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Volume 18, 2011
Article de recherche



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Modèles et outils pour prendre en compte l’évolutivité dans les profils d’apprenants

 

Stéphanie Jean-Daubias, Blandine Ginon, Marie Lefevre
(LIRIS, Lyon)

 

RÉSUMÉ : Si la notion de profils d’apprenants est maintenant bien connue et intégrée dans de multiples EIAH (Environnements Informatiques pour l’Apprentissage Humain), la prise en compte de l’évolution dans ces profils ne bénéficie pas des mêmes avancées. L’objet de cet article est de définir cette notion et de montrer sa prise en compte dans les recherches abordant l’ingénierie des profils d’apprenants. Après une définition du concept de profils d’apprenants évolutifs que nous illustrons d’exemples, nous montrons en quoi ce concept fait évoluer les modèles de notre projet, notamment le langage de modélisation de profils PMDL étendu en PMDLe, pour prendre en charge l’évolutivité des profils.

MOTS CLÉS : profils d’apprenants évolutifs, modèles, uniformisation de profils.

ABSTRACT : If the concept of learners profiles is now well known and treated in various ILE (Interactive Learning Environments), the taking into account of evolution in profiles do not benefit from the same advances. The subject of this paper is to define this notion and to show how it is taken into account en ILE researches. After a definition of the concept of progressive learners profiles illustrated with examples, we show how this concept changes the models of our project, notably PMDL profiles modeling language extended to PMDLe, to take into account the evolutivity of profiles.

KEYWORDS : progressive learners profiles, models, profiles standardisation.

 

1. Introduction

Un profil d’apprenant permet de rassembler des informations sur les connaissances, les compétences ou encore le comportement d’un apprenant, informations rassemblées à l’issue d’une activité pédagogique, qu’elle soit informatisée ou non (Jean-Daubias et al., 2009).

L’objet profil d'apprenant recouvre une grande diversité dont nous synthétisons, définissons et illustrons les différentes dimensions que nous avons identifiées dans la Figure 1.

Les profils d’apprenants peuvent tout d’abord concerner différents sujets (cf. 1 sur la Figure 1) : un unique apprenant ou un groupe d’apprenants (un binôme, une classe) (Kosba et al., 2005), (Upton et al., 2009). Ils peuvent provenir de l’analyse d’activités de différents types du point de vue de la place de la collaboration (cf. 2 sur la Figure 1) (Upton et al., 2009) et de la distance dans ces activités (cf. 3 sur la Figure 1) : collaboratives ou non, présentielles, semi-distancielles ou distancielles. Ces activités peuvent être de disciplines variées (cf. 4 sur la Figure 1) et correspondre à différents niveaux (cf. 5 sur la Figure 1), scolaires, universitaires ou de formation continue. Les profils d’apprenants peuvent être créés à la demande de différents initiateurs (cf. 6 sur la Figure 1) : l'enseignant, afin de suivre l’évolution de l’apprentissage de ses élèves dans l'année ; l'institution, pour suivre celle de l’ensemble des apprenants (par exemple le collège ou le ministère (M.E.N._EducEval, 2008) dans un contexte scolaire, l’entreprise dans un contexte de formation continue); ou encore l'apprenant lui-même afin de suivre l’évolution de ses connaissances. De plus, les profils d’apprenants peuvent être constitués par différents créateurs (cf. 7 sur la Figure 1) : certains sont constitués de façon automatique ou semi-automatique par un logiciel comportant un modèle de l’apprenant, d’autres sont issus des pratiques des enseignants, pouvant s'appuyer sur des documents de référence (programmes scolaires ou référentiels de compétences), le plus souvent sous forme papier, mais parfois sous forme numérique (tableur par exemple), d’autres encore sont établis par l’apprenant lui-même, en situation d’autoévaluation, que ce soit sous forme papier-crayon ou logicielle (Cogne et al., 1998), (Eyssautier et al., 2004).

Figure 1 : Les 20 dimensions des profils d’apprenants.

Par ailleurs, les profils sont constitués dans le but d'être exploités par différents destinataires (cf. 8 sur la Figure 1), humains ou logiciels. Les profils créés par un enseignant sont en général destinés à être exploités par ce même enseignant, mais également par l'institution scolaire, parfois par l'apprenant concerné ou sa famille. Les profils créés par un système informatique sont la plupart du temps destinés à être exploités par le système lui-même. Toutefois, certains logiciels « externalisent » leurs profils, c’est-à-dire qu’ils les rendent visibles de l’extérieur, ce principalement à destination de l'apprenant et de l'enseignant (Paiva et al., 1995) ; d’autres créent même des profils avec pour but principal de les communiquer aux acteurs humains, c’est l’approche adoptée par les recherches sur les modèles de l’apprenant ouverts (LeMoRe, 2005), (McCalla et al., 2007), (McCalla et al., 2007), (Bull et al., 2010). Nous pouvons en outre différencier les profils selon le type (cf. 11 sur la Figure 1) des informations qu’ils contiennent. Il peut s’agir d'une part de profils d’utilisation, qui rendent compte de l’utilisation qu’a faite l’apprenant du logiciel, tel que le temps qu’il a mis pour effectuer l’activité, ce qui correspond au modèle comportemental de l’apprenant. Il peut s’agit d'autre part de profils d’apprentissage, qui correspondent au modèle cognitif de l’apprenant (Balacheff, 1994). Il peut s’agir également de profils de caractéristiques (Self, 1988). Notons toutefois que modèle du domaine, traces et productions de l’apprenant sont hors du champ de la notion de profils d’apprenants, car ne correspondant pas à la définition des profils. La nature (cf. 12 sur la Figure 1) des informations que comportent les profils d’apprenants est également variable (VanLehn, 1988), (Dillenbourg et al., 1992), (Vassileva, 1997), (Woolf, 2009) chapitre 13. Il peut s’agir de connaissances (« la terminaison de la première personne est -ai au futur ») ou méta-connaissances de l’apprenant (« je pense maîtriser la conjugaison du futur », « pour conjuguer un verbe au futur, il faut connaître son groupe ») (Clancey, 1982), de compétences (« savoir identifier le radical à partir de l’infinitif d’un verbe »), de stratégies (« identifier le radical du verbe, puis ajouter la terminaison ») ou de conceptions (qui peuvent couvrir des connaissances erronées de type « la terminaison de la première personne est –ais au futur »), mais aussi de comportements (« travail par essais-erreurs »). La valuation (cf. 13 sur la Figure 1) utilisée peut également varier. Une compétence peut être valuée par une note (« 3/7 »), un taux de réussite (« 87% »), une évaluation textuelle (« connaissance partiellement maîtrisée »), une appréciation (« en progrès »), ou encore un commentaire d’ordre métacognitif (« je pense maîtriser cette compétence »). Dans un profil créé par un logiciel, il faut distinguer sa représentation interne (cf. 14 sur la Figure 1), celle qu'utilise le logiciel pour manipuler le profil (sous forme de couples attribut/valeur, de faits, de règles, de réseaux bayésiens...) (Vassileva, 1997), de sa représentation externe (cf. 15 sur la Figure 1), celle qui est utilisée pour stocker le profil ou encore de sa visualisation (cf. 16 sur la Figure 1), celle qui est proposée aux destinataires : sous forme textuelle, numérique, symbolique ou graphique. Nous identifions également les normes ou standards éducatifs utilisés pour l’échange de données (cf. 17 sur la Figure 1) (Pernin, 2006), comme LOM (LOM, 2002), SCORM (SCORM, 2001), PAPI (PAPI, 2002), IMS-LIP (IMS-LIP, 2001), MLR (Bourda et al., 2010), le format de stockage (cf. 18 sur la Figure 1), qui peut être de type texte, tableur, base de données, fichier XML, ainsi que les plateformes informatiques compatibles (cf. 19 sur la Figure 1), qu’elles soient associées à des dispositifs fixes ou mobiles (cf. 20 sur la Figure 1). Pour compléter, et nous insistons sur ce dernier point qui est central dans le cadre de cet article, notons que pour un même apprenant, il est possible de disposer de plusieurs profils qui représentent l’état de ses connaissances dans des domaines différents, selon des points de vue différents, dans des contextes différents, avec des objectifs différents (Bull et al., 2003), pour des usages différents (Vassileva et al., 2003), informations qui évoluent (cf. 10 sur la Figure 1) pour un même élément évalué (Vassileva, 1997), soit pour prendre en compte l’évolution des connaissances de l’apprenant qui peut refléter l’apprentissage ou l’oubli (Mendelsohn et al., 1991), (Brusilovsky et al., 2009), soit pour corriger l’évaluation qui a été faite. En effet, les informations contenues dans les profils ne sont pas certaines, elles sont le reflet des croyances du créateur du profil, qu’il soit humain ou logiciel, sur l’apprenant (Dimitrova et al., 1999). Si elle est prise en compte, cette évolution des données du profil peut se faire, soit en remplaçant les anciennes valeurs du profil (les profils sont alors modifiables), soit en gardant trace de l’évolution (les profils sont alors évolutifs). En complément, il est en outre intéressant d’avoir dans les profils des informations temporelles permettant d’identifier la période concernée ou le temps passé sur les activités (cf. 9 sur la Figure 1).

