Sciences et Technologies
de l´Information et
de la Communication pour
l´Éducation et la Formation
 

Volume 17, 2010
Article de recherche

Conditions des genèses d'usage des technologies numériques dans l'éducation

Teresa ASSUDE*, Dominique BESSIERES**, Delphine COMBROUZE**,
Catherine LOISY***

*UMR ADEF, Université de Provence, **AEP, Université de Reims Champagne-Ardenne, ***EducTice, INRP, CRPCC-CREAD, Rennes 2

RÉSUMÉ : Dans un contexte marqué par les injonctions institutionnelles pour la mise en œuvre des technologies de l’information et de la communication dans l’éducation, de nombreuses recherches ont mis en évidence les difficultés liées à leur généralisation. Cet article interroge les genèses d’usages professionnels des technologies numériques chez les enseignants et tente d’analyser les conditions et contraintes influençant ces usages. Le recueil des données est fait sur le terrain de la formation des enseignants et croise les résultats de deux recherches qui apportent des données complémentaires, une troisième recherche sert également à mettre en perspective les résultats. L’hypothèse posée est que les relations au changement et les représentations sociales du sujet sont des facteurs qui influencent la décision de mettre en œuvre ou non les technologies numériques dans l’enseignement. L’analyse révèle une autre dimension explicative des choix : les acteurs semblent pris dans un système d’injonction paradoxale.

MOTS CLÉS : Technologies numériques, représentations sociales, formation, certification, injonction paradoxale, changements - résistances.

ABSTRACT : Many researches have underlined the difficulties linked to generalizing the implementing of Information and Communication Technologies in education, in a context strongly influenced by institutional injunctions. This article examines the beginnings of professional uses concerning digital technologies among teachers, and tries to analyze the conditions and constraints influencing these usage. The data-gathering is carried out in the field of teachers’ training and cross-checks the results of two research studies, which bring further data. A third research study is also used to put the results into perspective. The assumption made is that the relationship to change and the social representations of the subject are factors that influence the decisions implement digital technology in teaching. The analysis conveys another explanatory dimension of the choices: the players seem to be caught in a paradox linked to institutional decisions and orders.

KEYWORDS : Digital technologies, social representations, teachers’ training, professional certification, paradoxical injunction, change-resistance

1. Introduction

Cet article essaie de mettre en évidence un certain nombre de conditions et de contraintes à prendre en compte pour appréhender les genèses d’usages professionnels des technologies numériques par les enseignants sur la base de trois terrains d’enquêtes. En particulier, nous nous intéressons aux rapports qui peuvent être identifiés entre les formations, les certifications et les représentations des acteurs en tant que facteurs favorisant ou freinant l’intégration des TIC (Technologies de l'information et de la communication) dans les pratiques professionnelles des enseignants. En cela, notre perspective diffère de la vision dominante des années 2000 insistant sur la primauté technique « refondant » l’activité ou négligeant les aspects synchrones liés à l’usage des TIC, soulignant la généralisation des équipements (Ben Youssef et Rallet, 2009).

L’intention d’intégrer les technologies numériques à l’école, en collège et en lycée en France est actuellement bien attestée dans les textes officiels. L’un des sept piliers du socle commun des connaissances et des compétences (Décret n°2006-830 du 11 juillet 2006) pour l’enseignement obligatoire est la maîtrise des techniques usuelles d’information et de communication qui apparaît au même titre que la maîtrise de la langue française. Nous pouvons y lire : « La culture numérique implique l'usage sûr et critique des techniques de la société de l'information. Il s'agit de l'informatique, du multimédia et de l'internet, qui désormais irriguent tous les domaines économiques et sociaux. Ces techniques font souvent l'objet d'un apprentissage empirique hors de l'école. Il appartient néanmoins à celle-ci de faire acquérir à chaque élève un ensemble de compétences lui permettant de les utiliser de façon réfléchie et plus efficace. ». Dans ce texte, ces technologies numériques font partie d’une culture numérique vis-à-vis de laquelle l’école non seulement ne doit pas rester à l’écart mais encore doit être partie prenante en favorisant une éducation réfléchie et critique des usages des techniques. La pression sociale et institutionnelle est très forte pour intégrer les technologies numériques du primaire au secondaire et l’accent est mis sur les usages : « usage sûr et critique » et « les utiliser de façon réfléchie et efficace ».

Dans ce contexte institutionnel volontariste, un certain nombre de travaux ont montré que les usages réels dans les classes ne sont pas à la mesure des intentions et des aspirations officielles et ont essayé de comprendre les différentes raisons de ce décalage (Kynigos et al., 2007), (Hoyles et Lagrange, 2009), (Assude et al., 2009).

