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Usages d’Internet à l’école selon le
regard des élèves. Pratiques d’intégration,
paradigmes pédagogiques et motivation scolaire
Pierre-François COEN, Jeanne REY, Isabelle MONNARD, Laurent JAUQUIER (Service Recherche et Développement, Haute école pédagogique de Fribourg, Suisse)
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RÉSUMÉ : Cette
recherche analyse les usages pédagogiques d’Internet à
l’école à partir du regard des élèves de
différents degrés scolaires (6 – 18 ans) et de deux groupes
linguistiques (francophones, germanophones) dans le canton de Fribourg (Suisse).
L’étude investigue la fréquence du recours à Internet
en classe et son orientation pédagogique (centrée sur
l’apprentissage ou sur l’enseignement), ainsi que les effets de ces
variables sur la motivation scolaire. Les résultats font apparaître
des différences du recours à Internet en fonction des
degrés, des filières, de la discipline et de la langue
d’enseignement. Ils démontrent également un effet positif de
la modalité pédagogique centrée sur l’apprentissage
sur la motivation des élèves.
MOTS CLÉS : intégration
des TIC, Internet, regard des élèves, apprentissage versus
enseignement, orientation pédagogique, motivation scolaire.
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ABSTRACT : This
research investigates the use of Internet in classrooms based on the perception
of students (6-18 years old) from two linguistic groups (French and German) in
the State of Fribourg (Switzerland). This study analyzes the frequency of
Internet uses in the classroom, their pedagogical orientation (learning vs.
teaching centered), as well as their effects on students’ learning
motivation. Results show an effect of school level, school track, school subject
and language group on the frequency of Internet use in the classroom.
Furthermore, in the context of learning tasks with information and communication
technologies (ICT), this study demonstrates a positive effect of teaching
centered pedagogical orientation on students’ learning motivation.
KEYWORDS : ICT
integration, Internet, students’ perception, learning vs. teaching
orientation, motivation for learning |
1. Introduction
Il y a plus de 20 ans qu'est
né Internet. L’avènement de ce réseau mondial et les
possibilités nouvelles qu’il offrait par ses nombreuses
applications (recherche d’informations, messageries électroniques,
navigation sur des milliers de sites, partage de fichiers, etc.) ont
indéniablement redessiné la place des technologies de
l’information et de la communication (TIC) en milieu scolaire.
Témoins de ce regain d’intérêt, les discours
populaires et médiatiques (Berney et Pochon, 2000) ainsi que les recommandations officielles des gouvernements de
l’époque (Vedel, 1996) ont
incité les collectivités à consentir d’importants
investissements en faveur de l’introduction massive de l’ordinateur
et d’Internet dans les écoles. Or, deux décennies plus tard,
à l’heure où des questions apparaissent sur le
bien-fondé de ces efforts, il semble souhaitable de s’interroger
sur le type de recours pédagogique à ces « autoroutes de
l’information et de la communication ». Cette posture
paraît d’autant plus légitime qu’un bon nombre de
travaux scientifiques démontrent que les TIC peinent à tracer la
voie qui leur était promise dans l’école
d’aujourd’hui. D’une part, et au regard des moyens mis en
œuvre1, les TIC sont encore
sous-exploitées par les élèves au sein des classes (DeBell et Chapman, 2006) ; (European Comission, 2006) ; (Henessy et al., 2005).
D’autre part, si les progrès techniques induisent une
évolution rapide des technologies, l’expérience de ces
dernières décennies montre que les pratiques enseignantes
évoluent quant à elles beaucoup plus lentement (Scardamalia, 2001).
L’enjeu de notre recherche se situe là et se donne pour mission
d’analyser les pratiques d’intégration des TIC, et en
particulier le recours à Internet, à partir d’une
étude conduite dans les classes du canton de Fribourg (Suisse). Cette
analyse comporte trois volets : une mesure des pratiques effectives
d’intégration ; une analyse des paradigmes pédagogiques
de leur intégration, ainsi qu’un modèle causal de la
motivation des élèves dans le cadre de l’apprentissage avec
les TIC. La spécificité de cette recherche réside notamment
dans son parti pris méthodologique : analyser
l’intégration des TIC à partir du regard des
élèves, alors même que cette intégration est
essentiellement orchestrée par l’enseignant. En interrogeant les
élèves, nous contournons ainsi partiellement l’effet de
désirabilité sociale associée à
l’intégration des TIC à l’école.
Dans un premier temps, nous reviendrons sur quelques éléments
théoriques concernant l’utilisation des TIC dans les classes, puis
nous donnerons les éléments de contexte de notre étude
ainsi qu’une description détaillée de notre instrument.
Après une présentation des principaux résultats
(intégration effective, paradigme dominant et motivation des
élèves), nous terminerons par une synthèse reprenant
quelques aspects qui nous semblent importants à discuter à la
suite de cette étude.
2. Cadrage théorique
2.1. Intégrer les technologies : le pari des années
2000
Dès les débuts de leur introduction,
les TIC ont séduit car, au-delà de leurs aspects technologiques,
elles semblaient présenter des caractéristiques susceptibles de
favoriser les apprentissages des élèves ou de développer
des compétences spécifiques - voir par exemple les travaux autour
de l’usage de LOGO - (Gurtner et Retschitzki, 1991).
Cependant, dès les années 2000, et après les relatives
déceptions liées à cette première approche,
d’autres travaux (Karsenti et al., 2001) ; (Charlier et Peraya, 2003) ; (Coen, 2007) ont
suggéré que l’intégration des TIC, en vue de
favoriser l’apprentissage des élèves, ne pouvait se
concevoir sans une transformation des pratiques et des modes
d’enseignement (Tardif, 1999).
Par là même, les technologies, au-delà de leur simple
condition d’outils didactiques, constitueraient ainsi l’occasion
d’innover et de transformer les pratiques enseignantes (Karsenti et al., 2002) ; (Charlier et al., 2003).
Ce virage amorcé dès le début des années 2000 est
déterminant dans la mesure où il a conditionné de
manière radicale les dispositifs de formation mis en place à ce
moment-là (Coen, 2007) ; (Peraya et al., 2008).
Dès lors, les institutions de formation n’ont eu de cesse de
privilégier des approches intégrant les apports des
théories constructivistes, associés à des pédagogies
actives et collaboratives (Lebrun, 2004) ; (Crinon et Legros, 2002).
Des chercheurs se sont interrogés sur les dispositifs les plus opportuns
à mettre en place auprès des formateurs d’enseignants pour
garantir, via des stratégies privilégiant l’isomorphisme,
une sorte de modelage des générations futures d’enseignants
ou des prises en charge plus personnalisées (Baumberger et al., 2008).
S’agissant des volontés politiques en matière
d’intégration des TIC, Guihot (Guihot, 2002) et
Charlier & Coen (Charlier et Cohen, 2008) relèvent qu’elles prônent, elles aussi, des approches
centrées sur l’apprenant, héritées des mêmes
théories. A ce jour, une relative unanimité s’est faite
autour de l’idée d’associer à l’innovation
technique une réelle innovation pédagogique.
