Sciences et Technologies
de l´Information et
de la Communication pour
l´Éducation et la Formation
 

Volume 21, 2014
Article de recherche

Analyse des intentions d’usage d’un ENT chez les enseignants de lycées professionnels

Ecaterina PACURAR (LISEC, Université de Strasbourg), Nargis ABBAS (Université de Sargodha, Pakistan)

RÉSUMÉ : Cette recherche interroge l’intention d’usage des ENT par des enseignants du secondaire. Un cadre théorique basé sur des approches de l’ingénierie pédagogique est utilisé pour proposer un modèle hypothétique ayant comme variable expliquée l’intention d’utilisation pédagogique d’une technologie éducative. Il prend comme variables exogènes la différence de sexe, les disciplines d’enseignement, l’utilisation des ordinateurs dans un cadre privé et la maîtrise technique perçue, afin de mesurer le degré de significativité de ces dernières sur l’intention d’intégration de l’ENT à l’école. Le modèle a été testé à partir des données obtenues suite à une enquête sur l’usage de l’ENT déployé dans l’Académie de Strasbourg. Pour le traitement de données nous avons utilisé les statistiques descriptives, l’analyse de variance (ANOVA) et la modélisation par équation structurelle. Les résultats obtenus tendent à mettre en évidence que l’ENT est perçu par les enseignants de notre enquête, avant tout comme un « outil de communication » via la messagerie, ou encore comme moyen de répondre aux usages prescrits par l’institution.

MOTS CLÉS : représentations des enseignants, attitudes, utilisabilité, utilité

ABSTRACT : This research analyzes the intention use of digital work environment (DWE) by the secondary school teachers in France. It was investigated if there are significant correlations between teachers DWE intention use, subject teaching and gender difference. A theoretical framework is used to propose a hypothetical model. The gender, the subject teaching, the use of computers at home and the technical skills are the exogenous variables in this hypothetical model in order to measure the degree of significance of these variables on the intention use of DWE in secondary school. A survey research design was adopted to collect the data on the DWE use from the Academy of Strasbourg Institution. Descriptive statistics and ANOVA was used to measure the difference among the groups. While structural equation modeling technique was used to test and validate the proposed model. The results tend to demonstrate that the DWE is perceived primarily as a "communication tool“or as a means to achieve the prescribed uses by the academic institutions.

KEYWORDS : teacher beliefs, attitudes, usability, usefulness

1. Contexte, objet de recherche

A partir des premières initiatives de déploiement des Environnements Numériques de Travail (ENT) en 2003 et l’introduction du schéma directeur dès 2006, (MEN, 2008) plusieurs partenariats académies-collectivités territoriales ont été formalisés autour d’une volonté commune de généraliser les ENT à moyen terme à l’ensemble des établissements scolaires (MEN, 2012). Depuis 2003, le développement de l’ENT de l’Académie de Strasbourg a été réalisé dans le cadre du projet ENTEA retenu suite à un appel à projets par le Ministère de l’Education Nationale (Zender, 2011). De plus, l’Académie de Strasbourg menait déjà une expérimentation depuis 2002 et présentait un projet ambitieux d’espace numérique de travail au périmètre très large, intégrant les activités de toutes les composantes de l’établissement : la pédagogie, la vie scolaire, la communication, l’administration et s’adressant à l’ensemble de la communauté : enseignants, parents, personnels administratifs. La phase d’expérimentation de l’ENT développé dans le cadre du projet ENTEA a débuté avec 15 établissements en 2004 pour s’achever en 2007 avec 45 établissements, avec le concours de l’ENT de la société mulhousienne Infostance. Puis, en avril 2007, l’ENT Scolastance, produit d’Infostance, est choisi comme outil de généralisation. Enfin, le projet ENTEA2 met en œuvre la généralisation planifiée de 2007 à 2010 et la dernière vague dans l’Académie de Strasbourg, a été mise en place à la rentrée 2010 (ENTEA, 2010).

Par ailleurs, en 2010, s’agissant des lycées sur le plan national, 5 régions avaient un niveau de déploiement de l’ENT dans plus de 50 % des établissements et 16 étaient en phase de généralisation (Zender, 2010). Dans ce contexte de généralisation des ENT sur le territoire français, des recherches ont été conduites dans plusieurs académies, comme l’Académie de Grenoble, de Lyon, de Rouen ou encore celle de Nancy. Elles portaient sur l’étude des perceptions des enseignants sur ces environnements numériques (Puimatto, 2006) et l’intégration de ces outils dans les pratiques pédagogiques et de gestion de classe (Genevois et Poyet, 2010) ainsi que leur impact sur la relation des personnels de l’éducation avec les familles d’enfants scolarisés (Voulgre, 2011), (Schneewele, 2012).

Notre recherche a été réalisée en 2009-2013 dans le contexte de la généralisation de l’ENT dans l’Académie de Strasbourg. Elle porte sur l’analyse des intentions d’intégration de l’ENT Scolastance dans les pratiques des enseignants de lycées. Par ailleurs, dans l’Académie de Strasbourg, 15 établissements étaient doté de l’ENT dès 2003, il y en avait déjà 45 en 2007 et 41 % des établissements disposent de cet outil depuis plus de 4 ans (Zender, 2010).

Une première partie de ce texte introduit le contexte et l’objet de la recherche. Dans une seconde partie sont passés en revue des travaux antérieurs sur les perceptions et pratiques des enseignants du secondaire avec les ENT et d’autres outils numériques tels que Internet, web 2.0. Ces recherches interrogent l’influence de facteurs extrinsèques (âge, différences de sexe, disciplines d’enseignement) et intrinsèques (attitude envers l’ordinateur, autonomie, formation aux outils numériques) sur l’intégration des outils numériques dans les situations d’enseignement-apprentissage en classe. Une troisième partie décrit des éléments de problématique, les objectifs de recherche ainsi qu’une proposition de modèle hypothétique construit à partir des questions de recherche. Enfin, la dernière partie présente la démarche méthodologique ainsi que l’analyse et la discussion des résultats d’une enquête quantitative sur l’usage de l’ENT Scolastance et des entretiens auprès des enseignants, en concluant sur les perspectives de recherches à court et moyen terme.

2. Environnements numériques et les enseignants du secondaire

2.1. Les ENT à l’école : quelles fonctionnalités pour quels usages ?

En France, depuis l’introduction du plan informatique pour tous, le ministère de l’éducation nationale œuvre à l’intégration de l’outil informatique dans les enseignements, et « cette action ministérielle s’est trouvée cadrée dans des plans d’action gouvernementaux (Programme d’action gouvernementale pour la société de l’information 1997-2002, Pour une république numérique dans la société de l’information 2002-2007) » (Durpaire et al., 2012). Pour atteindre cet objectif ont été mises en place, dès 2000, les premières opérations de dotation d’ordinateurs portables pour les élèves : le « cartable électronique » de Savoie (Ginioux et Narcy, 2002) et le « cartable des Landes » (Jaillet et Daguet, 2002). D’autres projets visant l’introduction des technologies dans les établissements scolaires ont contribué à la conception et au développement des Espaces Numériques de Travail (ENT). Cet espace numérique intégrateur s’inscrit dans la continuité des précédents réseaux numériques d’éducation et favorise le nomadisme en permettant un accès distant via le web. Censé offrir des « bouquets de services numériques » (MEN, 2010), l’ENT apparaît comme un moyen pour moderniser le fonctionnement de l’établissement scolaire (Bruillard, 2011). Son principal atout est de constituer un point d’accès unique au système d’information et à l’ensemble des ressources de l’établissement scolaire (Puimatto, 2006), (Genevois et Poyet, 2010). Cependant, des travaux de recherche sur l’intégration de l’ENT dans les établissements d’enseignement secondaire contribuent à observer que « sous cette apparente unicité, l’ENT fait coexister quatre environnements dont les logiques apparaissent dissemblables » (Genevois et Poyet, 2009). On retrouve ainsi emboîtés l’environnement informatique (englobant des fonctionnalités qui reposent sur des métaphores), celui d’information et de communication, de l’enseignement et de l’apprentissage, et l’environnement éducatif (qui dépasse le cadre de l’établissement). Or, comme le remarquent Genevois et Poyet (Genevois et Poyet, 2010), les relations entre ces environnements et leurs utilisateurs révèlent des communautés de pratique dont les logiques entrent en contradiction. Ces observations amènent ces chercheurs à interroger les effets d’usage de l’ENT sur le changement de l’organisation de l’école dans son rapport au temps et à l’espace.

