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Volume 16, 2009
Article de recherche



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Modéliser l’organisation du tutorat pour assister la description de scénarios d’encadrement

 

Patricia GOUNON, Pascal LEROUX (LIUM, Le Mans)

 

RÉSUMÉ : Le travail présenté dans cet article s’intéresse à la conception d’activités d’encadrement d’apprenants dans le cadre de Formation en Ligne (FEL). Notre problématique porte sur la question du soutien pour la conception d’une FEL et plus précisément l’assistance à la description de l’encadrement des apprenants dans le but de spécifier les rôles et interventions du tuteur ainsi que les outils supports à son activité. À partir d’une étude des travaux sur la prise en compte du tutorat dans des dispositifs d’apprentissage à distance, nous avons élaboré le modèle d’organisation du tutorat Triton et sa méthodologie d’utilisation. Nous montrons l’intérêt et la facilité de son intégration dans des langages de modélisation pédagogique (EML) à travers deux cas d’études que sont IMS-LD et LDL pour lesquels nous proposons une extension permettant d’enrichir le scénario d’encadrement.

MOTS CLÉS : ingénierie pédagogique, formation en ligne, tutorat, scénario d’encadrement, standard, langage de modélisation pédagogique

ABSTRACT : The research presented in this paper focuses on the design of tutoring activity in the context of distance learning environments. Our problematic concerns the assistance for describing the tutoring activity. We aim to specify roles and tutor involvement and also to describe the tools supporting this activity. Using tutoring activity research studies in distance learning environments, we propose a model of tutoring organisation, called Triton. We describe the methodology for using Triton. We propose to extend two EMLs (IMS-LD and LDL) based on Triton. These two cases of study show the interest to enrich the tutoring scenario of the EMLS.

KEYWORDS : pedagogical engineering, on-line education, tutoring activity, tutoring scenario, standard, Educational Modelling Language.

 

1. Introduction

La question de l’encadrement des apprenants constitue un enjeu majeur des Formations En Ligne (FEL) (Hotte et al., 2003) en particulier quand les apprenants n’ont pas l’autonomie souhaitée ; autonomie nécessaire et souvent sous-estimée pour s’impliquer dans une formation à distance (Linard, 2000). Les problèmes à prendre en compte concernent aussi bien les apprenants dans la réalisation de leurs activités (i.e. difficulté d’accès à une aide humaine ou informatique) que les tuteurs pour le suivi des activités des apprenants et leur intervention auprès d’eux (Leroux, 2002). L’étude de la littérature nous a amené à faire deux constats. Premièrement, les plateformes de FEL proposent de nombreux outils mais ne proposent pas toujours de scénarios d’utilisation de ces outils. Autrement dit, le choix des outils est antérieur à la réflexion sur l’organisation du tutorat envisagé. Deuxièmement, les fonctions du tuteur en FEL sont très diverses et les modalités d’intervention multiples que ce soit auprès d’un apprenant ou d’un groupe. Sur la base de ces constats, nous nous intéressons à la question du soutien à apporter aux concepteurs quant à l’assistance à la description de scénarios d’encadrement dans le contexte d’une FEL.

La diversité des fonctions du tuteur et la multiplicité des modalités des interventions que nous avions recensées dans (Gounon, 2005) font toujours l’objet de travaux de recherche (Quintin, 2008) ; (Bourdet et Teutsch, 2009) ; (Garrot-Lavoué et al., 2009) ; (Villiot-Leclercq et Dessus, 2009). Ses interventions dépendent en grande partie de la situation d’apprentissage et du profil des apprenants. Il semble alors opportun d’aider le tuteur en lui proposant des recommandations d’intervention adaptées à la situation rencontrée. Les recommandations correspondent aux interventions susceptibles d’être effectuées tout au long de la formation par les tutorants. Par ailleurs, l’interaction entre apprenant(s) et tuteur(s) s’effectue essentiellement par des outils de communication tels que le forum, le chat ou la messagerie électronique. Afin d’optimiser l’activité d’encadrement du tuteur, il est intéressant de mettre à disposition des outils adaptés là aussi à la situation pour suivre les apprenants et communiquer avec eux. C’est pourquoi nous centrons notre problématique de recherche sur le soutien à la conception d’une FEL pour la description de l’encadrement des apprenants. Mais encore faut-il dans ce cas, comme dans celui des recommandations, avoir anticipé les besoins des tuteurs et spécifié au mieux leurs rôles et interventions ainsi que les outils supports à leur activité.

Pour avancer dans le traitement de notre problématique, nous nous sommes intéressés au concept de scénario pédagogique ainsi qu’aux langages de modélisation pédagogique au cœur actuellement des problématiques en EIAH (Environnement Informatique pour l’Apprentissage Humain). Un scénario pédagogique (Quintin et al., 2005) se décompose en (1) un scénario d’apprentissage qui décrit les activités d’apprentissage, leur articulation dans la séquence de formation ainsi que les productions des apprenants attendues et (2) un scénario d’encadrement permettant de préciser les modalités d’intervention du tuteur afin d’appuyer le scénario d’apprentissage. C’est à travers le scénario d’encadrement qu’est modélisée l’activité de tutorat. Selon (Faerber, 2004), « un scénario anticipe un processus d’apprentissage et les interactions, il définit généralement un cheminement à travers des contenus de cours, des ressources, il prévoit des comportements, un séquençage des tâches et s’il n’est pas linéaire il est en tout cas arrêté ». Le scénario pédagogique est utilisé de différentes manières tout au long d’une activité d’apprentissage. Avant une activité d’apprentissage, il permet de définir l’enchaînement des différentes activités pédagogiques, les acteurs et leurs tâches. Il est particulièrement intéressant de l’étudier au préalable de façon à anticiper les effets de telle ou telle décision sur le déroulement d’une formation. Pendant le déroulement d’une activité d’apprentissage, il sert de « guide ». Il permet de s’assurer du bon déroulement de l’activité des acteurs au cours d’une session d’apprentissage. Après une activité d’apprentissage, le scénario prescrit peut être comparé aux différents scénarios observés afin d’en mesurer les écarts. Le scénario observé permet d’analyser et de mieux comprendre le déroulement d’une activité d’enseignement, et de modifier si besoin le scénario pédagogique prescrit. Par ailleurs, cette analyse a posteriori apporte des informations en termes de spécifications des rôles et tâches du tuteur dans son activité de suivi.