Si certains points communs peuvent être trouvés entre nos 20 dimensions des profils d’apprenants et l’approche SMILI Open Learner Modelling Framework (Bull et al., 2007), nos approches diffèrent significativement, notamment en raison du fait que nous adoptons le point de vue général des profils d’apprenants et non le point de vue particulier des profils d’apprenants ouverts. Plusieurs auteurs ont défini différents axes d’analyse des profils d’apprenants (Rich, 1983), (VanLehn, 1988), (Dillenbourg et al., 1992), (Vassileva, 1997), (Moulet, 2011). Nous nous distinguons de ces approches en ne nous limitant pas à deux ou trois dimensions par rapport auxquelles nous cherchons à positionner les profils d’apprenants d’un certain nombre d’EIAH, mais en cherchant à caractériser finement les profils d’apprenants existants. Enfin, nous n’adoptons pas le point de vue de la façon de construire le diagnostic (Dillenbourg et al., 1992), mais bien celui de l’objet profil d’apprenants, résultat de ce diagnostic. Nous ne prétendons pas que ces dimensions sont exhaustives, même si nous avons tenté de couvrir au mieux la diversité des profils. Il est donc possible de compléter ce travail en y ajoutant d’autres dimensions.

Dans les travaux que nous présentons dans cet article, nous nous intéressons à la réutilisation de profils d’apprenants existants hétérogènes par des acteurs autres que leurs auteurs, dans le but notamment de favoriser l’utilisation des profils au delà du contexte de leur création.

L’uniformisation des profils que nécessite cette réutilisation peut se faire selon plusieurs approches. Les approches a priori, qu’elles s’appuient sur la normalisation (PAPI, 2002), (IMS-LIP, 2001), sur des ontologies (Desmoulins et al., 2006), (Woolf, 2009), (Heckmann et al., 2005), (Paquette, 2007), (Moulet, 2011) ou de type e-portfolio (Mason et al., 2004), (Eyssautier-Bavay, 2004), (Moulet, 2005), (EuroLMAI, 2010), (Najjar et al., 2010) nécessitent que les profils d’apprenants soient écrits dans le formalisme spécifié. Le fait même qu’il s’agisse d’approches a priori est un frein à une exploitation large d’outils s’appuyant sur ces travaux. En effet, seuls les profils conformes aux spécifications pourraient être traités, alors que les profils existants sont très hétérogènes (Jean-Daubias et al., 2009) et pour la plupart ne respectent pas de telles spécifications (Jean-Daubias et al., 2009). Les approches a posteriori quant à elles consistent à réécrire les profils dans un formalisme qui leur est propre pour pouvoir les traiter, tels DynMap+ (Rueda et al., 2006) ou VisMod (Zapata-Rivera et al., 2004). La principale limite des systèmes qui adoptent cette approche est leur manque de généricité : ils savent seulement réécrire les profils provenant de source(s) identifiée(s). Pour plus de souplesse, Ramandalahy et al (Ramandalahy et al., 2009) adoptent une démarche plus évolutive. D’autres approches s’intéressent à l’interopérabilité entre les modèles de l’utilisateur (et pas forcément spécifiquement entre les modèles de l’apprenant) issus de différents systèmes. Ces approches, parmi lesquelles (Celik et al., 2008), (Brusilovsky et al., 2008), (Conlan et al., 2004), (Walsh et al., 2009), (Tortarolo et al., 2009), s’appuient sur la mise en correspondance de modèles de l’utilisateur. Les limites principales de ces systèmes proviennent des types de profils pris en charge assez limités, souvent issus d’une plateforme de formation à distance et imposant parfois un format de représentation : principalement une ontologie ou un standard, ce qui exclut les profils papier-crayon, mais également un grand nombre de profils issus d’EIAH. Ainsi, s’il existe des systèmes permettant de gérer des profils d’apprenants, aucun n’adopte une démarche suffisamment générique pour traiter et exploiter facilement et de façon riche tous les types de profils.

Dans nos travaux, nous avons choisi d’adopter une démarche a posteriori afin de pouvoir prendre en compte une plus grande variété de profils. Nous adoptons de plus une démarche générique : nous proposons un environnement capable de réécrire toutes sortes de profils existants dont on ne connait ni la structure, ni les données, sans imposer aucun formalisme a priori. Cette approche s’appuie sur un environnement générique sans contenu, que les utilisateurs vont compléter en y mettant les informations dont ils ont besoin : ce sont les utilisateurs qui ajoutent leur propre sémantique au système, contrairement aux approches a priori pour lesquelles la sémantique est donnée et imposée.

Dans cet article, nous nous intéressons plus précisément à la prise en compte de l’évolution dans les profils d’apprenants. Avoir des informations sur l’évolution des profils permet de garder trace des états de connaissances précédents pour des exploitations ultérieures : que ce soit pour le diagnostic en EIAH ou pour le suivi des apprenants par les différents acteurs concernés (enseignants et institutions, mais aussi familles, et apprenants dans un contexte métacognitif (Jean-Daubias et al., 2009)). Ainsi, un EIAH peut utiliser l’évolution de la maîtrise d’une connaissance donnée pour adapter le niveau des exercices proposés ; un enseignant sera non seulement intéressé par le niveau de maîtrise d’un apprenant, mais aussi par l’évolution de ce niveau depuis la dernière évaluation. Pour cela, les profils doivent intégrer cette notion d’évolutivité.

Afin d’une part d’illustrer la notion de profil d’apprenants et d’autre part de mettre en lumière plus particulièrement la prise en compte du temps dans les profils, prenons trois exemples de profils évolutifs. Le premier est un profil papier-crayon utilisé par les enseignants de l’école maternelle Antoine Rémond de Lyon 6ème pour effectuer un suivi des élèves durant les trois années de maternelle (petite section -PS-, moyenne section -MS- et grande section -GS-). Chaque année comporte deux périodes d’évaluation. L’extrait du profil présenté sur la Figure 2 concerne la section « Découvrir le monde », composée de trois thèmes eux-mêmes précisés en composantes à évaluer. L’échelle d’évaluation utilisée par cette école est textuelle graduée : un élément évalué sur une période peut être associé au niveau « non acquis » (NA), « en cours d’acquisition » (ECA), ou « acquis » (A). Le niveau « en cours d’acquisition » est divisé en ECA- et ECA+ pour plus de précision dans l’évaluation. Dans notre exemple, « Connait les principaux concepts spatiaux » est une compétence acquise pour toutes les périodes évaluées. Il est possible qu’un élément du profil soit non évaluable sur une période, il est alors associé à une case noire. Dans l’exemple de la Figure 2 « Compare des collections et les range selon des critères quantitatifs » n’est ainsi pas évaluable en petite section. Il arrive également que les apprenants ne soient pas évalués pour un élément sur certaines périodes, dans ce cas l’élément est associé à une case vide pour la période concernée. C’est le cas par exemple sur le profil de la Figure 2 pour les premières périodes de petite et moyenne sections pour l’élément « Réalise une collection comportant le même nombre d’objets qu’une collection référente ». Ainsi, dans ce profil, ce n’est pas tant les valeurs que leur évolution qui sont importantes.

