Sciences et Technologies de l´Information et de la Communication pour l´Éducation et la Formation |
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Volume 17, 2010 |
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1. IntroductionEn France, il est possible d’accéder à l’enseignement supérieur sans pour autant obtenir le baccalauréat. Une des possibilités offerte est l’obtention du diplôme d’accès aux études universitaires (DAEU). Après une expérience professionnelle ou une période de chômage le candidat peut s’inscrire pour l’obtention de ce diplôme1. Il remplace depuis 1994, l’ancien Examen Spécial d’Accès aux Etudes Universitaires (ESEU) créé en 1957, et confère les mêmes droits que ceux qui sont liés au succès du baccalauréat français2. Son public est composé d’adultes en reprise d’études. A l’université de Haute Alsace (qui comprend les sites de Mulhouse et de Colmar) trois modes d’enseignement sont proposés afin de permettre à ces adultes de suivre les cours permettant l’obtention du DAEU : un mode présentiel qui suppose que ceux qui apprennent sont dans une même salle de cours avec en face à face un enseignant en même temps, un mode à distance par correspondance qui, lui, fonctionne grâce à l’utilisation dominante de l’écrit et de l’envoi des cours par le biais de la poste (Glickman, 2002). Enfin un mode sous forme de plate forme numérique qu’on appelle aussi enseignement en ligne. Ce mode d’enseignement étant défini par (Ally, 2004) : voir (Col et Fenouillet, 2007, p.9) « comme l’utilisation d’Internet pour accéder à des ressources pédagogiques, des enseignants, à d’autres apprenants, des supports... ». Notre questionnement porte sur l’intérêt de la mise en place de ces trois modes d’enseignement. Existerait-il une différence d’efficacité, en termes de réussite, selon que l’on choisisse l’un ou l’autre de ces modes d’enseignement ? En d’autres termes, existerait-il un effet « mode d’enseignement » sur la réussite des étudiants ? de la même manière qu’il existe un effet maître ou un effet établissement. Les travaux de recherches portant sur l’efficacité de l’enseignement à distance sont nombreux (Orivel et Si Moussa, 2001) ; (Fenouillet et Déro, 2006) ; (Ben Abid-Zarrouk et Audran, 2008) de même que les travaux portant sur l’efficacité des technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE) ne sont pas nouveaux (Eicher, 1983) ; (Orivel, 1996) ; (Ben Abid, 2000). Généralement l’analyse de l’efficacité des modes d’enseignements à distance s’effectue en comparaison de l’enseignement présentiel sans que l’on différencie l’enseignement par correspondance de l’enseignement en ligne, partant du principe que le second a remplacé le premier. Cependant, en France notamment, ce mode d’enseignement occupe toujours une place importante dans l’offre d’enseignement à distance, même si les acteurs des centres de formations n’en font pas leur vitrine principale (Glickman, 2002). A ce titre, que sait-on aujourd’hui de l’apport de l’enseignement par Internet comparativement à celle de l’enseignement par correspondance, en termes d’efficacité ? En quoi l’Internet révolutionnerait-il la formation ? (Glickman, 2002). Notre contribution a pour but de déterminer s’il existe ou non une réelle plus value en termes d’efficacité de l’enseignement en ligne comparativement à l’enseignement par correspondance et, par ricochet, par rapport à l’enseignement présentiel. Nous avons donc cherché à évaluer l’efficacité en termes de réussite de ces trois modes d’enseignement. Notre approche méthodologique a consisté d’une part à comparer les publics des différents modes d’enseignement et d’autre part à comparer les résultats obtenus aux examens finaux des étudiants candidatant au DAEU. 2. La problématique de l’évaluation de l’efficacité de l’enseignement à distance.Dans l’introduction nous avons défini rapidement les trois modes d’enseignement proposés par l’Université de Haute Alsace et notamment celui par correspondance et celui de l’enseignement en ligne, englobés tous deux dans la même terminologie d’enseignement à distance. Le but était d’éclairer, dès les premières lignes, le lecteur sur l’objet de notre recherche. Nous sommes, cependant conscients que le terme d’enseignement à distance est beaucoup plus complexe à définir tant il se cache derrière ce terme des formes d’enseignement diverses et variées (Glickman, 2002). De manière générale, l’enseignement à distance est caractérisé par la séparation ou l’éloignement physique de l’enseignant et de l’enseigné lors des enseignements (Rumble, 1997) ; (Ben Abid 2000). En France, le terme d’enseignement à distance est de moins en moins utilisé par les chercheurs et on lui préfère celui de formation à distance (Glickman, 2002). Cette dernière dénomination suppose que l’on cherche à prendre en compte à la fois l’enseignement à distance mais aussi l’apprentissage à distance dans un but d’analyse du processus d’apprentissage (Glickman, 2002), ce qui n’est pas notre cas présentement. En effet, la notion d’apprentissage n’est pas notre sujet d’étude, seule l’efficacité, en terme de réussite, du mode de transmission du savoir nous intéresse. L’enseignement en ligne qui est traduit en anglais par e-learning3, est une des formes de l’enseignement à distance et est tout aussi difficile à définir tant, selon (Glickman, 2002), p.57) « il est difficile d’introduire de la rigueur dans tous ces termes qui ont tout autant pour fonction de décrire que de promouvoir des dispositifs de formations très divers ». Fenouillet et Déro (2006) recensent, rien que pour ce terme, 13 vocables s’en rapprochant. Les auteurs rappellent qu’un chercheur comme (Romiszowski, 2003) après avoir inventorié près d’une vingtaine de définitions a construit un tableau regroupant les principales caractéristiques des différentes formes d’application de l’e-learning (Fenouillet et Déro, 2006), p 88. Malgré cela et par souci de clarté nous avons cherché parmi les définitions existantes celles qui se rapprocheraient le plus des modes d’enseignement proposés par l’Université de Haute Alsace. Ainsi, pour l’enseignement en ligne nous utiliserons la définition de l’e-learning du lexique proposé par le Forum Français de la Formation Ouverte et à Distance (Glickman, 2002). En effet, l’e-learning est défini comme étant tout dispositif de formation qui utilise un réseau local, étendu ou Internet pour diffuser, ou interagir ou