Une difficulté de la modélisation d’un scénario d’encadrement réside dans le fait qu’il ne peut pas être définitivement et totalement construit lors de la conception initiale du scénario pédagogique de même qu’il est difficile de le spécifier totalement à l’avance. Ceci est dû à la spécificité du tutorat qui est une activité se déroulant dans l’interaction. Nous avons conscience des limites de l’exercice de spécification a priori du scénario d’encadrement mais elle nous semble très utile pour préciser le plus possible les interventions que le tuteur est susceptible de faire, en lui suggérant des recommandations d’intervention ainsi que des outils supports à son activité de tutorat.

Lorsque l’on parle de tutorat, les notions de tuteur, d’accompagnement, d’encadrement et de support à l’apprentissage sont évoquées. D’une manière générale, le tutorat se définit comme étant la fonction du tuteur. Le tuteur est, le plus souvent, la personne qui suit, assiste et conseille particulièrement un étudiant ou un groupe d’étudiants pour atteindre un objectif d’apprentissage. Le tuteur est un guide, un conseiller (Legendre, 1993). On parle alors d’accompagnement ou d’activité d’encadrement dont le but est de faciliter l’apprentissage de l’étudiant au moyen d’interventions humaines (Gagné et al., 2001) ou bien « informatiques » comme dans un système tutoriel intelligent. Les activités en question ici sont fondées sur les échanges entre les acteurs d’une formation pour atteindre un objectif d’apprentissage (Gagné et al., 2002). Elles font partie du support à l’apprentissage tel que le définissent Deschênes et Lebel (1994) : « le support à l’apprentissage regroupe tous les types d’interventions qui sont faites auprès d’un étudiant pour l’accompagner dans sa démarche d’apprentissage, afin de lui permettre d’atteindre les objectifs de son activité de formation et de développer son autonomie ».

Les façons d’aborder le tutorat sont multiples, et dépendent de l’activité d’apprentissage mise en place et des acteurs qui y participent. L’approche que nous adoptons est générale dans le sens où nous souhaitons prendre en compte les différents points de vue présents dans la littérature comme les dimensions individuelle et collective de cette activité ainsi que les acteurs incarnant la fonction de tuteur. L’étape de définition des rôles et tâches du tuteur, lors de la conception d’un dispositif d’apprentissage, est souvent négligée et réduite à une généralisation du rôle et de la tâche du tuteur qui doit alors répondre aux différentes questions rencontrées par les apprenants au cours de leur activité d’apprentissage. La multiplicité des questions peut engendrer une sursollicitation du tuteur et le manque de cadrage du tutorat, d’où une difficulté de compréhension du déroulement de l’activité de la part des apprenants. Il est donc nécessaire de s’interroger sur la conception de l’accompagnement pour déterminer les stratégies de tutorat à adopter ainsi que pour affiner et préciser les rôles et tâches du/des tuteur(s). Comment et pourquoi décider d’une activité de tutorat plutôt que d’une autre quand on souhaite greffer une activité d’accompagnement à un environnement d’apprentissage ? Qui va intervenir, auprès de qui, avec quels moyens et quand ?

Concernant les objectifs du tutorat, nous retenons le maintien de la motivation de l'apprenant (Pettigrew, 2001) et l’acquisition d'une méthode de travail (Patoine, 1995). Les activités d'encadrement incluent également un support au plan cognitif, surtout dans sa dimension méthodologique (Gagné et al., 2001). Ainsi, le tuteur doit repérer la manière dont l'apprenant organise, présente et structure ses connaissances (Rodet, 2000) pour intervenir de manière proactive ou réactive auprès de lui. Le tuteur a donc un rôle « méthodologique », pédagogique, mais aussi social.

Sur les bases des définitions ci-dessus, nous parlerons dans la suite du document du tutorat comme étant une activité d’encadrement et d’accompagnement fondée sur un suivi des apprenants par un tuteur humain (Deschênes et Paquette, 1996) et(ou) un tuteur artificiel, de type tuteur intelligent, au cours d’une session d’apprentissage, dans le but de les accompagner tout au long de leur formation.

Nous émettons comme hypothèse de recherche que fonder le processus de conception de l'encadrement et de l’accompagnement d’apprenants dans une FEL sur les bases d'un modèle d'organisation du tutorat facilite la définition des recommandations au tuteur et des outils d’intervention adaptés.

Concevoir des dispositifs d’accompagnement des acteurs d’une FEL et plus particulièrement du tuteur n’est pas aisé compte tenu du manque actuel de modèles d’organisation du tutorat sur lesquels on peut s’appuyer pour développer des outils informatiques. D’où une difficulté de conception de dispositifs de tutorat amenant à l’élaboration de systèmes souvent ad hoc et donc peu réutilisables dans différents contextes d’apprentissage. La plupart des modèles proposés dans le cadre du tutorat concernent des modélisations de l’activité des apprenants (Bourdet et Teutsch, 2000) ; peu s’intéressent à un modèle portant sur les tâches et rôles du tuteur. Généralement, les modèles proposés sont spécifiques à un domaine d’apprentissage. On ne trouve pas de modélisation prenant en compte différents points de vue du tutorat et guidant le concepteur dans l’organisation d’une activité de tutorat pour une formation donnée. Un des objectifs de nos travaux est de contribuer à l’élaboration de ce type de modèle. Il est à noter que le terme de concepteur est utilisé au sens large : il peut être tout aussi bien un enseignant qu’un ingénieur pédagogique.