Figure 2 : Extrait du profil évolutif papier-crayon de l’école Antoine Rémond.

Notre second exemple de profil évolutif est issu du site de soutien scolaire Maxicours (Maxicours, 2000). Ce site, en plus de parcours d’apprentissage libres et de séances de révision, propose aux apprenants d’effectuer chaque jour une séance adaptée à leur niveau scolaire et tenant compte de leurs précédentes séances de travail. Les extraits présentés correspondent aux résultats obtenus pour les différentes activités réalisées au cours des séances du samedi 13 novembre (cf. partie gauche de la Figure 3) et du dimanche 14 novembre (cf. partie droite de la Figure 3). Cette mise à disposition des bilans des différentes séances effectuées permet à l’apprenant et/ou à ses parents de suivre l’activité réalisée. Dans ces extraits, nous pouvons observer une progression des résultats entre les deux séances pour l’activité de conjugaison en français (activité n°3) : le nombre de questions réussies est passé de 5 à 6 pour cette activité.

Figure 3 : Extraits du bilan de l’élève dans Maxicours (Maxicours, 2011).

Notre dernier exemple de profil évolutif est celui de Narcissus qui définit un profil de collaboration entre membres d’un groupe travaillant au développement d’une application (Upton et al., 2009) (cf. Figure 4). Le temps y est pris en compte en affichant la date de chacun des événements qui constituent le profil et en montrant l’évolution des situations. La visualisation est faite sous forme graphique : pour une date donnée (en ordonnée sur la Figure 4), Narcissus représente, pour chaque membre du groupe observé (en abscisse sur la Figure 4), son activité au sein du groupe. Cette représentation permet à l’utilisateur de saisir à la fois l’ensemble de l’activité du groupe et son évolution.

Figure 4 : Visualisation du profil de Narcissus (Upton et al., 2009).

Si l’idée de la prise en compte de l’évolution dans les connaissances des apprenants ne date pas d’hier (Self, 1988), il n’existe pas un grand nombre d’EIAH maintenant des profils d’apprenants évolutifs. En effet, il n’est pertinent de stocker des informations sur l’évolution des connaissances de l’apprenant dans son profil que si ces informations seront utiles par la suite (Self, 1990). À défaut de savoir facilement gérer et/ou exploiter ces informations sur l’évolution des connaissances des apprenants, peu de concepteurs d’EIAH intègrent la notion d’évolutivité dans les profils de leurs systèmes. Toutefois, dans la recherche que nous présentons ici, nous souhaitons proposer une approche générique permettant de prendre en compte un maximum de profils : certains de ces profils étant évolutifs, nous nous devons de prendre en compte cette caractéristique. L’évolutivité des profils, outre la possibilité de conserver une trace des différentes étapes de construction des connaissances des apprenants, permet des traitements intéressants sur les profils répondant à des besoins des tuteurs, humains ou logiciels.

Ainsi, prenons le cas de Valérie, enseignante en CM2. En début d’année, après une séries d’évaluations visant à situer le niveau de ses nouveaux élèves, elle peut étudier leurs connaissances à un instant t et comparer ces connaissances au contenu du profil de l’année précédente transmis par son collègue de CM1, afin d’identifier les élèves qui ont besoin de révisions après la coupure estivale. Dans la suite de l’année, Valérie peut également suivre l’évolution des résultats de ses élèves sur le logiciel de mathématiques qu’elle utilise en salle informatique une fois par semaine. Elle souhaite proposer des activités de remédiation aux élèves dont les résultats stagnent ou sont en baisse par rapport aux premières séances, et faire travailler en autonomie ceux dont les résultats s’améliorent. Ainsi, les informations sur l’évolution des connaissances des ses élèves constituent un réel outil de travail pour Valérie.

Dans les travaux existants proposant des outils de gestion de profils, l’évolutivité des profils d’apprenants n’est pour l’instant pas prise en compte ou pas de manière satisfaisante. Il n’est ainsi actuellement pas possible de gérer de façon riche des profils évolutifs tels que ceux présentés dans nos exemples (cf. Figure 2, Figure 3 et Figure 4).

Dans la suite de cet article, nous montrons comment nous prenons en compte l’évolutivité des profils d’apprenants dans notre approche. Après cette introduction, nous présentons tout d’abord le contexte de cette recherche, le projet PERLEA, puis les modèles proposés dans ce contexte, notamment le langage de modélisation de profils PMDL et ses extensions, ainsi que leur mise en œuvre dans l’environnement EPROFILEA. Nous exposons dans le cœur de cet article comment nous avons fait évoluer ces modèles et outils pour prendre en compte l’évolutivité des profils. Nous terminons en évoquant les exploitations qui pourront être faites de ces profils désormais évolutifs.

2. Contexte

2.1. Le projet PERLEA

Le projet PERLEA (Profils d’Elèves Réutilisés pour L’Enseignant et l’Apprenant) s’intéresse à la personnalisation de l’apprentissage par l’exploitation de profils d’apprenants.

Il vise à proposer des modèles et des outils pour la réutilisation et l’exploitation mutualisée de profils d’apprenants hétérogènes de tous niveaux et de toutes disciplines, existants ou à venir, papier-crayon ou logiciels, dans des contextes différents et par des acteurs autres que leur auteur (Jean-Daubias et al., 2009).

2.2. Le modèle REPro et le langage PMDL

Le projet PERLEA a donné lieu à la spécification du modèle REPro, Reuse of External Profiles, un modèle du processus de gestion de profils, qui va de la création de profils d’apprenants à leur exploitation (cf. partie basse de la Figure(Eyssautier-Bavay et al., 2009 (Eyssautier-Bavay et al., 2009) pour une présentation plus détaillée). Ce modèle, au-delà d’une étape préalable de constitution de profils, met en évidence la nécessité d’harmoniser la structure et les données des profils pour en proposer une représentation unifiée, ce avant d’éventuellement transformer, puis exploiter ces profils. Pour l’harmonisation, REPro s’appuie sur un formalisme de description des profils permettant de rendre les profils externes réutilisables.

Le langage PMDL, Profiles MoDeling Language, qui sert de langage pivot entre les profils externes aux formalismes variés et les profils réutilisables réécrits dans un formalisme commun, est un langage de modélisation de profils qui permet de décrire la structure d’un profil afin d’exprimer différents profils hétérogènes selon un même formalisme (Jean-Daubias et al., 2009), (Eyssautier-Bavay, 2008). Pour cela, PMDL distingue dans un profil d’apprenant sa partie structure, pouvant être commune à plusieurs profils, de sa partie données, contenant les informations propres à chaque apprenant.

Ainsi, PMDL est un modèle théorique qui définit des éléments de base qu’un enseignant peut instancier et combiner pour constituer le modèle des profils qu’il souhaite manipuler, modèle que nous qualifions de structure de profils. Cette structure de profils, commune à plusieurs apprenants, sera ensuite instanciée pour contenir les données correspondant au profil de chaque apprenant.

Le langage PMDL a été décrit formellement selon une notation BNF (Eyssautier-Bavay, 2008) doublée d’une représentation graphique plus accessible (cf. Figure 5), celle utilisée dans cet article. Chaque élément de PMDL y est représenté dans un cadre possédant une partie blanche et une partie grise. La partie blanche porte le nom de l’élément. Si l’élément est terminal, c’est-à-dire s’il n’est composé d’aucun autre élément, la partie grise contient le type de l’élément, cette zone est vide dans le cas contraire. Les diagrammes de cette représentation graphique sont des structures d’arbres devant être lues de gauche à droite. Les éléments situés à gauche d’autres éléments et reliés à eux par un trait les contiennent. Ainsi, le symbole < représente une relation de OU logique, le symbole [ représente une relation de ET logique, le symbole * signifie que l’élément peut être présent de 0 à n fois, le symbole + signifie que l’élément peut être présent de 1 à n fois, le symbole ? signifie que l’élément peut être présent 0 ou 1 fois, c'est-à-dire qu’il est optionnel, enfin, l’absence de symbole devant un élément signifie qu’il est pr&(Eyssautier-Bavay, 2008)ne fois (Eyssautier-Bavay, 2008).