2.2. Quelle pratique dans les classes
Partant de là, se pose la question de savoir si, dans les pratiques
effectives des classes, les usages des TIC rejoignent à la fois les
directives politico-éducatives et les modèles pédagogiques
préconisés par les chercheurs et les responsables des formations.
En d’autres termes, l’innovation technologique qui s’est
traduite par l’équipement des écoles et leur connexion au
réseau Internet s’est-elle accompagnée d’une
innovation sur le plan pédagogique, c’est-à-dire dans la
manière d’utiliser ces nouvelles ressources techniques ? Rien
n’est moins sûr. Un inventaire produit par le
CTIE2 (Steiner et Delacrétaz, 2009) montre qu’en Suisse, la plupart des cantons ont des concepts de formation
des enseignants en la
matière3 et que ces derniers ont quasiment tous bénéficié de
formation en TIC. Cependant, au-delà de ces aspects de politique
éducative, une recherche, menée dans le canton de Fribourg (Schumacher et Coen, 2008),
a démontré que l’innovation techno-pédagogique
n’en était encore qu’à ses débuts après
six ans de mise en place d’une politique de formation très
injonctive. Les résultats de cette étude montrent, entre autres,
que des différences importantes existent notamment entre hommes et
femmes, entre degrés d’enseignement et, plus significativement
encore, entre usagers experts en technologies et
novices4.
D’autres recherches mettent en évidence l’importance de
certains facteurs qui déterminent l’intégration des TIC
notamment le milieu social dans lequel se trouvent les écoles (Larose et al., 2002) ou les attitudes motivationnelles des enseignants (Rey et Coen, 2013).
Par ailleurs, un grand nombre d’expériences, pour la plupart
innovantes au niveau technologique (Col et Fenouillet, 2007),
ne prennent pas - ou rarement de manière explicite - les dimensions en
lien avec l’innovation pédagogique. On en reste souvent à
l’implantation de campus virtuels, de plates-formes d’enseignement
à distance ou encore d’outils techniquement parfaits sans mettre en
place de véritables dispositifs de recherche susceptibles d’en
mesurer les effets à l’instar d’autres travaux (Paquelin et al., 2006) qui essaient de problématiser cette question. Ainsi donc, si certains
auteurs ont montré que le recours aux TIC peut faciliter des
démarches d’apprentissage constructivistes (Leask et Younie, 2001) ; (Zurita et Nussbaum, 2004) ; (Germain-Rutherford et Diallo, 2006),
d’autres récusent l’idée d’un changement de
paradigme par le seul fait de l’introduction d’une technologie (Kennewell et al., 2008),
aussi récente soit-elle (Audran, 2007).
Tout comme l’avait démontré en son temps Russel (Russell, 1999),
l’impact des TIC dans l’enseignement est loin de faire
l’unanimité. Peut-être est-ce dû au fait que nos
connaissances des pratiques effectives dans les classes sont encore lacunaires.
C’est là le point de départ de notre recherche qui
s’inscrit dans la volonté d’abord d’identifier les
pratiques scolaires en matière d’usages d’Internet et ensuite
de les caractériser au niveau pédagogique. Cette analyse est
effectuée à partir du regard des élèves
eux-mêmes et devrait constituer en soi un moyen de corroborer (ou non) les
constats faits auprès des enseignants dans une précédente
recherche (Coen et Schumacher, 2006a) ; (Schumacher et Coen, 2008).
3. Méthodologie
3.1. S’appuyer sur le regard des élèves
En matière d’intégration des TIC,
la majorité des recherches se basent sur les discours des enseignants sur
leurs propres pratiques (Deaudelin et al., 2005).
Souhaitant concentrer notre attention sur les modalités
d’intégration effectives tout en apportant un autre point de vue
que celui des enseignants, nous avons choisi de nous baser sur les perceptions
des élèves en les interrogeant sur les pratiques
d’utilisation des TIC telles qu’ils peuvent les vivre au sein de
leur classe. Dans ses travaux, Genoud (Genoud, 2004) a
mis en évidence plusieurs avantages à considérer le regard
porté par les élèves sur leur enseignant. Grâce
à leur nombre et aux longues périodes sur lesquelles se basent
leurs observations, les élèves possèdent une
expérience pleinement représentative susceptible
d’écarter l’effet cobaye imputable à la
présence ponctuelle et limitée dans le temps d’observateurs
externes (De Jong et Westerhof, 2001).
Par ailleurs, le recours à une telle méthodologie permet
également d’éviter le biais de désirabilité
sociale. En effet, les injonctions institutionnelles en faveur de
l’intégration des TIC peuvent modifier les déclarations des
enseignants sur leur propre pratique et refléter davantage leur besoin de
fournir des réponses socialement acceptables (Edwards, 1953) ; (Vella-Brodrick et White, 1997).
Enfin, l’addition des multiples points de vue des élèves
d’une même classe et leur incorporation dans des moyennes permet de
résister aux biais particuliers liés à l’un ou
l’autre d’entre eux.
3.2. Contexte et échantillon
Notre recherche s’est déroulée dans le canton de
Fribourg, région bilingue (français - allemand) de 250'000
habitants, située à l’ouest de la Suisse. Durant
l’année scolaire 2007-2008, 45'723 élèves y ont
été scolarisés, dont environ 70% en français et 30%
en allemand. Nous avons sélectionné 183 classes issues de
différents ordres d’enseignement. L’échantillonnage
s’est fait par stratification et nous a permis de solliciter 3’530
élèves. Profitant d’un taux de réponses valides
s’élevant à 85%, nous avons disposé d’un
échantillon effectif de 3’008 sujets. L’échantillon
considéré recouvre trois ordres d’enseignement :
l’école primaire (28.2%), le secondaire 1 (49.7%) et le secondaire
2 (22.1%). Pour des raisons pratiques, nous avons pris en compte les deux
dernières années de l’école primaires
(élèves de 11 à 13 ans) ; pour le secondaire 1, nous
avons sélectionné des élèves âgés de 14
à 15 ans provenant de trois filières
d’enseignement5 ; pour le
secondaire 2, les élèves, âgés de 16 à 20 ans
provenant des différents voies d’études habituellement
choisies par les adolescents de cet âge. Remarquons en outre que 72.3 % de
nos répondants fréquentent une classe dont la langue
d’enseignement est le français et 27.7 % une classe où
l’enseignement leur est dispensé en allemand, ce qui reflète
avec fidélité la situation dans la population de
référence. Le Tableau 1 récapitule ces différentes
données.