Nous souhaitons apporter une assistance à la scénarisation de l’encadrement de façon à amener une réflexion quant à l’organisation du tutorat envisagé et de proposer des outils adaptés à l’activité d’encadrement et d’accompagnement. L’idée est de ne pas réfléchir à l’activité d’encadrement et d’accompagnement uniquement en fonction des outils mis à disposition sur la plateforme. Une réflexion en amont peut amener à la spécification de nouveaux outils et ainsi à disposer d’un tutorat adapté à une situation d’apprentissage donnée.

De ces constats, nous tirons trois objectifs de recherche. Le premier est de proposer une modélisation de l’organisation de l’activité de tutorat. Le deuxième est de définir une méthodologie du processus de conception de l'encadrement et de l’accompagnement sur les bases du modèle d’organisation du tutorat. Le troisième est de tester l’aptitude de ce modèle à être implémenté dans des langages de modélisation pédagogique (ou EML pour Educational Modelling Languages) et d’évaluer ainsi les modifications ou extensions à faire sur ces langages traitant des questions d’encadrement et d’accompagnement des activités des apprenants.

A terme, cette modélisation a pour but de servir de fondement à la conception et à la réalisation d’un prototype informatique dédié au concepteur d’une FEL pour l’aider à scénariser une situation d’apprentissage. L’idée est de proposer au concepteur d’une FEL un formalisme lui permettant d’élaborer un scénario pédagogique en termes de description d’une situation d’apprentissage (scénario d’apprentissage) et d’interactions entre les acteurs apprenants et tuteur(s) (scénario d’encadrement).

Dans une première partie de cet article, nous présentons le modèle d’organisation d’une activité de tutorat nommé Triton. La partie suivante est consacrée à la méthodologie d’utilisation de Triton dans le cadre de la conception d’une unité d’apprentissage afin d’aider à l’élaboration de scénarios d’encadrement. Ensuite, nous présentons des exemples d’instanciation informatique de Triton dans un souci d’échange et de modifications aisées du scénario d’encadrement. Pour ce faire, nous étudions les langages de modélisation pédagogiques et plus particulièrement IMS-LD et LDL.

2. Organisation de l’activité de tutorat : Triton

Comment guider, lors de la conception d’une FEL, la construction de l’activité de tutorat ? Cette question est centrale à nos travaux. Elle nous amène à nous interroger sur la personne qui agit, le bénéficiaire des interactions, le contenu des échanges ainsi que la façon dont s’effectuent les actions. C’est sur ces bases que nous avons construit notre modèle d’organisation de l’activité de tutorat, nommé Triton (Tutoring organisation model), pour guider la description de l’encadrement et de l’accompagnement des apprenants.

Triton trouve ses origines dans la littérature en sciences de l’éducation, en informatique et dans une expérience exploratoire (Barré et al., 2003) dont l’un des buts était l’étude des interactions entre acteurs (enseignant tuteur et étudiants) au cours d’une activité d’apprentissage. Nous entendons par activité d’apprentissage toute situation planifiée et structurée en un ensemble d’activités pédagogiques (tâches accomplies par un étudiant) pour amener un étudiant à atteindre un objectif d’apprentissage.

Nous présentons dans cette section une synthèse de Triton. Les fondements de chacune de ces composantes sont explicités dans (Gounon et al., 2004a).

2.1. Description de Triton

Triton (Figure 1) s’articule autour de trois composantes : l’acteur qui incarne le tuteur (le tutorant), le bénéficiaire (le tutoré) et la nature du tutorat. Cette dernière composante permet de spécifier la stratégie de tutorat souhaitée dans le cadre d’une activité d’apprentissage. Il s’agit de déterminer (1) le contenu de chaque intervention du tutorant auprès du tutoré, (2) les formes d’intervention du tutorant et (3) la temporalité des actions de tutorat au cours de la session d’apprentissage.

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Figure 1. Le modèle d’organisation du tutorat Triton

2.1.1. Tutorant

La composante Tutorant permet de définir les acteurs qui, dans le dispositif de formation, peuvent jouer le rôle de tuteur. Nous définissons trois types d’acteurs : le tuteur humain (souvent incarné par un enseignant), un co-apprenant et le dispositif informatique. Ce dernier peut apporter une aide pour l’utilisation de ressources pédagogiques ou donner des repères relatifs au déroulement d’une activité d’apprentissage.

2.1.2. Tutoré

Cette composante détermine le bénéficiaire d’une action de tutorat au cours d’une session d’apprentissage. Les types d’acteurs répertoriés sont : l’ensemble des apprenants, un sous-groupe et un apprenant. Nous considérons comme sous-groupe un sous-ensemble de la totalité des apprenants participant à une même activité d’apprentissage. En effet, il est possible d’avoir des activités d’apprentissage restreintes à un sous-groupe qui nécessite un accompagnement spécifique. Le choix des tutorés revient à déterminer à qui s’adresse l’intervention du tutorant.

2.1.3. Nature du tutorat

Cette composante permet de spécifier la stratégie de tutorat souhaitée dans le cadre d’une activité d’apprentissage. Il s’agit de déterminer (1) le contenu de chaque intervention du tutorant auprès du tutoré, (2) les modalités d’intervention du tutorant et (3) la temporalité des actions de tutorat au cours de la session d’apprentissage.

La sous-composante intitulée « Contenu du tutorat » spécifie la nature de l’assistance fournie, que nous caractérisons de quatre manières : l’utilisation, la compréhension, la méthodologie et la motivation. L’utilisation concerne l’utilisation par un apprenant des ressources pédagogiques du dispositif de formation, mais aussi des problèmes de navigation au sein du dispositif de formation. La compréhension porte sur les savoirs du domaine d’apprentissage à acquérir et le contenu des diverses activités pédagogiques proposées (par exemple, la compréhension d’un énoncé, la définition d'un terme, la proposition d'un ou plusieurs exemples de résultats à une question posée dans une activité pédagogique). Mais le support à la compréhension, c’est aussi donner à l'apprenant une analyse du résultat de ses activités en ce qui a trait notamment à l'explication de ses erreurs. La méthodologie concerne la façon dont l'apprenant peut ou doit s'organiser pour résoudre un problème donné, pour aborder la formation et pour travailler au fil des activités. Enfin, la motivation correspond à un aspect plutôt social du tutorat, où le tuteur doit veiller au maintien de la motivation des tutorés tout au long d’une activité voire de la formation.