La réflexion mérite cependant d’être poursuivie, en prenant appui sur de nouveaux terrains. La recherche présentée ici concerne trois terrains étudiés pendant le projet de recherche GUPTEn (Genèses d’usages professionnels des technologies par les enseignants(1)), recherche qui regroupait plusieurs équipes s’intéressant à l’émergence d’une culture professionnelle chez les enseignants dans le cadre de situations instrumentées et tentant d’identifier les élans ou les freins aux usages réels des technologies numériques dans les classes ou auprès d’enseignants et de formateurs, en particulier les genèses d’usages professionnels au moment de la formation initiale des enseignants. Le choix de parler de genèse s’explique par le fait que les utilisations des TICE étudiées pendant ces recherches ne sont pas suffisamment stabilisées pour parler véritablement d’usages sociaux « les usages sociaux sont des modes d'utilisation se manifestant avec suffisamment de récurrence et sous la forme d'habitudes suffisamment intégrées dans la quotidienneté pour s'insérer et s'imposer dans l'éventail des pratiques culturelles préexistantes, se reproduire et éventuellement résister en tant que pratiques spécifiques à d'autres pratiques concurrentes ou connexes » (Lacroix, 1994) (p. 147). Les utilisations des TICE étudiées ici ne sont ni socialement partagées, ni suffisamment stables pour parler d’usages. En revanche, elles se situent dans un contexte dans lequel les injonctions sont très fortes, puisque les stagiaires IUFM (Institut National de Formation des Maîtres) doivent bénéficier d’une formation aux TICE pour obtenir le C2i2e, certificat Informatique et Internet niveau 2 “enseignant” (Circulaire n° 2005-222 du 19 décembre 2005).

Ces préoccupations rejoignent et prolongent celles de Karsenti et ses collaborateurs (Kersanti et al., 2002) lorsqu'ils indiquent les perspectives et les besoins des recherches concernant l'intégration des TIC. Les auteurs préconisent qu’il faut tenter de comprendre l'apport de divers facteurs individuels, organisationnels ou sociétaux dans l'intégration pédagogique des TIC à la pratique éducative des nouveaux enseignants en s’interrogeant notamment sur les contextes et les processus qui favorisent le plus le transfert de connaissances technopédagogiques dans la pratique professionnelle.

Ainsi, l’intégration des technologies apparaît liée à des facteurs individuels, bien sûr, mais aussi à des facteurs organisationnels et sociétaux, il semble donc utile d’analyser le point de vue des individus en le reliant à un contexte élargi à l’organisation de la formation, et aux attentes sociétales. Les contextes et les processus facilitateurs seront tirés de l’analyse des discours et l’intérêt se portera sur les rapports qui peuvent être identifiés entre les formations, les certifications et les représentations des acteurs en tant que facteurs favorisant l’intégration des TIC dans les pratiques professionnelles des enseignants. Le questionnement porte sur la contextualisation globale de l’émergence des usages des TIC : quelles sont les influences des représentations des acteurs (formateurs ou enseignants) ? Quel est le rôle des certifications pour les acteurs ? Dans quelle mesure la diffusion de ces usages s’inscrit-elle dans l’évolution des organisations manifestant une injonction paradoxale ?

Nous posons l’hypothèse qu’il existe des logiques de convergence et des dynamiques de mutation et que celles-ci peuvent être mises en évidence en analysant les représentations des acteurs de la formation. Ces résultats seront mis en lien avec d’autres domaines professionnels pour montrer ainsi que l’école et la formation ne sont pas des « champs » isolés dans la société puisqu’ils intègrent les dynamiques de mutation de celle-ci rendant la situation des acteurs plus complexe.

2. Cadre théorique pour appréhender les usages

Pour penser la relation entre la dimension institutionnelle et la dimension personnelle dans le cadre de l’intégration des TIC, l’analyse s’appuie sur deux soubassements théoriques : le premier est la dialectique changements/résistances, le second est celui des représentations sociales. Ils permettent de penser les cadres dans lesquels les acteurs peuvent ou non développer leurs actions en la matière.

Par ailleurs, l’approche doit être plus élargie qu’une centration sur la classe (Karsenti et al., 2002), l’approche systémique qui sous-tend cette recherche combine l'étude des représentations et des pratiques avec celle des institutions et des contextes (Viens et Rioux, 2002), notamment en prenant en compte les formations et les certifications. Cette approche peut être déclinée aux niveaux macro (social), méso (établissement) et micro (classe) (Assude et al., 2009).

2.1. Une dialectique changements/résistances pour des genèses d'usages

Les technologies numériques sont l’un des facteurs du changement curriculaire comme l’indique le socle commun des connaissances et des compétences. Ces changements impliquent plusieurs acteurs – les enseignants et les élèves bien-sûr – mais aussi les formateurs d’enseignants qui ont un rôle important lors de la formation initiale et continue. Pour les formateurs et enseignants en formation initiale – les stagiaires –, les perturbations introduites par les TIC provoquent un certain nombre de réactions, par exemple l’adhésion ou le refus des changements.