Figure 5 : Le contenu d'un profil en PDML.

PMDL permet de décrire la structure des profils lors de l’étape d’harmonisation. Ce langage, indépendant de toute plateforme et donc réutilisable, permet d'exprimer à l’identique, c’est-à-dire sans perte ou corruption d’information, la plupart des profils existants selon un même formalisme, que ces profils soient issus de logiciels ou de pratiques papier-crayon. Un profil décrit avec PMDL est composé d’informations sur l’apprenant avec une partie structure et une partie donnees. La structure du profil, indépendante de la partie donnees qu’il contient comporte un ensemble d’element (par exemple « mathématiques » ou « conjugaison »). Il existe quatre types de contenu pour un element : liste_composante, liste_repartition, graphe et texte (cf. Figure 8). Ce sont ces quatre types de contenu qui vont permettre de constituer des profils dont la structure pourra être très variée, afin de répondre aux besoins des enseignants. PMDL ne permet toutefois pas de représenter des profils d’apprenants évolutifs.

Nous avons défini le cadre d’application de PMDL et l’expressivité du langage dans ce cadre. Le cadre d'application du langage PMDL précise les informations que le langage prend en charge ou pas, à l’aide de dix critères auxquels sont associés des degrés de prise en compte (cf. Figure 12). Nous avons ensuite évalué l'expressivité de PMDL au sein de ce cadre d'application en exprimant différents profils avec le langage PMDL afin de tester les limites d'expression du langage.

Les principales limites du langage mises en évidence par cette évaluation sont son incapacité à prendre en compte l’évolutivité des profils, le lien avec les activités à l’origine des évaluations et l’organisation des éléments du profil entre eux. Par contre, certaines limites, comme la non prise en compte des traces, sont liées à la nature même des profils d’apprenants et ne nécessitent pas d’être levées.

Figure 6 : Cadre d'application de PMDL (Eyssautier-Bavay, 2008).

2.3. L’environnement EPROFILEA

Le projet PERLEA a également donné lieu au développement d’un EIAH, l’environnement EPROFILEA, dans lequel sont mis en œuvre les modèles définis dans PERLEA. EPROFILEA concerne les différents acteurs de l’apprentissage, même s’il s’adresse principalement aux enseignants. Il comporte trois parties elles-mêmes composées de plusieurs modules (cf.(Jean-Daubias et al., 2009) et (Jean-Daubias et al., 2009)).

Figure 7 : Architecture d’EPROFILEA.

La première partie de l’environnement Eprofilea, celle de préparation des profils, consiste à établir la structure des profils que l’on souhaite manipuler, avant d’y intégrer les données issues des profils externes pour constituer des profils d’apprenants conformes au souhait de l’enseignant et respectant le formalisme d’EPROFILEA.

Le langage PMDL y est opérationnalisé dans le module Bâtisseur qui permet à l’enseignant de définir la structure des profils d’apprenants selon un formalisme unifié. Les structures de profils issues de Bâtisseur seront complétées dans les modules d’intégration des données : Prose et Tornade. Le module Prose, PROfils Saisis par l’Enseignant, aide l’enseignant à saisir les données issues de profils papier-crayon de chacun de ses élèves selon la structure de profils définie dans Bâtisseur. Pour intégrer des profils logiciels externes (issus de logiciels pédagogiques extérieurs à EPROFILEA), le module Tornade permet à des experts de constituer des systèmes de conversions de profils, les tourbillons, puis à des enseignants de les utiliser pour intégrer les données des profils correspondants à des profils respectant le formalisme d’EPROFILEA (Jean-Daubias et al., 2009).

Les profils ainsi constitués sont hybrides : ils peuvent provenir de différentes sources qu’elles soient papier-crayon ou logicielles. Une partie d’un profil peut venir par exemple d’évaluations nationales (M.E.N._EducEval, 2008), une autre de l’utilisation d’un EIAH d’algèbre, une troisième d’un EIAH de conjugaison et le reste du profil peut provenir des évaluations établies à la main par l’enseignant de la classe.

La deuxième partie d’EPROFILEA est dédiée aux transformations des profils. Ces transformations peuvent concerner leur structure ou leurs données (module Groupe qui permet entre autres la constitution d’un profil de groupe à partir des profils des apprenants du groupe) ou préparer la visualisation des profils (module Regards qui permet à un enseignant de définir différentes vues des profils et préciser quelles vues seront accessibles par quel acteur : enseignants, élèves, familles...).

La troisième partie de l’environnement, celle d’exploitation des profils, propose d’une part des activités sur les profils, avec le module Perl, et d’autre part des activités pédagogiques personnalisées définies en fonction du contenu des profils des apprenants, avec le module Adapte.

Le module Perl permettra ensuite la visualisation interactive des profils par les différents acteurs selon les vues déterminées par l’enseignant dans Regards. Il propose également aux apprenants, en plus de la visualisation des profils, des activités sur les profils (reformulation, négociation des éléments du profil...) permettant à l’apprenant d’entrer dans une démarche réflexive par rapport à son apprentissage, et ainsi de mieux assimiler et exploiter les informations qui lui sont fournies (Eyssautier-Bavay et al., 2006).

Le module Adapte quant à lui, vise à donner à l’enseignant les moyens de personnaliser les activités pédagogiques proposées à ses apprenants selon leurs besoins en fonction de ses choix pédagogiques. Pour cela, il permet à l’enseignant de créer des structures d’activités, ainsi que des stratégies pédagogiques qui affectent certaines structures d’activités aux apprenants en fonction de leur profil. Enfin, l’enseignant définit un contexte d’utilisation d’une stratégie pédagogique qui lui permettra ensuite de générer des feuilles d’exercices papier-crayon ou des séquences de travail personnalisées dans des logiciels pédagogiques pour chaque profil d’apprenant ou pour le profil de classe (Lefevre, 2009).

2.4. Limites de PMDL et de sa mise en œuvre

Revenons maintenant sur la situation de Valérie, une enseignante de CM2 qui exploite non seulement les connaissances de ses élèves contenues dans leurs profils, mais aussi l’évolution de ces connaissances. Le langage PMDL et sa mise en œuvre dans l’environnement EPROFILEA ne permettent pas de modéliser les profils évolutifs dont Valérie a besoin. Pour représenter de tels profils, il est nécessaire de prendre en compte explicitement le caractère potentiellement évolutif des profils, à la fois dans le langage de modélisation de profils PMDL, et dans sa mise en œuvre dans EPROFILEA.

En effet, dans le langage et l’environnement associé décrits ci-dessus, il n’est pas possible de garder trace des états de connaissances précédents des apprenants, et encore moins d’exploiter ces informations pour étudier par exemple l’évolution des connaissances des apprenants dans une période donnée.

3. L’évolutivité dans les modèles de PERLEA

Dans cette section, après une définition du concept de profils d’apprenants évolutifs, nous montrons comment nous avons fait évoluer d’une part les modèles et d’autre part les outils du projet PERLEA, afin qu’ils prennent en charge l’évolutivité dans la gestion des profils.

3.1. Le concept de profil d’apprenant évolutif

Dans le cadre du projet PERLEA, un profil d’apprenant hybride et évolutif désigne un fichier rassemblant diverses informations sur l’apprenant. Ces informations peuvent concerner ses connaissances, compétences, conceptions, son comportement, ou encore des informations d’ordre métacognitif. Un tel profil peut comporter des informations provenant de différentes sources qui peuvent être hétérogènes : on parle alors de profil hybride. Les informations qu’il contient peuvent également porter sur différentes périodes pour un même élément évalué : on parle alors de profil évolutif.

Ainsi, la notion de profils évolutifs fait référence à l’évolution des données d’un apprenant dans son profil.