La sous-composante « Modalité de l’intervention » se décompose en deux modalités : tutorat réactif et tutorat proactif (De Lièvre et al., 2006). La modalité d’intervention « tutorat réactif » est généralement la plus utilisée dans les environnements numériques d’apprentissage. Elle est définie en deux temps : une demande explicite d’un apprenant ou d’un groupe d’apprenants, puis une réponse apportée par le tutorant. L’intérêt de cette modalité est de permettre à l’apprenant d’expliciter un problème rencontré au cours d’une session d’apprentissage. Une autre modalité du tutorat, moins utilisée, est le tutorat proactif (De Lièvre et Depover, 2001) ; (Quintin, 2008). Dans ce cas, le tutorant intervient de sa propre initiative auprès du tutoré. Ces interventions utilisent les mêmes informations que celles appliquées dans le cadre d’un tutorat réactif. L’intérêt de l’utilisation de cette modalité consiste à maintenir un rythme à l’activité et à rassurer le tutorant sur le fait qu’un apprenant ne rencontre pas de difficultés particulières. En effet, ce dernier n’est pas toujours conscient d’être en difficulté. Par ailleurs, le tutorat proactif peut être une réponse aux problèmes de motivation et d’isolement de l’apprenant en apportant un sentiment de soutien. Nous distinguons deux modalités de tutorat proactif : 1) le tutorat proactif planifié dont les interventions sont prescrites dans le scénario pédagogique, et 2) le tutorat proactif contextuel qui résulte souvent d’un besoin d’intervenir du tutorant à la suite de difficultés repérées lors d’une session d’apprentissage.

Enfin, la sous-composante « Temporalité » correspond à la planification des interventions. Elle caractérise le moment de l’intervention du tutorant et la persistance de l’information transmise au tutoré. Le moment de l’intervention caractérise la présence du tutorant ou non lors de la session. Ainsi, nous définissons une modalité synchrone (le tutorant intervient pendant que l’étudiant est en ligne) et une modalité asynchrone (l’étudiant n’est pas en ligne au moment où intervient le tutorant). Nous définissons deux niveaux dans la persistance des informations transmises au tutoré : les informations dites « pérennes » et « non pérennes ». Les interventions non pérennes ne sont visibles qu’au moment où l’intervention du tutorant a lieu, contrairement à une intervention pérenne où le tutoré peut, à tout moment de la formation, retrouver les informations la concernant.

Nous venons de décrire notre proposition de modèle d’organisation d’une activité de tutorat. Nous présentons dans la section suivante une méthodologie d’application de ce modèle au cours du cycle de vie d’une formation.

3. Méthodologie d’utilisation de Triton pour décrire et mettre en place un scénario d’encadrement

L’utilisation de Triton permet en amont de la formation, de mieux définir l’activité de tutorat et, en aval, de faciliter une analyse en profondeur de son déroulement.

Nous synthétisons dans cette section le contenu de chaque phase que compose le cycle de vie d’une formation (conception, production, déroulement et évaluation) ; une description plus détaillée est disponible dans (Gounon et al., 2004b). Comme exemple de mise en œuvre de la méthodologie, nous prenons le cadre d’une formation sur la conception et l’intégration multimédia. L’activité d’apprentissage étudiée ici, intitulée « Découverte de l’environnement Director© », est destinée aux étudiants de première année inscrits en DUT Systèmes Réseaux et Communication (SRC) de l’Institut Universitaire de Technologie de Laval.

3.1. Phase de conception

La phase de conception consiste à définir le contenu des cours, leurs objectifs, le public cible ainsi que l’activité de tutorat. Triton donne les moyens de décrire spécifiquement la nature de l’assistance, les modalités d’intervention et la planification des interventions des tutorants.

3.1.1. Étape d’identification des acteurs et de la nature des interventions

Dans une première étape, le recours à Triton permet d’identifier les types d’acteurs tutorants et tutorés qui participent à une activité d’apprentissage donnée. Sur ces bases, et avant de spécifier les différents actes des tutorants au cours des sessions d’apprentissage, il décrit la nature du tutorat pour chaque tutorant identifié.

Par exemple, dans le cadre de l’activité multimédia, trois types d’acteurs incarnant le rôle de tutorant ont été identifiés : un étudiant, le tuteur enseignant et le dispositif informatique. Le public concerné est un groupe de 64 étudiants répartis en cinq sous-groupes. Chaque sous-groupe (quatre constitués de 14 étudiants et un de 8) est amené à travailler sur différents projets au cours de la formation. Les types acteurs tutorés identifiés sont : l’ensemble des étudiants, les cinq groupes et un apprenant dans le cadre d’un tutorat individuel. Nous considérons qu’il existe des sous-groupes d’étudiants puisque des activités pédagogiques sont prévues par petits groupes ce qui implique un tutorat spécifique.

Concernant la nature de l’intervention des tutorants, prenons l’exemple de l’acteur Tutorant Enseignant (Figure 2). Ce dernier intervient aussi bien auprès de l’ensemble des étudiants, d’un sous-groupe d’étudiants que d’un étudiant.

La nature de l’assistance porte sur la compréhension des concepts, la méthodologie d’organisation du travail et la motivation. Toutes les interventions concernant l’utilisation de l’environnement sont prises en charge par les tutorants Étudiant et Dispositif informatique : ce choix a été effectué au moment de la mise en place de la formation compte tenu des compétences des étudiants : ils ont pour habitude de travailler par petits groupes sur divers projets et de s’aider mutuellement pour l’utilisation des logiciels.

Dans le scénario d’apprentissage, des plages horaires sont prévues pour que l’enseignant puisse répondre de façon synchrone aux étudiants. Le reste du temps, les étudiants peuvent l’interroger à l’aide des outils de communication asynchrones. Les modalités d’intervention du tutorant Enseignant sont proactive et réactive. Les interventions proactives, quant à elles, sont planifiées. Les informations échangées peuvent être ou non persistantes selon la nature de l’intervention.