Pour penser les changements induits par l'intégration des TIC, nous avons décidé de prendre en compte, outre les facteurs et les acteurs du changement, d’autres éléments tels que le degré, la valeur et les effets des changements ainsi que les types de résistance à ces changements.

Le degré du changement perçu par les acteurs est un indicateur qui permet de se placer par rapport aux pratiques habituelles dans une dialectique ancien-nouveau. Il peut y avoir des « petits » et des « grands » changements qui n’induisent pas forcément les mêmes effets ni les mêmes adhésions ou résistances. Lorsque la distance entre l’ancien et le nouveau est trop grande, cela peut provoquer de fortes résistances, voire des oppositions qui peuvent empêcher le changement ou faire reculer certaines avancées.

Nous nous intéressons aux rhétoriques construites pour légitimer les changements qui, en termes de valeur, peuvent être symbolique ou économique. Elles montrent, ainsi, avec des arguments épistémologiques, que le changement vaut la peine. Dans le même ordre d’idée, la thématique de l’impact du changement s’inscrit dans des registres similaires en matière de valorisation.

Quels sont les effets des changements ? Les effets attendus ont-ils été réalisés ? Y a-t-il d’autres effets inattendus ? Ces effets peuvent être voulus ou non voulus. Il semble important d’insister sur ces derniers, les effets « malgré soi ».

Il existe des liens entre les changements (voulus ou non) et les résistances des traditions, des acteurs, des forces d’inertie des systèmes. Ces résistances peuvent être actives ou passives, constituer des obstacles mais aussi des leviers pour trouver des équilibres ou pour garder des équilibres structurels ou fonctionnels. Elles peuvent être partout et se manifestent en ce qui concerne les facteurs et les acteurs d’une part, le degré, la valeur et les effets des changements d’autre part. Les indicateurs à prendre ici en compte sont les types et les effets des résistances.

Plusieurs travaux de recherche se sont intéressés aux facteurs de résistance à ces changements, quatre catégories de résistances apparaissent (Sauvé et al., 2004) : celles liées à l'économie d'enseignement, celles liées à la transformation du style pédagogique, celles liées aux obstacles organisationnels et celles liées aux obstacles à l'intégration des TIC dans la pratique professionnelle. Le surplus de travail et le manque de temps pour préparer des séquences d'enseignement apparaissent comme des obstacles liés à l'économie d'enseignement. Le style d'enseignement habituel de l'enseignant, manière usuelle d'être et d'agir du professeur (Poellhuger et Boulanger, 2001), constitue aussi un frein à l'intégration des TIC ainsi que la crainte de l'échec et le doute sur la valeur du changement. La déficience du soutien technique ou l'inadéquation du matériel sont des obstacles organisationnels. La maîtrise insuffisante des outils informatiques ou le manque de formation sont des obstacles liés à la pratique professionnelle.

Ainsi les types de résistances peuvent être divers, personnels, sociaux et/ou institutionnels, épistémologiques, éthiques, économiques, symboliques et temporels. Les résistances symboliques ont une importance certaine, comme nous l’avons observé, car elles peuvent se heurter à des « rituels » culturels naturalisés depuis très longtemps.

Les résistances agissent sur les changements comme des forces d’opposition ou d’inertie ou d’adhésion. Elles ne sont pas forcément néfastes au changement, et peuvent finalement classiquement l’accompagner. Par exemple, le fait de produire des ressources, qui montrent aux maîtres comment utiliser les calculatrices pour apprendre les nombres et non seulement pour calculer, peut être un moyen de transformer une résistance didactique (au sens strict) – ne pas avoir des moyens d’organisation mathématique et didactique – en une adhésion des acteurs impliqués.

Ces catégories sont des outils d’analyse qui ont été élaborés au fur et à mesure des besoins de l'analyse de réponses à des questionnaires de professeurs-stagiaires à propos des usages des calculatrices à l'école primaire (Assude, 2007). Nous voulons faire fonctionner ce modèle sur deux autres enquêtes. Il nous permet de penser que les perturbations induites par la volonté institutionnelle et sociale d’intégrer les technologies numériques peuvent être analysées dans le cadre d’une dialectique changements/résistances mettant en évidence le rôle des institutions et des acteurs. Dans ce sens, le deuxième élément théorique, celui des représentations sociales, nous permet de faire le lien entre les discours et les actions.

2.2. Des représentations sociales pour agir

La représentation sociale est une forme de connaissance permettant au sujet de se situer dans un environnement. C’est donc un savoir essentiellement pratique et également social en ce sens qu’il concourt à la construction d’une réalité commune à un ensemble social et en légitime les pratiques et les conduites. Les représentations sociales « forme de connaissance, socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social » (Jodelet, 1991) (p. 36), permettent, de la sorte, de renforcer les liens d’un groupe, d’agir en harmonie. Ainsi, par là même, la représentation est une sorte d’interprétation de la réalité qui détermine les relations au monde, les comportements et les pratiques des individus. Les représentations sociales apparaissent ainsi liées à un sujet (aspect cognitif) et déterminées par le contexte social dans lequel elles sont élaborées (aspect social et institutionnel).