D’autres recherches menées dans le contexte français portent sur l’impact des ENT dans les activités d’enseignement-apprentissage en classe, sur le processus de déploiement de ces technologies (Puimatto, 2006) ainsi que sur l’étude des discours et des actions des acteurs impliqués (Voulgre, 2011). Une cartographie de ces recherches qui se sont déroulées ou qui sont en cours, est présentée dans une récente synthèse proposé par Eric Bruillard (Bruillard, 2011). On y retrouve des recherches s’inscrivant en sciences de l’information et de la communication (Bruillard, 2011), en sciences de gestion (Missonier, 2008) et en sciences de l’éducation, notamment avec les travaux récents d’Emmanuelle Voulgre (Voulgre, 2011) et Manuel Schneewele (Schneewele, 2012).

Situés dans une approche systémique, les travaux de Voulgre (Voulgre, 2011) interrogent les services offerts par l’ENT et la perception de leurs utilisateurs, enseignants, élèves mais aussi parents, sur l’utilité pédagogique et également sur la gestion de la classe et de la relation avec les parents. Le cadre théorique utilisé s’appuie sur le « carré de Padi » proposé par Jacques Wallet (Wallet, 2010) avec lequel sont croisées des approches complémentaires telles la théorie de l’activité (Engeström, 1987) et la théorie instrumentale, pour la mise en évidence des écarts entre usages prescrits et usages réels (Rabardel, 1995), (Bruillard, 1997). Les résultats de cette recherche inter-cas (cinq établissements d’enseignement secondaire) basée sur une approche méthodologique qualitative, amènent à conclure que le potentiel pédagogique en lien avec les ENT n’est que partiellement exploité (Voulgre, 2011).

Dans une même visée concernant le déploiement des ENT et l’étude de leur impact sur les pratiques pédagogiques, de gestion de classes et la relation école-famille, Manuel Schneewele (Schneewele, 2012) a conduit ses travaux de thèse sur l’académie de Nancy-Metz. L’auteur s'est intéressé à comprendre les usages émergents de l’ENT, en procédant à une décomposition du processus d'appropriation. Il précise que ces recherches répondent également à une commande institutionnelle dont l'objectif politique est tourné vers l'encouragement et la stimulation des usages de ce type d'outil. Le cadre théorique s’appuie sur la proposition du modèle DAME (Modèle Dynamique d’Acceptation pour l’Education) qui est une extension du modèle d’acceptation d’une technologie (TAM – Technology Acceptance Model (Davis, 1989) en prenant en compte les concepts d’utilité, d’utilisabilité, d’accessibilité et de représentation sociale de l'ENT. L’étude, basée sur une approche quantitative prédictive (utilisant la modélisation par équation structurelle), avait pour objectif d’analyser l’usage du cahier de textes par les élèves, leurs enseignants et leurs parents. L’auteur considère que pour favoriser l'adoption d'un l'ENT et donc son acceptabilité dans le cadre des activités quotidiennes d'enseignement, il est essentiel que sa prise en main ainsi que la plus-value liée à son usage soient pleinement perçues. Ses résultats amènent, entre autres, à conclure que lorsqu’il y a usage répété, « une dépendance à l'ENT peut s'installer lorsque celui-ci devient essentiel au bon déroulement de son activité, qu'elle soit professionnelle ou d'apprentissage, ce qui est notamment le cas pour les fonctionnalités : cahier de textes et espace d'informations » (Schneewele, 2012).

2.2. Disciplines d’enseignement et différence de sexe : quelle influence sur l’intention d’usage des outils numériques ?

Les pratiques pédagogiques des enseignants du secondaire avec les technologies numériques ont été aussi observées par des chercheurs du domaine, et en particulier l’usage des environnements pour la gestion des apprentissages (Wozney et al., 2006), (Franklin, 2007), (Sørebø et al., 2009), (Lonn et Teasley, 2009), (Sang et al., 2010), (De Smet et al., 2012) ou encore l’usage d’Internet, du Web 2.0 et des outils interactifs de projection de supports de cours (Chen, 2010), (Ward et Parr, 2010)(Chien et al., 2012)(Ertmer et al., 2012). Ces recherches questionnent, selon des approches qualitatives et quantitatives, les facteurs extrinsèques (le genre, la discipline d’enseignement, l’expérience d’enseignement avec et sans technologies, l’âge, l’accès à l’ordinateur, l’utilisabilité perçue des outils de communication, de gestion de contenu) et les facteurs intrinsèques (la formation à l’utilisation des TICE, l’attitude des enseignants envers l’enseignement et les technologies, l’auto-efficacité avec les technologies) qui influent sur l’intégration de ces technologies dans des situations d’enseignement-apprentissage par des enseignants du secondaire. Elles étaient réalisées en utilisant des cadres conceptuels issus de la psychologie du comportement humain telles que la théorie de l’autodétermination (Gagné et Deci, 2005), la théorie du comportement planifié (Ajzen et Fishbein, 1977) ainsi que des concepts tels que l’attitude, l’utilité, l’utilisabilité (Tricot et al., 2003) et l’auto-efficacité (Bandura, 1977). Comme le souligne Bouabeng-Andoh (Bouabeng-Andoh, 2012), les résultats de ces recherches amènent à observer une variation du degré de significativité de l’influence de l’âge et la différence de sexe sur l’intention d’intégration des outils numériques dans les pratiques d’enseignement chez les enseignants du secondaire.

Afin de pouvoir poser le questionnement en lien avec notre objet de recherche nous recentrons le propos, dans ce qui suit, sur la question de l’influence des disciplines d’enseignement et de la différence de sexe sur l’intégration de ces environnements numériques par les enseignants dans leurs activités pédagogiques.