communiquer. Est inclut l’enseignement à distance en environnement distribué, hors enseignement par correspondance classique, l’accès à des ressources par téléchargement ou en consultation sur Internet. Il peut faire intervenir du synchrone ou de l’asynchrone, des systèmes tutorés, des systèmes à base d’autoformation, ou une combinaison des éléments évoqués. A l’Université de Haute Alsace (UHA) l’enseignement en ligne proposé fonctionne sous forme de cours hypermédia sur écran, sous forme de papiers imprimables, d’exercices d’auto-évaluation à réaliser en ligne et d’interactions verbales d’étayage réalisées grâce aux forums virtuels de discussions entre tuteurs et étudiants ou entre étudiants seulement. L’enseignement par correspondance est lui plus simple à caractériser puisque c’est un mode d’enseignement où l’enseignant et l’enseigné sont séparés par le temps et le lieu et interagissent essentiellement par voie épistolaire même s’ils peuvent, aussi, communiquer par téléphone ou par courrier électronique (Glickman, 2002). On notera que les étudiants inscrits par correspondance à l’UHA peuvent aussi échanger avec leurs enseignants et le personnel administratif par téléphone, ou email4. Enfin le mode d’enseignement présentiel se caractérise par la coprésence de l’enseignant et de l’enseigné dans un même lieu au même moment et les interactions se font en face à face. (Glickman, 2002). A l’UHA, les cours pour la préparation au DAEU en présentiel ont lieu le soir dans une classe, un enseignant donne cours et interagit avec les étudiants en face à face. Donner une définition de l’efficacité est relativement difficile et « le choix de telle ou telle définition correspond plus à une certaine commodité de mesure qu’à la prise en compte de tout ce que cette notion peut englober... » (Eicher, 1983). En économie de l’éducation, on distingue habituellement l’efficacité externe de l’efficacité interne. La première répond aux objectifs de la société puisqu’elle mesure la capacité du système éducatif dans son ensemble ou au sein d’une institution scolaire déterminée, à préparer les élèves et les étudiants à leur rôle futur dans la société, elle s’apprécie à travers les perspectives d’emploi et de gains des étudiants... L’efficacité interne s’intéresse, elle, aux relations entre les inputs éducatifs et les résultats scolaires (Psacharopoulos et Woodhall, 1988). C’est donc à travers l’indicateur efficacité interne, que l’on va mesurer, dans notre cas, l’efficacité des modes d’enseignement. Lorsqu’il s’agit de mesurer l’efficacité interne on fait le choix de l’estimation de l’efficacité pédagogique mesurée par des résultats à des tests de connaissances (Eicher, 1983). Evaluer l’efficacité de tel ou tel système d’enseignement suppose la comparaison avec des modes d’enseignements de référence afin d’estimer lequel d’entre eux est le plus efficient notamment en termes d’« efficacité pédagogique » et de coût (Orivel et Orivel, 1999). Ainsi l’enseignement à distance est très souvent comparé à l’enseignement présentiel et l’on étudie et analyse les différences en termes d’efficacité interne (Ben Abid-Zarrouk et Audran, 2008) mais aussi en termes d’équité et d’efficience (Ben Abid et Orivel, 2000). Dans notre cas, l’appréciation de l’efficacité interne s’effectuera à partir de la mesure des taux de réussite ou d’échec aux examens à la fois par rapport aux inscrits et par rapport aux présents aux examens. Cette distinction nous permet de prendre en considération le taux d’abandon dans l’évaluation. La part des étudiants qui quittent le cursus avant les examens finaux est relativement importante, notamment en enseignement à distance puisqu’elle avoisine généralement les 50% et qu’elle est habituellement plus importante qu’en formation présentielle (Ben Abid, 2000). La prise en compte de ce taux est d’autant plus essentielle qu’il a un impact direct sur l’évaluation de l’efficacité interne. En effet, si cette dernière est mesurée en tenant compte des abandons durant le cursus, elle sera particulièrement faible (ces derniers étant considérés comme des échecs) comparativement à l’enseignement présentiel. Au contraire, si elle est appréciée uniquement à partir des présents à l’examen, elle sera relativement plus importante (Ben Abid, 2000) ; (Eicher, 1983)5. En enseignement en ligne, des forums de discussions virtuelles, généralistes ou disciplinaires, sont généralement mis en place afin d’éviter l’isolement et ont pour but de faire diminuer le taux d’abandons particulièrement élevé en enseignement à distance (Audran et al., 2008) ; (Peraton, 1993). Les études portant sur l’évaluation des technologies dans l’apprentissage sont contradictoires et la littérature distingue deux courants : un premier dit de Non Significant Difference dans lequel on retrouve les travaux de (Clark, 1983) ; (Clark, 1985) ; (Clark, 1994) et pour qui les technologies n’ont aucun effet sur l’apprentissage. Et un deuxième, qui tendrait à prouver au contraire que l’introduction de ces "Technologie de l’Information et de la Communication en Enseignement" (TICE) dans l’enseignement présentiel pourrait avoir une portée positive sur l’efficacité de l’apprentissage (Orivel et Si moussa, 2001) ; (Col et Fenouillet, 2007). Mais de manière générale, les récentes recherches ont tendance à montrer que « l’e-learning, sous ses diverses définitions, n’a pas pour effet d’augmenter ou de diminuer la qualité de l’apprentissage » (Col et Fenouillet, 2007, p. 8). Les recherches portant sur l’efficacité en termes de réussite du mode d’enseignement en ligne comparativement à l’enseignement présentiel ont été menées, entre autres, par (Fenouillet et Déro, 2006). Les auteurs ont recensé les principales études nord américaines portant sur l’efficacité de l’e-learning depuis 1994 et en arrivent à la conclusion qu’il n’existe pas de réelles différences de résultats entre le mode d’enseignement présentiel et le mode à distance sous forme numérique. Cette constatation porte non seulement sur des résultats d’études sur la satisfaction des usagers, mais aussi, et surtout sur la comparaison, dans le cas de formations diplômantes, des taux de réussite aux examens d’étudiants ayant suivi un enseignement présentiel et un enseignement à distance. On peut dans ce cas se poser la question du pourquoi de l’explosion de l’enseignement via Internet depuis les années 2000 en France (Fenouillet et Déro, 2006) et si cette