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Apport de l’ingénierie ontologique aux
environnements de formation à distance
Valéry Psyché Centre
de recherche LICEF, Télé-université
Olavo Mendes [Université
Fédérale à Paraiba - Brésil]
Jacqueline Bourdeau Centre de recherche LICEF,
Télé-université
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RÉSUMÉ : Cet
article explore le potentiel de l’ontologie et de
l’ingénierie ontologique pour augmenter l’intelligence dans
les environnements de formation à distance, ainsi que dans la conception
de ces environnements. Il contient une introduction à l’ontologie
avec ses origines dans la philosophie occidentale, une discussion des relations
entre l’intelligence artificielle et l’ingénierie
ontologique, suivie d’une description des méthodologies et des
outils d’ingénierie ontologique. Plusieurs pistes
d’exploitation du potentiel des ontologies pour les environnements de
formation à distance sont explorées.
MOTS CLÉS : Ontologie,
ingénierie ontologique, formation à distance |
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ABSTRACT : How
is Ontology relevant to Distance Education? This article claims that ontology
and ontological engineering have a potential to increase intelligence both in
the learning environments for distance education, and in the process of
designing them. An introduction to the origins of the concept of ontology in
western philosophy is presented, as well as a discussion on the relationships
between artificial intelligence and ontological engineering, followed by a
description of methodologies and tools for ontological engineering.
KEYWORDS : ontology, ontological engineering, distance education
|
1. Introduction
L’ingénierie ontologique[1]
est devenu un thème récurrent dans les milieux de recherche
du domaine des Environnements Interactifs pour l’Apprentissage Humain
(EIAH). L’ingénierie des connaissances
de type ontologique serait une piste de travail à privilégier
pour l'analyse, la conception, et le développement d'environnements
interactifs d'apprentissage à distance. Qu'en est-il du potentiel
d’une telle approche pour ces environnements, et quelle réflexion
peut être menée sur ce thème? L'article qui suit se
veut une tentative d'éclairer un aspect de ce questionnement, soit
l’apport potentiel de l'ingénierie ontologique pour la conception
d'environnements interactifs de formation à distance (FAD).
Le numéro thématique précédent de la revue se
penchait sur le rôle du langage XML dans la
conception des ressources numériques en éducation, soit les
documents à finalité pédagogique. Si
XML doit jouer un rôle important pour la
création des documents (micro-design), des questions se posent au
sujet des terminologies et des systèmes de classification qui serviront
à l'indexation et au repérage de ces documents, pour
l'exploitation ou le partage de ces documents
[Wiley00], et
l'ontologie est au rendez-vous pour répondre à ces questions.
Toutefois, au-delà de cette considération, c'est une
réflexion fondamentale qui est appelée par un processus
d'ingénierie ontologique, puisque la représentation de
l'existant contraint à définir sans ambiguïté
possible les concepts et les liens qu'ils entretiennent entre eux. Si des
auteurs tels
[NilssonAl02]
sont arrivés à la conclusion d’une nécessité
de modélisation conceptuelle pour l’exploitation du Web
sémantique aux fins du téléapprentissage, cet article
rejoint l’idée d’une telle modélisation, en proposant
toutefois une approche spécifique, celle de l’ingénierie
ontologique (IO).
Le texte qui suit présente un historique de l'ontologie, expose les
fondements de l'ingénierie ontologique ainsi que ses liens avec
l’intelligence artificielle (IA), et propose
des pistes d’exploitation de l’ontologie pour des environnements de
formation à distance.
2. Perspective historique sur l’ontologie
Historiquement, l’ingénierie ontologique a émergé
de l’ingénierie des connaissances. Cette dernière
a longtemps été considérée comme le domaine
de prédilection du développement d’expertise en conception
de systèmes à base de connaissances. Malgré le fait
que l’ingénierie des connaissances ait contribué à
accroître cette expertise en l’organisant dans une perspective
computationnelle, certains membres de la communauté de l’intelligence
artificielle dont nous faisons partie ont éprouvé le besoin
de passer à une ingénierie s’appuyant plus solidement
sur des fondements théoriques et méthodologiques, afin d’améliorer
la conception des systèmes intelligents : l’ingénierie
ontologique (IO) permet de spécifier
la conceptualisation d’un système, c’est-à-dire,
de lui fournir une représentation formelle des connaissances qu’il
doit acquérir, sous la forme de connaissances déclaratives
exploitables par un agent. Ainsi, l’exploitation par un mécanisme
d’inférence, d’une représentation de type déclarative
telle que l’ontologie, tout en suivant les règles d’inférence
définie dans cette ontologie, est la source de l’intelligence
de système, par exemple un environnement de formation à
distance.
L’ingénierie de connaissances a ainsi donné naissance
à l’ingénierie ontologique, où l’ontologie est
l’objet clé sur lequel il faut se pencher. La
nécessité d’une ontologie et d’une ingénierie
ontologique des systèmes à base de connaissances commence à
être comprise et acceptée par la communauté. Fonder
l’ingénierie ontologique exige que l’on puisse en
définir l’objet et en défendre la spécificité
méthodologique. Or, si personne ne conteste que l’objet de
l’ingénierie ontologique soit l’ontologie, la
définition explicite et la délimitation précise de ce
concept soulève un questionnement qui est tout à la fois
d’ordre philosophique, épistémologique, cognitif et
technique. La prochaine section introduit la notion d’ontologie ainsi que
sa genèse dans l’histoire de la philosophie occidentale.
2.1. Origine de l’ontologie
L’Ontologie est un terme philosophique qui signifie être
- du grec ancien ôn, onton, participe présent de einai
- et discours, étude, science - de logos
– [EncyclopædiaUniversalis00].
En d’autres termes, l’Ontologie serait la Science ou théorie
de l’être. Bien que ce soient les Grecs qui aient inventé
cette science, ils ne l’avaient pas appelé Ontologie, le
terme étant beaucoup plus récent (XVIIe siècle) que
la discipline qu’il désigne [EncyclopædiaUniversalis00].
La discipline elle-même a évolué en se rapprochant
des sciences cognitives et de l’IA, il y a seulement une vingtaine
d’années.
Dans les écrits scientifiques contemporains, le terme ontologie
recouvre deux usages dont le premier appartient à la philosophie
classique et le second plus récent, aux autres sciences cognitives. De ce
fait, la convention veut que la notation Ontologie (avec un O
majuscule) soit attribuée au domaine issu de la philosophie et
ontologie aux autres.
Pris dans son sens le plus large, le terme ontologie est plus ou moins
synonyme de : théorie ou conception du réel. Dans
cette acception, très large, la recherche ontologique n'est nullement
quelque chose dont la philosophie aurait le monopole, comme nous le verrons par
la suite dans l’historique de l’ontologie en intelligence
artificielle.
Dans la section 2, nous nous intéressons à son sens
philosophique, le plus étroit et le plus théorique, où
l'Ontologie est définie comme la théorie de l’être
en tant qu’être.
2.2. Fondement métaphysique : La science de
l’être
Dans la philosophie classique, l’Ontologie correspond à ce
qu’Aristote appelait la Philosophie première, protè
philosopha, c’est-à-dire la science de l’être en
tant qu’être, par opposition aux philosophies secondes qui
s’intéressaient, elles, à l’étude des
manifestations de l’être (les étants)
[Graf96].
D’après, le constat fondamental d'Aristote, influencé par
Parménide, l'étant se dit de multiples façons.
Figure 1 : Ontologie de l'être selon Aristote
Les catégories constituent les différentes descriptions
associées aux manifestations de l’être dans le monde,
traduites par des propositions. Aristote a ramené l’ensemble des
formes possibles de manifestations de l’être à dix
catégories : 1) Substance ; 2) Quantité ; 3)
Qualité (quels attributs); 4) Relation (plus x que, etc.) ; 5)
Lieu (où) ; 6) Temps (quand) ; 7) Posture (positionné
comment) ; 8) Possession (avec quoi) ; 9) Action (en faisant
quoi) ; 10) Pâtir (subissant/étant affecté par). Parmi
les dix catégories, la substance a une importance
prépondérante car : 1) elle constitue l’essence
(ousia prôté) sans quoi une entité ne peut pas
subsister, et qui par le fait même, individualise et différencie
une entité par rapport à toutes les autres ; 2) elle assure
une structure qui demeure stable (ousia deutera) à travers les
changements continuels du monde. Ainsi, il est possible de reconnaître un
être (un certain individu par exemple), comme étant en essence le
même, en dépit des changements qu’il subit dans toutes les
autres propriétés (les catégories dites accidentelles ou
transitoires) au fil du temps, modifiant par exemple son
apparence/qualité (nourrisson, enfant, adulte, vieillard), sa posture,
ses actions, ses possessions, etc. La figure 1 (modélisée à
l’aide du langage MOT[2])
résume cette ontologie de l’être selon Aristote.