Reprenons l’exemple du profil papier-crayon de l’élève de maternelle de la Figure 2. Ce profil est évolutif : il conserve les résultats de toutes les évaluations réalisées au cours des six périodes d’évaluation de maternelle, afin de suivre l’évolution des compétences des apprenants. Ainsi, on constate que l’apprenant a progressé dans l’année de petite section pour l’élément « Dénombre de petites quantités » du thème « Approche des quantités ». En effet, cette compétence était « en cours d’acquisition  » lors de la première période d’évaluation et « acquise » lors de la seconde période. Au contraire, l’apprenant a régressé en moyenne section pour la compétence « Réalise un assemblage d’objets simples d’après un modèle » du thème « Domaine des formes et des grandeurs », puisqu’elle était « en cours d’acquisition + » lors de la première période et « en cours d’acquisition - » lors de la seconde période. Contrairement à cet exemple, la plupart des profils ne sont pas évolutifs, à l’instar de celui de Maxicours (cf. Figure 3). Pour ces profils, il n’est donc pas possible de repérer les domaines dans lesquels l’apprenant a obtenu des résultats constants et ceux dans lesquels il a progressé ou régressé.

3.2. Extension du langage PMDL en PMDLe

La prise en compte du concept de profil évolutif d’apprenant a occasionné la modification et l’extension du langage de modélisation de profils PMDL vers PMDLe, pour PMDL évolutif.

Pour respecter le concept de profil évolutif d’apprenant et donc permettre à un profil de contenir des informations portant sur différentes périodes pour un même élément évalué, il est nécessaire de conserver dans les données du profil d’un apprenant chaque valeur et chaque commentaire, en les associant à une date et éventuellement à une source d’évaluation. C’est pourquoi certains éléments du langage PMDL, qu’ils concernent la partie structure ou la partie données, ont été modifiés (Ginon et al., 2010). Ainsi, le contenu de l’élément valeur_p de PMDL dont la représentation graphique est donnée en Figure 8, a été modifié dans PMDLe (cf. Figure 9). Il contient désormais zéro, une ou plusieurs évaluation. Les évaluation contenues dans les éléments valeur_p sont associées à une date, une valeur, éventuellement une source, ce qui permet d’associer à valeur_p une nouvelle valeur, sans supprimer les précédentes. L’élément optionnel commentaire est remplacé dans PMDLe par l’élément optionnel commentaires. Dans PMDL, une valeur_p contenait un unique commentaire, sous forme d’une chaîne de caractères : ainsi, chaque nouveau commentaire associé à valeur_p remplaçait le précédent, dont on ne gardait aucune trace. Au contraire, commentaires de PMDLe contient zéro, un ou plusieurs commentaire. Chaque commentaire de PMDLe est associé à une date, un texte destiné à contenir le commentaire et éventuellement une source, ce qui permet d’associer un nouveau commentaire à valeur_p sans supprimer les commentaire précédents.

Figure 8 : Représentation graphique de valeur_p dans PMDL.

Figure 9 : Représentation graphique de valeur_p dans PMDLe.

En définissant PMDLe, nous avons également complété PMDL au delà de ce que nécessitait la prise en compte de l’évolutivité en permettant par exemple d’associer à un profil autant d’informations sur l’apprenant que l’utilisateur le veut, structurées comme il le souhaite, et non plus seulement un nom et un prénom comme c’était le cas dans PMDL, ou en ajoutant la notion de source d’une évaluation qui manquait jusqu’à présent.

Ainsi, PMDLe permet maintenant de représenter non seulement les données personnelles des apprenants (qu’elles soient d’ordre comportemental, cognitif ou métacognitif), mais permet aussi de prendre en compte la temporalité dans les profils (grâce aux modifications apportées au langage décrites ci-dessus), le temps passé sur les activités (par la gestion de plusieurs valeurs pour une même composante : une pour valuer la composante, l’autre pour indiquer le temps passé), ainsi que le lien vers les productions associées aux évaluations.

Prenons l’exemple des profils utilisés par les enseignants de l’école maternelle Antoine Raymond de Lyon 6ème, dont nous avons donné un exemple en Figure 2. La Figure 10 et la Figure 11 montrent un extrait d’un même profil d’apprenant : la partie correspondant à la composante « Approche des quantités » de la brique « Découvrir le monde ». Dans la Figure 10 cet extrait est écrit en PMDL et donne seulement la dernière valeur de chaque élément du profil ; dans la Figure 11, il est écrit en PMDLe et permet donc de voir l’évolution des connaissances de l’élève pour cette composante.


Figure 10 : Extrait d’un fichier de profil d’apprenant non évolutif dans EPROFILEA.

En comparant ces deux extraits, nous constatons que le premier profil ne peut contenir que des informations relatives à une unique évaluation pour la sous-composante « Connait la comptine numérique orale » de la composante « Approche des quantités » : NA (cf.  sur la Figure 10) et qu’en cas de nouvelle évaluation, ces informations seront perdues car remplacées par de nouvelles. Au contraire, dans le second profil, qui est évolutif, les informations relatives à chaque évaluation sont conservées, modifiables et réutilisables (cf.  à  sur la Figure 11). Par exemple, la Figure 11 montre en  que l’apprenant avait le niveau ECA+ pour la sous-composante « Connait la comptine numérique orale » lors de l’évaluation du 2009/01/21, puis en  qu’il avait le niveau A pour l’évaluation du 2009/06/07. Ces informations n’avaient pas été conservées par le profil non évolutif. De plus, le profil non évolutif ne conservait ni la date ni la source des évaluations, au contraire du profil évolutif. De même, on voit que le second profil conserve chaque commentaire, contrairement au premier. Ainsi, dans notre exemple, l’apprenant avait le 2009/06/11 comme commentaire relatif à la brique « Découvrir le monde », « Bon travail toute l'année » , alors que le 2010/06/18, le commentaire était « Bon travail mais quelques difficultés de concentration » . Là encore, l’évolution de l’évaluation est porteuse de sens et est intéressante pour les différents acteurs de l’apprentissage.

Figure 11 : Extrait d’un fichier de profil d’apprenant évolutif dans EPROFILEA.

3.3. Évaluation de l'expressivité de PMDLe

Comme nous l’avions fait pour PMDL, nous avons réalisé une évaluation de l'expressivité du langage PMDLe en prenant en compte deux aspects : le cadre d’application du langage et l’expressivité de PMDLe dans ce cadre.

La Figure 12 synthétise le cadre d’application de PMDLe en représentant les 20 dimensions du profil d’apprenant que nous avons présentées en introduction. Pour chacune de ces dimensions nous y donnons le degré de prise en compte par PMDLe de plusieurs éléments représentatifs et pertinents dans notre contexte, ce à l’aide d’une échelle graphique comportant quatre niveaux (un triangle positionné à gauche – niveau 0 – indique un élément non pris en charge dans PMDLe, un triangle positionné à droite – niveau 3 – indique un élément entièrement pris en charge, les positions intermédiaires – niveaux 1 et 2 – correspondent à des éléments partiellement pris en charge). Certaines dimensions sont peu pertinentes pour la définition du cadre d’application du langage, car triviales, mais à des fins de clarté et d’exhaustivité, nous étudions toutefois systématiquement les 20 dimensions du profil d’apprenant.

 

Figure 12 : cadre d'application de PMDLe.