Le concept de représentation trouve son origine dans la description des représentations collectives — stables dans leur production et dans leur transmission — que Durkheim, en 1898, oppose aux représentations individuelles — propres à chaque individu et, en conséquence, très variables. Cette notion est modernisée par Moscovici. La représentation sociale se révèle pour lui comme socialement, idéologiquement et culturellement déterminée. De la sorte, la genèse et l’essence d’une représentation dépendent implicitement du système de valeurs, de l’idéologie(2) et des normes du groupe qui la produit ou la transmet. Il définit la représentation sociale comme « un schéma de transformation de l’inconnu en connu, du lointain en familier, du mystère en clarté » (Moscovici, 1961) (p.427).

Les enseignants « ont des représentations, des jugements de valeurs, et des croyances qui guident leur action » (Baron et Bruillard, 1996) (p. 13-14). Ainsi, les représentations sociales peuvent être considérées comme des éléments fondamentaux dans la genèse des usages des TIC. Ainsi, nous pouvons postuler que la représentation ne dépend pas uniquement de l’expérience de l’individu, mais qu’elle peut être dérivée du système des savoirs et des valeurs qu’il détient du fait de son appartenance culturelle et sociale et de la communication sociale. L’insertion sociale des individus les place dans un réseau de rapports sociaux, dont ceux qui s’exercent dans la formation.

Le concept de « représentation sociale », tel qu’il a été remis à jour par Moscovici, a permis de préciser qu’une représentation sociale ne se crée ou ne se transforme qu’à partir des interactions sociales. La représentation sociale est, par conséquent, considérée comme un système contextualisé (contexte social et contexte discursif). Les représentations sociales sont des guides pour l’action.

En résumé, il ressort des différentes études que les représentations répondent à quatre fonctions principales :

- fonction de compréhension : elles permettent la compréhension du monde réel. « Elles définissent le cadre de référence commun qui permet l’échange social, la transmission et la diffusion de ce savoir « naïf » » (Abric, 1994) (p.16),

- fonction d’identité : elles s’acquittent d’une fonction identitaire puisqu’elles permettent aux individus de s’intégrer au groupe et par là même d’acquérir ce sentiment d’appartenance,

- fonction d’orientation : elles guident les comportements et les pratiques. Les représentations déterminent souvent les conduites, indépendamment de la réalité « objective »,

- fonction de justification : elles permettent de justifier, d’expliquer un comportement.

Ainsi, les représentations sont symptomatiques des changements puisqu’elles induisent, justifient et expliquent des comportements. Exprimer la représentation que l’on se fait d’une situation – l’usage des TIC ici – conduit à la compréhension que l’on en dégage (Boissonneault, 2003) (p.209). Aussi, il nous semble important d’essayer de mettre en évidence un certain nombre de représentations sociales chez des acteurs vis-à-vis des usages des TIC, représentations qui sont des guides pour l’action soit pour des usages réels soit pour empêcher ces usages : nous établissons ainsi un lien avec la dialectique changements/résistances. Interroger les formateurs sur leurs représentations des TIC permet d’aller au cœur de la situation, là où les questions de présence, d’intégration, et de pertinence de l’usage des TIC se posent de façon concrète dans les pratiques professionnelles. En effet, les représentations sociales qu’ont les formateurs des TIC et de leurs usages sont sans aucun doute liées à leurs pratiques pédagogiques. On peut alors, au travers des discours, avoir accès aux modes d’appropriation ou de rejet. L’ensemble de ces éléments nous fonde à étudier les usages à partir des représentations.

3. Méthodologies : deux corpus complémentaires

Les catégories d'analyse sur les changements/résistances explicitées ci-dessus ont été dégagées d’un travail sur le corpus d’une des équipes, ce travail n’est pas présenté ici parce que nous nous focalisons sur le contexte de la mise en œuvre du C2i2e, mais il est disponible en ligne (Assude, 2007). Pour ce qui concerne les recherches des deux autres équipes, la méthodologie de recueil de données mise en œuvre est expliquée ci-dessous. L’analyse qui suivra interrogera les résultats sous trois angles représentant trois niveaux d’appréhension, du plus général au plus particulier.