La question du genre, et en particulier, la relation entre la différence de sexe et l’utilisation de l’ordinateur par les enseignants, a été discutée dans de nombreux travaux (Busch, 1995), (Volman et van Eck, 2001)(Adams, 2002), (Norris et al., 2003)(Wozney et al., 2006)(Yukselturk et Bulut, 2009). Dans les années 2000, les résultats des recherches sur ce questionnement ont révélé un faible niveau d’utilisation de l’ordinateur chez les enseignantes. Ceci s’expliquait par un intérêt et des compétences limités mais également par des problèmes d’accès (Volman et van Eck, 2001). Si les problèmes d’accès étaient bien présents dans le passé autant dans le milieu urbain que rural des pays européens et également dans d’autres pays, leur fréquence a diminué au fil du temps (Becta, 2008). Les résultats d’autres recherches plus récentes montrent que les enseignants utilisent plus les outils numériques dans leur processus d’enseignement et d’apprentissage que les enseignantes (Kay, 2006), (Wozney et al., 2006). Cependant les résultats sont variables en fonction des attitudes envers les outils numériques, des contextes culturels et de structure d’école et de l’équipement en infrastructure technologique (Hsu et Kuan, 2013). Ainsi, Kay (Kay, 2006) dans son étude observe les attitudes des enseignantes et enseignants envers les outils numériques, avant et après leur implémentation dans un établissement scolaire. Les résultats de sa recherche montrent qu’il y avait une relation significative entre la différence de sexe et l’attitude envers les outils numériques uniquement avant l’implémentation de la technologie dans l’établissement scolaire : les enseignants avaient un niveau d’attitude positive plus élevé que les enseignantes. Wozney, Venkatesh et Abrami (Wozney et al., 2006) ont interrogé la relation entre la différence de sexe et la fréquence d’utilisation de certaines fonctionnalités des ordinateurs. Leur résultats les conduisent à observer que les enseignants déclarent utiliser plus fréquemment l’ordinateur pour des activités de communication, d’analyse et de création, que les enseignantes. En revanche, les enseignantes déclaraient utiliser l’ordinateur plus fréquemment pour la préparation de leur activité d’enseignement que les enseignants (Wozney et al., 2006). Ces résultats sont également observés dans une récente étude réalisée par Hsu et Kuan (Hsu et Kuan, 2013) sur l’impact des facteurs multiniveaux sur l’intégration des outils numériques par des enseignants taiwanais. Hsu et Kuan (Hsu et Kuan, 2013) remarquent que les enseignants obtiennent des scores élevés sur l’intégration des outils numériques dans leur pratique tandis que les enseignantes en obtiennent sur l’utilisation d’outils de traitement de texte et d’Internet. Aucune différence de sexe n’est observée sur l’utilisation des outils de communication et sur le développement professionnel (Hsu et Kuan, 2013).

D’autres recherches se sont intéressées à étudier les relations entre l’attitude des enseignants envers les outils numériques et l’intégration de ces outils dans leur disciplines d’enseignement. Ainsi, dans le cadre d’un projet sur les communautés de pratiques, Sutherland et al. (Sutherland et al., 2004) interrogent le processus d’intégration des outils numériques dans différentes disciplines d’enseignement telles les mathématiques, les langues, l’histoire et la géographie. Les résultats montrent que la plupart des enseignants de mathématiques étaient prêts à intégrer la technologie dans leur enseignement. Les enseignants en langues modernes avaient également développé des stratégies d’intégration de ces outils dans leur enseignement tandis que le travail avec les outils numériques en histoire et géographie était plus varié (Sutherland et al., 2004). Lors d’une recherche sur l’utilisation des technologies numériques et des média dans des écoles suédoises, Jedeskog (Jedeskog, 2005) constate que les enseignants en mathématiques, en sciences et en langues intègrent plus facilement les technologies dans leur pratique que ceux d’autres disciplines d’enseignement. Ward et Parr (Ward et Parr, 2010) analysent l’influence des facteurs sociodémographiques sur différents types d’usage professionnel (préparation et planification des séances) et personnel des enseignants dans des écoles secondaires en Nouvelle Zélande. Ces chercheurs observent des différences significatives entre les disciplines d’enseignement et l’utilisation des outils numériques dans la préparation et la planification des séances. Ainsi, en ce qui concerne les disciplines fondamentales, mathématiques, sciences, langues et sciences sociales, on constate un faible niveau d’utilisation du numérique chez les enseignants d’écoles dont les élèves proviennent de familles aisées par rapport aux autres écoles. Une autre recherche réalisé par Erixon (Erixon, 2010) dans le contexte académique suédois étudie dans quelle mesure les enseignants utilisent des technologies numériques dans leur pratiques d’enseignement et quels impacts elles auraient sur le contenu de cours. Parmi les disciplines enseignées, celles où l’usage est le plus fréquent sont l’histoire, la géographie et les études sociales. Erixon (Erixon, 2010) observe qu’en arts et musique, les enseignants se montraient également impliqués dans l’utilisation des technologies telles que le caméscope et les technologies mobiles. Ceci s’explique par l’ouverture des enseignants participants à cette étude sur la culture des jeunes et l’utilisation des technologies modernes (Erixon, 2010).

3. Eléments de problématique et hypothèses

La présente contribution décrit notre recherche sur l’analyse des intentions d’intégration de l’ENT Scolastance dans les pratiques des enseignants de lycées. Elle se situe dans la problématique de généralisation des ENT dans les établissements d’enseignement secondaire en interrogeant la relation entre des facteurs tels que discipline d’enseignement, différence de sexe ou encore la maîtrise technique perçue, l’usage personnel quotidien et l’intention des enseignants à intégrer ces technologies dans leurs pratiques.

Comme nous l’avons décrit dans le §2 ci-dessus, ce questionnement fait l’objet de nombreux travaux en France et dans d’autres pays. Parmi ces différents travaux, certains contribuent à une meilleure compréhension du processus d’acceptation et d’utilisation des fonctionnalités des ENT par les enseignants. Des résultats de ces travaux ont montré que les enseignants déclarent utiliser les fonctionnalités de gestion de classe, le cahier de textes ainsi que l’espace de communication (Genevois et Poyet, 2010), (Schneewele, 2012). L’intérêt que les parents portent à l’utilisation du cahier de textes en ligne a également été constaté (Schneewele, 2012). Cependant, d’autres résultats font apparaître que le potentiel pédagogique en lien avec les ENT n’est que partiellement exploité (Voulgre, 2011). Ces constatations s’accordent avec celles de nombreuses études sur l’intégration effective des TIC à l’école (Larose et Jaillet, 2009), (Balanskat et al., 2006), (Karsenti et al., 2008).

D’autres recherches sur l’intégration des technologies éducatives considèrent que les facteurs exogènes et endogènes influencent leur usage (Chaptal, 2007), (Drent et Meelissen, 2008). Ainsi, les résultats des travaux sur la différence de sexe (facteur exogène) et les attitudes envers les ordinateurs (facteur endogène) varient en fonction des contextes culturels, de la perception des enseignants de leurs compétences techniques ou encore des structures d’écoles (Hsu et Kuan, 2013). On observe ces dernières années, une réduction de l’écart entre sexes quant à l’utilisation de l’ordinateur et plus généralement, des technologies numériques. Autant les femmes que les hommes en font quotidiennement un usage personnel voire professionnel (Norris et al., 2003). Par ailleurs, une perception positive de la qualité d’une technologie peut contribuer à la réduction des inégalités de sexe (Kay, 2006).

La discipline d’enseignement est considérée comme un facteur endogène qui influence la perception des enseignants sur la plus-value pédagogique des technologies numériques (Ruthven et al., 2005). La relation entre technologies et disciplines d’enseignement a été observée comme étant positivement perçue par des enseignants en arts et musique, en géographie et en langues (Erixon, 2010), (Wikan et Molster, 2011). En sciences et en mathématiques, les résultats varient en fonction des perceptions sur l’amélioration de la qualité de présentation du contenu de cours et sur la plus-value en termes d’apprentissage (Ward et Parr, 2010), (Wikan et Molster, 2011).