2.3. Fondements épistémologiques
Le terme Ontologie aurait été introduit sous sa forme latine au
XVIIe siècle par Goclenius (Rudolph Göckel, dans Lexicon
philosophicum, 1613-1615) pour désigner la science de
l’être en général. Il correspond par conséquent
à cette recherche sur l’être en tant qu’être
(on hè on, en grec ancien) qu’Aristote avait
assignée, parmi d’autres objets propres, à la philosophie
première, appelée par la suite, métaphysique
[EncyclopædiaUniversalis00].
Par la suite, Johann Clauberg attribue la même signification au terme
dans ses œuvres Metaphysica (1646) et Ontosophie sive
ontologia (1656), où il l’emploie pour faire
référence à une sorte de métaphysique
générale qui aurait pour objet les caractéristiques
essentielles communes à tous les êtres, à savoir :
substance, existence, essence, etc.
[Auroux84],
[Graf96],
[Lalande60]. Selon
Clauberg dans son œuvre Metaphysica (cité dans Lalande, 1960)
: "Le nom seul est nouveau ; quant à
cette science, elle existait déjà chez les scolastiques avec la
même définition : on appelait Transcendentia ces
déterminations communes à tous les êtres".
La diffusion du terme est due à l’Ontologia de
[Wolff29], qui, dans
le concept scolaire de métaphysique, rangeait l’Ontologie en tant
que métaphysique générale, puisqu’elle traitait de
l’être en général, et la distinguait des trois
sciences métaphysiques spéciales (metaphysica specialis)
que sont la psychologie rationnelle (l’être de l’âme
intellective), la cosmologie rationnelle (l’être du
monde) et la théologie rationnelle (l’être de
Dieu), chacune traitant d’une région
déterminée de l’être.
La différence entre la conception wolffienne de l’être et
la conception classique dépend selon
[Couturat1903],
de ses prémisses leibniziennes (Leibniz, 1646-1716), qui veulent que le
possible précède le réel, si bien que l’être
est défini comme, ce qui veut exister, soit qu’il existe
effectivement, soit qu’il n’existe pas, l’existence
apparaissant comme le complément de la possibilité.
Les principes suprêmes de l’Ontologie sont le principe de
non-contradiction et le principe leibnizien de raison suffisante. Les
déterminations internes de l’être sont ses attributs
essentiels. Pour le reste, l’Ontologie étudie une série de
couples conceptuels, comme quantité et qualité,
nécessité et contingence, simplicité et composition,
finitude et infinitude, identité et diversité, cause et effet,
etc.
Kant a conçu son analytique transcendantale - première
partie de la logique transcendantale, dans la Critique de la raison pure
[Kant78] - d’une
telle manière qu’elle put prendre la place de la vieille Ontologie.
Hegel (1770-1831) procéda de manière analogue avec la logique
qu’il identifie à la métaphysique, lorsqu’il affirme
dans l’un des textes introductifs à la Science de la logique :
"la logique objective prend [...] la place de la
métaphysique d’autrefois"
[Hegel1812].
C’est dans le cadre du développement de la
phénoménologie que le terme d’Ontologie a recommencé
à investir le discours philosophique : d’abord Husserl, dont
le projet de phénoménologie pure le conduit à parler
d’ontologies régionales ou sciences idéales de genres
d’être qui empiriquement sont l’objet de plusieurs sciences
(par exemple, l’ontologie régionale de la nature physique, etc.),
puis Heidegger et Hartmann. L’école existentialiste, avec Sartre,
développera ensuite sa propre vision de l’Ontologie.
Dans la philosophie analytique, l’Ontologie a été
étroitement liée à la logique et à la philosophie du
langage. Selon Quine, les engagements ontologiques du discours (plus exactement
d’une théorie scientifique) ne sont pas tant
déterminés pas ses assertions d’existence que par le type de
variables sur lesquelles le langage admet la quantification : ainsi, une
position nominaliste – pour qui il n’existe que des individus
– admettra seulement la quantification sur des variables individuelles (et
non pas, par exemple, sur des variables prédicatives).
L’Ontologie est donc déterminée par la sémantique
de son langage, et coïncide de fait avec les aspects généraux
de cette sémantique. Un courant significatif de la philosophie analytique
poursuit la construction d’une ontologie formelle,
c’est-à-dire d’une théorie formelle des modes
d’être. La construction d’une telle théorie
coïncide avec la définition d’une sémantique pour un
langage logique, dans laquelle peuvent trouver place les types
d’entités que la théorie admet (par exemple, des individus,
ou bien des individus et des classes, ou bien des propriétés,
etc.), et où sont définies les relations entre les
différents types d’entités.
Une telle ontologie formelle implique de soumettre à une
re-formulation dans le langage logique toutes les théories
traditionnelles de l’être substantiel (idéalités
mathématiques, réalités phénoménales des
sciences naturelles, etc.). Cela constitue une réduction des ontologies
des théories de la substance à l’ontologie fondamentale
proposée.
La section suivante présente l’appropriation des ontologies par
les chercheurs contemporains en IA.
3. Vision contemporaine en intelligence artificielle
Dans les milieux de l’intelligence artificielle, il semblerait que l’ontologie
ait été abordée pour la première fois par
John McCarthy qui reconnut le recoupement entre le travail fait en Ontologie
philosophique et l’activité de construire des théories
logiques de systèmes d’intelligence artificielle. McCarthy
affirmait déjà en 1980 que les concepteurs de systèmes
intelligents fondés sur la logique devaient d’abord énumérer
tout ce qui existe, en construisant une ontologie de notre monde.
Cette vision de McCarthy, inspirée par les lectures de Quine, fut
reprise par Patrick Hayes, en 1985 dans son travail sur la Physique
Naïve. La signification du terme a évolué, et pendant que
les champs de l’ingénierie des connaissances, de la
modélisation conceptuelle, et de la modélisation du domaine
commençaient à converger, la signification du terme a fait de
même.
Au début des années 1990, l’usage du terme était
déjà bien répandu dans chacun des sous-domaines de
l’intelligence artificielle.
[Neeches91] et ses
collègues, ont présenté leur vision en ces termes :
"An ontology defines the basic terms and relations
to define extensions to the vocabulary".
En 1993, Gruber propose sa définition :
"An ontology is an explicit specification of a
conceptualizatio"
[Gruber93], qui est
jusqu’à présent la définition plus citée dans
les écrits en intelligence artificielle. Depuis la définition de
Gruber, beaucoup de définitions de l’ontologie ont
été proposées dans la littérature.
En 1997, [Borst97]
modifia légèrement la définition de Gruber en
énonçant que : "Une ontologie est
définie comme étant une spécification formelle d’une
conceptualisation partagée".
Ces deux définitions ont été expliquées par
[StuderAl98] et ses
collègues comme suit : Conceptualisation réfère
à un modèle abstrait d’un phénomène dans le
monde, en ayant identifié les concepts appropriés à ce
phénomène. Explicite signifie que le type de concepts
utilisés et les contraintes liées à leur usage sont
définis explicitement. Formel réfère au fait que
l’ontologie doit être traduite en langage interprétable par
une machine. Partagé réfère au fait qu’une
ontologie capture la connaissance consensuelle, c’est-à-dire non
réservée à quelques individus, mais partagée par un
groupe ou une communauté.
En 1995,
[GuarinoGiaretta95]
ont choisi sept définitions dont ils ont fourni des
interprétations syntaxiques et sémantiques. D’après
[GómezPérez99],
des auteurs ont également fourni une définition fondée sur
la méthodologie qu’ils ont utilisée pour construire leur
ontologie. Pour
[SwartoutAl97]
par exemple ; "an ontology is a hierarchically
structured set of terms for describing a domain that can be used as a skeletal
foundation for a knowledge base". Dans le même ordre
d’idées,
[BernarasLaresgoitiCorera96]
proposent la définition suivante : "an
ontology provides the means for describing explicitly the conceptualization
behind the knowledge base".
Les approches associées à ces définitions sont
explicitées par la suite dans notre section sur les méthodologies
de l’ingénierie ontologique.