Ces deux recherches font référence au C2i2e, certification validant l’utilisation professionnelle des TIC pour l’éducation. Il s’inscrit en prolongement du C2i® de niveau 1. Ce dernier désigne et spécifie les compétences devant être acquises avant la fin de la licence par tous les étudiants dans le prolongement des B2i® puisqu’il valide la maîtrise des compétences définies dans le référentiel d’instrumentation des élèves et des étudiants. En revanche, tous les C2i® de niveau 2 concernent les compétences relatives à la capacité à utiliser les technologies dans les pratiques professionnelles, opérant ainsi une certaine rupture avec les brevets. Pour ce qui concerne le C2i2e, la rupture est double en raison des visées professionnelles et de la spécificité de la profession enseignante. Comme les autres C2i® de niveau 2, les compétences définies dans le C2i2e sont spécifiques à la profession, c’est ce que nous considérons comme la rupture professionnelle dans les visées, par exemple les enseignants doivent « Se constituer et organiser des ressources en utilisant des sources professionnelles » (3). Pour ce qui concerne la profession enseignante, il existe également une rupture de posture, puisque les enseignants, non seulement doivent acquérir des compétences professionnelles de fonctionnement, mais ils doivent aussi être en mesure de former, évaluer et valider les compétences informatique et Internet de leurs élèves.

Le C2i2e comporte un référentiel des compétences TICE (Circulaire n° 2005-222 du 19 décembre 2005) que les enseignants–stagiaires doivent construire pendant leur formation et qu’ils doivent faire valider. Une analyse du référentiel (Loisy, 2009) a montré que ces compétences sont centrées essentiellement sur le développement professionnel et sur l’usage des TICE pour les apprentissages des élèves. L’évaluation des compétences TIC des élèves est présente mais la formation des élèves aux TIC en est totalement absente.

La certification, c'est à dire la validation définitive des compétences est dévolue aux IUFM. Le dispositif prévoit qu’en amont, les stagiaires soient formés, à la fois sur les aspects techniques et sur les usages pédagogiques. La formation aux aspects techniques revient aux formateurs TIC, la formation aux usages pédagogiques relève de l’implication de tous les formateurs, quelle que soit leur discipline.

3.1. Une enquête auprès des formateurs sur les usages professionnels avec la généralisation du C2i2e

L’équipe AEP (Analyse et Evaluation des Professionnalisations) (4) s’est intéressée à l’impact des dispositifs instrumentés sur la modification des modes de travail des formateurs. En effet, il existe une évolution des dispositifs dans les IUFM. On peut citer par exemple le C2i® niveau 2 "enseignant" (dispositif de certification d'un ensemble de compétences TICE dans la formation des enseignants) qui introduit une dimension professionnelle forte dans le processus de développement des TICE. Nous assistons également à un avènement des formations ouvertes et à distance (FOAD) et des autres dispositifs de type environnement numérique de travail (ENT). Nous n’allons pas présenter dans le détail toutes les données recueillies, mais en extraire quelques-unes significatives.

L’enquête quantitative nationale par questionnaires permet de dresser un panorama des pratiques et des représentations sociales des formateurs en France. Elle s’est déroulée entre décembre 2005 et février 2006. Elle comporte 699 réponses utilisables provenant de formateurs répartis dans 29 des 31 IUFM identifiés : 85,4% de réponses en ligne et 14,6% sur papier. Elle vise notamment à cerner les points suivants :

- les aspects techniques,

- la maîtrise et l’appropriation des nouveaux environnements,

- les modes de travail,

- les compétences mobilisées,

- la professionnalité enseignante,

- les conséquences des évolutions sur l’identité professionnelle,

- la dimension statutaire (évolution face aux nouvelles attentes de la société, obligations et liberté pédagogique, rôle des institutions),

- la mobilisation des acteurs (impact des mesures gouvernementales et/ou ministérielles, volontés et discours institutionnels, suivi des accompagnements, perception par les intéressés).

Les caractéristiques globales de la population des formateurs d’IUFM au niveau national ne peuvent être déterminées avec exactitude, tant dans les effectifs réels, que dans les caractéristiques de disciplines et plus encore de statuts hétérogènes des formateurs. Nous n’avons pas trouvé de telles statistiques exhaustives et fiables au niveau national. Par ailleurs, une population de professionnels, comme celle des formateurs d’IUFM, ne peut permettre d’utiliser une méthodologie de sondages faute d’effectifs d’une population mère suffisamment importante pour permettre une application des méthodes de sondage probabilistes ou par choix raisonné. Aussi, si la population des répondants ne constitue pas un échantillon de sondage à proprement parler, elle est représentative des répondants couvrant un large éventail de disciplines. Lorsque nous les répartissons en grandes classes, nous obtenons environ un tiers de « littéraires », un tiers de « scientifiques » et le dernier tiers réparti entre les arts (4,9%), l’EPS - Education Physique et Sportive (6,2%), les TICE (14,3%) et les enseignants polyvalents du primaire (12,8%). À ce titre, elle constitue un éclairage important d’un point de vue heuristique, par l’ampleur quantitative et la diversité statutaire des répondants que connaît l’ensemble des IUFM de France. Ce niveau d’analyse quantitatif de la population des formateurs est à relier avec une approche plus qualitative.