PMDLe permet tout d’abord d’établir le profil de n’importe quel sujet (niveau 3, cf. 1 sur la Figure 12 : apprenant, groupe d’apprenants, classe...). Par contre, il est nécessaire de nuancer en ce qui concerne les activités. En effet, du point de vue de la distance (cf. 3 sur la Figure 12), les activités présentielles, semi-distancielles ou distancielles sont indifféremment prises en compte par le langage de description de profils (niveau 3). Mais du point de vue de la collaboration (cf. 2 sur la Figure 12), si PMDLe permet parfaitement de représenter des activités individuelles (niveau 3), la représentation d’activités collaboratives semble moins évidente. Il est toutefois difficile d’établir définitivement si PMDLe permet ou non de représenter de telles activités, car nous n’avons pas trouvé de profils d’apprenants intégrant des spécificités structurelles liées au caractère collaboratif des activités empêchant sa représentation en PMDLe, cette incertitude explique le niveau 2 choisi, alors que rien ne prouve que le niveau 3 n’est pas atteint. PMDLe permet de représenter (niveau 3) des profils de toutes disciplines (cf. 4 sur la Figure 12) et de tous niveaux (cf. 5 sur la Figure 12). Par ailleurs PMDLe prend en charge tous les types d’initiateurs (cf. 6 sur la Figure 12), de créateurs (cf. 7 sur la Figure 12) et de destinataires du profil (cf. 8 sur la Figure 12). En effet, que le profil soit créé à l’initiative d’une institution ou d’un enseignant, créé par un enseignant ou un EIAH, ce à destination d’un enseignant ou d’un apprenant, n’a pas de conséquence sur le fait qu’il peut être représenté avec PMDLe (niveau 3 pour ces trois dimensions). Comme nous l’avons montré dans la section précédente, PMDLe prend en charge le temps (niveau 3, cf. 9 sur la Figure 12). Il permet ainsi de garder trace de la date des évaluations, du temps passé sur les activités. Il gère également l’évolution des données (niveau 3, cf. 10 sur la Figure 12) en gardant des traces des différentes valeurs successives des éléments du profil. En ce qui concerne le type des informations traitées (cf. 11 sur la Figure 12), il est également nécessaire de nuancer. Si PMDLe est fait pour traiter le modèle cognitif des apprenants (niveau 3), il est également partiellement capable (niveau 2) de prendre en charge le modèle comportemental, si ses différentes composantes sont préalablement explicitées, mais aussi le modèle du domaine, notamment s’il est représenté par un réseau bayésien. Par contre, il ne gère ni les traces ni les productions des apprenants (niveau 0) dont ll’organisation n’est pas adaptée à la structure d’un profil. Par ailleurs, si PMDLe est prévu pour gérer les profils d’apprentissage, il permet également de prendre en charge les profils de capacités et profils de handicaps (niveau 3), ainsi que, partiellement (niveau 2), les profils d’utilisation. En effet, si les profils de capacités et de handicaps ont des organisations comparables à celles des profils d’apprentissage, les profils d’utilisation peuvent être plus proches des modèles comportementaux, et peuvent, comme ces derniers, poser des problèmes pour être représentés avec PMDLe si leurs différents éléments ne sont pas préalablement définis. Quelle que soit la nature (cf. 12 sur la Figure 12) des informations à porter dans le profil, PMDLe permet de le faire (niveau 3), qu’il s’agisse de connaissances, de méta-connaissances, de compétences, de conceptions ou même de liens entre des éléments du profil. En raison de la définition générique de la notion d’échelle qu’ils proposent, PMDL et PMDLe permettent de gérer les différentes valuations (niveau 3, cf. 13 sur la Figure 12) possibles. Le cas de la représentation interne des profils (cf. 14 sur la Figure 12) nécessite des explications. En effet, sur la Figure 12, tous les types de représentations internes sont considérés comme gérés par PMDLe (niveau 3), même les faits, règles, plans d’actions et réseaux bayésiens. Cela s’explique par le fait que, dans le cadre d’un langage de description de profils, c’est la représentation externe qui est prise en compte et non la représentation interne. Toutefois il n’existe pas toujours de représentation externe, dans les EIAH, maintenant un profil de l’apprenant. Si l’on souhaite évaluer la pertinence de PMDLe dans ce cadre, il est nécessaire d’utiliser la représentation interne en lieu et place de la représentation externe inexistante ; dans ce cas, les représentations internes sous forme de faits, règles, plans d’actions et réseaux bayésiens ne sont que faiblement pris en charge par PMDLe (niveau 1, cf. partie basse du 15 sur la Figure 12). Par contre, lorsqu’une représentation externe existe, le langage de description de profils sait parfaitement la prendre en charge (niveau 3 sur la partie haute du 15 sur la Figure 12). La forme prise par la visualisation du profil (niveau 3, cf. 16 sur la Figure 12) n’affecte pas sa structure et ne pose pas de problème de prise en charge dans PMDLe. En ce qui concerne le format (cf. 18 sur la Figure 12), PMDLe est également capable de le gérer entièrement (niveau 3). En effet, que le profil soit dans un format texte, tableur, base de données ou XML ne change rien à la structure intrinsèque des informations qu’il contient. De même, les différents normes ou standards éducatifs éventuellement employés (cf. 17 sur la Figure 12) sont entièrement compatibles avec l’utilisation de PMDLe (niveau 3). Enfin, PMDLe est utilisable quelle que soit la plateforme (cf. 19 sur la Figure 12) et le dispositif (cf. 20 sur la Figure 12) employés pour la visualisation.

Après avoir défini ce cadre d’application de PMDLe, nous avons évalué l'expressivité de ce langage dans ce cadre, en étudiant notamment les changements par rapport à l’expressivité de PMDL. Les résultats sont en toute logique assez proches de ceux de l’évaluation de l’expressivité de PMDL. En effet, tous les profils pris en charge par PMDL le sont également naturellement par PMDLe. La plupart des profils sortant du cadre d’application de PMDL peuvent être pris en charge par PMDLe. Mais en ce qui concerne les profils s’appuyant sur un réseau bayésien, le profil résultant peut être représenté sans problème, mais le réseau bayésien lui-même ne peut être représenté que partiellement par PMDLe. Un langage de modélisation de profils ne visant pas à la modélisation de l’étape de constitution des profils, mais à celle des profils eux-mêmes, la représentation des profils résultants est suffisante pour la validation de PMDLe.

Ainsi, dans le cadre d’application du langage, PMDLe permet de représenter tous les profils que nous avons pu étudier.

3.4. Définition de nouveaux opérateurs sur profils

Le langage PMDL est complété par un certain nombre d’opérateurs qui définissent les transformations possibles sur les profils. Ces opérateurs permettent de répondre aux besoins de modification des profils, après leur création, que ces besoins concernent leur structure ou leurs données.

Les opérateurs associés à PMDL ont été identifiés à l’issu d’une analyse des besoins effectuée auprès d’enseignants du primaire et du secondaire avec lesquels nous avons travaillé pendant plusieurs mois. Ces opérateurs sur des profils PMDL ont été définis de manière semi-formelle. Ils permettent par exemple de lire les commentaires contenus dans les éléments texte, d’ajouter ou supprimer un élément à un profil, de constituer un profil de groupe à partir des profils de plusieurs apprenants ayant la même structure : le profil ainsi obtenu aura la même structure que les profils d’apprenants à partir desquels il a été créé, mais les valeurs qu’il contiendra seront calculées à partir des valeurs contenues dans les profils individuels (Eyssautier-Bavay, 2008).

Les opérateurs sur profils respectant le formalisme PMDL restent adaptés pour les profils évolutifs respectant le formalisme PMDLe. Mais grâce aux nouvelles possibilités offertes par PMDLe en raison de la prise en compte de l’évolutivité dans les profils, de nouveaux opérateurs peuvent être définis : nous avons ainsi défini huit nouveaux opérateurs en nous appuyant d’une part sur les opérateurs existants et les nouvelles possibilités offertes par PMDLe, et d’autre part sur les comptes-rendus d’entretiens effectués avec les enseignants de notre étude initiale (cf. Figure 13).

Les opérateurs de compression par moyenne (cf.  de la Figure 13) ou par somme  permettent de réduire un élément en remplaçant toutes les évaluations dont la date est comprise dans un certain intervalle par une évaluation qui a pour valeur la moyenne ou la somme des évaluations remplacées. Ces opérateurs prennent en entrée le profil, l’élément concerné et un ensemble de deux dates constituant un intervalle. L’une ou l’autre de ces deux dates peut être nulle, dans le cas où l’on voudrait compresser toutes les évaluations antérieures ou postérieures à une date donnée. L’opérateur renvoie un profil ayant la même structure que le profil initial, mais dans lequel l’élément spécifié a été compressé. Cela peut permettre de conserver une trace de la progression d’un élève, sans pour autant garder chaque résultat intermédiaire dans son profil. Prenons l’exemple de Sylvain, un enseignant de biologie en Licence, qui propose à ses étudiants une petite évaluation en début de chaque semaine. Sylvain utilise les résultats de chaque petite évaluation afin de savoir si une partie précise de son cours a été mal comprise par beaucoup d’étudiants, dans ce cas il donnera une explication supplémentaire avant le prochain cours. À la fin d’un semestre, Sylvain souhaite cependant que les profils de ses étudiants ne contiennent plus que cinq notes, correspondant à une moyenne des petites évaluations portant sur chacun des cinq chapitres constituant sont cours. Pour cela, il devra appliquer aux profils de ses étudiants l’opérateur de compression par moyenne pour chacun de cinq chapitres, avec les dates de début et de fin du chapitre en paramètres.