4. Composantes d’une ontologie
Les connaissances traduites par une ontologie sont à véhiculer
à l’aide des éléments suivants [GómezPérez99]
: 1) Concepts; 2) Relations ; 3) Fonctions ;
4) Axiomes; 5) Instances.
-
Les concepts, aussi appelés termes ou
classes de l’ontologie, correspondent aux abstractions pertinentes
d’un segment de la réalité (le domaine du problème),
retenues en fonction des objectifs qu’on se donne et de l’application
envisagée pour l’ontologie. Selon [GómezPérez99]
ces concepts peuvent être classifiés selon plusieurs
dimensions : 1) niveau d’abstraction (concret ou
abstrait) ; 2) atomicité (élémentaire
ou composée) ; 3) niveau de réalité
(réel ou fictif).
Les relations traduisent les associations
(pertinentes) existant entre les concepts présents dans le segment
analysé de la réalité. Ces relations incluent les
associations suivantes: 1) Sous-classe-de (généralisation –
spécialisation) ; 2) Partie-de (agrégation ou
composition) ; 3) Associée-à ; 4) Instance-de, etc. Ces
relations nous permettent d’apercevoir la structuration et
l’interrelation des concepts, les uns par rapport aux autres. Les
fonctions constituent des cas particuliers de relations, dans laquelle un
élément de la relation, le nième (extrant) est
défini en fonction des n-1 éléments
précédents (intrants).
Les axiomes constituent des assertions,
acceptées comme vraies, à propos des abstractions du domaine
traduites par l’ontologie.
Les instances constituent la définition
extensionnelle de l’ontologie ; ces objets véhiculent les
connaissances (statiques, factuelles) à propos du domaine du
problème.
5. Dimensions de classification
Les ontologies peuvent être classifiées selon plusieurs dimensions.
Parmi celles-ci, nous en examinerons quatre : 1) Objet de conceptualisation ;
2) Niveau de détail; 3) Niveau de complétude; 4) Niveau
de formalisme de représentation. Ces dimensions de classification
sont illustrées à la figure 2 et le détail de chacune
des quatre dimensions est montré en annexe.
Figure 2 : Typologies d’ontologies selon quatre dimensions
de classification
5.1. Typologie selon l’objet de conceptualisation
Les ontologies classifiées selon leur objet de conceptualisation par
[GómezPérez99],
[Guarino97b], [Mizoguchi98],
[MizoguchiIkeda96],
[VanHeijstAl97],
[VanwelkenhuysenAl94],
[VanwelkenhuysenAl95],
[WieliingaSchreiber93],
le sont de la façon suivante : 1) Représentation
des connaissances; 2) Supérieure/ Haut niveau; 3) Générique ;
4) Domaine ; 5) Tâche; 6) Application.
-
Ontologie de représentation des connaissances
[GómezPérez99a],
[VanHeijstAl97]
ce type d’ontologies regroupe les concepts (primitives de représentation)
impliqués dans la formalisation des connaissances. Un exemple
est l’ontologie de Frame qui intègre les
primitives de représentation des langages à base de
frames : classes, instances, facettes, propriétés/slots,
relations, restrictions, valeurs permises, etc.
-
Ontologie supérieure ou de Haut niveau [Guarino97a],
[Sowa95a],
[Sowa95b].
Cette ontologie est une ontologie générale. Son sujet
est l’étude des catégories des choses qui existent
dans le monde, soit les concepts de haute abstraction tels que: les
entités, les événements, les états, les
processus, les actions, le temps, l'espace, les relations, les propriétés.
L'ontologie de haut de niveau est fondée sur : la théorie
de l'identité, la méréologie (theory of whole
and parts role) et la théorie de la dépendance.
Guarino et Sowa ont poursuivi chacun indépendamment des recherches
sur la théorie de l’ontologie. Tous deux intègrent
les fondements philosophiques comme étant des principes à
suivre pour concevoir l’ontologie de haut niveau ou supérieure.
Sowa introduit deux concepts importants, Continuant et Occurrent,
et obtient douze catégories supérieures en combinant
sept propriétés primitives. L’ontologie supérieure
de Guarino consiste en deux mondes : une ontologie des Particuliers
(choses qui existent dans le monde) et une ontologie des Universels
comprenant les concepts nécessaires à décrire
les Particuliers. La conformité aux principes de l’ontologie
supérieure a son importance, lorsque le but est de standardiser
la conception des ontologies.
-
Ontologie Générique [GómezPérez99],
[GómezPérez99a],
[VanHeigjstAl97].
Cette ontologie aussi appelée, méta-ontologies ou core
ontologies, véhicule des connaissances génériques
moins abstraites que celles véhiculées par l’ontologie
de haut niveau, mais assez générales néanmoins
pour être réutilisées à travers différents
domaines. Elle peut adresser des connaissances factuelles (Generic
domain ontoloy) ou encore des connaissances visant à résoudre
des problèmes génériques (connaissances procédurales)
appartenant à ou réutilisables à travers différents
domaines (Generic task ontoloy). Deux exemples de ce type d’ontologies
sont : 1) l’ontologie méréologique [Borst97]
contenant des relations, Partie-de et 2) l’ontologie
topologique contenant des relations, Associé-à.
Ontologie du Domaine
[MizoguchiAl00].
Cette ontologie régit un ensemble de vocabulaires et de concepts qui
décrit un domaine d'application ou monde cible. Elle permet de
créer des modèles d'objets du monde cible. L'ontologie du domaine
est une méta-description d'une représentation des connaissances,
c'est-à-dire une sorte de méta-modèle de connaissance dont
les concepts et propriétés sont de type déclaratif. La
plupart des ontologies existantes sont des ontologies du domaine. Selon
Mizoguchi, l'ontologie du domaine caractérise la connaissance du domaine
où la tâche est réalisée. Dans le contexte de la
formation à distance, un domaine serait par exemple : le
téléapprentissage.
Ontologie de Tâches
[MizoguchiAl00].
Ce type d’ontologies est utilisé pour conceptualiser des
tâches spécifiques dans les systèmes, telles que les
tâches de diagnostic, de planification, de conception, de configuration,
de tutorat, soit tout ce qui concerne la résolution de problèmes.
Elle régit un ensemble de vocabulaires et de concepts qui décrit
une structure de résolution des problèmes inhérente aux
tâches et indépendante du domaine. Selon
[MizoguchiAl00],
l'ontologie de tâche caractérise l'architecture computationnelle
d'un système à base de connaissances qui réalise une
tâche. Deux exemples d'utilisation de l'ontologie de tâche dans le
domaine de l'éducation sont les suivants : 1) l'ontologie de
formation par ordinateur - Computer Based Training Ontology
[JinAl99] - qui
régit un ensemble de concepts spécifiques à un
système d'apprentissage inhérent à des ontologies de
tâche ; et 2) l'ontologie des objectifs d'apprentissage - Learning
Goal Ontology
[InabaAl00] - qui
décrit les rôles des apprenants et des agents dans le cadre d'un
apprentissage collaboratif.
Ontologie d'Application. Cette ontologie est la plus
spécifique. Les concepts dans l’ontologie d'application
correspondent souvent aux rôles joués par les entités du
domaine tout en exécutant une certaine activité
[Maedche02].
5.2. Niveau de détail de l’ontologie
Par rapport au niveau de détail utilisé lors de la conceptualisation
de l’ontologie en fonction de l’objectif opérationnel
envisagé pour l’ontologie, deux catégories au moins
peuvent être identifiées : 1) Granularité
fine : correspondant à des ontologies très détaillées,
possédant ainsi un vocabulaire plus riche capable d’assurer
une description détaillée des concepts pertinents d’un
domaine ou d’une tâche. Ce niveau de granularité peut
s’avérer utile lorsqu’il s’agit d’établir
un consensus entre les agents qui l’utiliseront; 2) Granularité
large : correspondant à un vocabulaire moins détaillé
comme par exemple dans les scénarios d’utilisation spécifiques
où les utilisateurs sont déjà préalablement
d’accord à propos d’une conceptualisation sous-jacente
[Fürst02],
[Guarino97b].
Les ontologies de haut niveau possèdent une granularité
large, compte tenu que les concepts qu’elles traduisent sont normalement
raffinés subséquemment dans d’autres ontologies de
domaine ou d’application [Fürst02].
5.3. Typologie selon le niveau de complétude
Le niveau de complétude a été abordé par
[Mizoguchi98] et
[Bachimont00].