3.2. Une enquête auprès des formateurs et d'autres acteurs institutionnels impliqués dans l'expérimentation nationale du C2i2e

La recherche conduite au sein du CREAD (Centre de Recherches sur l'Enseignement, l'Apprentissage et les Didactiques, IUFM de Bretagne) a été menée lors de la phase d’expérimentation nationale du C2i2e c'est-à-dire aux premiers temps de la mise en œuvre du C2i2e. Le recueil de données porte sur les TICE et non sur la certification, encore à un stade embryonnaire à ce moment-là.

Deux types d’instruments ont été construits pour recueillir ces données, des questionnaires déposés sur une plateforme collaborative et des grilles d’entretiens. Le premier questionnaire était une fiche permettant de décrire le lancement de l’expérimentation, le second une fiche de bilan. Pour l’un, comme pour l’autre, les rubriques à renseigner sur la fiche descriptive concernaient le périmètre de l’expérimentation, le dispositif mis en place pour les stagiaires, le dispositif technique, le dispositif organisationnel et de suivi de l’expérimentation et une rubrique de remarques libres. Tous les IUFM de France pouvaient répondre aux questionnaires, la SDTICE (Sous-Direction TICE du Ministère) qui pilotait l'expérimentation attendait qu'une dizaine d’IUFM participent.

Concernant les entretiens, le choix s’est porté sur des entretiens semi-directifs. Des grilles d’entretien ont été constituées pour chacune des catégories de participants. Les questions portaient principalement sur la formation et la validation des compétences et sur les acteurs impliqués dans les décisions, notamment concernant le rôle qu’ils devraient jouer, leur implication réelle versus retrait dans l’expérimentation, le regard qu’ils portaient sur les certifications. Concernant le référentiel de compétences et les effets de la mise en place du C2i2e sur l’organisation de la formation, aucune question précise n’était posée mais les personnes participant aux entretiens avaient la possibilité de s’exprimer librement sur ces deux points. Le champ « rapport aux technologies » permettait de recueillir le point de vue des personnes interviewées sur la juste place des technologies dans l’enseignement en général et dans la formation des enseignants en particulier et de connaître leur sentiment général sur l’expérimentation. Concernant les personnes auprès desquelles les entretiens devaient être conduits, le choix s’est fixé sur trois statuts, le correspondant C2i2e, un représentant de la direction et un formateur participant à l’expérimentation par IUFM sans autre précision. Les chargés d’expérimentation et les formateurs interviewés devaient décrire précisément des pratiques de formation et des exemples de situations de validation alors que ces questions, en lien avec les pratiques, n’étaient pas prévues pour les représentants de la direction. Ces trois statuts ont été choisis parce que représentatifs de trois champs de responsabilité, le directeur étant celui qui impulse la politique locale, le correspondant C2i2e étant la personne qui assure le relais entre les attentes de la SDTICE et l’IUFM, le formateur étant la personne qui met en œuvre la politique. Il est cependant important de souligner qu’un manque de précaution méthodologique a amené un biais dans le choix de la population car les formateurs choisis par le correspondant C2i2e avaient tous un regard positif sur les TICE. Le recueil des données par entretiens s’est déroulé en mai - juin 2005.

Douze entretiens ont été ainsi conduits dans quatre IUFM différents. Les entretiens conduits en présentiel ont duré de quarante-cinq minutes à une heure trente selon les participants. Lors des entretiens, toutes les personnes sollicitées ont accepté de répondre aux questions posées. Les entretiens ont été enregistrés sauf cas exceptionnels liés à des impossibilités matérielles puis transcrits intégralement. Dans les cas exceptionnels, soit les réponses ont été directement prises en copie à l’aide d’un logiciel de traitement de texte, soit les participants ont répondu dans un fichier texte. Le matériel a été la base d'un travail à visée compréhensive. Nous avons découpé le discours des répondants en unités informationnelles, unités qui ont un sens global unitaire et nous les avons catégorisées par thèmes.

Dans le papier présent, seules les données concernant les thèmes communs aux trois recherches sont présentées.

4. Eléments convergents pour discerner les genèses d'usage

Au travers du corpus de nos deux enquêtes, des éléments d’analyses convergents émergent. Le premier concerne l’adhésion des acteurs, le deuxième la dialectique changements/résistances et le troisième la valeur ajoutée des technologies dans l’enseignement et l’apprentissage.