croissance exponentielle est justifiée ? (Glickman, 2002) rappelle que les décideurs ont dans les années 2000 fait le choix de ce type d’outils pour des raisons de coût mais aussi d’efficacité : « C’est le « formidable outil » sur lequel ont misé les technologues de l’éducation, fortement encouragé par les pouvoirs publics en quête de solutions économiquement acceptables pour lutter contre l’échec scolaire et augmenter le niveau de qualification de la population dans son ensemble » (Glickman, 2002), p. 185. Cet engouement des pouvoirs publics et de certains chercheurs est essentiellement dû aux outils interactifs proposés par l’enseignement en ligne. Ainsi (Jacquinot, 1993) en montrant l’importance de supprimer la distance, facteur d’abandons en enseignement à distance, propose comme solution, l’interactivité. En effet, l’auteur explique que la perte de la co-présence physique de l’apprenant et de l’enseignant doit être compensée par l’utilisation « de ressources de la médiation technique ». L’isolement physique peut être de cette manière, compensable « en partie par l’interactivité des technologies interactives » (Jacquinot, 1993) : p. 63. L’enseignement en ligne en tant qu’enseignement à distance, doté d’outils interactifs et permettant la flexibilité (Harasim, 2000), serait-il donc plus efficace que l’enseignement par correspondance ? A priori et aux vues de ce que nous venons d’avancer nous émettons l’hypothèse que l’enseignement en ligne est plus efficace que l’enseignement par correspondance, puisqu’il permettrait grâce à ses outils interactifs de réduire les abandons et donc d’améliorer l’efficacité interne mesurée par les taux de réussite. Il y aurait donc un effet mode d’enseignement, plus précisément un impact positif de l’enseignement en ligne, sur la réussite des étudiants. Ainsi choisir l’enseignement en ligne serait plus profitable en termes de réussite comparativement aux autres modes d’enseignements. Notre travail a donc consisté, d’une part à l’étude et à l’analyse du public et des résultats aux examens pour l’obtention du DAEU des étudiants inscrits à l’UHA et d’autre part à estimer l’impact de l’enseignement en ligne sur la réussite comparativement aux deux autres modes d’enseignement. 3. Approche méthodologique3.1. Les caractéristiques de notre populationL’enquête sur l’efficacité de l’enseignement en ligne a été effectuée sur une population d’étudiants passant le DAEU A sur le site de Mulhouse-Colmar et inscrite entre 2002 et 2006. Soit 5 promotions et 274 étudiants. Ces étudiants se sont inscrits soit en enseignement en ligne (93), soit en enseignement présentiel (92), soit en enseignement par correspondance (89). La première partie de notre recherche consiste à identifier les trois populations, celle inscrite en enseignement en ligne, celle en enseignement présentiel et celle de l’enseignement par correspondance, et à étudier leurs ressemblances et dissemblances. Comparer des résultats pour un même diplôme mais avec des modes d’enseignement différents est toujours délicat notamment en termes de biais (Phipps et Merisotis, 1999) ; (Fenouillet et Déro, 2006). En effet, on ne peut utiliser avec certitude les résultats d’une comparaison entre différentes populations que si ces dernières sont comparables et donc ayant les mêmes caractéristiques. Ce qui n’est pas toujours possible quand il s’agit de comparer les publics de l’enseignement à distance et de l’enseignement présentiel tant en terme de profils ils sont différents (Ben Abid, 2000). Au delà de la particularité des publics, le biais principal est lié aux différences en termes de méthodes d’enseignement. Nous avons malgré cela fait en sorte de minimiser au possible ces différents biais notamment, en comparant des publics à visées et aux profils a priori identiques et en comparant des modes d’enseignement ayant des programmes et un diplôme identiques. De même les conditions générales de passation de l’examen final sont les mêmes pour les trois modes d’enseignement. En effet, pour les cours de préparation au DAEU, les candidats préparent leur diplôme à l’université de Haute-Alsace soit sur Pegasus, (un dispositif de formation en ligne de type campus numérique élaboré par un consortium de six universités françaises) soit en cours par correspondance (sous format papier) soit en cours du soir dispensés sur les sites de Mulhouse et de Colmar. Les enseignants-auteurs qui ont conçu les cours multimédia sur Pegasus ont été la plupart du temps recrutés parmi des enseignants qui sont chargés de dispenser des cours dans les préparations classiques (c'est-à-dire par correspondance ou en présentiel) au DAEU. Enfin, les tuteurs qui encadrent les classes virtuelles du DAEU en ligne interviennent aussi auprès des étudiants des modes d’enseignement classiques. De plus, les étudiants qui candidatent au DAEU relèvent de la formation continue, n’ont pas le baccalauréat et désirent soit accéder à la formation universitaire, soit aux concours soit à des écoles ou des organismes professionnels. Nous avons donc pu comparer trois cursus aux visées de préparation identiques, dispensés dans un même contexte universitaire, auprès de publics a priori très semblables. L’existence de biais peut cependant demeurer ce qui peut rendre les résultats de la comparaison toujours délicats (Ben Abid-Zarrouk et Audran, 2008). 3.2. Outils et déroulement de l’enquêteNous avons obtenu auprès de la scolarité de l’Université de Haute Alsace, qui s’occupe de ce diplôme, deux types de documents. Le premier est relatif aux caractéristiques de l’étudiant qui prépare le DAEU. Nous avons donc étudié les dossiers d’inscription dans lesquels nous avons trouvé des informations portant sur le sexe, l’âge, la catégorie socioprofessionnelle, les motivations et objectifs de la formation, les caractéristiques familiales et matrimoniales des étudiants inscrits ainsi que le mode d’enseignement choisi pour la préparation du diplôme. Le deuxième type de document est les procès verbaux de jury d’examen dans lequel on retrouve les résultats aux examens des candidats. Les notes obtenues par module, la moyenne annuelle ainsi que l’obtention ou non du diplôme. Les informations recueillies dans les dossiers d’inscriptions permettent d’une part de décrire la population et d’autre part de comparer les caractéristiques des étudiants en ligne, en présentiel, et en cours à distance. Les notes obtenues aux examens