À titre d’exemple, nous décrivons la typologie de
[Bachimont00]. Ce
dernier propose la classification sur trois niveaux suivante :
Niveau 1 - Sémantique : Tous les
concepts (caractérisés par un terme/libellé) doivent
respecter les quatre principes différentiels :
1) Communauté avec l’ancêtre; 2) Différence
(spécification) par rapport à l’ancêtre;
3) Communauté avec les concepts frères (situés au
même niveau); 4) Différence par rapport aux concepts
frères (sinon il n’aurait pas lieu de le définir). Ces
principes correspondent à l’engagement sémantique qui
assure que chaque concept aura un sens univoque et non contextuel
associé. Deux concepts sémantiques sont identiques si
l’interprétation du terme/libellé à travers les
quatre principes différentiels aboutit à un sens
équivalent.
Niveau 2 - Référentiel :
Outre les caractéristiques énoncées au niveau
précédent, les concepts référentiels (ou formels) se
caractérisent par un terme/libellé dont la sémantique est
définie par une extension d’objets. L’engagement
ontologique spécifie les objets du domaine qui peuvent être
associés au concept, conformément à sa signification
formelle. Deux concepts formels seront identiques s’ils possèdent
la même extension (ex : les concepts d’étoile du
matin et d’étoile du soir associés à
Vénus).
Niveau 3 - Opérationnel : Outre les
caractéristiques énoncées au niveau
précédent, les concepts du niveau opérationnel ou
computationnel sont caractérisés par les opérations
qu’il est possible de leur appliquer pour générer des
inférences (engagement computationnel). Deux concepts
opérationnels sont identiques s’ils possèdent le même
potentiel d’inférence.
5.4. Typologie selon le niveau du formalisme
Par rapport au niveau du formalisme de représentation du
langage utilisé pour rendre l’ontologie opérationnelle,
[UscholodGrüninger96b]
proposent une classification comprenant quatre catégories :
1) Informelles : ontologies opérationnelles dans
un langage naturel (sémantique ouverte) ; 2) Semi-informelles :
utilisation d’un langage naturel structuré et limité ;
3) Semi-formelles : langage artificiel défini
formellement; 4) Formelles : utilisation d’un langage
artificiel contenant une sémantique formelle, ainsi que des théorèmes
et des preuves des propriétés telles la robustesse et l’exhaustivité
[GómezPérez99].
Selon Studer, "il y a différents types
d’ontologie et chaque type remplit un rôle différent dans le
processus de construction du modèle du domaine".
[StuderAl98]. La
section suivante aborde les fondements de ce processus.
6. Fondements de l’ingénierie ontologique
Le processus de construction d’ontologies, appelé ingénierie
ontologique, peut être décrit selon les principes qui le
gouvernent, et les méthodologies et les outils qui le soutiennent.
6.1. Principes
Il existe un ensemble de critères et de principes qui ont fait leurs
preuves dans le développement des ontologies et qui peuvent être
résumés comme suit :
Clarté et Objectivité
[Gruber93] :
L’ontologie doit fournir la signification des termes définis en
fournissant des définitions objectives ainsi qu’une documentation
en langage naturel.
-
Complétude
[Gruber93] : Une définition exprimée
par des conditions nécessaires et suffisantes est préférée
à une définition partielle (définie seulement
par une condition nécessaire et suffisante).
Cohérence
[Gruber93] : Une
ontologie cohérente doit permettre des inférences conformes
à ces définitions.
Extensibilité monotonique maximale
[Gruber93] : De
nouveaux termes généraux et spécialisés devraient
être inclus dans l’ontologie d’une façon qui
n’exige pas la révision des définitions existantes.
Engagements ontologiques minimaux
[Gruber93] :
Ce principe invite à faire aussi peu de réclamations que possible
au sujet du monde représenté. L’ontologie devrait
spécifier le moins possible la signification de ses termes, donnant aux
parties qui s’engagent dans cette ontologie la liberté de
spécialiser et d’instancier l’ontologie comme elles le
désirent.
Principe de distinction ontologique
[BorgoAl96] :
les classes dans une ontologie devraient être disjointes. Le
critère utilisé pour isoler le noyau de propriétés
considérées comme invariables pour une instance d’une classe
est appelé le critère d’Identité.
Modularité
[BernarasAl96] :
Ce principe vise à minimiser les couplages entre les modules.
Diversification des hiérarchies
[ArpirezAl98] :
Ce principe est adopté pour augmenter la puissance fournie par les
mécanismes d’héritage
multiple[3]. Si suffisamment de
connaissances sont représentées dans l’ontologie et que
suffisamment de différentes classifications de critères sont
utilisées, il est plus facile d’ajouter de nouveaux concepts
(puisqu’ils peuvent être facilement spécifiés à
partir des concepts et des classifications de critères
pré-existants) et de les faire hériter de propriétés
de différents points de vue.
Distance sémantique minimale
[ArpirezAl98]. Il
s’agit de la distance minimale entre les concepts enfants de mêmes
parents. Les concepts similaires sont groupés et
représentés comme des sous-classes d’une classe, et
devraient être définis en utilisant les mêmes primitives,
considérant que les concepts qui sont moins similaires sont
représentés plus loin dans la hiérarchie.
Normaliser les noms
[ArpirezAl98]. Ce
principe indique qu’il est préférable de normaliser les noms
aussi autant que possible.
Cet ensemble de critères et de processus est
généralement accepté pour guider le processus
d’ingénierie ontologique.
6.2. Méthodes d’ingénierie ontologique
Le processus de construction d’une ontologie
est un processus complexe, impliquant plusieurs intervenants dans les
différentes phases du processus. La gestion de cette complexité
exige la mise en place de processus de gestion, afin de contrôler les
coûts et le risque, et d’assurer la qualité tout au long du
processus de construction.
À l’heure actuelle, il n’existe pas encore de consensus
à propos des meilleures pratiques à adopter lors du processus de
construction ou même des normes techniques régissant le processus
de développement des ontologies, bien que certaines contributions dans
cette direction soient déjà disponibles dans les écrits
[FernadezLopezAl97],
[GrüningerFox94],
[GrüningerFox95],
[LenatGuha90],
[Mizoguchi98],
[StaabAl01],
[UscholodKing95].
Une recension des écrits
[Mendes03] a permis
de dénombrer un total de trente trois méthodologies de
développement d’ontologies existantes à l’heure
actuelle. Une méthodologie étant considérée comme
ensemble de principes de construction systématiquement reliés,
appliqués avec succès par un auteur dans la construction
d’ontologies.
Les méthodologies recensées permettent la construction
d’ontologies 1) à partir du début, 2) par intégration
ou fusion avec d’autres ontologies, 3) par re-ingénierie, 4) par
construction collaborative, ainsi que 5) par l’évaluation des
ontologies construites. Afin de mieux comprendre comment ces différentes
méthodologies s’intègrent et parfois se complètent
à l’intérieur d’un cycle de vie de construction,
d’évaluation et de maintenance des ontologies, nous proposons le
cadre référentiel montré à la figure 3 qui permettra
une analyse comparative des méthodologies recensées :
Les méthodologies recensées peuvent
être analysées selon plusieurs critères ou dimensions
[OntoWeb01],
l’un d’entre eux étant le type du processus de construction :
Construction de nouvelles ontologies à partir de
zéro ;
Ré-ingénierie d’ontologies ;
Fusion ou intégration d’ontologies ;
Construction collaborative
d’ontologies.
Figure 3 : Cadre d’analyse
des méthodologies recensées
Ces méthodologies d’ingénierie peuvent être
associées à des approches pour l’évaluation des
ontologies construites. Les méthodes d’ingénierie
ontologique identifiées dans les écrits sont listées dans
le tableau 1. Pour une analyse plus détaillée du le sujet, il faut
se référer à
[Mendez04] (à
paraître):
Tableau 1 : Méthodologies
d’ingénierie ontologique
Aux méthodologies sont généralement associés des
outils de modélisation, qui sont présentés dans la
sous-section suivante.
6.3. Environnements et outils de modélisation
Un ensemble d’environnements d’ingénierie ontologique
ont été développés afin de systématiser
l’ingénierie des ontologies. Selon [GómezPérez00],
les plus connus sont : ONTOLINGUA [FarqhuarAl96],
ONTOSAURUS [SwartoutAl97],
ODE [BlazquezAl98],
PROTéGé WIN (maintenant
connu sous le nom de PROTéGé 2000)
[MusenAl93]
[NoyAl00] et
enfin, TADZEBAO et WEBONTO
[Domingue98].
Ces outils font l’objet d’une étude comparative des
outils d’ingénierie ontologique proposée par l’équipe
WonderTools[4] de l’Université
d’Amsterdam [DuineveldAl99].