Ordre d’enseignement |
N |
% |
Langue d’enseignement |
Français |
Allemand |
Primaire |
849 |
28.2 |
263 g
274 f |
157 g
155 f |
Secondaire 1 |
Filière prégymnasiale (études longues) |
565 |
18.8 |
187 g
234 f |
66 g
77 f |
Filière générale (écoles professionnelles) |
676 |
22.4 |
242 g
236 f |
110 g
88 f |
Filière exigences de base |
255 |
8.5 |
122 g
93 f |
19 g
21 f |
Secondaire 2 |
663 |
22.1 |
212 g
311 f |
47 g
93 f |
Tableau 1 • constitution de
l’échantillon (g = garçons, f = filles)
3.3. Le questionnaire utilisé
Le questionnaire a été développé sous forme
électronique. Il est subdivisé en trois parties. La
première recueille des informations de nature sociodémographique
sur l’élève, son aisance vis-à-vis de
l’ordinateur et, à titre indicatif, quelques données sur
l’équipement informatique à disposition de sa classe (tel
qu’il le perçoit). La seconde porte sur trente-six usages
spécifiques des TIC et la fréquence à laquelle elles sont
intégrées par l’enseignant. Elle se présente sous la
forme de trente-six items invitant l’élève à situer,
pour chacun d’eux, la fréquence de l’usage sur une
échelle de Likert à six modalités allant de
« jamais » à « très
souvent ». La dernière partie du questionnaire s’attache
à caractériser les modalités pédagogiques dans
lesquelles s’inscrivent les pratiques d’intégration des TIC.
À cet effet, nous nous sommes appuyés sur les travaux de Dwyer (Dwyer, 1994) et
Tardif (Tardif, 1999) qui mettent en évidence plusieurs dimensions en lien avec deux paradigmes
pédagogiques : le paradigme d’enseignement,
orienté vers une logique instructiviste, et le paradigme
d’apprentissage, favorisant, quant à lui, une démarche
plus constructiviste. Les dimensions que nous avons investiguées sont
illustrées dans la Figure 1.
Figure 1 • Les sept dimensions investiguées dans
le modèle pour les deux paradigmes.
Pour situer le positionnement pédagogique des pratiques
d’intégration des TIC, tel que perçu par les
élèves, nous avons opérationnalisé ce modèle
par des questions permettant de tester ces sept dimensions. Nous inspirant des
vignettes de situations proposées par Coen et Schumacher (Coen et Schumacher, 2006b) dans une précédente recherche, nous avons imaginé de petits
scénarios présentant aux sujets onze situations de classe
intégrant les TIC. Chaque situation était composée de 9
à 13 questions. Considérant les deux paradigmes (enseignement et
apprentissage) davantage comme un continuum que comme deux positions
antinomiques, nous avons proposé aux sujets une échelle continue
au moyen de laquelle ils devaient situer l’attitude probable de leur
enseignant (voir Figure 2) à un moment donné de la situation.
Figure 2 • Exemple de question
scénarisée d’une situation pour la troisième partie
du questionnaire.
Relevons encore que le caractère dynamique du questionnaire a permis
de ne proposer aux répondants que des situations supposées
rejoindre leur expérience personnelle ou, à tout le moins, des
usages ayant cours dans leur classe. Le choix des situations proposées
dans cette partie du questionnaire s’est ainsi effectué de
manière automatisée en fonction des renseignements
récoltés dans les deux parties précédentes. Enfin,
les élèves des degrés du secondaire 1 et 2 se sont vus
attribuer aléatoirement une discipline à laquelle ils devaient se
référer tout au long du questionnaire. Dès lors, des
comparaisons ont pu être faites entre les quatre disciplines scolaires
choisies : la langue 1 (L1 : français pour les francophones et
allemand pour les germanophones), la langue 2 (L2 : allemand pour les
francophones et français pour les germanophones), les
mathématiques et la géographie.
3.4. Modalités de passation
Les données ont été récoltées durant
l’automne 2007. Les élèves de l’école primaire
et du secondaire 1 ont complété le questionnaire en ligne durant
le temps de classe, encadrés par leur enseignant. Les
élèves du secondaire 2 y ont répondu durant les heures de
cours ou de manière individuelle en-dehors de celles-ci. Un document
d’aide à la compréhension du questionnaire, comportant
notamment un glossaire et quelques notions techniques, a été
transmis aux élèves ainsi que les consignes de passation aux
enseignants concernés. Une procédure de contrôle automatique
nous a permis d’éliminer les questionnaires invalides notamment
ceux qui n’auraient pas été complétés de
manière exhaustive. Enfin, l’anonymat des participants a
été garanti. Toutefois, pour nous permettre de regrouper
facilement les élèves appartenant à une même classe,
il a été demandé aux enseignants de choisir un
mot-clé quelconque, commun à l’ensemble de la classe, que
chaque élève a reporté dans son questionnaire.
4. Résultats
Dans cette partie, nous exposons les principaux
résultats de notre recherche en réservant une attention
particulière aux activités scolaires impliquant
l’utilisation des TIC. Dans un premier temps, nous y décrivons les
principaux usages des TIC par rapport à leur fréquence
d’utilisation dans les classes. Dans un second temps, nous nous
attacherons à décrire les pratiques d’intégration
à l’aune des deux paradigmes pédagogiques
présentés plus haut. Dans la troisième partie, nous
aborderons les résultats en lien avec la motivation des
élèves.
4.1. Fréquence d’utilisation
Pour cerner les fréquences d’utilisation des différentes
pratiques intégrant les TIC, nous avons posé 36 questions aux
élèves, se référant chacune à un usage
spécifique d’une technologie (2ème partie du
questionnaire). Une analyse factorielle nous a permis d’agréger ces
36 items initiaux en sept composantes principales, ci-après
désignées « pratiques regroupées ».
L’information produite par cette analyse s’est avérée
pertinente et cohérente comme en attestent les coefficients de
consistance interne (alpha de Cronbach) présentés dans le tableau
suivant (Tableau 2). En outre, au regard de l’échelle de mesure
utilisée (0 = jamais ; 5 = très souvent), les moyennes
reportées font état d’une fréquence
d’utilisation moyenne relativement faible (M = 1.14 ; SD = 1.22) dont
l’étendue se situe entre 0.43 pour le projet audiovisuel et 1.98
pour la recherche d’information.
Usages regroupés |
N d’items initiaux |
alpha |
Moyenne |
SD |
Recherche sur Internet |
4 |
0.79 |
1.93 |
1.49 |
Vidéo-projecteur (beamer) |
4 |
0.86 |
1.72 |
1.43 |
Traitement de texte |
3 |
0.63 |
1.67 |
1.43 |
Messagerie électronique |
4 |
0.86 |
0.80 |
1.15 |
Plateforme en ligne |
3 |
0.85 |
0.79 |
1.22 |
Réalisation de sites |
4 |
0.79 |
0.70 |
1.02 |
Projet audiovisuel |
3 |
0.74 |
0.43 |
0.80 |
Tableau 2 • Coefficients de consistance interne
(alpha de Cronbach), moyennes des fréquences d’utilisation et
écarts types des sept pratiques regroupées
Notons encore la présence d’usages isolés (portfolio
électronique, traçage de l’activité, observation
vidéo, drill, simulation, wiki) qui, de par des taux d’utilisation
faibles et marginaux, n’ont pu être retenus dans notre analyse.