permettent d’analyser l’efficacité interne des différents modes d’enseignement. On notera que nous avons étudié uniquement les réussites aux modules complets. En effet, nous avons préféré travailler sur les modalités de la dichotomie réussite/échec, plutôt que sur les notes obtenues, car l’analyse des notes posait un problème au niveau du stade de recueil de données. En effet, le règlement du DAEU prévoit que l’étudiant peut choisir en début d’année entre deux modes de validation : un mode dit « modulaire » (chaque module est préparé séparément sur un maximum de quatre ans) où la moyenne est exigée pour chaque module année par année, un mode « complet » où les 4 modules sont préparés simultanément et les notes sont compensables entre elles (le DAEU est alors obtenu avec la moyenne des quatre modules). Cette mixité dans les modes de validation nous a donc conduits, pour éviter les biais qu’aurait introduit le calcul sur les notes (un 13, par exemple, obtenu une année à un module, peut être ramené à la moyenne, 10, dans le calcul final de validation effectué l’année suivante), à raisonner et à coder les résultats à partir de l’obtention du DAEU. 3.3. Méthodes d’analyses de l’efficacitéTrois méthodes d’analyses de données ont été utilisées. La première de type descriptif a consisté à calculer des fréquences et croiser les variables pertinentes (comme la variable réussite) afin de décrire la population et de la répartir en fonction des modes d’enseignement (en ligne, en présentiel et par correspondance). La seconde a consisté à utiliser le test du Chi2 afin d’étudier les éventuelles corrélations entre les modalités des variables étudiées6. Ce qui nous permettra d’estimer la comparabilité des populations en fonction des modes d’enseignements. Cette première partie du travail dite « exploratoire » doit nous permettre de discerner les éventuelles divergences et/ou convergences entre les 3 populations. Nous aurions pu tout aussi bien utiliser ce procédé pour identifier les facteurs influençant la réussite des étudiants mais si cette méthode dite du pourcentage apporte certes un éclairage « elle ne fait que « livrer » ce qui se passe sans expliquer les mécanismes responsables de différences » (Duru-Bellat et Mingat, 1993). Une analyse par la modélisation7 est rendue donc nécessaire afin de donner une connotation causale (Duru-Bellat et Mingat, 1993) aux phénomènes étudiés. La seconde méthode a alors consisté à construire des modèles de régression logistique8 qui nous permettront d’identifier les facteurs ayant un impact sur la réussite aux examens et par ricochet d’estimer l’efficacité de l’enseignement en ligne comparativement à l’enseignement par correspondance et en présentiel. Un groupe de modèle a donc été construit autour des facteurs supposés influer sur la réussite. La variable expliquée est donc l’obtention du DAEU (réussir les examens finaux) et les variables explicatives concernent les caractéristiques socio-économiques (le sexe, l’âge, la situation matrimoniale, la situation professionnelle), l’objectif de l’inscription dans la formation (objectif de reprise des études, d’ascension ou de changement professionnel, satisfaction personnelle, équivalence pour passer des concours). A ces facteurs nous ajoutons le facteur « mode d’enseignement » (enseignement en ligne, enseignement présentiel, enseignement par correspondance) dans le but d’estimer l’impact de ces modes d’enseignement sur la réussite. Nous avons ainsi construit plusieurs modèles de régression et nous avons gardé celui qui avait le D de Somer9 et les pourcentages de concordance les plus élevés. Ces derniers sont des indicateurs qui permettent d’apprécier la fiabilité des modèles. Ainsi toutes les variables on été testées, seules celles qui avaient une influence sur notre variable expliquée ont été retenues dans le modèle final. 4. Résultats4.1. Une analyse descriptive des données4.1.1. Analyse des variables socio-économiques (tableau 1)Notre population compte 274 candidats au DAEU, répartis de manière quasi égale entre les trois modes d’enseignement : 93 en enseignement en ligne (en ligne), 92 en enseignement présentiel (présentiel) et 89 en enseignement par correspondance (EC), soient respectivement 34%, 34% et 32% de l’ensemble de la population. Les femmes représentent près de 6 étudiants sur 10 (60%) inscrits au DAEU, tous modes d’enseignement confondus. Elles se répartissent de manière distincte en fonction des modes d’enseignement puisque 26% d’entre elles se retrouvent dans l’enseignement en ligne, 35% dans l’enseignement présentiel et 39% dans l’enseignement par correspondance (Chi2=12.730 ; ddl=2 ; p=0.0017). Les femmes auraient donc une préférence pour l’enseignement par correspondance, à la différence de la population masculine. En effet, les hommes se retrouvent plus souvent en enseignement en ligne (45%) que dans les modes par correspondance (32%) et présentiel (23%) (Chi2=12.730 ; ddl=2 ; p=0.0017). En d’autres termes les femmes auraient tendance à choisir des modes d’enseignements de type « traditionnel » alors que les hommes, eux, auraient une préférence pour la « technologie ». Plus de 6 étudiants sur 10 sont célibataires, dont 10% déclarent avoir un enfant. Le reste de la population est constitué de couples (40%)10 dont plus d’un cinquième a des enfants (22%). Les couples sont plus présents dans les modes d’enseignement à distance que dans le mode d’enseignement présentiel. Ainsi, 4 étudiants sur 10 sont en enseignement en ligne, un peu plus du tiers en enseignement par correspondance et seulement un peu plus du quart en enseignement présentiel (Chi2=5.478 ; ddl=2 ; p=0.0646). Plus de 6 étudiants sur 10 ont un emploi (61%) pour un tiers de sans emploi et moins d’1% de travailleurs indépendants. La part de la population en situation d’emploi est plus importante en enseignement en ligne (près de 40%) qu’en enseignement présentiel où elle est la moins élevée avec seulement un quart de la population (26%). Enfin, plus du tiers des étudiants en emploi choisissent l’enseignement par correspondance (Chi2=12.528 ; ddl=2 ; p=0.0019). L’âge moyen de la population est de 28.6 ans. La population la plus jeune se situe en enseignement présentiel (26.57 ans). Alors que les deux autres modes d’enseignement regroupent des populations d’âge moyen quasiment identique 29.17 années pour l’enseignement en ligne et 29.14 pour l’enseignement par correspondance.
