants du groupe B utilisent des activités
d'apprentissage classiques. La troisième étape consiste à
soumettre un deuxième questionnaire à tous les apprenants (groupes
A et B). La quatrième étape consiste à comparer les
résultats des questionnaires 1 et 2 afin d'étudier la progression
des apprenants des deux groupes. Naturellement, les deux questionnaires, des
étapes une et trois, et le contenu des activités d'apprentissage
de l'étape deux doivent être cohérents avec le domaine
d'apprentissage (stimulation cognitive dans notre contexte).
Durant toute l'expérimentation, les apprenants ont été
filmés afin d'analyser leurs réalisations a posteriori.
7.2.2. Expérimentation et résultats
Nous avons mené une expérimentation avec huit participants, en
situations de handicap, membles de l’association Handica
Réussir5. Avec l’aide des
responsables de cette association, nous avons organisés les participants
en deux groupes relativement équivalents en terme de compétences
et capacités. Le tableau 5 montre un aperçu des profils de ces
participants.
Participants |
Age |
Sexe |
Situation de handicap |
|
Participant 1 |
30 |
M |
Dysphasie |
Groupe A |
Participant 2 |
26 |
M |
Epilepsie |
Participant 3 |
21 |
F |
Syndrome Asperger |
Participant 4 |
21 |
M |
Physique |
Participant 5 |
21 |
F |
Multi-dys |
Groupe B |
Participant 6 |
16 |
M |
Troubles attentionnels |
Participant 7 |
17 |
M |
Syndrome Asperger |
Participant 8 |
18 |
M |
Dyspraxie |
Tableau 5 • Expérimentation
2 : Profils des participants
Cette expérimentation a été focalisée sur trois
fonctions cognitives: perception, mémoire et raisonnement logique. Pour
chacune de ces fonctions, nous avons préparé les questionnaires
des trois étapes : pré-test, test et post-test. Nous avons
également introduit dans GOALS les connaissances du projet CLES et les
profils des apprenants avec l’aide d’un expert.
Durant l'étape de pré-test, les apprenants des deux groupes ont
répondu au même questionnaire. Durant l'étape de test, les
participants du groupe A ont utilisé les scénarios adaptatifs
générés par GOALS et les participants du groupe B ont
utilisé des activités d'apprentissage papier-crayons. Dans ce
dernier cas, les mêmes scénarios ont été fournis aux
participants du groupe B. Naturellement, les exercices papier-crayons sont de
même niveau des mini-jeux et portent sur les mêmes fonctions
cognitives. La seule différence est qu’elles ne sont pas
paramétrables/adaptables. La figure 12 un exemple d’un exercice sur
la perception.
Figure 11 • Déroulement de
l’expérimentation 2
Figure 12• Exemple d’un
exericie sur la perception
Durant l'étape de post-test, les participants des deux groupes ont
répondu aux mêmes questionnaires.
Le tableau ci-après montre les résultats des questionnaires
pré et post-tests sur la perception. Dans l’ensemble, ces
résultats montre que la progression du groupe A est plus importante que
celle du groupe B. Néanmoins, il est prématuré
d’affirmer que cet écart s’explique par les seuls jeux. Il
faudrait plusieurs d’autres expérimentations, dans la durée,
pour démontrer cela.
Perception |
Gr |
Participants |
Pre-test |
Moyenne |
Ecart-type |
Post-Test |
Moyenne |
SD |
Group A |
P1 |
4 |
6,25 |
2,63 |
10 |
8,875 |
1,03 |
P2 |
5 |
7,5 |
P3 |
6 |
9 |
P4 |
10 |
9 |
Group B |
P5 |
7 |
8 |
1,41 |
10 |
8,5 |
1,22 |
P6 |
7 |
7,5 |
P7 |
8 |
7,5 |
P8 |
10 |
9 |
Tableau 6 • Expérimentation
2 : résultats de l’évaluation
En plus des deux expérimentations, la dernière version de
GOALS, antérieure à ces expérimenations, a
été testé par douze orthophonistes praticiens. Les retours
que nous avons obtenu, suite à ces tests, sont très positifs dans
l'ensemble, en particulier sur le principe de construction de connaissances
(domaine, profils...) et sur la génération de scénarios.