4.1.1. Usage selon les ordres d’enseignement
En observant l’évolution des sept pratiques regroupées au
cours de la scolarité, nous constatons que les usages les plus
fréquents demeurent les mêmes dans les trois ordres
d’enseignement, à savoir la recherche d’informations sur le
Web, l’utilisation d’un video-projecteur et le recours au traitement
de texte. Des tendances inversées apparaissent néanmoins parmi les
pratiques les moins couramment intégrées. Ainsi les enseignants du
primaire ont-ils plus volontiers recours à des activités
favorisant une pédagogie de projet (création d’un site,
projet audiovisuel), alors que dans les degrés secondaires, les
technologies supportant des interactions à distance (messagerie
électronique, plateformes en ligne) gagnent en importance. Signalons que
ces différences, représentées dans la Figure 3, sont
significatives (F(2, 2984) = 11.436 ; p < 0.000).
Figure 3 • Fréquences
d’utilisation des usages regroupés selon l’ordre
d’enseignement.
4.1.2. Usage selon les disciplines d’enseignement
Concernant les quatre disciplines scolaires testées dans les
degrés du secondaire, nos données font ressortir, tous usages
confondus, des différences à l’avantage de la langue 1 (M =
1.31 ; SD = 0.79) et de la géographie (M = 1.24 ; SD = 0.75).
Selon le regard des élèves, les professeurs de langue 2 (M =
1.05 ; SD = 0.80) et leurs collègues mathématiciens (M =
0.86 ; SD = 0.75) seraient les moins enclins à intégrer les
TIC dans leur enseignement. Toutefois, si la discipline apparaît bien
comme un facteur déterminant dans les variations observées
(F(3, 2141) = 26.833 ; p < 0.00), l’ordre des
usages demeure strictement identique quelle que soit la matière
considérée, consacrant la recherche sur le Web,
l’utilisation d’un vidéo-projecteur et celle du traitement de
texte au rang des usages les plus répandus, suivis par la messagerie
électronique, la plateforme en ligne, la réalisation de sites et
la conduite de projets audiovisuels.
4.1.3. Usage des TIC selon les filières d’enseignement du
secondaire 1
Dans les établissements scolaires du secondaire 1 qui, rappelons-le,
ont la particularité de répartir les élèves dans
trois sections distinctes en fonction de leur niveau de performance scolaire,
des fréquences d’utilisation contrastées ont
également pu être mises en exergue entre ces trois filières
d’orientation. Il ressort que les classes aux exigences les moins
élevées, accueillant des élèves avec des
difficultés d’apprentissage, sont celles qui intègrent le
plus fréquemment les TIC (M = 1.24 ; SD = 0.90), en
comparaison aux classes générales (M = 1.04 ; SD = 0.80) et
prégymnasiales (M = 1.02 ; SD = 0.73). Ces différences sont
statistiquement significatives (F(2, 1481) = 8.422; p < 0.000).
Figure 4 • Fréquences
d’utilisation des usages regroupés selon la filière
d’orientation (secondaire 1).
4.1.4. Usage selon la langue d’enseignement
Parmi les autres facteurs explorés, celui de la langue
d’enseignement introduit des différences entre les deux
régions linguistiques du canton de Fribourg, le recours aux TIC
étant notablement plus courant dans les classes germanophones (M =
1.37 ; SD = 0.78) que francophones (M = 1.03 ; SD = 0.78),
F(1, 2985) = 80.313; p < 0.000. Cet écart est
particulièrement marqué au secondaire 1, là où les
écoles alémaniques sont in globo mieux
équipées6, les
établissements les abritant plus petits, et les enseignements
disciplinaires fragmentés en un nombre d’enseignants moins
important, ce qui offre à chacun d’eux un temps de présence
plus élevé auprès de leurs élèves que celui
dont jouissent leurs homologues romands.
Figure 5 • Fréquences
d’utilisation des usages regroupés selon la langue
d’enseignement
4.1.5. Usage selon le genre de l’enseignant
Enfin, nos données ne nous permettent pas de mettre en évidence
des différences significatives entre hommes et femmes dans l’usage
des TIC en classe. Les observations déclarées des
élèves s’inscrivent en faux contre l’idée
reçue selon laquelle les femmes seraient moins enclines à recourir
aux technologies dans l’enseignement que leurs collègues
masculins.
4.2. Modalités pédagogiques d’intégration des TIC
dans l’enseignement
Dans la troisième partie du questionnaire, nous souhaitions
caractériser les usages des TIC par rapport au paradigme
pédagogique soutenant leur intégration. Pour y parvenir, nous
avions exposé aux répondants des situations
scénarisées permettant de situer sur les usages sur un l’axe
paradigmatique décrits plus haut. Ces onze activités
scénarisées – dont quatre concernaient l’utilisation
d’Internet – sont représentées dans le graphique
ci-après (Figure 6), positionnées sur un axe horizontal
échelonné de 1 à 5, selon que leur intégration se
réalise plutôt dans une approche orientée vers
l’enseignement (moyenne tendant vers 1) ou dans une approche
orientée vers l’apprentissage (moyenne tendant vers 5). En se
prononçant sur la façon dont chacune de ces activités se
déroule dans leur classe, les élèves montrent que la
correspondance par courriel (M = 3.61 ; SD = 0.64), le projet de
création d’un livre (M = 3.50 ; SD = 0.84) ou d’un
reportage photo (M = 3.33 ; SD = 0.72) se réalisent dans des
séquences d’enseignement davantage centrées sur
l’élève, i.e. orientée vers l’apprentissage
(paradigme d’apprentissage), alors que le recours ponctuel au traitement
de texte (M = 2.82 ; SD = 0.67), l’utilisation d’un
vidéo-projecteur (M = 2.78 ; SD = 0.70) ou d’une plate-forme
en ligne (M = 2.39 ; SD = 0.89) se fondent dans des approches
pédagogiques plutôt instructivistes, i.e. orientées vers
l’enseignement (paradigme d’enseignement). Les autres
activités, situées en position médiane, ne semblent pas
favoriser significativement l’un ou l’autre des paradigmes.
Figure 6 • Orientation du paradigme pédagogique des
différentes situations d’intégration des TIC
En nous concentrant sur les quatre activités impliquant
l’utilisation d’Internet (mises en évidence dans la Figure
6), nous avons par la suite testé quelques facteurs susceptibles
d’en influencer l’orientation paradigmatique.