Tableau 1• Répartition des inscrits au DAEU en fonction du mode d’enseignement 4.1.2. Analyse des objectifs de l’inscription (tableau 2)Plus de 6 étudiants sur 10 qui s’inscrivent au DAEU ont pour objectif la reprise d’études alors que 17% espèrent pouvoir passer des concours et une même proportion de la population (17%) a des attentes de type professionnel (ascension professionnelle, trouver un emploi...). A peine 3% de notre population utilise le DAEU dans un objectif de « satisfaction personnelle ». En fonction du mode d’enseignement, on observe une différence dans les buts recherchés par les étudiants. Ainsi ceux inscrits en enseignement en ligne souhaitent pour plus de 75% poursuivre des études. Ils sont un peu plus de 63% en enseignement présentiel et à peine plus de la moitié en enseignement par correspondance. C’est d’ailleurs cette population qui pour plus d’un quart a pour but l’accès à des concours administratifs. Ils ne sont que 10% en enseignement présentiel à faire ce choix et à peine plus en enseignement en ligne (15%). On notera que les étudiants qui ont des « projets professionnels » représentent plus d’un cinquième des étudiants d’enseignement présentiel et d’enseignement par correspondance, alors qu’ils sont à peine plus de 6% des étudiants de l’enseignement en ligne (Chi2=23.046 ; ddl=8 ; p=0.0033).
Tableau 2 • Les objectifs de l’inscription au DAEU 4.1.3. Analyse de la réussite par mode d’enseignement (tableau 3)On a distingué deux taux de réussite : le taux de réussite par rapport aux inscrits et le taux de réussite par rapport aux présents aux examens. Si l’on tient compte des taux de réussite par rapport aux inscrits seul 35% (97/274) de la population a obtenu le diplôme, 41% (111/274) ont échoué à l’examen et 24% (66/274) ont abandonné durant le cursus et / ou ne se sont pas présentés aux examens. En enseignement en ligne 30% de la population réussit à obtenir le diplôme, ils sont plus d’un tiers (34%) en enseignement présentiel et 43% en enseignement par correspondance. Le taux d’abandon sur l’ensemble de la population est de 24% (66/274). Il est particulièrement élevé dans l’enseignement en ligne où plus de 4 étudiants sur 10 abandonnent la formation, ils sont seulement de 14% en enseignement présentiel et de 12% en enseignement par correspondance. Le taux de réussite par rapport aux présents aux examens est de 47%. On constate que 53% des étudiants qui passent les examens en enseignement en ligne obtiennent leur diplôme. Ils sont 40% en enseignement présentiel et (49%) en enseignement par correspondance (Chi2=30.18, ddl=4 ; p=0.0000). Les étudiants qui choisissent l’enseignement en ligne sont 3 fois plus nombreux à ne pas se présenter à l’examen final comparativement aux étudiants qui ont choisi l’enseignement par correspondance. Les étudiants de l’enseignement par correspondance sont 4 sur 10 à obtenir leur diplôme alors qu’enseignement en ligne ou en présentiel ils ne sont que 3 sur 10. Le taux d’abandon est le principal facteur de la baisse des taux de réussite de l’enseignement en ligne. En effet, l’analyse du taux de réussite par rapport aux présents montre, que dans le cas où ils se présentent aux examens, les étudiants qui choisissent l’enseignement en ligne sont en proportion plus nombreux à obtenir leur diplôme.
Tableau 3 • Les taux de réussite par inscrit, les taux d’abandon, les taux de réussite par rapport aux présents 4.1.4. Synthèse de l’analyse descriptive (tableau 4)Les statistiques développées ci-dessus ont permis de montrer des différences entre les populations que l’on soit inscrit en enseignement en ligne, en enseignement présentiel ou en enseignement par correspondance. En fonction du mode d’enseignement choisi la population se répartit de manière distincte. On constate ainsi des différences en fonction du sexe, de l’âge, de la situation professionnelle ou de la situation familiale. Les hommes choisissent de préférence l’enseignement en ligne alors que les femmes seraient plus enclines à se tourner vers des modes d’enseignement plus « traditionnels » comme l’enseignement par correspondance, en priorité ou l’enseignement présentiel. On n’observe pas, cependant, de différence fondamentale dans la répartition des hommes et des femmes dans l’enseignement présentiel. Les étudiants en emploi semblent se retrouver plus souvent vers l’enseignement en ligne et l’enseignement par correspondance que vers l’enseignement présentiel. L’étude du facteur âge apporte aussi un certain nombre d’informations sur la répartition de la population par mode d’enseignement. Ainsi, il semblerait que les plus jeunes de la population ont tendance à choisir le mode présentiel. Alors que les candidats plus âgés auraient une préférence pour l’enseignement en ligne ou l’enseignement par correspondance. L’étude de la situation matrimoniale montre que la part de la population célibataire est plus importante en enseignement présentiel (près des 3/4 de la population) qu’elle ne l’est dans les deux autres modes d’enseignements (plus des 2/3 de leur population respective). La population a pour objectif majoritaire la reprise d’études, ce qui peut paraître logique a priori puisque ce diplôme a cette vocation ; mais on a pu constater qu’une part non négligeable de la population soit près de 40% avait d’autres objectifs, comme le fait de vouloir passer des concours ou d’utiliser le diplôme à des fins professionnelles. Le choix de la reprise d’étude est majoritaire pour les trois populations, mais, c’est en enseignement par correspondance que ce but est le moins important puisque seule une moitié de la population a cet objectif, alors qu’ils sont 6 étudiants sur 10 en enseignement présentiel et plus de 7 étudiants sur 10 en enseignement en ligne. L’étude de la réussite par mode d’enseignement montre que c’est en enseignement par correspondance que le taux de réussite est le plus élevé et en enseignement en ligne qu’il est le plus faible. Cette différence de plus de 12 points entre les deux modes d’enseignement est essentiellement due au très fort taux d’abandon en enseignement en ligne. En résumé les hommes ont tendance à choisir plutôt l’enseignement en ligne, alors que les femmes auraient une préférence pour l’enseignement par correspondance. Les célibataires se retrouvent plus souvent en enseignement en présentiel que dans les enseignements à distance, de même que les étudiants les plus jeunes. De plus, les étudiants en situation d’emploi font plutôt le choix des enseignements à distance que celui de l’enseignement en présentiel. Ce qui peut paraître attendu, dans la mesure où ces modes d’enseignement sont généralement réservés aux populations empêchées (pour causes professionnelles et/ou familiales) d’assister à des cours dits « traditionnels ». Enfin, les taux de réussite les plus élevés se retrouvent en enseignement par correspondance. La suite de notre travail va consister à savoir si le fait d’être un homme ou une femme, d’être en couple ou non, d’être en situation d’emploi ou non, d’avoir pour objectif la reprise d’étude plutôt que d’autres objectifs, de choisir le mode d’enseignement en ligne plutôt qu’un des deux autres modes d’enseignement, peut avoir ou non un impact sur la réussite.