Figure 13 : Nouveaux opérateurs sur profils évolutifs.

Les opérateurs de concaténation des commentaires sur un élément  ou sur un profil  permettent de compresser un profil ou un élément en remplaçant tous les commentaire qu’il contient par un seul commentaire qui contiendra la concaténation de la date, de la source et du contenu des commentaire remplacés. Ces opérateurs peuvent être utilisés en complément des opérateurs de moyenne ou de somme. Ils permettent en effet de compresser sans perte d’information les commentaires, sur lesquels on ne peut pas faire d’opération arithmétique contrairement aux informations comportant des valeurs numériques. Reprenons l’exemple de Sylvain qui enseigne la biologie en Licence. Après avoir utilisé l’opérateur de compression par moyenne sur les profils de ses étudiants afin d’obtenir une moyenne pour chacun des cinq chapitres de son cours, Sylvain peut souhaiter conserver les commentaires qui étaient associés à chaque petite évaluation, tout en les rassemblant en un seul commentaire par chapitre. Pour cela, il doit utiliser l’opérateur de concaténation des commentaires sur les profils de ses étudiants, avec les dates de début et de fin du chapitre en paramètres.

Les opérateurs de filtrage sur un élément  ou un profil  prennent en entrée un profil, éventuellement un élément, ainsi que deux dates. Ils permettent de réduire un profil en ne gardant que les informations dont la date est comprise dans la période spécifiée par les deux dates. Reprenons l’exemple de Sylvain qui enseigne la biologie en Licence. En cours de semestre, Sylvain s’aperçoit qu’une partie d’un chapitre de son cours a été trop difficile pour des étudiants de Licence et souhaite donc supprimer les commentaires et évaluations correspondant à cette partie de son cours. Pour cela, il doit appliquer l’opérateur de filtrage sur les profils de ses étudiants, avec les dates du début et de la fin de cette partie de son cours.

Les opérateurs d’intersection sur profil  ou sur élément  permettent de réaliser une intersection entre deux profils d’apprenants, dans le but de ne conserver que les évaluations communes aux deux profils, pour tout le profil ou pour un élément, et pour une période donnée. Cela peut par exemple permettre à un enseignant de ne conserver dans les profils que les parties communes à tous les élèves d’une classe. Reprenons l’exemple du profil évolutif d’un élève de maternelle, donné en Figure 2. Certains éléments évalués ont le même intitulé pour les trois sections de maternelles alors qu’ils ne correspondent pas exactement aux mêmes exercices selon la section. Par exemple, pour l’élément « Connait la comptine numérique orale », la comptine numérique comporte 5 nombres pour les enfants de petite section, 10 pour ceux de moyenne section et 30 pour ceux de grande section. Pour connaître l’évolution de l’apprenant pour cet élément, il est donc important de ne considérer que les évaluations relatives à la même année de maternelle. En effet, on observe qu’à la seconde période d’évaluation de petite section, l’apprenant de l’exemple avait « acquis » cette compétence, alors qu’elle était notée « en cours d’acquisition  » pour la première période d’évaluation de moyenne section. Il ne s’agit cependant pas d’une régression, puisque la comptine numérique évaluée n’est pas la même dans toutes les sections : elle est plus longue et donc plus complexe lorsque l’apprenant passe dans la section supérieure. Dans ces conditions, il est nécessaire d’utiliser un opérateur de filtrage afin de ne conserver que les évaluations d’une même année avant de chercher à déterminer l’évolution de l’apprenant pour un élément donné.

3.5. cPMDLe

Le modèle de contraintes sur profils cPMDL définit les différentes contraintes qui peuvent être associées à un profil d’apprenant défini selon le formalisme PMDL (Lefevre, 2009). Trois types de contraintes sont définis par cPMDL : les contraintes sur profils portant sur une valeur, celles portant sur un élément et celles portant sur le nombre d’occurrences. Dans le but d’exploiter les nouvelles possibilités offertes par PMDLe, nous avons défini trois nouveaux types de contraintes ajoutés à cPMDL pour étendre celui-ci en cPMDLe, pour cPMDL évolutif : contraintes d’évolution sur profils portant sur une valeur, sur un élément ou sur un nombre d’occurrences. Ces types de contraintes correspondent aux types existant dans cPMDL, lesquels sont toujours valables avec les profils évolutifs, mais portent spécifiquement sur le caractère évolutif des profils.

Grâce à ces nouvelles contraintes, il est possible d’étudier l’évolution des résultats d’un apprenant pour un élément du profil donné et sur une période donnée, afin de déterminer si cet apprenant a progressé, régressé ou bien s’il a obtenu des résultats stables. cPMDLe permet de plus de s’intéresser à la régularité de l’évolution des résultats de l’apprenant.

4. L’évolutivité dans l’environnement EPROFILEA

La mise en œuvre du concept de profils évolutifs dans le projet PERLEA, outre la modification des modèles concernés, a occasionné la modification des différents modules de l’environnement EPROFILEA (cf. Figure 7). En effet, les changements dans le langage de description de profils ont été répercutés dans son opérationnalisation dans EPROFILEA, ce à la fois pour la définition de structures de profils dans Bâtisseur, leur complétion dans Prose et/ou Tornade, leurs transformations éventuelles dans Groupe et leurs exploitations dans Adapte et Perl.

5. Conclusion et perspectives

Dans cet article, nous avons traité la notion d’évolutivité dans les profils d’apprenants, ainsi que sa prise en compte à la fois dans les modèles et dans les outils du projet PERLEA, en maintenant l’approche générique revendiquée dans le projet. Après avoir défini le concept de profil évolutif d’apprenant, nous montrons dans un premier temps comment nous avons fait évoluer le langage de modélisation de profils PMDL vers PMDLe, qui prend en charge le caractère évolutif des profils. PMDLe permet ainsi de conserver dans le profil d’un apprenant, si l’enseignant le souhaite, chaque résultat d’évaluation et chaque commentaire, en les associant à des informations telles que la date et la source de l’évaluation. L’intégration du concept d’évolutivité permet ainsi de conserver des informations sur la progression des apprenants.

Cette évolution de PMDL en PMDLe a eu des conséquences sur les modèles et logiciels qui y sont liés : les opérateurs sur profils et contraintes sur profils, mais également l’environnement EPROFILEA. Nous avons donc répercuté ces changements dans les modèles concernés et dans les différents modules de l’environnement EPROFILEA.

L’ensemble de l’environnement EPROFILEA permet maintenant de gérer des profils d’apprenants non seulement hybrides, mais désormais également évolutifs. Les structures de profils et les profils utilisés dans l’environnement EPROFILEA doivent désormais respecter le formalisme de PMDLe. Néanmoins, afin d’assurer la compatibilité avec les profils non évolutifs, et donc la transition entre PMDL et PMDLe, il est possible d’utiliser le module Tornade pour insérer les informations qu’ils contiennent dans une nouvelle structure de profils évolutive.

Cette prise en compte de la notion d’évolutivité pour la gestion des profils d’apprenants ouvre de nouvelles perspectives pour le projet PERLEA. Tout d’abord, l’évolutivité d’un profil d’apprenant devra être prise en compte lors de la visualisation de ce profil. En effet, un profil d’apprenant évolutif permettra de visualiser non seulement le profil, mais aussi la progression d’un apprenant sur une période donnée. Cela permettra également, au-delà des différentes activités prévues sur les profils, de créer des activités autour de la notion d’évolutivité d’un profil d’apprenant, comme la définition d’objectifs pour l’apprenant. Ainsi, un enseignant pourra par exemple définir avec un apprenant un objectif à atteindre, puis visualiser avec lui les résultats qu’il aura obtenus, et ultérieurement déterminer si l’objectif a été atteint ou non, voire dépassé. Ensuite, la prise en compte de l’évolutivité des profils dans EPROFILEA permet d’étendre les possibilités de personnalisation des activités pédagogiques permises par Adapte.