4.2.1. Influence de l’ordre d’enseignement
Un effet significatif du degré scolaire a tout d’abord
été observé (F(2, 1608) = 15.82 ; p <
0.01). Grâce à un test de comparaisons multiples (Tukey HSD), nous
constatons que cet effet est dû au fait que les activités ayant
recours à Internet sont sensiblement plus orientées vers
l’apprentissage à l’école primaire (M = 3.21 ; SD
= 0.75) que dans les degrés secondaires 1 (M = 2.95 ; SD = 0.77) et
2 (M = 3.02 ; SD = 0.77). Nous relevons par ailleurs que, c’est en
dernière année du primaire, que les scores sont les plus
élevés (M = 3.3 ; SD = .71) ; par la suite, les valeurs
baissent au fur et à mesure que l’on monte dans les degrés
scolaires. Ce fléchissement est d’autant plus marqué si
l’on considère l’ensemble des onze activités
intégrant les TIC, et non pas seulement celles liées à
l’usage d’Internet.
4.2.2. Influence de la langue d’enseignement
Globalement, le paradigme pédagogique dans lequel s’inscrivent
les séquences intégrant les TIC ne diffère pas entre les
établissements francophones et germanophones qui présentent des
scores respectifs quasi équivalents de 3.02 et 3.06 (t(1609) =
1.00 ; n.s.) si l’on considère les quatre situations
liées à Internet, et 2.99 et 3.02 (t(1871) =0.74 ;
n.s.) si l’on tient compte des onze situations. Toutefois, un effet
d’interaction Degré scolaire × Langue d’enseignement
(F(2, 1867) = 5.98 ; p < 0.01) suggère
que les enseignants germanophones, en matière d’intégration
des TIC, semblent davantage privilégier un paradigme
d’apprentissage que leurs collègues francophones, mais uniquement
au secondaire 1.
4.2.3. Influence de la discipline d’enseignement
Les données sur les activités impliquant l’utilisation
d’Internet laissent en outre apparaître de légères
différences imputables à la discipline d’enseignement
(F(3, 1212) = 3.22 ; p < .05) – facteur que nous avons
pu tester, au secondaire, entre les professeurs de langue 1, de langue 2, de
mathématiques et de géographie. Les comparaisons multiples
calculées a posteriori révèlent que ce sont les
enseignants de mathématiques qui, dans leur manière
d’intégrer Internet à leur enseignement, tendent le plus
significativement vers un paradigme orienté vers l’enseignement (M
= 2.86 ; SD = 0.81), par opposition aux enseignants de langue 1 dont la
discipline apparaît, au regard des élèves, comme la plus
favorable à une intégration centrée sur l’apprenant
(M = 3.06 ; SD = 0.75). La géographie et la langue 2 occupent quant
à elles une position intermédiaire. Notons encore que ces
divergences observées entre les quatre usages d’Internet
s’accentuent si l’on considère l’ensemble des
technologies (F(3, 1382) = 7.37 ; p < 0.01).
4.2.4. Influence de la filière d’enseignement (secondaire
1)
Nous n’avons en revanche pas constaté de variations du paradigme
pédagogique entre les trois filières de niveau qui, au secondaire
1, séparent les élèves en fonction de leurs performances
scolaires. Les enseignants n’envisagent donc pas différemment
l’intégration d’Internet dans leurs pratiques selon
qu’ils s’adressent à des élèves
présentant des difficultés d’apprentissage ou à ceux
faisant montre de plus d’aisance vis-à-vis du travail scolaire
(F(2, 784) = 0.112 ; n.s.).
4.2.5. Influence du genre de l’enseignant
En ce qui a trait au genre de l’enseignant, encore une fois, aucune
différence n’a pu être mise en évidence entre hommes
et femmes par rapport à leur manière d’intégrer
Internet dans leur enseignement, les premiers livrant un score de 3.03 (SD =
0.79), les secondes de 3.02 (SD = 0.77), t(1558) = - 1.12 ;
n.s.
Enfin, la fréquence d’utilisation d’une technologie
n’apparaît pas non plus comme un facteur déterminant du
paradigme pédagogique présidant à son intégration.
Quoique statistiquement significative, sa valeur prédictive demeure
faible au regard du critère de Cohen affichant une corrélation (R)
de 0.12 et n’expliquant que 1.4% de la variance observée du
paradigme (R2 ajusté = 0.014 ; F(1, 1609) = 24.66 ; p < 0.01).
4.3. Impact motivationnel des TIC sur les apprenants
Aux items investiguant le paradigme pédagogique dans la
troisième partie de notre instrument de mesure, nous avons ajouté
quelques questions spécifiquement liées à la motivation des
élèves. L’appréhendant dans une approche
sociocognitive, nous considérons la motivation comme un concept dynamique
et multidimensionnel qui se définit à travers l’interaction
de facteurs à la fois internes, liés aux caractéristiques
individuelles de l’apprenant, et de facteurs externes, propres aux objets
et situations d’apprentissage (Viau, 1994). Parmi
la multiplicité des facteurs, nous avons exploré deux composantes
de la dynamique motivationnelle que sont l’attrait perçu de
la tâche et la volonté d’apprendre, la première
influençant directement la seconde en contexte scolaire comme le
démontrent notamment les travaux de Ntamakiliro, Monnard & Gurtner (Ntamakiliro et al., 2000).
4.3.1. Attrait et volonté d’apprendre selon les
usages
Dans le cadre de notre enquête, les séquences
d’enseignement ayant recours à Internet apparaissent comme
très attrayantes aux yeux des élèves et l’attirance
qu’elles suscitent (attrait perçu) influence positivement leur
volonté d’apprendre (R2 ajusté = 00.23 ;
F(1, 1890) = 564.08 ; p < 0.01). Toutefois,
l’aspect séduisant d’une technologie ne suffit pas toujours
à provoquer un fort engagement de la part des apprenants comme
l’illustre la recherche d’informations sur le Web dans la figure
suivante (Figure 7). Bien que cet usage jouisse d’un attrait réel
(M = 3.99 ; SD = 0.99) auprès des élèves, ces derniers
ne se montrent pas particulièrement enclins à consentir beaucoup
d’énergie ou de temps pour prétendre apprendre (M =
3.53 ; SD = 1.01) par le biais de cet usage.
Figure 7 •
Dimensions de la motivation dans des situations de classe intégrant
Internet
(1 = Faible attrait et volonté d’apprendre ; 5 =
Fort(e) attrait et volonté d’apprendre).
4.3.2. Evolution de l’attrait et de la volonté
d’apprendre selon les ordres d’enseignement
En étudiant le développement longitudinal de ces deux
déterminants de la motivation, nous constatons qu’ils
décroissent au gré de deux courbes quasi parallèles au fur
et à mesure de l’avancement dans la scolarité. Un
redressement subit de la volonté d’apprendre apparaît
néanmoins au treizième degré de scolarité,
témoignant de l’importance du contexte, cette année
étant celle de l’examen de maturité gymnasiale dont la
réussite conditionne l’accès à
l’université. Concernant l’attrait perçu de la
tâche, une mise en perspective de nos résultats avec des travaux
antérieurs (Gurtner et al., 2006) montre que l’attrait pour les situations scolaires intégrant
Internet chute sensiblement moins du primaire au secondaire 1 que
l’attrait pour les études en général à ce
même moment (Figure 8), comme si le recours aux technologies était
susceptible de compenser une baisse d’attractivité
générale pour les études.