Tableau 4 •Tests d’indépendance sur les différentes catégories de variables étudiées Ainsi, les modèles de régression logistiques devraient nous permettre d’identifier les facteurs influençant la réussite aux examens finaux et par conséquent nous éclairer sur l’existence ou non de l’effet « mode d’enseignement ». Les variables, sexe, être en couple, avoir un emploi, objectifs et modes d’enseignements vont être testées afin de savoir, si elles ont ou non, un impact sur la réussite des étudiants. 4.2. Analyse multivariée portant sur l’estimation de l’efficacité interne de l’enseignement en ligne4.2.1. Les facteurs influençant la réussite (tableaux 5 et 6)Les tableaux 5 et 6 suivants présentent les résultats des modèles de régression logistique11 portant sur l’obtention ou non du DAEU12. Nous cherchons à expliquer la variable « obtention du DAEU » par les variables explicatives « âge », « mode d’enseignement », et « objectifs ». Le lecteur notera comme cela a été précisé dans la partie méthodologique que toutes les autres variables ont été testées et seules ces trois variables semblent avoir une influence sur l’obtention du DAEU. Ainsi selon les modèles construits, il semblerait que la variable « sexe » (le fait d’être une femme ou un homme), la variable « avoir un emploi » (le fait d’avoir ou non un emploi) et la variable « être en couple » (être ou non en couple) n’ont pas d’impact significatif sur le fait de réussir ou d’échouer aux examens. La variable « âge » a été divisée en quatre catégories13 : <= à 23 ans ; >23 et <=26 ans ; >26 et <=33 ans ; > 33ans. Ceci afin d’estimer l’impact de chacune de ces catégories sur la réussite de l’étudiant. La variable de référence est dans ce cas « plus de 33 ans ». Les autres variables sont les variables actives. Ainsi, le modèle mesure entre autre l’impact sur la réussite du fait d’avoir au plus 23 ans par rapport au fait d’avoir plus de 33 ans. De même, il mesure l’influence du mode d’enseignement sur la réussite. La variable mode d’enseignement a elle aussi été divisée en trois catégories, enseignement par correspondance, enseignement présentiel, enseignement en ligne. Notre variable de référence est ici l’enseignement en ligne. Ainsi nous testons l’influence du fait d’être inscrit en enseignement présentiel puis en enseignement par correspondance sur la réussite par rapport au fait d’être inscrit en enseignement en ligne. La variable « objectifs » a elle aussi été divisée en deux catégories. Avoir pour « objectif reprise d’études » et « autres objectifs ». La variable de référence est ici « autres objectifs » et la variable active « objectif reprise d’études ». Nous testons l’influence d’avoir comme objectif la reprise d’étude sur l’obtention du diplôme par rapport au fait d’avoir d’autres objectifs. Les résultats du modèle de régression logistique portant sur les variables affectant la réussite au DAEU montrent que l’âge a une incidence sur l’obtention du diplôme. On notera que certaines catégories de la variable « âge » sont plus significatives que d’autres. Ainsi le fait d’avoir plus de 23 ans et au plus 26 ans a un impact négatif sur la réussite comparativement au fait d’être âgé de plus de 33 ans (significatif à 1%). La probabilité de réussite diminue de plus de 30% pour les étudiants de cette tranche d’âge comparativement aux étudiants âgés de plus de 33 ans. De plus, le fait d’avoir au plus 23 ans diminue les chances de réussite d’un peu plus de 50 % (significatif à 10%). Enfin, le fait d’avoir entre 26 et 33 ans n’a pas d’impact significatif sur la réussite. L’autre variable qui semble avoir un impact sur la réussite est la variable « objectif ». Les résultats montrent que le fait d’avoir comme objectif « la reprise d’études » multiplie les chances de réussite par 1.89 fois par rapport à ceux qui ont d’autres objectifs (significatif à 5%). Enfin la variable qui nous intéresse tout particulièrement et qui nous permettra d’estimer l’efficacité des modes d’enseignement sur la réussite est la variable « mode d’enseignement ». D’après le modèle, les étudiants de l’enseignement par correspondance multiplient leurs chances de réussite par 2.28 par rapport à ceux de l’enseignement en ligne (significatif à 1%). Alors qu’il ne semble pas y avoir de différence de réussite que l’on soit en enseignement présentiel ou en enseignement en ligne.