Outre la validation du langage de modélisation de profils PMDLe par la définition de son cadre d’application associée à l’évaluation de son expressivité dans ce cadre d’application, ce travail a été évalué par de premières mises à l’essai de l’environnement EPROFILEA intégrant la notion d’évolutivité des profils. Cette mise à l’essai a concerné l’ensemble de l’environnement et a été conduite auprès de 48 étudiants dans un premier temps en tant qu’apprenant pour visualiser l’évolution de leurs profils et dans un second temps en tant qu’enseignant pour agir sur l’ensemble du processus de gestion de profils et notamment établir des profils évolutifs. Le concept de profil évolutif n’a pas posé de problème aux étudiants, ils ont su faire le lien entre le profil évolutif visualisé et leurs résultats dans l’enseignement concerné. Ils ont également pu manipuler la notion de profils d’apprenants évolutifs du point de vue enseignant. Cette mise à l’essai ne constitue qu’un embryon de l’évaluation à réaliser pour valider l’environnement EPROFILEA. Nous sommes conscientes que la validation d’un tel travail requiert un travail conséquent qui se doit d’être pluridisciplinaire.

Le langage PMDLe que nous proposons prend en charge des profils beaucoup plus variés que les approches existantes. Parmi les normes pédagogiques existantes, certaines prennent en compte le temps (comme PAPI (PAPI, 2002) et IMS-LIP (IMS-LIP, 2001) qui permettent de stocker des informations sur les performances de l’apprenant pour différentes périodes). Par rapport à ces approches, PMDLe permet de représenter des profils plus détaillés, correspondant mieux aux besoins des enseignants ou des institutions scolaires. Contrairement au langage UserML (Heckmann et al., 2003), il ne s’agit pas d’un langage imposé, mais d’un langage pivot entre différents langages existants (qui peuvent être implicites) et le langage de l’environnement de gestion de profils. Il n’impose pas de sémantique prédéterminée comme le font les ontologies pédagogiques (Desmoulins et al., 2006), (Heckmann et al., 2005), (Moulet, 2011), il peut ainsi s’adapter aux besoins particuliers des enseignants, sans forcément suivre les conventions imposées par les institutions. Par rapport aux approches de type e-portfolios, qui permettent de garder trace de plusieurs périodes d’apprentissage en indiquant la date de l’évaluation (Mason et al., 2004), (Eyssautier-Bavay, 2004), (EuroLMAI, 2010), PMDLe permet d’établir des profils plus généraux, applicables à des contextes plus variés. De plus, par rapport aux logiciels adoptant une approche en partie similaire à la nôtre, PMDLe adopte une approche plus générique que VisMod (Zapata-Rivera et al., 2004) et que DynMap+, qui a l’avantage de prendre en compte l’évolution dans les profils (Rueda et al., 2006), et plus souple que celle de (Ramandalahy et al., 2009). Enfin, par rapport aux démarches d’interopérabilité entre modèles de l’utilisateur (Celik et al., 2008), (Brusilovsky et al., 2008), (Conlan et al., 2004), (Walsh et al., 2009), (Tortarolo et al., 2009), notre approche ne permet pas seulement l’interopérabilité entre n formats donnés ou m lieux donnés, mais une interopérabilité plus générale, ne se limitant pas à certains systèmes et n’imposant pas de connaître préalablement la structure et la sémantique des profils concernés. Du point de vue de l’évolutivité des données du profil de l’apprenant, l’approche la plus proche de la nôtre est celle proposée par (Moulet et al., 2008), (Moulet, 2011). (Moulet, 2011) propose en effet un modèle de l’apprenant qualifié de cognitif, évolutif, interopérable et qui intègre la notion de points de vue multiples. Ce modèle permet de représenter des connaissances, compétences et habiletés. Il prend en charge des points de vue différents : différents acteurs peuvent établir différentes instances du modèle d’un même apprenant, les conflits possibles entre ces différentes instances étant gérés par le modèle. Ce modèle est en outre annoncé comme interopérable, mais l’interopérabilité y est uniquement assurée par un stockage des modèles au format XML. Ce modèle de l’apprenant ambitionne de couvrir l’ensemble des besoins actuels. Pour cela, il dispose de certains paramètres modifiables pour l’adapter à des contextes différents de ceux prévus initialement et il est connectable à différentes ontologies, représentant les domaines à couvrir par le modèle de l’apprenant. Enfin, ce modèle gère l’évolutivité, dans quatre circonstances pré-identifiées, en définissant de nouvelles versions du modèle de l’apprenant instancié. Ce modèle est partiellement mis en œuvre au sein du prototype de recherche Nosma. Cette approche diffère de la nôtre par différents points. En effet, le modèle paramétrable proposé n’a pas la même puissance que le méta-modèle que nous proposons à travers le langage de modélisation de profils PMDLe. Par ailleurs, en s’attachant à des ontologies, même s’il est possible de les choisir, l’approche a les même défauts de faible couverture que les approches a priori : ainsi, de nombreux profils ne pourront pas être représentés à l’aide de ce modèle. Enfin, cette approche ne prévoit pas d’utilisation des modèles d’apprenants comme nous le faisons avec les différentes exploitations des profils d’apprenant personnalisées. Ainsi, du point de vue de l’évolutivité des données du profil de l’apprenant, notre approche est plus souple que les quatre niveaux de granularité permis par le prototype Nosma (Moulet, 2011).

Les travaux présentés dans cet article montrent d’une part la faisabilité de la prise en compte de l’évolutivité des profils d’apprenants dans une approche générique, et d’autre part rendent possible des exploitations particulièrement riches de ces profils évolutifs.

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À propos des auteurs

Stéphanie JEAN-DAUBIAS est maître de conférences en informatique à l’Université Claude Bernard Lyon 1. Elle est rattachée au LIRIS (Laboratoire d'InfoRmatique en Images et Systèmes d'information, UMR 5205) au sein de l'équipe SILEX (Supporting Interaction and Learning by Experience). Ses recherches portent sur l’ingénierie des profils d’apprenants et la personnalisation des apprentissages. Elles sont mises en œuvre, principalement au sein des projets PERLEA et AMBRE, sous forme d’outils d’assistance destinés aux enseignants.

Adresse : Université de Lyon, CNRS - Université Lyon 1, LIRIS, UMR5205, F-69622, France

Courriel : Stephanie.Jean-Daubias@liris.univ-lyon1.fr

Toile : http://liris.cnrs.fr/stephanie.jean-daubias/

Blandine GINON commence une thèse en informatique au sein de l’équipe Silex du LIRIS. Après plusieurs stages sur le projet PERLEA, elle travaille maintenant à la proposition d’un assistant intelligent visant à faciliter l’articulation entre des EIAH génériques et les spécificités des besoins de leurs utilisateurs.

Adresse : Université de Lyon, CNRS - Université Lyon 1, LIRIS, UMR5205, F-69622, France

Courriel : Blandine.Ginon@liris.cnrs.fr

Toile : http://liris.cnrs.fr/blandine.ginon/

Marie LEFEVRE est en post-doctorat au LIRIS au sein de l'équipe SILEX. Ses recherches portent sur la personnalisation de l’apprentissage, et notamment sur la proposition de modèles et d’outils génériques permettant à chaque enseignant d’obtenir, pour chacun de ses élèves, des activités pédagogiques adaptées d’une part à ses intentions pédagogiques et d’autre part au profil de l’élève. Elle s’intéresse également à l'étude des interactions utilisateur pour la construction d'outils d'assistance dynamiques et adaptables, notamment au sein de wikis sémantiques distribués.

Adresse : Université de Lyon, CNRS - Université Lyon 1, LIRIS, UMR5205, F-69622, France

Courriel : Marie.Lefevre@liris.cnrs.fr

Toile : http://liris.cnrs.fr/marie.lefevre/

 

 
Référence de l'article :
Stéphanie Jean-Daubias, Blandine Ginon, Marie Lefevre, Modèles et outils pour prendre en compte l’évolutivité dans les profils d’apprenants, Revue STICEF, Volume 18, 2011, ISSN : 1764-7223, mis en ligne le 31/01/2012, http://sticef.org
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Mise à jour du 31/01/12