Figure 8 • Évolution de l'attrait pour les situations scolaires
intégrant Internet et l’attrait pour les études en
général. (6e = fin du primaire, 8e = secondaire 1, 12e =
secondaire 2)
4.3.3. Aisance pour les TIC et motivation
L’aisance déclarée vis-à-vis des TIC
apparaît également comme un facteur important de la motivation des
élèves dans les situations scolaires liées à
l’utilisation d’Internet. L’effet observé est
significatif, aussi bien pour l’attrait perçu de la tâche
(F(3, 1584) = 29.41 ; p < 0.01) que pour la volonté
d’apprendre (F(3, 1579) = 11.65 ; p < 0.01). Ainsi, les
élèves se déclarant les moins compétents
présentent des moyennes s’élevant respectivement à
2.61 et 3.05 pour l’attrait et la volonté d’apprendre contre
3.87 et 3.51 par ceux affirmant être les plus à l’aise
vis-à-vis de l’ordinateur.
4.3.4. Modèle en pistes causales sur la motivation à
utiliser les TIC
Des analyses plus fines nous ont finalement amenés à construire
un modèle en pistes causales dans lequel les données concernant
les paradigmes pédagogiques ont pu être intégrées.
À la lecture des indices d’ajustement, nous pouvons relever que
leurs valeurs rendent compte d’une excellente congruence du modèle
prédictif avec nos données. Quant aux pistes causales, il
apparaît en premier lieu que la volonté d’apprendre dans le
cadre de séquences intégrant les TIC se voit sensiblement
déterminée par l’attrait de l’apprenant pour les
technologies. Cette attraction est influencée par l’aisance
déclarée de l’élève vis-à-vis des
ordinateurs, facteur apparenté au sentiment d’efficacité
personnelle, lequel compte pour un prédicteur connu de la motivation (Bandura, 2003).
Les modalités pédagogiques participant à
l’intégration des TIC s’avèrent très
importantes également. Ainsi, on peut affirmer que plus la situation
d’enseignement recourant aux TIC s’oriente vers un paradigme
d’apprentissage, plus l’activité se révèle
attrayante pour l’apprenant.
Figure 9 • Modèle causal lié
à la motivation
Parmi les sept dimensions du paradigme que nous avons testées, les
réponses des élèves nous font savoir que quatre
d’entre elles ont un effet positif et déterminant sur
l’attrait qu’ils perçoivent de la situation, à
savoir : la manipulation des objets technologiques confiée aux
apprenants, les responsabilités et prises de décisions
partagées entre l’enseignant et les élèves, le
transfert de l’expertise de l’enseignant aux apprenants, la
préférence accordée à des savoirs
intégrés plutôt que restitués. Finalement, une
cinquième dimension du paradigme figure dans le modèle
(intérêt porté sur le processus), mais n’a pas un
impact immédiat sur l’attrait de la situation, mais agissant plus
directement (et modestement) sur la volonté d’apprendre.
5. Discussion
A la suite de ces résultats, il nous semble
intéressant de revenir sur quelques éléments que nous
mettons ici en discussion.
5.1. Des usages modestes à relativiser
Le premier élément qui apparaît de manière
marquante est la valeur relativement faible des fréquences globales
d’utilisation des TIC. Les résultats de cette étude
confirment ceux que Schumacher et Coen (Schumacher et Coen, 2008) avaient obtenus à partir du regard des enseignants en exercice dans le
canton de Fribourg également. Cela dit, il convient de relativiser ces
données car, si les usages des TIC sont jugés peu fréquents
par les élèves, on est en droit d’imaginer des cumuls. En
effet, si sur une année scolaire, l’enseignant n’a
proposé qu’une seule fois à ses élèves de
faire un projet audio mais que, par ailleurs, il leur a laissé
réaliser un site Internet en utilisant le traitement de texte ou encore
en effectuant des recherches sur le Web, l’exposition globale des
élèves aux différentes technologies s’avèrent
moins modestes que ce qui apparaît ici.
Par contre, il convient de s’interroger sur les usages marginaux des
technologies comme la simulation, le recours à des logiciels traceurs,
à des forums de discussion, des wikis, des portfolios
électroniques, etc. qui demeurent quasiment ignorés par les
enseignants alors même que c’est probablement avec ces outils que la
plus-value pédagogique des technologies est la plus grande. C’est
sans doute parce que l’adoption de tels instruments bouscule plus
fondamentalement les pratiques qu’ils sont moins prisés par les
enseignants. Le risque de ne s’arrêter qu’à une
innovation technologique sans dépasser les modèles
pédagogiques instructivistes (Charlier et al., 2003) est ainsi très réel à tel point qu’il convient de se
méfier des technologies qui, sous des aspects séduisants,
pourraient tout simplement agir dans le sens d’un renforcement des
pratiques dites traditionnelles. L’usage du vidéo-projecteur ou
encore des tableaux blancs interactifs est une bonne illustration de ce
risque.
5.2. Une diversité à exploiter
La diversité des pratiques est un autre élément qui
mérite d’être souligné. Le lecteur aura
remarqué que, dans notre étude, les indices de dispersion
(écarts-types) sont très souvent élevés. En
d’autres termes, les enseignants intègrent les TIC de
manière très différentes au niveau quantitatif (temps
d’exposition aux technologies) mais aussi qualitatif (diversité des
types d’outils choisis). Cette
hétérogénéité n’est pas surprenante et
il serait illusoire d’exiger que tout le monde fasse la même chose
au même moment. Elle devrait pourtant nous inciter à
réfléchir sur les manières d’identifier les
enseignants technophiles (acquis à la cause des TIC) pour les amener
à partager positivement leur expérience avec les enseignants plus
réticents à ces usages. A nos yeux, la cohabitation des deux types
d’enseignants dans un même bâtiment scolaire ne suffit pas,
elle peut même induire des stigmatisations négatives. Il est donc
nécessaire de trouver des courroies de transmission entre enseignants
pour que ceux qui hésitent encore à faire le pas soient davantage
attirés par les expériences positives des autres sans risque
d’être contraints à se soumettre à la
« nouvelle doctrine technologique » dont ils subiraient le
discours évangélisateur. Des pratiques de co-enseignement
pourraient être des pistes intéressantes à explorer.
5.3. L’impact des disciplines
Exception faite des degrés d’enseignement primaire où une
vision transdisciplinaire de l’enseignement est plus facile, les
disciplines restent encore des facteurs déterminant pour
l’intégration des TIC. Les démarches d’enseignement
tout comme les outils où les dispositifs sont souvent liés
à des branches particulières et à leur didactique. On peut
cependant s’interroger sur cette idée dans la mesure où les
pratiques que nous avons identifiées comme les plus fréquentes (i.
e. recherche d’informations sur Internet, traitement de texte, messagerie)
pourraient très bien s’actualiser dans toutes les disciplines. Une
analyse des pratiques dans les disciplines où cette intégration
est importante (i.e. langue 1) permettrait sans doute de trouver des leviers
pour diffuser ces usages dans d’autres situations d’enseignement.