A partir de ces différents constats, quelques questions émergent en lien avec notre objet de recherche : les enseignants du secondaire ayant accès à l’ENT Scolastance font-ils un usage des outils institutionnels ? Quelle place donnent-ils dans leur pratique aux outils de communication ou encore aux ressources numériques accessibles depuis l’ENT de leur établissement ? Y a-t-il des relations d’association entre des facteurs exogènes (tels que la différence de sexe, l’expérience d’enseignement) et des facteurs endogènes (disciplines d’enseignement, utilisabilité, utilité), et leur attitude par rapport à l’intégration des fonctionnalités de l’ENT Scolastance dans leur pratique ? Font-ils un usage pédagogique de l’ENT ? Ces questions ont contribué à l’élaboration d’hypothèses et à une proposition de formalisation d’un modèle hypothétique.

H1) Il y a un effet significatif de la différence de sexe sur la relation entre l’acceptation de l’utilisation des outils institutionnels (saisie des notes, saisie des absences, édition des bulletins de notes et relevé des notes) et l’intention d’usage effectif de l’ENT.

H2) Il y a un effet significatif de la différence de sexe sur la relation entre la persévérance dans l’utilisation de l’ENT (malgré des difficultés techniques rencontrées) et l’intention de son intégration dans les pratiques pédagogiques des enseignants du secondaire. A travers la vérification de cette hypothèse, nous nous sommes intéressées à observer le comportement des enseignants et notamment l’intention d’acceptation de l’ENT lorsqu’ils se trouvent face à des problèmes techniques (par exemple, difficulté de paramétrage/personnalisation de la page d’accueil ou encore d’accès aux outils institutionnels).

H3) Il y a un effet significatif de la différence de sexe sur la relation entre l’acceptation d’utilisation de l’espace collaboratif de l’ENT et des outils de communication et l’intention de son intégration dans les pratiques pédagogiques.

H4) Il y a un effet de causalité des pratiques quotidiennes avec des environnements numériques (Internet, messagerie électronique) sur l’intention d’intégration de l’ENT dans les pratiques pédagogiques.

H5) Il y a une différence significative de la variable « discipline d’enseignement» sur l’utilisation des outils institutionnels et de communication.

4. Intention d’intégration d’un ENT : objectifs de recherche et proposition d’un modèle hypothétique

Afin d’obtenir des éléments de réponse à nos questions de recherche, nous orientons les réflexions autour d’un modèle regroupant trois dimensions : sociodémographique, pédagogique et technique. L’objectif général de cette recherche est de vérifier si l’articulation entre ces trois dimensions a une influence significative sur l’intention des enseignants à intégrer l’ENT Scolastance dans leur pratique d’enseignement. Deux objectifs spécifiques ont également été visés. Premièrement nous souhaitions estimer l’effet de causalité sur la variable « persévérance des enseignants avec l’ENT » et observer s’il y a un effet direct ou indirect de l’ensemble des variables indépendantes sur l’intention d’acceptation de l’ENT. Deuxièmement cette étude visait à observer s’il y des effets liés aux différences de sexe et de discipline enseignée sur l’intention des enseignants à intégrer l’ENT dans leur pratiques malgré les difficultés techniques rencontrées. Pour atteindre ces objectifs, nos hypothèses, présentées ci-dessus, ont été vérifiées en utilisant des corrélations entre les variables du modèle (Tableau 1) ainsi que la modélisation par équation structurelle, en particulier l’analyse en piste causale (Figure 2). Puis nous avons testé les effets de causalité de la variable modératrice « différence de sexe » en utilisant l’analyse de variance (Figures 3 et 4).

4.1. Quelques apports théoriques

Dimension sociodémographique (DS) : cette dimension prend en compte les facteurs exogènes tels l’âge, la différence de sexe, l’expérience d’enseignement (Figure 1). Lin (Lin, 2008) à travers ses résultats de recherche, affirme que le sentiment d’efficacité des enseignants avec ces technologies dépend largement de leurs expériences et valeurs culturelles et sociales. Les nombreuses recherches sur la différence de sexe dans la relation des enseignants avec les technologies font observer des résultats variables en fonction du contexte et des valeurs culturelles mais également en fonction des catégories de ces technologies (traitement de texte, communication, simulation de calcul) et la finalité de l’usage professionnel ou personnel (Li et Kirkup, 2008)(Hsu et Kuan, 2013). Cette nature variée des résultats des recherches antérieures nous amène à nous interroger sur l’existence d’associations entre la différence de sexe et les pratiques des enseignants avec l’ENT Scolastance. Ainsi, nous considérons la différence de sexe et l’âge comme des variables exogènes intégrées dans le modèle proposé (Figure 1). A partir de cette dimension sont intégrés dans le modèle hypothétique les variables « la différence de sexe » et « l’âge ».

Dimension pédagogique (DP) : cette dimension prend en compte, dans la proposition du modèle hypothétique, l’espace collaboratif et les outils de communication. Plusieurs recherches sur la relation entre les représentations constructivistes des enseignants et l’intégration des TICE ont montrées qu’elle sont un facteur important pour déterminer l’usage de l’ordinateur en classe, aussi bien chez des enseignants confirmés que des stagiaires (Taylor et al., 1994)(Rhéaume et Laferrière, 2002)(Sang et al., 2010). Sur ces mêmes questions, Honey et Moeller (Honey et Moeller, 1990), avaient montré que les enseignants adoptant des approches pédagogiques centrées sur l’élève, réussissent à intégrer dans leur pratique, des outils collaboratifs et des ressources numériques, sauf dans les cas où l’appropriation par l’enseignant n’est pas effective (Honey et Moeller, 1990). L’un de nos objectifs était ainsi d’observer si les enseignants mettent en œuvre des approches d’enseignement constructivistes lorsqu’ils utilisent l’ENT Scolastance, en particulier l’espace collaboratif et les outils de communication avec les élèves. Dans notre modèle, l’espace collaboratif et les outils de communication sont intégrés dans « Espaces pédagogiques » (Figure 1). Dans la dimension pédagogique de notre approche se retrouvent également la variable « discipline d’enseignement ». Des recherches sur ce sujet montrent que ces facteurs endogènes ont un effet significatif sur l’intégration de technologies par les enseignants (O’Dwyer et al., 2004)(Tondeur et al., 2008)(Hsu et Kuan, 2013).

Dimension technique (DT) : cette dimension fait référence aux concepts de l’utilisabilité (facilité d’utilisation, de prise en main) et de l’utilité perçue par les enseignants. Ces concepts ont été intégrés dans des nombreux travaux sur l’acceptation des technologies pour la formation (Tricot et al., 2003)(Wozney et al., 2006)(Sorebo et al., 2009)(Schewelle, 2012). Nous considérons l’environnement technique comme un pré-requis regroupant l’accès à la technologie, le soutien en cas de difficultés techniques et la temporalité nécessaire à l’intégration de la technologie et ceci dans le but d’en faire un usage effectif. Dans notre étude, l’utilisabilité de l’ENT Scolastance et le niveau de persévérance dans son utilisation malgré les difficultés techniques rencontrées sont des facteurs significatifs, influant sur l’intention des enseignants à l’intégrer dans leur pratique. A partir de cette dimension, sont intégrés dans le modèle les facteurs « Persévérance avec l’ENT » et « pratiques quotidiennes » avec l’ordinateur et d’autres outils.

Rappelons ainsi que les éléments issus des différentes approches présentées ci-dessus, ont été utilisés pour la construction du modèle dont la description suit.

4.2. Proposition d’un modèle hypothétique

Le modèle présenté sur la Figure 1 est basé sur une approche de modélisation par équation structurelle (Sang et al., 2010)(Chen, 2010). Il a comme particularité un regroupement des facteurs sociodémographiques, pédagogiques (disciplines, ressources, espace collaboratif) et institutionnels (saisie de notes et absence). Par ailleurs, il prend en compte l’accès à la technologie et en particulier à l’ENT ainsi que l’usage privé et professionnel qui en est fait par les enseignants. L’Intention d’intégration d’un ENT par les enseignants, malgré les difficultés techniques rencontrées, représente la variable–réponse (variable expliquée), dans cette approche.