D’autres outils non compris dans l’étude, mais recensés
dans [Psyché03]
méritent d’être cités : HOZO
[MizoguchiAl00],
KAON (anciennement connu sous le nom
de OntoEdit) [ Maedche02],
[MaedcheAl03]
et OILED [BechhoferAl01] :
KAON (Karlsuhe Ontology
and Semantic Web) est un environnement open source modulaire,
basé dans Java, destiné à la conception, au
développement et à la gestion d’ontologies.
L’environnement intègre les modules suivants : API, Query,
Serveurs (d’ontologie et d’application), Générateur de
portails web (basés sur les ontologies), Éditeur d’ontologie
(construction et maintenance).
HOZO du MizLab de
l’Université d’Osaka; Hozo est un environnement
composé d’un éditeur et d’un serveur
d’ontologies. L’éditeur est développé en
applets Java afin de pouvoir fonctionner comme un client via l’Internet.
Hozo gère les ontologies et ses instances pour chaque programmeur. Chacun
peut lire et copier toutes les ontologies et les instances présentes dans
Hozo, mais ne peut pas modifier celles développées par
d’autres. La vérification de la consistance d’une instance se
fait en utilisant les axiomes définis dans l’ontologie. Hozo
gère l’exportation des ontologies et modèles en format XML,
RDF, DAML+OIL.
ODE du laboratoire
d'Intelligence Artificielle de l’Université de Madrid. Les
principaux avantages de ODE (Ontology Design Environment) sont le module
de conceptualisation pour construire des ontologies et le module pour construire
des modèles conceptuels ad hoc.
ONTOLINGUA de
l’Université Stanford; Le serveur Ontolingua est le plus connu des
environnements de construction d’ontologies en langage Ontolingua. Il
consiste en un ensemble d’outils et de services qui supportent la
construction en coopération d’ontologies, entre des groupes
séparés géographiquement.
ONTOSAURUS de
l’Information Science Institute de l’Université de
Southern California. Ontosaurus consiste en un serveur utilisant
LOOM comme langage de représentation des
connaissances, et en un serveur de navigation créant dynamiquement des
pages HTML qui affichent la hiérarchie de l’ontologie; le serveur
utilise des formulaires HTML pour permettre à l’usager
d’éditer l’ontologie. Des traducteurs du LOOM en Ontolingua,
KIF, KRSS et C++, ont été
développés.
OILED de
l’Information Management Group de l’Université de
Manchester développé par Sean Bechhofer et Gary Ng se veut un
éditeur freeware d’ontologies, destiné à supporter le
développement d’ontologies de petites et moyennes tailles,
basées sur le standard DAML+OIL. OILEd n’est pas un environnement
de développement d’ontologies offrant des fonctionnalités
supportant le cycle complet de conceptualisation et
d' opérationnalisation.
PROTéGé-2000
du département d’Informatique Médicale de
l’Université Stanford; Protégé-2000 successeur de
PROTéGéWIN, est un outil, une
plateforme et une librairie d’ontologies, qui permettent : 1) de
construire une ontologie du domaine, 2) de personnaliser des formulaires
d’acquisition de connaissances et 3) de transférer la connaissance
du domaine.
WEBONTO du Knowledge
Media Institute de l’Open University; WebOnto et
TADZEBAO sont des outils
complémentaires. Tadzebao permet aux ingénieurs des connaissances
de tenir des discussions sur les ontologies, en mode synchrone et asynchrone.
WebOnto supporte la navigation collaborative, la création et
l’édition d’ontologies sur le Web.
Pour conclure, nous rappelons que dans l’ensemble les outils de
l’ingénierie ontologique ont mûri considérablement au
cours des dernières années, mais qu’ils doivent encore
s’enrichir de certaines caractéristiques propres à
l’ontologie et à la collaboration.
L’ingénierie ontologique possède un potentiel de
systématisation et d’explicitation des connaissances. Comment ce
potentiel peut-il se concrétiser pour les environnements de formation
à distance ? Nous abordons ce sujet dans la section suivante.
7. Rôles de l’ontologie pour les environnements de formation
à distance
Le rôle de l’informatique cognitive dans
la conception des environnements de formation à distance n’est plus
à démontrer
[Paquette02], et
les équipes de recherche poursuivent leurs efforts dans le but
d’augmenter ou d’enrichir l’intelligence dans ces
environnements, ainsi que la qualité du processus de
conception-développement. Quel serait l’apport spécifique de
l’IO qu’aucune autre méthode d’ingénierie
n’ait apporté à ce jour ?
De façon générale, l’apport spécifique de
l’IO pour ces environnements serait la représentation formelle de
connaissances déclaratives, couplée à un mécanisme
d’inférence exploitable par ces environnements. La richesse de
l’apport de l’IO est cependant plus complexe, et comprend les
éléments suivants : connaissances déclaratives,
intégrité, consensus, orientation par l’usage,
compatibilité dans les systèmes multiagents, sémantique
riche, interopérabilité, requêtes en direct
(run-time).
Une ontologie contient une base de connaissances déclaratives,
rendues explicites par un exercice approfondi d’analyse conceptuelle. Les
méthodes de représentation pratiquées dans le domaine des
EIAH tendent à intégrer connaissances
déclaratives, procédurales et conditionnelles de façon
souvent inextricable.
Cette base de connaissances déclaratives conserve son
intégrité quelle que soit l’exploitation qui en est
faite, ce qui n’est pas le cas lorsque les types de connaissances sont
regroupés, comme on le retrouve dans les
EIAH.
La construction d’une ontologie se fait par la voie d’un
consensus, et représente ainsi la compréhension
partagée a priori d’un groupe ou d’une communauté, au
lieu, comme c’est le cas dans la plupart des systèmes, de reposer
sur une signification donnée par quelques individus ou par une
autorité, à laquelle tous doivent s’ajuster.
La définition de l’ontologie est orientée par
l’usage, tel que l’entendent un groupe ou une communauté,
afin de servir directement leurs besoins, et se distingue ainsi d’un
système qui, au mieux, peut être pensé en fonction des
usagers, mais sans que cet usage guide directement et explicitement la
conception du système.
Une ontologie permet une compatibilité dans les systèmes
multiagents, en fournissant un référentiel commun aux
agents qui peuvent ainsi l’exploiter de différentes
façons sans altérer son intégrité.
Dans la perspective du Web sémantique, qui est en voie de devenir une
assise pour les environnements de formation à distance, l’IO offre
de façon spécifique une sémantique riche, mieux que
toute autre méthode de représentation des connaissances
connue.
L’IO est également le type
d’ingénierie qui se positionne le mieux pour permettre
l’interopérabilité réclamée par le Web
sémantique, à des fins d’opération des
systèmes de formation à distance ainsi que de partage au sein de
ces systèmes et entre eux.
L’ontologie offre une meilleure performance puisqu’elle supporte
une interaction en direct lors des requêtes (queries)
d’information par les usagers, à l’inverse d’autres
structures de représentation de connaissances (comme les schémas
décrivant les données stockées dans une base de
données), qui sont utilisées elles, plutôt en mode
différé.
Ces caractéristiques mettent en relief la spécificité et
l’originalité de l’apport de
l’IO pour augmenter l’intelligence dans
les environnements de FAD, leur conception et leur
opération.
Dans cette section, Nous soulignerons deux contextes particuliers à la
formation à distance, où l’ingénierie ontologique
peut s’avérer utile :
7.1. Besoins pour les environnements de formation à distance
Parmi les besoins identifiés pour augmenter l’intelligence dans
les environnements de formation à distance, il est possible
d’identifier les quatre besoins suivants qui induisent le recours à
l’ontologie.
-
Besoin d’une représentation formelle :
une caractéristique de la formation à distance est d’exiger
un design pédagogique complet, et complètement explicite
[BourdeauBates97];
la méthode de design pédagogique MISA
développée au Centre de recherche LICEF,
avec ses 30 processus et ses 150 tâches, en est sans doute l’expression
la plus accomplie [Paquette01a].
Tant pour le téléapprentissage que pour la formation
à distance, un environnement de conception-développement
fondé sur les connaissances constitue le soutien à la
conception et au développement d’environnements d’apprentissage ;
la problématique des environnements de conception intelligents
pour la conception d’environnements d’apprentissage intelligents
[NkambouAl02]
correspond à celle des environnements de formation à
distance [MooreKearsley96].