Tableau 5 • Modèle de régression logistique15 portant sur les facteurs influençant la réussite aux examens Lecture du tableau : avoir au plus 23 ans a un impact négatif sur la réussite et peut diminuer de 50.8% les chances de réussite à l’examen final par rapport au fait d’avoir plus de 33 ans (significatif à 10%). Etre inscrit en enseignement par correspondance multiplie les chances de réussite par 2.282 par rapport au fait d’être inscrit en enseignement en ligne (significatif à 1%) Dès lors que l’on ne tient plus compte des abandons, on constate qu’il n’existe plus d’effet « mode d’enseignement ». Cette variable n’a pas dans ce cas d’impact significatif sur l’obtention du diplôme. Les chances de réussite aux examens seraient donc significativement les mêmes quel que soit le mode d’enseignement choisi par l’étudiant candidat au DAEU.
Tableau 6 • Modèle de régression logistique portant sur les facteurs influençant la réussite aux examens après avoir ignoré les abandons Lecture du tableau : (p=0.5803) NS Etre inscrit en enseignement à distance n’a pas d’impact sur la réussite comparativement à l’enseignement en ligne dès lors qu’on ne tient plus compte des abandons 4.3. Synthèse de l’analyse multivariée sur l’efficacitéLa recherche sur les déterminants de la réussite montre premièrement que le fait d’être «relativement » jeune a un impact négatif sur la réussite par rapport au fait d’être plus âgé, deuxièmement que le fait d’utiliser ce premier diplôme à des fins de reprise d’études est un facteur positif pour l’obtention du diplôme et enfin troisièmement, que les étudiants qui choisissent l’enseignement par correspondance ont plus de chances de réussir que ceux qui choisissent l’enseignement en ligne. Contrairement aux attentes le fait d’être en situation d’emploi ne semble pas, selon le modèle de régression, avoir d’impact sur la réussite ou l’échec des candidats. De même qu’être en couple ou non ou être un homme ou une femme. 4.4. Synthèse des résultats portant sur l’efficacité interneL’analyse portant sur l’efficacité interne des modes d’enseignement a permis de montrer que c’est dans l’enseignement par correspondance que les taux de réussite sont les plus élevés et en enseignement en ligne qu’ils sont les moins élevés avec une différence significative de 12.6 points. Les modèles de régression logistique construits autour de la variable « réussir » (c'est-à-dire obtenir le DAEU) ont montré que le facteur « mode d’enseignement » a un impact significatif sur l’obtention du diplôme au même titre que la variable âge ou la variable « objectif ». Ainsi, les étudiants qui s’inscrivent en enseignement par correspondance multiplient leurs chances de réussir par plus de 2 comparativement à ceux qui ont choisi l’enseignement en ligne. On notera que si l’on ne tient pas compte des abandons et que l’on raisonne en termes de taux de réussite par rapport aux présents, les différences de taux de réussite ne sont plus significatifs (tableau 3). En d’autres termes l’enseignement en ligne, pour ce public en particulier, ce diplôme et notre terrain d’enquête, est tout aussi efficace que l’enseignement présentiel ou par correspondance. L’analyse de l’efficacité interne de l’enseignement présentiel comparé aux deux autres modes d’enseignement qualifiés d’enseignement à distance, montre qu’il n’existe pas de différences significatives en termes de réussite et ceci que l’on tienne compte des inscrits ou des présents. 5. ConclusionL’enseignement en ligne semble être le remède aux problèmes posés par les modes d’enseignement traditionnels. En effet, l’enseignement en ligne combine les avantages de l’enseignement présentiel (interaction) et à distance (flexibilité) en évitant les inconvénients de rigidité de temps et de lieu ainsi qu’une interaction très limitée (Walckiers et De Praetere, 2004) ; (Harasim, 1989). Cependant pour un certain nombre d’auteurs, l’enseignement en ligne, devrait rejoindre d’autres médias, comme entre autre la télévision, qui après avoir suscité beaucoup d’espoir et d’engouement n’a pas amélioré l’efficacité de l’enseignement (Glikman, 2002). En termes d’efficacité interne, pour notre cas particulier, les modèles de régression ont pu mettre en évidence toutes choses égales par ailleurs un effet « mode d’enseignement » sur la réussite des étudiants. Ainsi, malgré les différences de répartition des populations dans les différents modes d’enseignements, en termes de sexe, d’âge, de situation professionnelle, de situation matrimoniale ou d’objectifs nous pouvons estimer que, pour notre cas particulier, pour ce diplôme et ce terrain d’enquête, l’enseignement en ligne a une efficacité interne moins élevée que les autres modes d’enseignement. Il faut, cependant, rappeler que dès lors que l’on ne tient plus compte des abandons et que l’on raisonne en termes de taux de réussite par rapport aux présents l’enseignement en ligne est tout aussi efficace. Les limites de notre travail tournent essentiellement autour des caractéristiques de notre public et des différences entre les modes d’enseignements. En effet, malgré notre tentative de choisir des publics proches, les résultats en termes d’accès aux différents modes d’enseignements (tableaux 1 et 2) ont montré que nous avions des publics relativement distincts. De plus les modes d’enseignements sont très différents (cf section 2), en termes de conception, de modèles pédagogiques, de contexte ... ce qui rend la comparaison difficile entre l’enseignement en ligne et un « hypothétique » enseignement traditionnel (Saba, 1999). Les résultats des comparaisons sont à ce propos souvent critiqués et un certain nombre d’auteurs mettent en avant des problèmes liés au contrôle des populations comparées, les techniques statistiques appliquées ou encore le traitement de données... (Moore et Thompson, 1997) ; (Phipps et Merisotis, 1999). Dans notre cas particulier, on peut tout à fait émettre l’hypothèse qu’un certain nombre de facteurs externes pourraient expliquer la faiblesse des taux de réussites tels que la motivation des candidats, leur capacité de travail, la maîtrise de l’outil