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Figure 2. Nature du tutorat pour le tutorant Enseignant

Dans l’exemple présenté plus haut, nous avons procédé de la même manière pour établir la nature du tutorat des tutorants Étudiant et Dispositif informatique.

3.1.2. Étape de définition des recommandations d’intervention

La description des types d’acteurs et de la nature de leurs interventions permet de définir un ensemble de recommandations d’intervention susceptibles d’être effectuées tout au long de la formation par les tutorants. Nous rappelons qu’une recommandation correspond à une intervention susceptible d’être réalisée pendant le déroulement d’une formation par les tutorants.

Nous distinguons trois types de recommandations d’intervention : 1) générales à l’activité d’apprentissage, 2) spécifiques aux étapes du scénario d’apprentissage et 3) propres à une activité pédagogique. Pour chaque recommandation identifiée, Triton est appliqué pour décrire la recommandation sur le plan du contenu, du moment et de la modalité de l’intervention du tutorant auprès du tutoré.

Dans le cadre de notre exemple de formation multimédia, 21 recommandations d’intervention ont été définies : 11 générales à l’activité d’apprentissage et 10 spécifiques aux étapes du scénario d’apprentissage. Nous poursuivons la présentation de notre méthodologie au travers d’une recommandation (appelée recommandation 1) choisie parmi les recommandations générales, et formulée de la manière suivante : « L’enseignant a pour tâche d’informer l’ensemble des étudiants du démarrage et de la fin d’une étape tout au long de l’activité ».

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Figure 3. Nature du tutorat répondant à la recommandation 1

La recommandation 1 (Figure 3) permet de rythmer l’activité de l’ensemble des étudiants de manière à ce que tous puissent suivre la même progression. L’intervention du tutorant enseignant auprès des tutorés s’effectue selon une modalité proactive planifiée (au début ou à la fin de l’activité). Son contenu est d’ordre méthodologique. L’information est accessible d’une manière permanente pendant le déroulement de la session.

3.1.3. Étape de spécifications et de choix des outils

À partir des recommandations d’intervention définies à l’étape précédente, il reste à déterminer les outils informatiques supports des interventions des tutorants. Pour ce faire, le concepteur sélectionne ou développe si nécessaire les outils qui s’avèrent les plus adaptés aux besoins d’intervention des tutorants auprès des tutorés. Concernant le choix des outils, nous avons défini, sur la base de Triton, les caractéristiques propres à chaque outil susceptible d’être utilisé par les acteurs lors de la formation : le tableau 1 présente la qualification de l’outil Forum.

Tableau 1. Qualification de l’outil Forum (les éléments grisés correspondent à des attributs non valides)

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À partir de la qualification des outils et de la liste des recommandations d’intervention transcrites au format de Triton, il est possible de sélectionner a priori les outils les plus adaptés pour soutenir l’activité des acteurs et plus précisément les recommandations d’intervention des acteurs tutorants.

Les outils, supports à l’activité de tutorat, intégrés ou développés dans le cadre de l’activité d’apprentissage « Découverte de l’environnement Director© » sont les suivants : forum, messagerie, chat, carnet de route et aide réactive.

La description de la recommandation 1 selon Triton est couverte par les outils Forum et Messagerie. L’outil Chat satisfait deux spécificités établies par la recommandation, à savoir le contenu du tutorat et le tutorant. La temporalité n’est cependant pas vérifiée puisque l’outil Chat ne peut être utilisé que de manière synchrone. Dans le cadre de l’activité d’apprentissage étudiée, l’outil Forum a donc été choisi comme support de communication satisfaisant la recommandation 1. Il a été préféré à l’outil Messagerie car le contenu du message devait être visible de manière pérenne pour l’ensemble des acteurs (tutorants et tutorés).

3.2. Phase de production

L’étape de production conduit à produire et intégrer dans la plate-forme de formation les différents médias/supports nécessaires à la diffusion du cours et à l’activité de tutorat. Par rapport à l’activité de tutorat, il s’agit : soit de développer les outils spécifiés dans la phase de conception puis de les intégrer dans la plate-forme de formation, soit d’intégrer des outils à la plate-forme quand les outils satisfaisants aux recommandations d’intervention existent déjà.

3.3. Phase de déroulement

La phase de déroulement permet le recueil de l’ensemble des observables utiles à l’analyse a posteriori de l’activité de tutorat. Nous définissons comme observables, toutes les données recueillies au cours d’une activité d’apprentissage : des questionnaires, des traces informatiques, des informations échangées lors des interventions de tutorat et des productions réalisées par les apprenants.

3.4. Phase d’évaluation

À l’issue de la formation, l’étape d’évaluation permet une analyse du déroulement de la formation en vue d’effectuer d’éventuelles modifications des ressources pédagogiques et du scénario d’encadrement pour une réutilisation de la formation. Au niveau de l’activité de tutorat, la phase d’évaluation permet une synthèse de l’activité de tutorat en s’appuyant sur une analyse des observables recueillis et une comparaison entre le scénario d’encadrement prévu et le scénario observé. L’écart entre ces deux scénarios peut être mesuré via les interventions recommandées lors de la phase de conception, et celle réalisée au cours des sessions d’apprentissage.

Un autre but de l’évaluation est de déterminer la pertinence des outils sélectionnés comme support à l’activité de tutorat. Pour chaque outil, une utilisation a été envisagée en amont. Le but de l’analyse est de comparer les qualifications préalables des outils avec les utilisations observées. La pertinence ou non des outils peut être démontrée ainsi que d’éventuels usages émergents permettant ainsi d’ajuster leur utilisation.