Nous sommes sans doute face à des « traditions
didactiques » qu’il convient d’interroger. Nos
résultats ne sont en effet pas tout à fait en phase avec ceux de
Larose, Lenoir, Karsenti & Grenon (Larose et al., 2002) dans lesquels, par exemple, l’intégration des TIC en
mathématique semble être importante alors qu’elle
apparaît en queue de liste dans nos travaux. Dès lors, une
réflexion sur la présence et la pertinence des TIC au sein des
didactiques de branches s’avèrent être une piste à
creuser encore.
5.4. Les TIC en classe et en dehors de la classe
Dans cette réflexion autour de l’usage des TIC, il nous semble
également important d’interroger les lieux d’utilisation des
technologies. En effet, tout porte à croire qu’il y a là de
grandes différences. Ainsi, l’on imagine bien des
élèves d’école primaire ou du secondaire 1 manipuler
les TIC en classe pour rédiger des textes, réaliser des sites ou
encore envoyer des messages électroniques à des correspondants
d’une autre classe. Par contre, les élèves plus
âgés ont des conduites bien différentes en intégrant
davantage les TIC dans les tâches à domicile. Ainsi, la
réalisation de travaux personnels ou l’envoi de message aux
professeurs se font davantage hors du temps d’enseignement en classe.
Ce même constat est à faire au niveau des enseignants qui font,
eux aussi, un usage différent des TIC selon qu’ils sont en classe
ou à domicile. Du reste, beaucoup d’enseignants
préfèrent utiliser les TIC à la maison où la
pression liée aux éventuels « bugs »
techniques est quasi nulle. Le gain en temps pour des tâches de
préparation de cours à domicile fait également
apparaître une plus-value davantage visible. Notons encore que
l’organisation des écoles permet difficilement aux professeurs
(notamment du secondaire 1 et 2) d’emporter en classe leur propre
ordinateur. Dans ce sens, un enseignant qui n’utilise pas les TIC en
classe peut très bien être un utilisateur assidu lorsqu’il
travaille à la maison.
5.5. Plate-forme d’enseignement : emblème d’un
malentendu
Parmi les surprises que cette recherche révèle, l’usage
des plates-formes d’enseignement est sans doute emblématique
d’un malentendu quil peut exister entre concepteur d’outils
technologiques et utilisateurs. Nos résultats mettent en évidence
le fait que les plates-formes d’apprentissage sont essentiellement
inscrites dans le paradigme d’enseignement alors même qu’elles
sont proposées aux utilisateurs comme le moyen d’approcher un
paradigme d’apprentissage. Les outils à disposition permettent en
effet de rendre plus effective la collaboration et les échanges (wiki,
forum), de renforcer la différenciation pédagogique (suivi
individualisé des élèves) ou encore de développer
une prise de conscience du processus d’apprentissage (par
l’utilisation des statistiques et des historiques). Or, les enseignants
utilisent les plates-formes essentiellement pour mettre à disposition du
matériel sous forme de documents numérisés.
Dès lors, faut-il considérer que ces premiers usages
constituent une forme d’apprivoisement des technologies à travers
des premier pas centrés sur une innovation technologique en
espérant que, petit à petit, les usagers fassent preuve
d’innovation pédagogique en intégrant progressivement
à leur pratique toutes les potentialités mises à leur
disposition dans ces plates-formes ? Faut-il au contraire tirer la sonnette
d’alarme arguant que ces outils (associés à ces usages)
renforcent des pratiques jugées souvent comme moins efficaces au niveau
pédagogique ? Ces questions interrogent la nature des formations aux
TIC - qu’elles soient initiales ou continues - (Peraya et al., 2008) notamment lorsqu’elles s’attachent à la pédagogie de
projet. En effet, dans les contextes de formation, les enseignants proposent
souvent des scénarios pédagogiques qui s’appliquent à
des séquences d’enseignement qui marchent (déjà)
bien. Les TIC apparaissent dès lors comme la « cerise sur le
gâteau ». Il nous semblerait plus opportun d’orienter
(durant la formation) les enseignants sur ce qui ne fonctionne pas dans leurs
pratiques habituelles et de les amener à voir en quoi l’usage
d’une technologie pourrait être (ou non) un moyen de résoudre
les problèmes qui se présentent à eux
quotidiennement7.
5.6. Motivation
Enfin sur le plan de la motivation, notre analyse met clairement en
évidence l’importance du paradigme d’apprentissage sur la
motivation des élèves. Offrir aux élèves une marge
de manœuvre au niveau décisionnel, leur donner la possibilité
d’utiliser eux-mêmes les TIC, viser l’intégration des
connaissances plutôt que leur assimilation ou encore profiter de leur
expertise au niveau technologique constituent des facteurs sur lesquels il est
possible d’agir très concrètement. Même si nous devons
admettre que les pourcentages explicatifs de notre modèle ne sont pas
très élevés, il nous semble évident qu’un
renforcement de ces dimensions serait souhaitable et que leur conjonction
créerait sans doute des effets positifs. Ces résultats
s’inscrivent dans la logique d’autres travaux sur l’impact des
TIC sur la motivation des élèves (Karsenti, 1999) ; (Karsenti et al., 2001) même si la controverse existe encore à ce sujet.
6. Conclusion
Le but de notre recherche était de faire un
inventaire des pratiques d’intégration des TIC en
général, et d’Internet en particulier, dans le canton de
Fribourg en alliant à la fois les aspects de fréquence et de
caractérisation de ces pratiques. Le bilan est en demi-teinte. Certes, il
faut admettre que les TIC sont progressivement intégrées dans les
classes du canton mais il convient également de souligner que les usages
réels ne s’inscrivent pas vraiment dans une perspective
réellement innovante. Comme d’autres chercheurs, nous faisons le
constat d’un transfert technologique sans vraiment voir les enseignants
dépasser leurs pratiques habituelles quand bien même la plupart
d’entre eux ont terminé les formations ad hoc mises en place
par le centre de formation et de ressources techno-pédagogiques de
Fribourg8. Après cinq à
six ans d’efforts, il semble bien que nous soyons encore dans une phase
d’amorce du processus.
Deux questions se posent alors : la première concerne les
dispositifs de formation initiale et continue des enseignants et interroge leur
efficacité. Devons-nous admettre que nous nous sommes trompés en
la matière alors même que des moyens importants ont
été consentis. Notre analyse serait plutôt de voir ces
dispositifs de formation comme des premiers jalons sur un itinéraire qui
en comporterait bien d’autres. A notre avis, la formation ne
s’inscrit pas que dans un cadre formel et il serait intéressant
d’aller voir, de plus près sur le terrain, comment de
manière informelle ou fortuite elle se poursuit. Les niveaux de
compétences entre enseignants ne sont pas homogènes et on peut
parier que des dynamiques d’entraide et de développement
professionnel s’installent au sein des établissements. Reste
à étudier ces mécanismes pour mieux les comprendre et, qui
sait, les intensifier ou les provoquer là où ils n’existent
pas encore.