informatique...une enquête qualitative, complémentaire, aurait sans doute pu nous éclairer sur les raisons de l’abandon des étudiants de l’enseignement en ligne. Ce qui pourrait faire, sans doute, l’objet d’une prochaine contribution. BIBLIOGRAPHIEALLY M. (2004). Foundations of educational theory for online learning . Dans T.Anderson et F. Elloumi (Dir.): Theory and practice of online learning. Athabasca, Canada : Athabasca University. Récupéré du site du Center for Distance Education de l’université de Athabasca : http://cde.athabasca.ca/online_book Audran J., Coulibaly B., Papi C. (2008). Les « incitateurs » et les « épreuves », traces de vie sur les forums en ligne ?, DistanceS, 1 Vol 10, 1-23. BEN ABID-ZARROUK S., AUDRAN J. (2008). L’enseignement en ligne est il efficace ? le cas Pegasus. Revue française de Pédagogie, 164, 99-110. BEN ABID S., ORIVEL F. (2000). Enseignement à distance: équité ou efficacité. Dans A. Alcouffe et alii. Equité versus efficacité. Paris : L’Harmattan, p.405-416. BEN ABID S. 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Cette évaluation finale met l’accent sur les connaissances générales dans quatre disciplines choisies par les candidats, ainsi que sur la culture générale et les méthodes qu’ils mettent en œuvre 3La traduction du e-learning en français est « apprentissage en ligne » mais en France il est traduit par le terme « mode d’enseignement en ligne » puisque en France l’expression de mode d’apprentissage en ligne est utilisée lorsque les chercheurs souhaitent insister sur les processus d’acquisition de connaissances (Glickman, 2002) ce qui n’est pas notre cas présentement. 4 C’est le cas pour les trois modes d’enseignement 5 Une recherche menée sur les centres de télé-enseignement universitaire de l’Est en 2000 (Dijon, Besançon, Reims, Strasbourg) montre que les étudiants qui préparent des examens à distance et qui passent les examens ont autant de chances de réussir que les étudiants d’enseignement présentiel. 6 Cf Modèles statistiques pour données qualitatives (Droesbeke et al., 2005, p18) 7 Le terme de modélisation est défini comme une transformation qui remplace un ensemble d’observations effectives par une formulation mathématique abstraite qui en retrace les caractéristiques ou lignes de forces principales (Duru-Bellat et Mingat, 1993). 8 Afin de mesurer l’impact sur la réussite de l’enseignement en ligne nous avons eu recours à des modèles de type Logit (dits aussi régression logistique) qui sont généralement utilisés lorsque la variable à expliquer est une variable binaire (0, 1) ou dichotomique et qui porte sur la probabilité qu'un évènement se réalise ou non (Gourieroux, 1984). Ce qui est le cas ici puisqu’on étudie l’obtention ou non du DAEU. 9 Le D de Somer est un indice qui mesure l’association entre la probabilité prédite et la valeur de la variable explicative. La capacité prédictive du modèle est d’autant meilleure que l’indice est élevé et qu’il se rapproche de 1. Cet indice varie entre -1 et 1. 10 Seul 263 étudiants ont rempli cette partie du dossier. Le calcul du pourcentage a donc été effectué sur 263 étudiants et non 274. 11 On utilise la régression logistique lorsque l’on effectue une régression sur des données qualitatives. Ce qui est notre cas présentement. Pour plus d’informations sur la régression logistique se référer à (Duru-Bellat et Mingat, 1993) et (Droesbeke et al., 2005). 12 Nous rappelons au lecteur que les modèles de régression logistique comme le modèle linéaire permettent un raisonnement « toutes choses égales par ailleurs ». Ex. dans notre cas nous testons l’influence de la variable expliquée « modes d’enseignement » sur l’obtention du DAEU, à l’exclusion de toute autre variable explicative. 13 Nous sommes partis de l’hypothèse que certaines catégories d’âge pouvaient, plus influencer la réussite que d’autres (Ben Abid, 2000). 14 * seuil de significativité à 10%, ** seuil de significativité à 5%, ***seuil de significativité à 1%, NS : variable non significative 15 Dans les modèles de régression logistique, la détermination des coefficients ai est comparables à celle des modèles linéaires, en revanche l’interprétation en est différente. Alors que dans la spécification linéaire le coefficient ai mesure directement la pente constante de la relation de Xi sur Y, au niveau de la spécification logistique, l’impact marginal d’une variable dépend du coefficient ai et du niveau de probabilité auquel on se situe. L’impact marginal au point de probabilité p vaut alors ai.p.(1-p) (Duru-Bellat et Mingat, 1993) ; (Jarousse ;1999). C’est la colonne variation marginale qui donnera une estimation de l’impact d’une unité supplémentaire pour une variable continue sur la variable expliquée. Et l’impact d’une catégorie de variable (explicative) par rapport à une autre sur la variable expliquée dans le cas de variables dichotomiques ou binaires (ex pour la variable sexe : on mesure l’impact sur la réussite du fait d’être un garçon par rapport au fait d’être une fille). A propos des auteursSandoss BEN ABID-ZARROUK est enseignant / Chercheur au centre universitaire de formation des enseignants et des formateurs à l’université de Haute Alsace. Elle appartient au laboratoire inter-universitaire des sciences de l’éducation et de la communication (LISEC –EA 2310). Elle est docteur en Sciences Economiques, qualifiée en sciences de l’éducation, et spécialisée en économie de l’éducation et plus précisément dans l’évaluation de l’enseignement à distance en général et de l’enseignement en ligne en particulier. Courriel : Sondess.Zarrouk@uha.fr |
Référence de l'article :Sandoss Ben Abid-Zarrouk, Une analyse de l’efficacité interne des modes d’enseignements par correspondance, en présentiel et en ligne dans le cadre de la préparation au DAEU, Revue STICEF, Volume 17, 2010, ISSN : 1764-7223, mis en ligne le 19/07/2010, http://sticef.org |
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© Revue Sciences et Techniques de l'Information et de la Communication pour l'Éducation et la Formation, 2010 |
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Mise à jour du 19/07/10 |