3.5. Apport méthodologique de Triton dans le cycle de vie d’une formation

Que ce soit lors de la conception et l’évaluation de l’activité de tutorat, la sélection ou le développement des outils d’intervention en soutien à cette activité, l’utilisation de Triton apporte une aide méthodologique à toutes les phases du cycle de vie d’une formation. Ce résultat confirme de notre point de vue l’hypothèse que nous émettions en début d’article, à savoir l’intérêt de fonder le processus de conception de l'encadrement et de l’accompagnement d’activités en FEL sur un modèle d’organisation du tutorat. Après avoir montré la pertinence méthodologique d’utiliser Triton dans le cycle de vie d’une formation, nous examinons dans la section suivante l’intérêt d’utiliser le modèle d’organisation du tutorat Triton pour guider la description d’un scénario d’encadrement via des langages de modélisation pédagogique. L’idée est de savoir comment Triton peut être intégré dans plusieurs EMLs pour décrire l’activité d’encadrement et d’accompagnement.

4. Réification de Triton dans des langages de modélisation pédagogique

Nous venons de décrire dans les sections précédentes le modèle d’organisation du tutorat Triton et une méthodologie de son utilisation pour guider la conception d’une activité pédagogique. À présent, nous étudions les conditions d’intégration de Triton dans des EMLs. Pour cela, nous choisissons d’examiner son intégration dans les langages de modélisation pédagogique IMS-LD et LDL.

Afin de permettre l’échange et la réutilisation d’objets d’apprentissage, il paraît nécessaire d’exprimer les scénarios pédagogiques selon des formes normalisées (Paquette et Léonard, 2005). Les scénarios pédagogiques décrivent le déroulement d’une unité d’apprentissage. Une unité d’apprentissage peut être, par exemple, un module, une séance de travaux pratiques, la consultation d’une page web, etc. (Koper, 2001) propose la description d’unités d’apprentissage à l'aide de langage de modélisation pédagogique. « An EML is a semantic information model and binding, describing the content and process within a ‘unit of learning’ from a pedagogical perspective in order to support, reuse and interoperability » (Rawlings et al., 2002). Un EML (Educational Modelling Language) est donc un métalangage de description des modèles pédagogiques partant des concepts pédagogiques impliqués dans le processus d’apprentissage. Il permet de formaliser toute séquence pédagogique et a pour objet d’aboutir à des composants pédagogiques réutilisables.

4.1. Le cas d’IMS-LD

4.1.1. IMS-LD en quelques mots

Le langage IMS-LD (IMS-LD, 2003) ; (Koper et Tattersall, 2005) vise à spécifier le déroulement d'une unité d'apprentissage en prenant en compte une grande diversité d’approches pédagogiques existantes (approche constructiviste, socio-constructiviste, etc.). Ce langage utilise la métaphore théâtrale pour définir la structure d’une unité d’apprentissage (learning design) comme étant un ensemble d’actes composés chacun de partitions associant des activités (activities) et des rôles (roles) (Lejeune, 2004) (cf. Figure 4).

IMS-LD définit deux rôles génériques que sont l’équipe d’encadrement (staff) et l’apprenant (learner). Les apprenants ont la possibilité d’obtenir un soutien au cours du déroulement de leur activité. Une activité est située dans un environnement (environment). Celui-ci inclut (1) des outils (services) correspondant à des outils de communication mis à disposition des acteurs d’une unité d’apprentissage et (2) des ressources pédagogiques (learning object). Une activité est caractérisée par des objectifs et des prérequis. Elle possède une structure spécifique. Une activité utilise des ressources et peut faire l’objet d’une production (outcome) de la part d’un apprenant. Une production peut ensuite être réinjectée dans d’autres activités comme étant une ressource.

L’utilisation de IMS-LD permet d’amener une réflexion en terme de contenus (ressources pédagogiques, outils) d’une formation et des liens les reliant. Il permet également de décrire l’accompagnement (support activity) dans le cadre d’une unité d’apprentissage donnée.

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Figure 4. Métamodèle IMS-LD simplifié

Si le modèle conceptuel IMS-LD permet d’exprimer toutes sortes de situation d’apprentissage et de décrire l’accompagnement dans le cadre d’une unité d’apprentissage donnée, il n’en reste pas moins trop général quant à la description des rôles (roles) ainsi que de l’activité d’encadrement (support activity) et des outils supports à cette activité (services). Par exemple, chaque tâche du tuteur est définie dans la composante support activity. Chaque action comprend l’acteur tuteur (role) et l’énoncé de sa tâche. Néanmoins, il n’est pas possible de décrire précisément la nature de la tâche du tuteur (contenu du tutorat, modalité de l’intervention et temporalité) et le type de tutorant (pairs, tuteur humain, système informatique). Nous proposons donc une extension à IMS-LD sur les bases de Triton afin de décrire plus clairement la nature des actions de tutorat et les outils supports aux tâches du tuteur.

4.1.2. Proposition d’extension d’IMS-LD

Notre proposition de réification de Triton dans IMS-LD (Gounon et al ., 2005) se situe à plusieurs niveaux du métamodèle simplifié (cf. les encadrés de la figure 4) : la description des types d’acteurs dans roles, la description des recommandations dans support-activity et la description des outils supports à l’activité du tuteur dans services. Les exemples des propositions d’extension présentés dans les sections suivantes (ainsi que pour LDL dans la section 4.2), s’appuient sur l’activité pédagogique « Découverte de l’environnement Director©» présentée à la section 3.

4.1.2.1. IMS-LD : roles

Nous proposons d’étendre IMS-LD en insérant dans la composante roles, les composantes tutorant et tutoré identifiées dans Triton. Ainsi, nous ajoutons un niveau de description pour la spécification des acteurs dans la composante learner (onelearner, learnersubgroup, learnergroup) et la composante staff (staffteacher, stafflearner, staffsystem). De fait, l’ensemble des composantes d’IMS-LD comprenant une composante role-ref (faisant référence à la description de chaque rôle préalablement défini) s’en trouve enrichi. Il est ainsi possible d’avoir une description plus détaillée des acteurs.