Besoin de partager la connaissance : La question du
partage se pose de façon particulière en formation à
distance, précisément en raison du design pédagogique
exhaustif, et de la médiatisation pédagogique intensive. Les
acteurs (apprenants, concepteurs, tuteurs, gestionnaires) qui interagissent tant
avec les environnements de conception qu’avec les environnements
d’apprentissage se trouvent face au besoin ou au défi de partager
des choses du monde dans lequel ils évoluent ensemble :
idées, vision, activités, objets, outils. Que le partage signifie
la répartition, la mise en commun ou l’échange, il requiert
dans tous les cas, une systématisation des connaissances où ces
choses sont spécifiées et structurées afin que le partage
puisse se réaliser. L’ingénierie ontologique se
présente comme une approche permettant le partage et la
réutilisation (share and reuse).
Besoin d’une assistance pour la conception de
cours : Concevoir un cours exige beaucoup de travail et pourtant, il est en
général conçu à partir de zéro. Peu
d’objets pédagogiques sont réutilisables et les cours
existants sont difficilement comparables. Une étude sur les
systèmes de formation
[Hayashi99] a
montré que les systèmes d’assistance à la conception
de cours auraient tout à gagner à se doter des
fonctionnalités suivantes :
Fournir aux concepteurs des primitives conviviales
afin qu’ils puissent décrire leurs propres idées
Donner des conseils pertinents, basés sur
les principes de l’ingénierie pédagogique
Montrer le comportement dynamique des
systèmes de formation à un niveau conceptuel afin qu’ils
puissent examiner leur validité.
répondre aux besoins des concepteurs, une assistance
intelligente basée sur l’ontologie serait la clé. Des
efforts
[BourdeauMizoguchi02],
[Ikeda97],
[JinAl99],
[Murray96],
[Murray99],
[MurrayAl03],
[Nkambou96],
NkambouAl03],
[PsychéAl03]
ont été orientés vers la conception d’outils
répondant aux exigences indiquées
ci-dessus.
Besoin d’indexer des objets
pédagogiques : Une indexation des objets pédagogiques riches
sémantiquement est nécessaire pour faire face à la
diversité des tâches du concepteur
[KabelAl99].
Figure 4 : Illustration du processus d'indexation d'objets
pédagogiques
Le processus d’indexation intervient dans
plusieurs tâches propres à la formation à distance,
par exemple le repérage, le référencement, la composition
dynamique d’objets pédagogiques à différents
niveaux de granularité (cours, leçons, scénarios
pédagogiques, webographie[5],
...).
De même ce processus intervient lors la réalisation des
tâches assignées à l’apprenant ou utiles à la
consolidation de son apprentissage. La figure 4 illustre comment
l’ontologie peut contribuer à une indexation sémantiquement
riche.
Nous avons présenté brièvement quelques-uns des besoins
d’augmenter l’intelligence dans les environnements de FAD
(représentation explicite, partage d’objets pédagogiques,
assistance aux concepteurs, repérage d’objets pédagogiques),
auxquels l’ingénierie ontologique pourrait apporter une
contribution. Dans cette optique, une analyse des usages vient compléter
celle des besoins.
7.2. Anticipation des usages
L’ontologie est toujours construite en fonction de son usage
anticipé sous forme de but, le contexte d’exploitation étant
dans ce cas, la formation à distance. Il faut donc spécifier son
usage anticipé avant d’entamer tout processus
d’ingénierie.
Plusieurs chercheurs tels que [GrüningerLee02],
[RussAl99],
[UscholdGrüninger96a]
et [BoudeauMuzoguchi02],
[MisoguchiBourdeau00],
[PsychéAl03],
se sont intéressés aux buts d’exploitation de l’ontologie.
Nous les avons répertoriés[6]
de façon non exhaustive et regroupés sous trois pôles
d’usage : 1) Communication et interopérabilité ;
2) Inférence computationnelle et 3) Systèmes d’information :
Le premier pôle, communication et
interopérabilité contient lui-même les sous-classes
suivantes :
-
Entre les personnes : une ontologie informelle
mais cohérente (définie sans ambiguïté)
serait suffisante [UscholdGrüninger96],
[UscholdJasper99],
[GómezPérez02],
[GrüningerLee02],
[BourdeauMizoguchi02],
[MizoguchiBourdeau00].
La communication se fait en partageant entre les humains la connaissance
qui a été accumulée dans les réseaux de
formation à distance [MizoguchiBourdeau00].
-
Entre les personnes et les systèmes :
une ontologie cohérente (définie sans ambiguïté)
dotée d’un degré de formalité semi-formel
ou rigoureusement formel [UscholdGrüninger96],
[UscholdJasper99],
[GómezPérez02],
[GrüningerLee02].
La communication se fait en partageant cette connaissance avec les
systèmes [MizoguchiBourdeau00].
-
Entre les systèmes (interopérabilité) :
l’ontologie, assurerait la traduction entre les différentes
méthodes de modélisation, paradigmes, langages et systèmes.
Le degré de formalité requis serait rigoureusement formel
[UscholdGrüninger96],
[UscholdJasper99],
[GómezPérez02],
[GrüningerLee02].
La communication se fait en mettant en oeuvre cette connaissance pour
soutenir la conception des systèmes de conception de formation
[MizoguchiBourdeau00].
Le deuxième pôle, inférence
computationnelle
[GrüningerLee02] :
il s’agit de la représentation et de la manipulation interne de
plans et d’information pour la planification, pour l’analyse de
structures internes, algorithmes, intrants et extrants des systèmes
informatiques de façon théorique et conceptuelle.
Le troisième pôle, systèmes de formation à
distance
[UscholdGrüninger96],
[UscholdJasper99],
[GómezPérez02].
Ce pôle peut se décomposer selon les sous-classes suivantes :
Réutilisation et partage d’objets
pédagogiques. Dans la construction de nouveaux systèmes de
conception en assemblant des objets pédagogiques déjà
construits et disponibles, l’ontologie assurerait la base pour un encodage
formel des entités, attributs, leurs interrelations dans le domaine
d’intérêt. Cette représentation formelle serait
réutilisable par d’autres systèmes, au moyen d’une
traduction automatique (ou partageable). Dans le cas du partage d’objets
pédagogiques : lorsque le but est l’utilisation d’objets
par plusieurs systèmes différents l’ontologie permet la mise
en correspondance des contenus sémantiques des objets.
Repérage d’objets
pédagogiques : l’ontologie est utilisée comme
méta descripteur afin de décrire le contenu sémantique
associé aux objets ;
Acquisition de connaissances :
l’utilisation d’ontologies contribue à augmenter la vitesse
et la fiabilité du processus d’acquisition de connaissances lors de
la construction d’un système de conception de cours. Organisation
d’objets pédagogiques : structuration ou gestion de banque
d’objets (ressources) sur un domaine;
Fiabilité : l’ontologie permet la
réalisation de tests de consistance automatiques ou semi-automatiques sur
les objets qu’elle décrit.
Spécification d’une
conceptualisation : l’ontologie peut être utilisée
pour définir les spécifications (domaine, tâche,
application) pour un système de formation.
Maintenance d’objets
pédagogiques : l’ontologie peut contribuer à rendre
le processus de maintenance des objets qu’elle décrit, plus
efficace.
Il existe une relation dialectique entre ces trois pôles d’usage,
leur mise en relation étant vitale pour le domaine de la formation
à distance. En effet, des usages tels que la communication,
l’interopérabilité, le partage, la réutilisation et
l’organisation intelligente des objets pédagogiques dus
à l’exploitation des ontologies, n'apparaît non seulement
désirable mais nécessaire pour l’avenir de la
FAD. L’ontologie pourrait ainsi trouver une
pertinence directement relative aux environnements de formation à
distance, à leur conception et leur utilisation.
7.3. Exemples de positionnement de l’ontologie
Maintenant que les buts d’exploitation de l’ontologie ont
été spécifiés, nous allons les illustrer dans le
contexte de la formation à distance, suivant les deux axes qui ont
été définis précédemment (section 7.1.),
à savoir : 1) Ontologie pour l’exploitation des environnements
de conception, 2) Ontologie pour l’exploitation des
EIAH (environnement interactif
d’apprentissage humain) par des apprenants.
7.3.1. Exemples extraits des écrits scientifiques
Nous proposons dans un premier temps, quelques
exemples tirés de la littérature, où l’exploitation
d’ontologies a permis d’obtenir de l’intelligence dans des
systèmes de formation à distance.