Figure 1 • Proposition d’un modèle hypothétique basé sur l’articulation des dimensions contextuelle, pédagogique et technique

Rappelons qu’à travers ce modèle, nous avons vérifié si l’articulation entre ces dimensions a une influence significative sur la persévérance des enseignants avec l’ENT et sur leur intention d’usage effectif de ce même environnement numérique : y-a-t-il des effets liés aux différences de sexe, d’âge, de discipline enseignée sur l’intention de l’intégration de l’ENT dans leur pratiques ? Pour atteindre cet objectif, nos hypothèses ont été vérifiées en utilisant les corrélations entre les facteurs ainsi que la modélisation par équation structurelle, en particulier l’analyse en piste causale (Figure 2). Puis nous avons testé les effets de causalité de la variable modératrice « différence de sexe ».

5. Démarche de méthodologie

Afin de tester nos hypothèses dans des conditions propices à l’obtention de résultats fiables, nous avons mis en œuvre une démarche méthodologique mixte s’appuyant sur des approches empiriques quantitatives et qualitatives. L’analyse des résultats obtenus suite à l’enquête quantitative par questionnaires réalisée auprès des enseignants des lycées professionnels et technologiques de l’Académie de Strasbourg fait l’objet du présent texte. L'inférence statistique était basée sur un échantillonnage aléatoire. Sur 41 établissements (lycées professionnels et technologiques), sollicités par mél, 71% ont proposé notre questionnaire à leurs enseignants. Le taux de retour est de 24, 5%. Notre échantillon valide était composé de 430 enseignants de lycée ayant répondu à cette enquête.

En nous appuyant sur le modèle proposé dans le §4 nous avons construit un questionnaire structuré en trois parties concernant l’Espace institutionnel (espace de saisie d’absences, de notes, cahier de texte), l’Espace pédagogique (ressources numériques et outils de communication, l’espace collaboratif) et la Persévérance dans l’utilisation de l’ENT Scolastance, malgré d’éventuelles difficultés techniques rencontrées par les enseignants interrogés. Le questionnaire était composé de trente questions portant sur l’usage quotidien de l’ordinateur, des outils institutionnels et de communication, et sur l’utilisabilité de l’ENT Scolastance et sa maniabilité (Tricot et al., 2003)(Betrancourt, 2007). Les variables endogènes étaient ce que les enseignants disent de l’usage quotidien de l’environnement numérique, les outils institutionnels (absences, notes, bulletin de notes, relevé de notes, cahier de texte en ligne et papier), de communication (messagerie, forum), de persévérance dans l’utilisation de l’ENT (difficultés lors de la prise en main de l’ENT, persistance de difficultés, autonomie dans la résolution des problèmes techniques) ainsi que l’usage de l’espace collaboratif et de ressources numériques (Kiosque numérique, BCDI, etc). Les variables exogènes étaient l’âge, la différence de sexe, l’expérience avec l’ordinateur, les disciplines académiques.

Une deuxième étape de notre cadre méthodologique consistait en une série d’entretiens semi-directifs auprès de 19 enseignants volontaires sur les 430 participants à l’enquête par questionnaire. L’objectif de cette démarche qualitative était d’introduire une approche complémentaire, compréhensive, dans l’interprétation des résultats obtenus suite à l’enquête quantitative.

6. Traitement des résultats: approches quantitative et qualitative

Dans le traitement statistique de ces données nous avons utilisé les statistiques descriptives, corrélations, analyse de variance (ANOVA) et modélisation par analyse structurelle (Quinn et Keough, 2002)(Vaus, 2002). Les traitements statistiques ont été réalisés en utilisant le logiciel SPSS V. 17 pour les statistiques descriptives et l’analyse de variance et AMOS V.16 pour l’analyse en piste causale dans la modélisation par équation structurelle (Arbuckle, 2007). Précisons que l’analyse de variance ANOVA est utilisée pour comparer s’il y a différence significative entre deux ou plusieurs groupes.

6.1. Analyse de corrélations

Une analyse bi-variée entre les différentes variables du modèle a également été mise en place. Le tableau 1 regroupe les valeurs de la matrice de corrélation, les moyennes ainsi que les déviations standard (SD), N représentant la part des répondants sur la totalité de l’échantillon.


N

Moyenne

DS

(1)

(2)

(3)

(4)

(5)

(6)

(7)

(1)
Outils Institutionnels

419

1.4487

.63707

1







(2)
Ressource Numérique

424

.2052

.53517

.025

1






(3)
Espace Communication

354

2.1977

.76791

.066

.106*

1





(4)
Espace Collaboratif

420

.3667

.48247

.177**

.209**

.266**

1




Usage quotidien
(5)

426

2.0822

.57009

.054

.035

.412**

.128**

1



(6)
Persévérance des enseignants avec l’ENT

411

1.7056

1.00654

.083

.178**

.287**

.310**

.160**

1


(7)
Intention d'acceptation

400

5.3100

1.36512

-.097

.066

.081

.072

.187**

.057

1

*p < .05  

**p < 0.01

Tableau 1 • Moyenne, Déviation standard, Corrélations entre les variables du modèle

Comme nous l’observons sur le tableau 1, il y a des relations significatives positives entre l’usage quotidien de l’environnement numérique (Internet, ENT) et l’intention d’intégration de l’ENT par les enseignants malgré les difficultés techniques rencontrées (Persévérance des enseignants avec l’ENT). De même, il y a une relation significative positive entre l’usage qui est fait par les enseignants, des outils de communication et de l’espace collaboratif, et l’impact de l’ENT sur la persévérance des enseignants avec l’ENT. Cependant, on observe sur la Figure 2 qu’il y a une relation significative négative entre l’usage des outils institutionnels et l’intention d’acceptation de l’ENT malgré les difficultés techniques rencontrées.

6.2. Modélisation par équation structurelle

Afin de tester notre proposition, nous avons utilisé une modélisation par équation structurelle, en occurrence, et l’analyse en piste causale. Avant de décrire nos résultats sur le test du modèle proposé, nous donnons quelques considérations théoriques sur la technique de modélisation par équation structurelle. Lorsqu’on utilise cette approche pour tester un modèle, quatre niveaux se distinguent : spécification, identification, estimation et test (Byrne, 2010), (Hair et al., 2010), (Loehlin, 2004), (Schumacker et Lomax, 2004). Le premier niveau, la spécification, concerne le modèle hypothétique qui est construit à partir des questions de recherche en lien avec une revue de littérature. Ceci implique le processus de sélection des variables et une proposition de leur relation dans le modèle (Schumacker et Lomax, 2004), p.62. Le deuxième niveau se réfère à l’identification de la structure de données. La validité de cette étape dépend du résultat d’estimation (troisième niveau). Le nombre des points (données) doit être supérieur ou égal aux nombre de paramètres dans le modèle. Si cette condition n’est pas satisfaite, le logiciel AMOS n’autorise pas le passage à l’étape de test du modèle. La dernière étape implique le test du modèle. Ainsi, lorsqu’on utilise la technique de modélisation par équation structurelle, l’objectif est d’explorer le degré de significativité statistique du modèle proposé. En effet, il s’agit de tester dans quelle mesure un modèle théorique est supporté et vérifié par les données de l’échantillon d’une étude.