La figure 5 explicite à travers notre exemple, les modifications apportées pour la description des acteurs participant à une unité d’apprentissage ; nous rattachons notamment, pour chaque type de tuteur identifié, une composante (tutoring-style) qui décrit la nature du tutorat telle que spécifiée aussi dans Triton. Cette composante explicite la description du rôle staff, en identifiant (1) la nature de son intervention (tutoring-content, tutoring-mode et tutoring-scheduling), et (2) auprès de qui le tutorant est susceptible d’intervenir (onelearner-ref, learnergroup-ref, learnersubgroup-ref : le qualificatif ref indique que l’on fait référence à un élément précédemment décrit). L’identification de chaque destinataire fait référence au rôle décrit dans la composante learner. Les composantes tutoring-content, tutoring-mode et tutoring-scheduling correspondent aux différentes catégories identifiées dans la composante nature du tutorat de Triton.

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Figure 5. Proposition d’extension de roles dans IMS-LD

L’extension proposée pour la spécification des rôles des acteurs a des répercussions sur la description des services (services) et de l’activité de soutien (support activity). Elles sont décrites dans les sections suivantes.

4.1.2.2. IMS-LD : support-activity

Une activité permet le lien entre les rôles, les ressources pédagogiques et les services de l’environnement d’apprentissage. Elle permet de situer un rôle (role) dans un environnement (environment). Il existe deux types d’activités : les activités d’apprentissage (learning activity) et les activités de soutien (support activity). Elles permettent de référencer le(s) rôle(s) (role-ref) et l’environnement (environment-ref) dans lequel se déroule l’activité.

Les modifications apportées à la modélisation de l’activité de soutien (cf. Figure 6) se situent au niveau de la référence des acteurs (role-ref). La description des rôles correspondants aux différents acteurs participant à l’activité d’apprentissage a une répercussion au niveau de l’activité de soutien puisque cette dernière permet de lier les acteurs aux différentes activités que doit réaliser chaque acteur.

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Figure 6. Proposition d’extension de support-activity dans IMS-LD

4.1.2.3. IMS-LD : services

Les acteurs évoluent au sein d’un environnement (environment) dans lequel est réalisé l’ensemble des activités. Un environnement est constitué d’un ensemble (a) d’objets pédagogiques (learning object) correspondant à toutes les ressources (numérique ou non), utilisées pour les activités et (b) de services correspondant aux outils mis à la disposition des rôles tels que des outils de communication (un forum par exemple).

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Figure 7. Proposition d’extension de services dans IMS-LD

Nous n’apportons pas d’extension à la description des ressources pédagogiques. Par contre, Triton permet de spécifier les caractéristiques des différents outils (services) de soutien à l’activité d’encadrement et d’accompagnement mis à disposition des acteurs au cours d’une session. Un objectif de l’extension apportée est de donner plus facilement accès à ces outils lors de la mise en place du dispositif de formation mais aussi de faciliter l’analyse de l’usage des différents outils supports à l’unité d’apprentissage. Dans ce cadre, nous ajoutons des modifications à IMS-LD concernant la description des outils (cf. Figure 7) et plus particulièrement la précision des références aux acteurs (learner-ref, staff-ref) utilisant l’outil ainsi que les destinataires.

4.2. Le cas de LDL

4.2.1. LDL en quelques mots

Learning Design Language (LDL) (Ferraris et al., 2008) ; (Martel et al., 2006) ; (Durand, 2006) est un langage de formalisation de scénarios pédagogiques. Ce langage de modélisation s’inscrit dans le projet SceClasse (Durand, 2006) dont le but est de donner aux concepteurs les moyens de produire des scénarios collaboratifs pour leurs classes, de façon réutilisable, partageable et opérationnalisable au sein d’un ENT. L’élaboration d’un scénario pédagogique repose sur l’identification et la façon dont les échanges vont se dérouler et s’organiser entre les acteurs d’une activité.

Ce langage repose sur un paradigme organisationnel intitulé modèle de participation. Ce dernier est constitué de différents concepts permettant de modéliser ce que doit être une activité collaborative (cf. Figure 8). LDL reprend la plupart des éléments du modèle de participation tels que les conceptions de position et d’enceinte.

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Figure 8. Métamodèle simplifié LDL

L’enceinte est le lieu où se déroule une interaction. Une enceinte peut être une ressource (document, page Web, etc.) ou bien un service (forum, chat, etc.). Les différents acteurs qui évoluent dans une activité sont décrits aux travers de rôles. Ces derniers permettent de préciser entre autres les liaisons entre les acteurs de l’activité et les interactions à réaliser. L’interaction définit le schéma d’actions entre deux ou plusieurs acteurs. C’est la composante principale d’un scénario car elle représente les activités en tant que telles. La structure définit l’enchaînement entre deux ou plusieurs interactions suivant une règle définie par l’un de ses attributs. Le point de vue d’un ou plusieurs participants à une activité sur une enceinte ou bien sur d’autres participants sont définis par la position. Une règle définit des conditions ou des positions. Les règles ont une fonction de régulation dans le déroulement de l’activité et ce, en évaluant des positions.

4.2.2. Proposition d’extension de LDL

Comme pour IMS-LD, la réification de Triton dans LDL (cf. les encadrés de la figure 8) apporte un niveau de granularité supplémentaire quand à la description des acteurs et la nature de leurs interventions dans le cadre d’une activité pédagogique. Plus précisément, il s’agit de donner des informations sur les acteurs auprès de qui le concepteur peut interagir (composante role de LDL), quand, pour quoi (composante interaction) et comment (composante enceinte) il peut intervenir.

4.2.2.1. LDL : roles

L’extension de LDL au niveau de la description des acteurs se situe dans la composante roles par l’insertion des composantes tutorant et tutoré identifiées dans Triton. En effet, la composante roles ne comprend pas à l’origine de définition des composantes tuteur ou apprenant. De plus, nous ajoutons dans chaque composante role id un niveau de précision dans la description des acteurs (roles) (cf. Figure 9) : staffteacher, stafflearner ou staffsystem pour le(s) tutorant(s) et onelearner, learnersubgroup ou learnergroup pour le(s) tutoré(s).