– Dans le projet de repérage et de
visualisation du modèle de l’apprenant de
[AptedAl03] un outil
de repérage et de visualisation, VIUM, a
été conçu pour permet à l’usager de
sélectionner un concept central sur l’écran. Une ontologie
est utilisée pour s’assurer que les concepts les plus proches
sémantiquement sont visibles. Cette sélection de concepts rendus
visibles est une partie essentielle de la visualisation qui assiste les
apprenants dans l’exploration de domaines comprenant des centaines de
concepts. La tâche particulière ici, est de montrer à un
usager ce qu’une ontologie computationnelle nous permet
d’inférer à partir d’informations comme
l’évaluation de l’apprenant sur sa propre connaissance.
– Dans le projet IMAT de
[DesmoulinsGrandbastien02],
une ontologie est utilisée pour l’indexation des briques de
documents à des fins de composition dynamique de documents
dépendamment des contextes d’utilisation : 1) technique, 2)
médiatique, 3) domaine, 4) ou pédagogique. L’ontologie
pédagogique qu’ils utilisent permet d’attribuer des
rôles aux briques ainsi que des attributs qualitatifs et des contraintes
d’organisation des briques dans le document final.
– Dans le projet de développement de
l’environnement de conception de cours, SmartTrainer de
[HayashiAl99], le
rôle de l’ontologie est de gérer la communication entre les
agents à l’intérieur de l’environnement. En effet,
SmartTrainer possède une architecture multiagents. Les concepts,
les relations et notamment les axiomes de l’ontologie, fournissent le
vocabulaire nécessaire à la formulation des messages et
requêtes. Par exemple, des messages appropriés sont produits si des
contraintes d’ordre sémantiques ne sont pas respectées.
L’environnement possède également des fonctionnalités
de contrôle et de maintenance des changements des instances de
l’ontologie. Cette gestion est rendue possible grâce aux axiomes de
l’ontologie.
– Dans le projet de
développement d’environnements pour favoriser l’apprentissage
collaboratif de
[Inaba00],
[Inaba01], les travaux
portent sur la construction d’une ontologie pour représenter les
concepts communs des théories d’apprentissage collaboratif.
Plusieurs théories démontrent les avantages de
l’apprentissage collaboratif (i.e., l’apprentissage par
l’observation, l’apprentissage autorégulateur, la cognition
distribuée, la théorie de flexibilité cognitive, la
théorie socioculturelle, etc.). En sélectionnant une
théorie parmi celles-ci et en formant un groupe d’apprenants, on
peut s’attendre à un apprentissage collaboratif efficace
s’appuyant sur cette théorie. De plus, selon Inaba, les
environnements d’apprentissage collaboratif doivent être
conçus en fonction de ces théories, c’est-à-dire
qu’ils doivent contenir une ontologie du domaine de l’apprentissage
collaboratif. Un système contenant d’une telle ontologie fournit
des fonctionnalités de médiation de l’apprentissage aux
apprenants, leur permettant de cette façon de construire leur
connaissance.
Dans le projet de développement de l’
environnement de conception de cours , EON de
[Murray96],
[Murray99], les
ontologies de EON décrivent le contenu et
les stratégies pédagogiques, les modèles de
l’apprenant et la conception d'interfaces. Ce dernier point mérite
d’être discuté : dans EON,
Murray propose une approche de méta-système de conception. En
effet, bien que EON soit un système de
conception de cours, il peut aussi être vu comme étant un
système de développement de système de conception de cours,
pour effectuer des tâches spécifiques à conception
d’un cours (à buts spéciaux). Le rôle de
l’ontologie est de soutenir la tâche des concepteurs dans son
ensemble, c’est-à-dire pour des tâches orientées, vers
la pédagogie (ontologie de la matière enseignée), vers
l’apprentissage (ontologie du modèle de l’apprenant) ou vers
la conception d’interfaces de cours (ontologie de conception).
Dans le projet de développement de
l’environnement de conception de curriculum
CREAM et de tutorat
CREAM-TOOL de
[Nkambou96],
[NkambouAl98]
[NkambouAl02]
[NkambouAl96],
[NkambouAl03], un
environnement de type tuteur pour la génération automatique de
curriculum – CREAM - et de cours -
CREAM-TOOLS - a été conçu.
Quatre ontologies constituent la base du curriculum. Elles sont construites
à partir d’alphabets (Klausmeier, etc.), de vocabulaires
d’évaluation (Merrill, Winograd, etc.), de taxonomies
(Gagné, Bloom, etc.) et d’un ensemble de concepts
(capacités, objectifs, ressources, liens) reliés entre eux
(relation d’analogie, de généralisation,
d’agrégation, de déviation, de pré-requis, de
prétexte, de constitution, de similarité, d’abstraction, de
cas particulier, d’utilisation et d’auxiliariat). Les ontologies de
CREAM-TOOL (une ontologie de capacités,
une ontologie d’objectifs, une ontologie de ressources et une ontologie de
liens) servent à décrire un module de capacités
d’apprentissage, un module d’objectifs d’apprentissage, un
module de ressources didactiques et des liens de couplage entre les trois
modules précédents.
Dans le projet de développement du système
conseiller de
[PaquetteTchounikine02],
une ontologie de tâche sert à identifier et à définir
les composants de la tâche de conseil considérée et les
notions qui vont être prises en compte dans le système. La
tâche considérée étant : 1) soit celle de
l’apprenant qui suit une formation via un environnement
d’apprentissage diffusé sur le Web, 2) soit celle d’un
concepteur qui construit une cours à l’aide d’un
système conseiller accessible par le Web.
-
Dans le projet DIVA-BCTA
[Paquette01b],
[PaquetteAl02],
[PaquetteAl03],
les objectifs sont : 1) de créer une base de connaissances
sur le téléapprentissage par le développement
d’une ontologie du domaine, et 2) de regrouper l’expertise
sur le téléapprentissage dans des objets pédagogiques
référencés en fonction de cette ontologie. Le
rôle de cette ontologie du domaine y est de servir de système
d’indexation et de classification aux objets pédagogiques.
Par ailleurs, une ontologie de tâche permet de définir
différents cas ou scénarios d’utilisation de ces
objets, identifiés grâce à leur référencement
en fonction de l’ontologie du domaine. Le rôle de cette
ontologie de tâche y est de fournir des réponses aux
requêtes des utilisateurs de la base.
Dans le projet de composition dynamique de documents
pédagogiques de
[RanwezCrampes03],
une ontologie est utilisée pour repérer des briques
d’information pertinente. Le contenu des briques est validé
grâce à l’ontologie du domaine. Ainsi, la vérification
de la pertinence consiste à associer à chaque brique un ou
plusieurs fragments significatifs de cette ontologie, traduisant la
sémantique contenue dans la brique. Le repérage
d’information est réalisé en fonction d’objectifs
spécifiés par un apprenant. Parallèlement,
l’ontologie est utilisée pour organiser les briques dont le contenu
est pertinent par rapport aux attentes d’un apprenant et pour organiser
ces briques d’information. Les auteurs du projet ont testé deux
méthodes différentes : l’une en fonction de grammaires
formelles, et l’autre par association de deux ontologies (du domaine et
pédagogique). Celle ayant démontré le plus de souplesse est
l’ingénierie ontologique. Il est a noté que cette
ingénierie a été appliquée dans deux projets :
KARINA et
SIBYL.
7.3.2. Synthèse des usages de l’ontologie
Le tableau synthèse présenté ci-dessous (tableau 2)
résume le rôle de l’ontologie en fonction de ses buts et de
ses contextes d’utilisation, dans les projets répertoriés et
décrits plus haut.