4.1. L'adhésion des acteurs génératrice d'usages

L’utilisation des TIC dans les IUFM semble facilitée par les conditions matérielles offertes, qui sont dans l’ensemble très satisfaisantes, même si des écarts existent entre les différents établissements. Majoritairement, les formateurs disent qu’ils se sont formés seuls aux outils et leur utilisation professionnelle repose principalement sur la motivation personnelle et les besoins tant pédagogiques que didactiques. La mobilisation se traduit également par le temps d’utilisation à des fins professionnelles (préparation et formation), plus de la moitié des formateurs déclarant utiliser ces outils TIC au moins deux heures par jour.

Plus largement, la mobilisation des acteurs et le développement des usages résultent des différentes pressions qui peuvent intervenir dans le cadre de l’exercice du métier. Paradoxalement, le rôle et l’influence forte de la hiérarchie sont illustrés par de nombreux éléments au sein des établissements (plans de formation, décisions et priorités issues des Conseil d'administration et Conseil scientifique et pédagogique). Celle-ci est perçue plutôt comme incitatrice (« elle appuie » pour 68,5% des formateurs). L’importance du milieu professionnel est accentuée également par la place des différents acteurs dont certains sont considérés comme des moteurs du développement des usages (formateurs TICE en particulier). Par ailleurs, les demandes émanant des étudiants et des stagiaires (pression sociale) sont un des éléments incitateurs de l’utilisation des TIC (57,8% du total des citations).

La mobilisation est également perceptible dans l’image professionnelle du formateur qui utilise les TICE : elle est “plutôt positive” ou “très positive” pour plus de 76% de la population. Cette représentation positive se décline également concernant le jugement porté sur l'impact des TIC sur la pratique professionnelle des formateurs : il est très majoritairement “plutôt positif” (67,1%) voire “très positif” (13,9%).

Le C2i2e apparaît aussi comme un élément incitatif pour que les formateurs intègrent les TIC dans leurs pratiques de formation et aussi pour les stagiaires qui doivent faire valider un certain nombre de compétences. Le C2i® niveau 2 est globalement connu comme en atteste le très faible pourcentage de non-réponse (0,4 %). Parmi les répondants, 68,4% estiment qu’il s’agit d’une certification validant des compétences informatiques, seulement 45,1% savent qu’il s’agit d’un référentiel de compétences professionnelles, d’autant plus pour les spécialistes, un peu moins pour les plus éloignés comme les disciplines du français et dans le primaire. Cette représentation a pour conséquence directe que majoritairement, les TICE sont assimilées au maniement d’outils technologiques proches de l’informatique.

Ainsi, intégrer les TICE dans la pratique par la généralisation du C2i2e est perçu comme incontournable (36.6%), souhaitable (29.9%), nécessaire (20.5%). Seuls 5.7% des formateurs pensent que cela est inapplicable et pour 8% « violent ».

De même, l'obligation, pour les stagiaires, de valider le C2i2e pour être titularisé, est perçue par 45.5% des formateurs répondants comme un moteur pour l’intégration rapide des TICE dans les pratiques. Mais 30.3% pensent que cela ne concernera que les formateurs impliqués directement par le C2i2e. En revanche, tout se passe comme si avec une « position personnelle ou institutionnelle » plus assurée (maîtres de conférences, hommes) la portée de l’innovation TICE était davantage relativisée.

Mais l’incitation à utiliser plus massivement les TICE ne peut faire l’impasse sur le développement de certains dispositifs et, en particulier, le recours à la formation de formateurs. Elle est indispensable pour 66,5% des interrogés.

Nous pouvons dire qu’une des conditions pour la genèse d’usages professionnels est l’adhésion des acteurs impliqués. Cette donnée recueillie, loin d’être triviale, confirme une caractéristique de la sociologie des usages d’objets innovants ou technologiques. Les genèses d’usages ne peuvent pas simplement être le fruit de décisions venant d’en haut, même si celles-ci sont soutenues par de bonnes conditions matérielles (dans les établissements mais aussi en ce qui concerne les technologies utilisées) et par des incitations diverses dans les établissements (d’autres acteurs mais aussi des instances institutionnelles), le tout étant consolidé par la généralisation de la certification en tant que nouveau cadre d’action générique.

4.2. La dialectique changements/résistances

L’implication des IUFM dans la phase d’expérimentation du C2i2e a été forte. Alors qu'une dizaine d'IUFM était attendue, au moment du lancement de l’expérimentation ils étaient 23 à renseigner la première fiche déposée sur la plateforme. Au mois de mai 2005, le nombre d’IUFM impliqués dans l’expérimentation était de 27 sur les 31 IUFM de France, soit 87% des IUFM. Le nombre d’IUFM participants a été important dès le départ et il y a eu peu d’abandons. On trouve des formateurs dans toutes les disciplines et, même si des réticences sont évoquées dans certains discours, souvent on trouve des arguments permettant de les réfuter dans d’autres discours.

Des résistances personnelles sont évoquées dans les entretiens : pour certains ces résistances s’expliqueraient par l’âge des formateurs pour d’autres non comme l’indique cet extrait « La notion d’âge et de sexe ne paraît pas un critère pour repérer l’implication ou non des formateurs ».