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Figure 9. Proposition d’extension de roles dans LDL

4.2.2.2. LDL : interaction

Comme pour le langage IMS-LD, la description des interactions des acteurs au cours de l’activité pédagogique est de fait précisée grâce au niveau de granularité supplémentaire ajouté à la description des acteurs (roles) : staffteacher, stafflearner, staffsystem, onelearner, learnersubgroup et learnergroup. De plus, la description de chaque interaction (interaction) (cf. Figure 10) est affinée en indiquant la nature de l’interaction (tutoring-style) en termes de contenu (tutoring-content), la modalité d’intervention (tutoring-mode) et la temporalité (scheduling).

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Figure 10. Proposition d’extension de interaction dans LDL

4.2.2.3. LDL : enceinte

Comme pour les composantes précédentes (roles et interaction structure), nous ajoutons au niveau de la composante enceinte, des références aux rôles des acteurs (staffteacher-role-ref, staffteachername-role-ref, stafflearner-role-ref et staffsystem-role-ref) susceptibles d’interagir ainsi que la nature de leurs échanges (tutoring-style) opérés avec les outils utilisés (cf. Figure 11).

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Figure 11. Proposition d’extension de enceinte dans LDL

4.3. Bilan

La réification de Triton dans les langages de modélisation pédagogique IMS-LD et LDL permet, par l’intermédiaire d’une granularité de description plus fine des acteurs intervenants dans les activités de tutorat, de préciser la nature des interactions et des outils supports à ces dernières. Ces deux cas d’études montrent qu’il est possible d’implémenter le modèle Triton dans deux types d’EMLs de nature différentes, moyennant des extensions aux modèles de base. L’intégration de Triton apporte un plus dans la précision de la nature de la tâche du tuteur (contenu du tutorat, modalité de l’intervention et temporalité), de qui assure le tutorat (pairs, tuteur humain, système informatique) et des outils supports aux interactions.

5. Conclusions et perspectives

Dans cet article, nous avons décrit nos propositions d’assistance à la description de scénarios d’encadrement dans le contexte de FEL. Le travail présenté apporte une réflexion quant à l’organisation du tutorat en termes d’acteurs, de la nature du tutorat et des outils supports à l’activité de tutorat et la façon d’aider le concepteur à mener une réflexion sur l’organisation du tutorat envisagé pour une situation d’apprentissage donnée. De fait, nous considérons la scénarisation de l’activité d’encadrement comme étant aussi important que la scénarisation de l’activité d’apprentissage.

Le modèle d’organisation du tutorat Triton et la méthodologie d’utilisation associée montrent l’intérêt de fonder le processus de conception de l'encadrement et de l’accompagnement d’apprenants dans une FEL sur les bases d'un tel modèle qui permet de définir des recommandations à faire au tuteur et les outils d’intervention adaptés. Les propositions d’extension apportées à IMS-LD et à LDL, sur les bases de Triton, contribuent à enrichir l’embryon du scénario d’encadrement déjà présent dans ces standards.

Nos perspectives de travail se situent à deux niveaux. Premièrement, nous souhaitons confronter Triton à différents contextes pédagogiques et situations d’apprentissage de manière à en vérifier la complétude voire de le compléter. Deuxièmement, le cadre méthodologique présenté pour décrire l’organisation du tutorat doit permettre à un concepteur d’une unité d’apprentissage, de mener une réflexion quant à l’organisation du tutorat qu’il souhaite mettre en place dans le cadre d’une plateforme de FEL. C’est pourquoi il nous semblerait opportun d’intégrer aux plateformes de FEL des éditeurs qui assistent la mise en place d’une activité de tutorat tout en mettant à disposition des outils supports à cette activité. Nous travaillons actuellement sur le développement d’un système coopératif nommé EdiScenE. Le but est d’offrir une assistance adaptée à tout concepteur pour décrire un scénario pédagogique intégrant une description détaillée de l’organisation du tutorat selon une forme standardisée. Le scénario pédagogique exprimé à l’aide d’un EML pourra alors être exporté en vue de son intégration dans la plateforme de formation. EdiScenE s’appuiera sur les EMLs intégrant les extensions issues du modèle d’organisation du tutorat Triton. Ainsi, il sera possible de guider la mise en place d’une activité de tutorat en fonction d’une stratégie identifiée en amont et de mettre à disposition des tuteurs les outils supports à l’encadrement et à l’accompagnement prévus.

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A propos des auteurs

Patricia GOUNON est Docteur en Informatique. Ses travaux de recherche s'inscrivent dans le cadre de l'ingénierie des EIAH (Environnements Informatiques pour l'Apprentissage Humain). Le travail mené concerne la conception d'activités d'encadrement des apprenants. La problématique porte sur la question du soutien informatique apporté à un concepteur d'une Formation En Ligne. L’objectif est de spécifier les rôles et les interventions du tuteur ainsi que les outils supports à son activité.

Adresse : LIUM, Université du Maine, Avenue Messiaen, 72085 Le Mans Cedex 9

Courriel : patricia.gounon@univ-lemans.fr

Pascal LEROUX est Professeur en Informatique à l'Université du Mans, Directeur de l’École Nationale Supérieure d’Ingénieurs du Mans et chercheur au LIUM. Ses activités de recherche concernent les Environnements Informatiques pour l'Apprentissage Humain (EIAH). Une première originalité de ses travaux est de s'intéresser aux systèmes partenaires des élèves et des enseignants. Une seconde est de se préoccuper de problématiques d'ingénierie éducative en robotique pédagogique (alphabétisation à la technologie et à l’informatique) et d’environnements supports de projets dans des contextes de formation en présence et à distance.

Adresse : LIUM, Université du Maine, Avenue Messiaen, 72085 Le Mans Cedex 9

Courriel : pascal.leroux@univ-lemans.fr

 

 
Référence de l'article :
Patricia GOUNON, Pascal LEROUX, Modéliser l’organisation du tutorat pour assister la description de scénarios d’encadrement, Revue STICEF, Volume 16, 2009, ISSN : 1764-7223, mis en ligne le 26/04/2010, http://sticef.org
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Mise à jour du 27/04/10