Dans notre cas, nous avons traité les données d’un échantillon de 430 enseignants de lycée de l’Académie de Strasbourg. Cette taille d’échantillon impose de suivre les recommandations des chercheurs en statistique, en ne se limitant pas aux seules valeurs du test du Chi-carré normé. Nous avons donc intégré dans le processus de test, les valeurs d’autres indices tels le NFI, CFI, RMSEA, ce qui améliore la qualité d’ajustement dans le test de notre modèle (Lomax, 1983), (Hair et al., 2010), (Tabachnick et Fidell, 2007). En effet, nous étions intéressées à déterminer le meilleur modèle parmi ceux présentés au Tableau 2.

Figure 2 • Pistes causales du modèle proposé

L’un de nos objectifs spécifiques était d’estimer l’effet de causalité sur la variable « persévérance des enseignants avec l’ENT » et d’observer s’il y a effet direct et indirect de l’ensemble des variables indépendantes sur l’intention d’acceptation de l’ENT. Le χ2 =16,320 (df=11), p<0 ,013 est significatif : il est évident que pour un grand échantillon comme le nôtre, N=430, la valeur du chi-carré peut être significative (Tabachnick et Fidell, 2007). Par conséquent nous constatons que le chi-carré « normé » (normed chi-square), i.e., χ2 /df =1.484 est dans la limite acceptable. En plus, les mesures d’ajustement incrémental, l’Index normé d’ajustement (Normed fit index) NFI=0,923, l’Index d’ajustement comparatif (Comparative fit index) CFI=0,971 et l’Erreur moyenne quadratique (Root Mean square error of approximation) RMSEA=0,033 montrent que nos données valident bien le modèle. En outre, les coefficients en piste causale pour les variables ressources numériques, usage de l’espace collaboratif et de communication ont un effet significatif direct sur la variable « persévérance dans l’utilisation de l’ENT» alors que les pratiques quotidiennes avec des outils numériques et l’utilisation des outils institutionnels ont un effet significatif direct sur l’intention d’acceptation de l’ENT dans les pratiques pédagogiques.

Suite aux résultats obtenus, nous pouvons conclure que notre première hypothèse a été validée. Dans le modèle de la Figure 2 on observe que parmi les cinq variables indépendantes, l’usage des ressources numériques, des outils de communication et de l’espace collaboratif, prédisent indirectement, à travers la variable « Persévérance dans l’utilisation de l’ENT », l’intention d’intégration de l’ENT dans les pratiques des enseignants, tandis que les variables « espaces institutionnels » et « pratiques quotidiennes avec des outils numériques» la prédisent directement.

Par ailleurs, nos données ont validé plusieurs modèles (Tableau 2). En appliquant le test de différence de chi-carré (Hair et al., 2010), les résultats affichés dans le tableau 2 indiquent que les modèles 2, 4 et 5 sont meilleurs que les autres. Le modèle 4 est le meilleur de tous.

Tableau 2 • Evaluation de l’ajustement des modèles valides

6.3. Vérification des hypothèses pour la différence de sexe et la discipline d’enseignement

Pour la vérification de nos hypothèses, nous utilisons les pistes causales illustrées sur les Figures 3 et 4 ainsi que les valeurs des coefficients de régression linéaire indiqués sur ces mêmes figures. Ainsi, en ce qui concerne la première hypothèse (H1) « Il y a un effet significatif des différences de sexe sur la relation entre l’acceptation d’utilisation d’outils institutionnels (saisie des notes, saisie des absences, édition des bulletins de notes et le relevé des notes) et l’intention d’intégration de l’ENT dans les pratiques des enseignants», les valeurs du coefficient de régression (β= -15 pour hommes ; β= -07 pour femmes) montrent que la différence de sexe a une influence négative mais pas significative pour les relations de causalité entre l’usage des outils institutionnels et l’intention d’acceptation de l’ENT par les enseignants. Ceci amène à conclure que lors de la rencontre d’une difficulté technique, l’abandon est préféré par les deux catégories de sujets. Cependant, ce sont plus les femmes qui abandonnent l’usage des outils institutionnels que les hommes.

Figure 3 • Influence du genre (catégorie–hommes) sur les relations entre variables

L’hypothèse 2 (H2) « Il y a un effet significatif de la variable « différence de sexe » sur la relation entre la persévérance dans l’utilisation l’ENT (malgré des difficultés techniques rencontrées) et l’intention de son intégration dans les pratiques pédagogiques des enseignants du secondaire » est également vérifiée dans cette étude. Ainsi, comme montrent les Figures 3 et 4, la variable « différence de sexe » influe sur l’intégration de l’ENT dans les pratiques pédagogiques, en ce sens que contrairement aux enseignantes, cette relation se montre positive mais pas significative pour les enseignants. Ce contraste peut s’expliquer par le fait que les enseignantes, en situation de difficulté technique, abandonnent l’utilisation des fonctionnalités intégrées dans l’ENT. Alors que pour les enseignants qui déclarent intégrer l’ENT dans leur pratique pédagogique, l’intention d’usage effectif augmente. En ce qui concerne l’hypothèse 3 (H3) « Il y a un effet significatif indirect de la variable ‘différence de sexe’ sur la relation entre l’acceptation d’utilisation de l’espace collaboratif de l’ENT et des outils de communication et l’intention de son intégration dans les pratiques pédagogiques» les résultats obtenus indiquent l’existence d’une influence significative directe de l’usage de ces outils sur la persévérance dans l’intégration de l’ENT dans les pratiques pédagogiques, autant pour les enseignants que pour les enseignantes. En revanche, nous n’avons pas trouvé d’effet significatif indirect sur l’intention d’intégration de l’ENT par les deux catégories d’enseignants interrogés. Les résultats obtenus suite à l’analyse en pistes causales pour tester l’hypothèse 4 (H4) « Il y a un effet de causalité de pratiques quotidiennes avec des environnements numériques (comme Internet, courriel) sur l’intention d’intégration de l’ENT dans les pratiques pédagogiques » tendent vers la validation de celle-ci (Figure 2).

Figure 4 • Influence du genre (catégorie- femmes) sur les relations entre variables

L’hypothèse 4 est également validée selon les résultats illustrés sur les Figures 3 et 4. En effet, pour les enseignantes, cette relation de causalité est significative pour β= ,31 mais elle ne l’est pas pour les enseignants. Chez les enseignantes, contrairement aux enseignants, l’usage quotidien de l’ordinateur augmente le niveau d’intention d’acceptation de l’ENT malgré les difficultés techniques.

Afin de vérifier la dernière hypothèse (H5) «Il y a une différence significative de la variable « disciplines » sur l’usage d’outils institutionnels et usage d’outils de communication», nous avons utilisé la technique d’analyse de variance (ANOVA). Les résultats obtenus nous amènent à considérer qu’il y a un effet significatif des disciplines d’enseignement sur l’utilisation des fonctionnalités de l’ENT et particulièrement sur l’utilisation d’outils de communication pour F (4, 343) = 3,782, p< ,001. De plus, nous précisons que, parmi les disciplines, le domaine « Professionnel » (M = 2,231, SD = ,514) a un effet plus significatif sur l’usage des outils de communication dans l’ENT. En revanche, il n’y a pas d’effet significatif de cette même variable sur l’usage des outils institutionnels.

6.4. Traitement et interprétation des entretiens

Nos résultats obtenus à partir de l’enquête quantitative sont complétés par une série d’entretiens menés auprès de dix-neuf enseignants de lycée professionnels de l’Académie de Strasbourg. Les entretiens ont été réalisés dans la période 2010-2013. Cet échantillon s’est constitué selon une approche par « volontariat », les répondants n’étant pas en conflit d’intérêt avec l’équipe de chercheurs.