|
|
Pôles
d’utilisation des ontologies |
Projets |
1 |
2 |
3 |
A |
B |
C |
D |
E |
F |
C1 |
Ontologie
des capacités, objectifs et ressources pour un ITS,
CREAM-TOOLS, Nkambou (Canada) |
ü |
|
|
ü |
|
|
ü |
|
Ontologie
du modèle de l’apprenant pour la visualisation, Apted
et Kay (Australie) |
|
ü |
|
ü |
|
|
|
|
Ontologie
de l’apprentissage collaboratif pour la médiation,
Inaba (Japon) |
ü |
|
|
|
|
|
ü |
|
Ontologie
pédagogique pour la composition dynamique d’OP, SIBYL
et KARINA, Ranwez (France) |
|
ü |
ü |
ü |
ü |
|
ü |
ü |
Ontologies
syntaxique et pédagogique pour indexation de briques d’OP,
IMAT, Desmoulins (France) |
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Ontologie pour
un système multi-agents, SMARTTRAINER,
Hayashi (Japon) |
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Ontologie
d’un système conseiller, Paquette et Tchounikine (Canada
& France) |
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Ontologie
pour une base de connaissance et un banque d’OP interopérables,
DIVA – BCTA, équipe
DIVA (Canada) |
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Ontologie
à but spéciaux, EON,
Murray (USA) |
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C2 |
Ontologie
du modèle de l’apprenant pour la visualisation, Apted
& Kay (Australie) |
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Ontologie
de l’apprentissage collaboratif pour la médiation,
Inaba (Japon) |
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Ontologies
syntaxique et pédagogique pour indexation de briques d’OP,
IMAT, Desmoulins (France) |
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Ontologie
d’un système conseiller, Paquette et Tchounikine (Canada
& France) |
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Ontologie
pour une base de connaissances et un banque d’OP interopérables,
DIVA – BCTA, équipe
CIRTA (Canada) |
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Tableau 2 : Mise en relation des usages de l'ontologie
et des projets
Légende :
Contextes d’utilisation
Buts d’utilisation
[ 1 ] : Communication entre
personnes/organisations/systèmes informatiques
(interopérabilité)
[ 2 ] : Inférence computationnelle
[ 3 ] : Ingénierie de systèmes de
formation à distance
[ 3A ] : Partage et réutilisation ; [ 3B ] :
Repérage d’informations
[ 3C ] : Acquisition et organisation de connaissances
[ 3D ] : Fiabilité ; [ 3E ] :
Spécification ; [ 3F ] : Maintenance
La pertinence de l’ingénierie ontologique s’applique pour
la formation à distance : tant aux tâches d’assistance
à la conception, qu’aux tâches d’assistance à
l’apprentissage.
Dans le premier contexte, l’accès direct des concepteurs aux
connaissances déclaratives viendrait : soutenir leurs processus de
décision, et potentiellement enrichir ou améliorer les choix
qu’ils font dans leur design d’environnements d’apprentissage
intelligents.
Dans le deuxième contexte, l’accès pour les apprenants
à ces mêmes connaissances déclaratives viendrait consolider
leur processus d’apprentissage : soit directement par navigation et
visualisation de l’ontologie, soit indirectement par le biais de
tâches d’apprentissage assignées.
La diversité des quelques exemples précédemment
cités de l’IO pour les environnements
de FAD, indique la pertinence et justifie une forte
convergence des efforts dans la direction de l’ingénierie
ontologique.
8. Conclusion
L’ontologie et l’ingénierie ontologique possèdent
un potentiel riche et multiple pour les domaines de la formation à
distance. L’enracinement du concept d’ontologie dans la philosophie
et dans l’histoire de la philosophie lui donne une sémantique
forte et diversifiée. L’appropriation du concept d’ontologie
par le monde de l’ingénierie des connaissances a donné
lieu à l’émergence d’une multiplicité
de méthodes et d’outils, qui devraient se stabiliser et se
raffiner progressivement.
L’apport de l’IO pour les
environnements de FAD est unique puisqu’elle
fournit une représentation formelle de connaissances déclaratives,
couplée à un mécanisme d’inférence exploitable
par ces environnements. Il comprend les éléments suivants :
connaissances déclaratives, intégrité, consensus,
orientation par l’usage, compatibilité dans les systèmes
multiagents, sémantique riche, interopérabilité,
requêtes en direct (run-time). La base de connaissances
déclaratives conserve son intégrité quelle que
soit l’exploitation qui en est faite ; la construction d’une
ontologie par consensus assure la compréhension partagée a
priori ; la définition orientée par l’usage
garanti l’adéquation aux besoins ; l’ontologie offre une
compatibilité avec un système multiagents ; l’IO
permet une sémantique riche, telle que le requiert le Web
sémantique ; elle permet également
l’interopérabilité requise pour le
partage ; elle assure une meilleure performance en permettant
l’utilisation des connaissances qu’elle représente en mode
direct (run-time).
En conclusion, l’exploitation de l’ontologie et de
l’ingénierie ontologique aux fins des environnements de FAD devrait
servir les visées d’intelligence tant dans les environnements
d’apprentissage que dans la conception de ces environnements,
c’est-à-dire pour les environnements de conception. Ainsi,
c’est non seulement l’utilisation par des humains, mais aussi par
des machines, qui permettrait le déploiement de la puissance d’une
ontologie
[MizoguchiBourdeau02].
Pour l’humain, l’ontologie lui donne accès à des
concepts et à des théories, en les reliant à des objets
pédagogiques; pour la machine, l’ontologie lui fournit une base de
connaissances déclaratives stable et consistante, à partir de
laquelle raisonner et offrir des services intelligents. Enfin, c’est la
qualité du processus de conception qui devrait s’en trouver
améliorée, grâce à la systématisation des
connaissances et à la vérification de consistance que permet
l’ontologie.
Remerciements
La rédaction de cet article a été rendue possible
partiellement grâce au soutien financier du Réseau canadien de
centres d’excellence en téléapprentissage, et de
Valorisation Recherche Québec et du centre de recherche
LICEF – TÉLUQ.
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manuscript.
Annexes
A
propos des auteurs
Valéry PSYCHÉ est doctorante en Informatique
Cognitive à l’UQAM et agente de
recherche au centre LICEF de la
Télé-université. Elle s’intéresse à
l’application de l’ingénierie ontologique aux systèmes
tuteurs intelligents, tout particulièrement pour faciliter la tâche
de l’auteur lors de la conception de ses cours. Parallèlement, elle
participe à plusieurs projets du LICEF
notamment : au projet visant à la création d’une
ontologie pour la base de connaissances sur le téléapprentissage
dans le cadre du projet DIVA ; et au
projet visant à la création d’un éditeur
d’ontologie, dans le cadre du réseau de recherche
LORNET.
Adresse : Centre de recherche
LICEF, Télé-université
4750 Henri-Julien, Montréal (Québec) H2T 3E4, Canada
Courriel : vpsyche@licef.teluq.uquebec.ca
Olavo MENDES est doctorant en informatique cognitive
à UQAM (Université du Québec
à Montréal). Il est professeur au Département de
Communication de la UFPB (Brésil),
détient une maîtrise en Informatique de Gestion
(UQAM) et s’intéresse aux aspects
philosophiques et psychologiques (cognitifs et sociaux/communicationnels,
sous-jacents à la conception et au développement des ontologies.
Adresse : Centre de recherche
LICEF, Télé-université
4750 Henri-Julien, Montréal (Québec) H2T 3E4, Canada et
Département de Communication - Université Fédérale
à Paraiba – Brésil
Courriel : omendes@licef.teluq.uquebec.ca
Jacqueline BOURDEAU, PhD en Technologie
éducationnelle, professeure à Télé-université
et à l'Université du Québec à Chicoutimi,
s'intéresse aux applications de l'intelligence artificielle en
éducation, parmi lesquelles l'ingénierie ontologique. Elle a
exploré la représentation des connaissances théoriques dans
un système-auteur intelligent, et cherche à relier cette
représentation avec des fonctionnalités d'un environnement
interactif de formation. Elle est actuellement directrice du Centre de recherche
LICEF de la
Télé-université.
Adresse : Centre de recherche
LICEF, Télé-université
4750 Henri-Julien, Montréal (Québec) H2T 3E4, Canada
Courriel : bourdeau@licef.teluq.uquebec.ca
[1] Un terme introduit par
[Mizoguchi98] pour
la première fois.
[2] MOT est un langage pour la
modélisation informelle qui permet de décrire différents
types de modèles (hiérarchie de classes, modèles
procéduraux, théories, arbres de décision, structures de
contrôle, processus et méthodes). Le langage permet
d’intégrer dans un même modèle (sur plusieurs niveaux)
des connaissances factuelles, procédurales et de contrôle (sous la
forme de principes et de liens de régulation)
[Paquette96].
[3] Certains chercheurs comme
Mizoguchi et al., sont opposés à l’idée
d’héritage multiple en ingénierie ontologique.
[4] WonderTools est un
acronyme pour Web-based ONtology DEscriptions and Research of its
TOOLS.
[5] La webographie est le
résultat de l’agrégation d’un ensemble
d’hyperliens. Par exemple l’environnement
EXPLOR@2 du centre de recherche
LICEF de la TELUQ
offre cette fonctionnalité aux apprenants. http://explora2.licef.teluq.uquebec.ca/demo/
[6] Dans la recension des usages du
pôle "système d’information" nous avons
sélectionné ceux qui nous semblaient pertinents au système
de formation à distance.
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