Néanmoins, les orthophonistes ont trouvé une certaine
difficulté à manipuler l’éditeur de connaissances
lorsque ces dernières sont assez denses (voir l’exemple de la
figure 12 suivante - A).
Figure 12• Exemple d’un
exericie sur la perception
Pour remédier à ce problème, nous avons proposé
une visualisation interactive multi-échelle. Le principe consiste
à visualiser que les concepts de haut niveau (les 12 concepts de base du@
projet CLES par exemple). Si l'utilisateur veut visualiser les sous-concepts
d'un concept donnée, il doit clic dessous (voir la figure 12 - B).
8. Conclusion et perspectives
Ce travail de recherche s’inscrit dans le
cadre du projet CLES dont l’objectif est de développer un jeu
sérieux adaptatif pour l’évaluation et la
rééducation des troubles cognitifs. Dans cet article, nous avons
présenté un système permettant de personnaliser le parcours
de jeux à chaque patient suivant ses capacités et ses
compétences. L’architecture de ce système organise les
connaissances en trois couches : concepts du domaine, ressources
pédagogiques et ressources de jeux. Cette architecture permet au
système d’être utilisé dans différents domaines
d’application et jeux sérieux.
Les traces sont utilisées pour mettre à jour le profil de
l'utilisateur. Le profil est défini par un ensemble de
propriétés de la forme attribut valeur où chaque attribut
correspond à un concept du domaine et sa valeur correspond à la
compétence de l'apprenant concernant ce concept. Notre approche de mise
à jour consiste à propager l'information dans le graphe de
concepts à partir des performances de l'apprenant.
Afin de valider nos modèles, nous avons proposé un protocole
d’évaluation qui permet de comparer, pour les mêmes cas, les
scénarios générés par le système avec les
scénarios créés par l’expert du domaine. Ce protocole
a été mis en œuvre avec un expert orthophoniste dans une
expérimentation qui nous a permis de valider les connaissances du domaine
du projet CLES et le fonctionnement du générateur. Les
difficultés que nous avons rencontrées portaient sur la
détermination de l’origine des erreurs lorsque l’expert
trouvait les deux types de scénarios (expert/système)
différents : s’agit-il d’un problème au niveau des
connaissances du domaine, de la stratégie adoptée par le
générateur ou les deux à la fois. Pour contourner cette
difficulté, nous avons étudié les trois possibilités
à chaque fois que la question était posée. Nous avons
également mené une deuxième expérimentation afin
d’étudier l’impact des scénarios GOALS sur
l’apprentissage des apprenants. Les premiers résultats sont
positifs. Il est néanmoins prématuré de tirer des
conclusions définitives. Nous souhaitons mener d’autres
expérimentations avec un grand nombre d’utilisateurs, dans
d’autres contextes, afin de confirmer ces résultats.
BIBLIOGRAPHIE
BIELIKOVÁ, M.,
DIVÉKY, M., JURNEČKA, P., KAJAN, R., & OMELINA, L. (2008).
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A
props des auteurs
Karim Sehaba (http://liris.cnrs.fr/ksehaba/) est
maître de conférences en informatique, habilité
à diriger des recherches, de l'université Lumière Lyon 2,
membre du laboratoire LIRIS (CNRS, UMR 5205). Ses travaux de recherche portent
sur les serious games adaptatifs. Dans ce cadre, Karim Sehaba s'intéresse
à l'analyse du comportement de l'utilisateur à partir des traces
d'interaction, l'extraction interactive de connaissances et à
l'adaptation au contexte d'usage. Karim Sehaba a mené plusieurs projets
pluridisciplinaires sur les environnements informatiques pour l'apprentissage
humain et l'assistance aux personnes en situation de handicap.
Aarij Mahmood Hussaan est maître de
conférences en informatique, de l'université IQRA, Karachi,
Pakistan. Ses travaux de recherche portent sur les systèmes intelligents
appliqués aux environnements Informatiques pour l’apprentissage
humain et les serious games en particulier. Aarij s’intéresse
également à l’analyse du comportement à base de data
Mining.
1 Adaptive Educational Interactive
Narrative System
2 Smart Multi-purpose Interactive
Learning Environment
3 Project Integrating eXperience in
Distance Learning
4 Advene
(http://liris.cnrs.fr/advene/) est un outil d’analyse vidéo à
base d’annotations.
5 http://www.handicareussir.com
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