6.4.1. Procédure de traitement

Les entretiens ont été enregistrés puis retranscrits par nos soins afin de rendre le contenu accessible à une analyse thématique. Ces données ont été traitées par analyse catégorielle de contenu (L’Écuyer, 1990). Une première série de lectures successives du corpus constitué des retranscriptions de ces dix-neuf entretiens a permis de dégager des catégories thématiques et de constituer notre grille d’analyse. Nous avons ainsi pu observer que le discours se structurait autour de thèmes sur l’utilisation des outils institutionnels (absences, bulletin de notes), de communication (messagerie électronique) et pédagogiques, intégrés dans l’ENT Scolastance.

Dans cette recherche, nous considérons le cahier de texte et l’espace collaboratif comme éléments pédagogiques de l’ENT Scolastance.

Nous avons pris en compte les disciplines d’enseignement des enseignants interrogés et les arguments qu’ils donnaient quant au choix d’utiliser l’ENT, notamment la fréquence d’utilisation et le type de pratique qu’ils avaient.

6.4.2. Interprétation des résultats

L’échantillon interrogé regroupait des enseignants en mathématiques, en histoire-géographie, en langues, en économie-gestion, en commerce et en physique et biotechnologie. Il était constitué de 13 hommes et 6 femmes dont l’expérience d’enseignement variait de sept à trente-cinq ans. Nous avons constaté à travers les discours, que la fréquence d’utilisation des outils intégrés varie de « tous les jours » à « jamais ». A l’exception de 2/19 enseignants, tous les autres déclaraient utiliser systématiquement (tous les jours) l’outil de gestion des absences et le bulletin de notes. Le cahier de texte était également utilisé par une grande majorité des interviewés. Parmi les dix-neuf qui déclaraient l’utiliser systématiquement, deux enseignants disaient le faire « parce que c’est obligatoire (ens_9_math ; ens_1_géogr)».

Par ailleurs, les perceptions des enseignants sur la dimension pédagogique de l’ENT, ont été repérées dans le contenu des entretiens. Ainsi, le cahier de texte, l’espace collaboratif et les ressources numériques telles que l’encyclopédie Kiosque Numérique Educatif (KNE), ont été perçus par leurs utilisateurs - enseignants interrogés- comme étant des outils numériques à finalité pédagogique. En enseignement des langues, les enseignants disent utiliser le cahier de texte numérique en y intégrant pour leurs élèves, des pièces jointes de type application Webquest. Cependant, des problèmes d’incompatibilité logicielle liés aux documents joints du cahier de texte numérique, sont évoqués par des enseignants en mathématiques. Ces enseignants utilisent leurs cahiers de texte en joignant des documents personnels, spécifiques à leur discipline d’enseignement, dont le format n’est pas toujours compatible avec les logiciels de traitement de texte disponibles sur les ordinateurs en classe.

L’espace collaboratif et l’encyclopédie KNE sont également intégrés dans la pratique pédagogique des enseignants interrogés notamment en mathématiques, en économie-gestion et en histoire et géographie. Dans l’espace collaboratif, les fonctionnalités de stockage et de partage de documents avec les élèves, sont utilisées pour faire, par exemple, des corrections de devoirs. En revanche, les enseignants en langues, déclaraient ne pas utiliser ces fonctionnalités (collaboratives et espace-ressources KNE) en raison de problèmes techniques rencontrés en classe ou d’un manque de maîtrise d’utilisation techno-pédagogique de ces outils numériques.

7. Discussions et limites de recherche

Les résultats de cette étude montrent que la généralisation de l’ENT Scolastance dans les établissements d’enseignement secondaire est perçue par les enseignants participants à notre enquête comme une étape de transition dans le processus d’intégration des technologies numériques dans les pratiques d’enseignement et d’apprentissage. Nous souhaitions savoir quels espaces de l’ENT Scolastance étaient utilisés et dans quelle mesure les enseignants– utilisateurs potentiels de cet environnement numérique – les intégraient dans leurs pratiques pédagogiques. Des hypothèses liées aux relations entre la différence de sexe et l’utilisation d’outils intégrés dans l’ENT, ont été posées et vérifiées par les résultats obtenus suite à notre enquête quantitative par questionnaires fermés. L’existence de différences entre les disciplines d’enseignement en rapport avec l’utilisation d’outils de communication ou institutionnels, a également fait l’objet de cette étude.

Les résultats obtenus par rapport à la différence de sexe montrent que l’utilisation de l’espace collaboratif et des outils de communication a un effet significatif direct sur l’intention d’intégration de l’ENT Scolastance autant dans les pratiques des enseignantes que dans celles des enseignants. Cependant, les enseignantes qui rencontraient des difficultés de maîtrise technique ou des problèmes d’accès au matériel informatique, abandonnaient l’utilisation des fonctionnalités intégrées dans l’ENT. Alors que chez les enseignants qui ont déclaré persévérer dans l’utilisation des fonctionnalités de l’ENT malgré les difficultés de maîtrise technique rencontrées, l’intention d’usage effectif augmente. Nous avons également observé chez les enseignantes, contrairement aux enseignants, que l’usage quotidien de l’ordinateur augmente le niveau d’intention d’acceptation de l’ENT malgré les difficultés techniques.

Des résultats similaires ont été observés par Kay (Kay, 2006) dans une étude sur le genre et les attitudes des enseignants envers les technologies numériques. En effet, ses résultats montraient une influence significative du genre sur les attitudes des enseignants, uniquement avant l’implantation d’un environnement numérique dans l’école. Les enseignants interrogés avaient des attitudes plus positives que les enseignantes envers les technologies (Kay, 2006). Alors que l’ENT Scolastance était implanté depuis plusieurs années, des résultats de notre étude amènent à constater que les enseignants abandonnent moins que les enseignantes l’utilisation des fonctionnalités de gestion de classe (absences, cahier de texte, bulletin de notes), de communication et de collaboration.

La perception des enseignants sur l’utilisabilité et l’utilité du cahier de texte, des espaces d’information et de communication d’un ENT a également fait l’objet d’études récentes (Genevois et Poyet, 2010), (Voulgre, 2011), (Schneewele, 2012). Nos résultats corroborent ces études par des observations sur l’utilisation du cahier de texte, de la gestion des absences et du bulletin de notes. Les outils à visée « pédagogique » tels que l’espace collaboratif et de ressources de type encyclopédie accessibles via l’ENT Scolastance ne s’avèrent que partiellement intégrés par les enseignants interrogés. Les non-utilisateurs soulignent, notamment dans leurs entretiens, des problèmes d’utilisabilité et d’utilité pédagogique. En revanche, les enseignants potentiellement intéressés précisent vouloir d’avantage les utiliser si leur fonctionnement devient stable du point de vue technique. Dans une direction similaire à celle des travaux de Voulgre (Voulgre, 2011), ces constats amènent à considérer que le potentiel pédagogique en lien avec les ENT n’est que partiellement exploité.

La question sur les différences significatives entre les disciplines d’enseignement et l’utilisation des fonctionnalités de l’ENT a été traitée dans le cadre de cette contribution. Les résultats indiquent qu’il y a une différence significative entre les disciplines d’enseignement et l’utilisation des outils de communication. Rappelons que parmi les disciplines des enseignants interrogés, le domaine « Professionnel » a un effet plus significatif sur l’usage des outils de communication dans l’ENT. En revanche, il n’y a pas d’effet significatif de cette même variable sur l’usage des outils institutionnels. Ce résultat est probablement lié au profil de lycées, technologique et professionnel, utilisé dans ce travail. En prenant en compte l’approche qualitative de ce travail, les discours des entretiens soulignent que les enseignants des disciplines à visée professionnelle, auxquelles forment les établissements de notre étude, utilisent souvent l’espace de communication sur l’ENT pour communiquer avec les élèves stagiaires se trouvant dans leurs entreprises d’accueil.