La seconde question s’attache à reconnaître que
l’innovation est bien en route mais qu’elle prendra encore du temps
à s’implanter. Recourir aux TIC pour développer des
aptitudes nouvelles (i.e. usages marginaux des TIC) ou initier des pratiques
impliquant davantage les élèves ne s’implante pas du jour au
lendemain. Ces pratiques renvoient à des habitus fortement inscrits dans
la réalité de la profession et nécessitent souvent la
réorganisation totale ou partielle des structures scolaires. Dès
lors, l’intégration des TIC (en tant qu’innovation) ne peut
s’envisager qu’en concomitance avec une réflexion sur le
métier d’enseignant et sur le fonctionnement de
l’école. En effet, intégrer les TIC c’est aussi
envisager davantage de travail collaboratif entre enseignants basé sur
une interdépendance positive, c’est peut-être imaginer des
dispositifs hybrides alliant distance et présence pour les
élèves - même à l’école obligatoire -,
c’est imaginer des espaces d’apprentissages multiples (Caron et al., 2007),
c’est encore valoriser autre chose que le résultat ou la
réussite en accordant plus d’importance aux erreurs et au
processus, c’est inventer de nouvelles manières
d’évaluer, etc. Bref, intégrer les TIC, c’est sans
conteste réinventer - en partie - l’école et on comprend que
la tâche soit ardue.
Pour terminer, nous soulignerons tout l’intérêt de
recourir au regard des élèves pour décrire la
réalité de la classe. A l’heure où ils sont de plus
en plus sollicités dans des démarches d’évaluation de
l’enseignement, il nous semble important de considérer avec
sérieux leurs avis. Finalement, ils sont aux premières loges et
souvent les premiers à adopter (ou à rejeter) les innovations
techniques. Même s’il convient de ne pas tomber dans des effets de
mode en ingérant n’importe quelle technologie dans le champ
scolaire, il ne fait aucun doute que l’école doit s’adapter
aux enfants d’aujourd’hui (et de demain) et que dans ce processus,
ils constituent une force indéniable sur (ou avec) laquelle il faut
compter.
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A
propos des auteurs
Pierre-François COEN dirige le Service Recherche &
Développement de la Haute école pédagogique de Fribourg
ainsi que l’Unité de recherche sur l’évaluation. Ces
travaux portent sur l’intégration des technologies en
l’éducation notamment sur le rôle de la trace dans les
apprentissages, sur l’évaluation scolaire et des institutions ainsi
que sur l’éducation musicale.
Adresse : Service Recherche &
Développement, Haute école pédagogique, Rue de Morat 36,
CH-1700 Fribourg, Suisse
Courriel : coenp@edufr.ch
Jeanne REY est collaboratrice scientifique au Service
Recherche & Développement de la Haute école pédagogique
de Fribourg. Ses thématiques de recherche se centrent sur les
technologies de l’éducation et sur l’insertion
professionnelle des jeunes enseignants. Elle signe en outre une thèse en
anthropologie consacrée aux migrations africaines et pentecôtistes
en Suisse.
Adresse : Service Recherche &
Développement, Haute école pédagogique, Rue de Morat 36,
CH-1700 Fribourg, Suisse
Courriel : rey-pellissierj@edufr.ch
Isabelle MONNARD est formatrice et chercheuse à la
Haute école pédagogique de Fribourg. Membre de
l’Unité de recherche sur l’évaluation, elle collabore
à plusieurs études traitant entre autres des
représentations des enseignants sur l’évaluation scolaire.
Elle conduit des travaux centrés sur la motivation et sur
l’utilisation de nouveaux moyens d’enseignement.
Adresse : Service Recherche &
Développement, Haute école pédagogique, Rue de Morat 36,
CH-1700 Fribourg, Suisse
Courriel : MonnardI@edufr.ch
Après des études
à l’Université de Fribourg, Laurent JAUQUIER travaille
plusieurs années pour le Centre suisse des technologies de
l’information dans l’enseignement. Etabli actuellement au
Brésil, il est toujours actif dans ce domaine et se consacre au
développement de plates-formes éducatives. Il est notamment le
créateur du site wikimini.org.
Adresse : Rua Adeodato José dos Reis, 1100 - ap. 704, bl. A, Nova Parnamirim,
59152-820 Parnamirim – RN
Courriel : laurent.jauquier@gmail.com
1 Depuis 2003, dans le canton de
Fribourg (en Suisse), on consacre pas loin de CHF 200.-- par année et par
élève à l’intégration des TIC.
2 Centre suisse des technologies de
l'information dans l'enseignement (www.ctie.ch)
3 Dans le canton de Fribourg,
c’est le Centre fri-tic qui assume cette mission depuis 2001.
(www.fritic.ch)
4 En 2012, les mêmes
questionnaires ont été passés aux enseignants. Si
l’on constate que la différence hommes / femmes se réduit
significativement, la progression du taux de pénétration de
l’innovation techno-pédagogique se situe aujourd’hui à
3.29 (sur une échelle de 1 à 5) alors qu’en 2006 elle
n’était qu’à 2.19.
5 Dans le canton de Fribourg,
l’école secondaire s’organise en trois filières :
la voie « prégymnasiale » qui préparent aux
études longues, la voie « générale »
qui prépare aux écoles professionnelles et la voie
« exigences de base » qui prend en compte les
élèves ayant des difficultés scolaires importantes.
6 Bien que le ratio
ordinateurs/élèves soit légèrement inférieur
dans les écoles secondaires alémaniques, la concentration de
postes informatiques dans les salles de cours ordinaires y est deux fois plus
importante que du côté francophone où la majorité des
ordinateurs est installée dans des salles informatiques
séparées. En ce sens, les établissements germanophones
répondent mieux aux recommandations définies par le Centre fri-tic
(2007).
7 Le cas de ce professeur est
éloquent. Se plaignant du manque d’intérêt de ses
étudiants pour la lecture d’articles scientifiques, il imagina un
dispositif simple qui consistait à diviser ses classes en trois groupes
de grandeur adéquate pour effectuer des discussions approfondies des
textes proposés. Alors qu’il était rétif à
tout usage technologique, il adopta une plate-forme collaborative pour proposer
des activités à distance avec les groupes d’étudiants
qui, dans son dispositif, étaient temporairement impossibles à
prendre en charge. Ainsi, c’est bien un problème - ou une
frustration - pédagogique qui a conduit ce professeur à
s’interroger sur la pertinence des technologies pour le résoudre.
La formation a pris dès lors tout son sens et les efforts consentis pour
la maîtrise de la technologie ont immédiatement été
mis à profit. Par ailleurs, la suppression du dispositif technologique
amène un retour du problème, c’est probablement là la
meilleure garantit de sa pérennisation.
8 Comme indiqué
précédemment, il s’agit du Centre fri-tic.
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