Le lien entre la discipline d’enseignement et l’utilisation pédagogique de l’espace collaboratif et du cahier de texte fait aussi l’objet de discussion à partir des résultats des entretiens. Bien que statistiquement nos données ne révèlent pas de différences de discipline dans l’utilisation du cahier de texte numérique, les entretiens nous font remarquer quelques éléments d’usage chez des enseignants en géographie et en langues. Ainsi, en langues, histoire et géographie, les enseignants disent ne pas savoir utiliser techniquement l’espace collaboratif mais perçoivent l’utilité pédagogique du cahier de texte numérique, en l’utilisant avec des applications interactives pour les élèves. De plus, en langues, les enseignants interrogés perçoivent le potentiel didactique des ressources numériques et disent en faire un usage systématique dans leur séance de cours. En revanche, des enseignants en mathématiques utilisent l’espace collaboratif et de stockage pour la correction des devoirs ou pour la mise à disposition des élèves des ressources complémentaires au cours. Ces observations corroborent celles de Sutherland et al., (Sutherland et al., 2004), Jedeskog (Jedeskog, 2005) et Erixon (Erixon, 2010).

Limites de cette recherche

Cette contribution présente les résultats d’une recherche sur les pratiques pédagogiques des enseignants avec les technologies numériques et en particulier avec l’ENT Scolastance développé dans le cadre du projet ENTEA2 (Environnement Numérique de Travail en Alsace). Elle tente d’apporter des éléments de réponse à des questions liées à l’influence de différence de sexe et des disciplines d’enseignements sur l’utilisation de cet ENT par des enseignants de lycées technologiques et professionnels dans l’Académie de Strasbourg.

Néanmoins, elle présente des limites conceptuelles et méthodologiques. En ce qui concerne les aspects conceptuels, notre recherche utilise les concepts d’utilité, utilisabilité et pratique pédagogique et interroge les perceptions des enseignants sur ces trois concepts liés aux technologies numériques. Si l’étude des deux premiers concepts peut se réaliser selon une approche quantitative d’enquête par questionnaire, ce n’est pas le cas dans l’étude des pratiques pédagogiques. Telles que nous les avons bien définies, les pratiques pédagogiques sont en lien avec les élèves. Pour augmenter la fiabilité conceptuelle et méthodologique et la qualité des résultats d’une recherche similaire, un protocole d’expérimentation qui intègre les élèves s’impose donc.

En ce qui concerne les aspects méthodologiques, les limites se situent au niveau de la taille de l’échantillon pour les entretiens. De plus une approche mixte (quantitative et qualitative) longitudinale apportera des éléments pertinents dans la compréhension des résultats observés sur l’évolution des pratiques pédagogiques chez les enseignants et les élèves.

8. Conclusion

Nous concluons cette première étude en soulignant que les résultats obtenus tendent à mettre en évidence que l’ENT est perçu avant tout comme un « outil de communication » via la messagerie, ou encore comme moyen de répondre aux usages prescrits par l’institution (saisie des notes, des absences, des remarques sur les bulletins, ...). De plus, ces résultats montrent l’existence d’associations entre sexe et discipline, d’une part, les outils institutionnels, de communication et difficultés techniques, d’autre part. L’utilisation des TICE par les enseignants (femmes et hommes) des différentes disciplines n’est pas fortement ancrée dans les pratiques pédagogiques en classe ou dans la conception des supports de cours (Zender, 2010). Par ailleurs, les résultats de l’analyse thématique des entretiens auprès d’un échantillon de dix-neuf enseignants de lycées professionnels nous amène à observer la tendance de leur argumentation sur le non-usage de l’ENT Scolastance à des fins pédagogiques (manque de formation pédagogique avec ces environnements numériques, problèmes techniques rencontrés pendant les séances en classe). Ainsi, ils regrettent la dimension verticale dans les usages prescrits qui s’adressent à un enseignant imaginaire et qui ne répondent pas à des besoins réels éprouvés et ressentis au quotidien dans leur pratique pédagogique. A partir de ces considérations, nous interrogeons l’écart entre la nature prescriptive de l’utilisation et celle déclarée, à savoir s’il y a un lien entre les attitudes des enseignants envers l’utilisation des TICE et en particulier de l’ENT Scolastance et l’intégration de ces outils dans les pratiques des enseignants. Ou alors, les enseignants ressentent-ils un besoin de formation pas tant technique que de nature réflexive, visant l’accompagnement à l’intégration effective dans leurs pratiques pédagogiques ?

Les résultats de l’analyse de nos entretiens (N=19) ont montré que les pratiques avec les technologies, y compris avec l’ENT, sont loin d’être systématiques ou généralisées. Des enseignants sont passés au « tout numérique » dans certaines disciplines : histoire et géographie, langues vivantes, technologie ou sciences physiques. D’autres n’en font aucun usage, par manque de pratique, par inexpérience ou par absence de familiarité avec les outils numériques : un tel manque interroge les élèves et les parents d’élèves qui ne comprennent pas pourquoi les usages d’outils aussi performants ne sont pas généralisés.

Remerciements

Nous tenons remercier chaleureusement Sylvie Zender, Professeure au Lycée Oberlin à Strasbourg pour sa contribution très efficace lors de la mise en place de l’enquête ainsi que tous les enseignants des lycées professionnels de l’Académie de Strasbourg qui ont participé à cette recherche.

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A propos des auteurs

Ecaterina PACURAR est depuis 2006 Maître de conférences en Science de l’éducation à la Faculté de Science de l’éducation et responsable scientifique et pédagogique de la formation à distance Licence Professionnelle Activités et Techniques de Communication de l’Université de Strasbourg. Elle est membre du laboratoire LISEC EA 2310. Ses activités de recherche et d’enseignement se situent dans la problématique de conception participative des environnements numériques pour l’apprentissage et la formation et celle de l’analyse des usages observés chez les élèves et les enseignants du primaire et secondaire. Parmi ses projets en cours elle développe un outil numérique support à l’autoévaluation des élèves de primaire, MAENA’Scol. Ce projet se donne comme objectifs d’analyser les affordances de l’outil ainsi que la perception de l’autoévaluation chez les élèves de primaire et d’interroger l’influence de sa mise en pratique sur le concept de soi, l’estime de soi et la motivation dans la réussite scolaire.

Adresse : Laboratoire interuniversitaire des sciences de l'éducation et de la communication (LISEC), Université de Strasbourg, 7 rue de l'Université, 67000 Strasbourg

Courriel : epacurar@unistra.fr

 

Nargis ABBAS est Maitre de conférences en Sciences de l’éducation au Département de Sciences Humaines de l’Université de Sargodha au Pakistan. Elle est titulaire d’un doctorat en sciences de l’éducation obtenu à l’Université de Strasbourg. Ses activités de recherches et d’enseignement se situent dans le domaine de statistiques pour les sciences humaines et sociales. Parmi ses recherches en cours elle s’intéresse à la problématique de l’apprentissage des mathématiques chez les élèves du secondaire au Pakistan.

Adresse : Department of Education, University of Sargodha, Pakistan.

Courriel : nabmirza@yahoo.fr