Des résistances institutionnelles sont aussi repérées, notamment celles liées à la légitimité des formateurs pour valider les compétences du C2i2e. Les réticences sont expliquées par l’absence de validation des compétences des formateurs, absence qui peut induire un sentiment d’illégitimité. Mais si la validation des compétences techniques ne pose pas trop de problème, en revanche, « c’est compliqué parce que quand on regarde... le C2i® niveau 2, ça ne va pas de soi de transférer ça pour les formateurs parce que le référentiel n’a pas été conçu comme ça ». Il n’est pas simple de valider les compétences C2i2e des formateurs et peut-être même inapproprié « ...il y aurait un danger d’ailleurs, ça serait de renforcer l’idée d’une homothétie finalement entre le travail de formation et le travail de l’enseignant, l’idée que pour faire un bon formateur, il suffirait d’un très bon enseignant, ça renforcerait cette idée-là qui est une idée simpliste. »

Des résistances didactiques sont aussi évoquées, par exemple lorsque les réticences sont expliquées par les disciplines enseignées, « L’implication me paraît très liée à la discipline pour les PLC (Professeur de lycée et collège, c'est-à-dire de l'enseignement secondaire) », soit parce que les formateurs ont le sentiment qu’ils ont une didactique efficace « Les réfractaires disent "On a une didactique établie qui ne tient pas compte des TICE et il n’y a pas de raison qu’on en change" », soit parce que certaines disciplines n’ont pas ou ont peu commencé l’intégration des technologies. « Les formateurs d’EPS ... ne se sentent pas concernés », à l’opposé un participant affirme « EPS, les collègues on les connaît, ...ça va fonctionner aussi ». Les formateurs de lettres sont parfois considérés comme réfractaires mais à l’opposé un exemple d’intégration réussie des technologies dans l’enseignement des lettres est donné « Alors sur l’atelier d’écriture, ce qu’on a vu... la collègue essaie d’identifier les difficultés des enfants au travers de l’expérience de l’écriture » et un des participants aux entretiens est une formatrice de lettres qui dit « En lettres, si je regarde la formation TICE, je trouve qu’on est en phase ascendante... ». Il en va de même pour les formateurs de philosophie, qui sont présentés comme majoritairement réticents alors qu’il se trouve que l’un des formateurs ayant participé aux entretiens a été, avant de devenir formateur TICE, professeur de philosophie en zone sensible et que c’est là qu’il a commencé à introduire les nouvelles technologies dans son enseignement. Concernant les CPE (Conseillers principaux d'éducation), la question est complexe parce que « certains des items sont susceptibles de concerner les CPE mais d’autres pas ».

Les participants à cette enquête indiquent d’ailleurs des pistes pour vaincre les réticences :

- le refus de la direction de choisir la voie de la force : « la réussite de l’intégration renvoie à l’adhésion des formateurs et les processus d’accompagnement des formateurs »,

- l’encouragement des formateurs : « ...rassurer les formateurs qui ont peur de l’absence de présentiel, c’est travailler autrement »,

- l’implication par des choses simples, accessibles à tous, au départ : « Je souhaite que tous les formateurs... s’inquiètent de savoir si le PE (Professeurs des écoles)... a pris connaissance de la feuille de position de ses élèves »,

- l’accompagnement du processus,

• accompagnement financier « c’est la capacité de l’institution à accompagner... financièrement le processus c’est-à-dire permettre aux formateurs qui vont faire l’effort de modifier leur pratique ... d’intégrer tout ce travail... dans leur service normal »,

• accompagnement didactique « nous qui avons réfléchi plutôt du point de vue TICE, je pense que... on peut les aider à mieux comprendre si effectivement... les PE qu’ils ont dans les cours prennent en compte les TICE... dans leur pratique professionnelle »,

- le recours aux personnes déjà impliquées pour amener ensuite les plus réticents : «nous, les formateurs TICE..., nous avons décidé... de sensibiliser davantage ceux qui avaient déjà montré un intérêt pour les TICE dans le cadre de leur discipline »,

- la possibilité d’une différenciation des compétences selon les publics : « On peut penser que suivant les catégories d’enseignants, certains des items des référentiels sont plus pertinents que d’autres ou certains niveaux d’exigence relative à certains items ne seront pas les mêmes d’une population à une autre ». Cette différenciation paraît nécessaire « C’est intéressant d’essayer de le prendre en compte, le référentiel, alors qu’on se pose la question des CPE en IUFM et là forcément, le référentiel en question ne peut être vu que comme un cadre à l’intérieur duquel certains des items sont susceptibles de concerner les CPE, mais d’autres pas ». La différenciation ne va cependant pas de soi « ...le rôle de la direction c’est d’essayer de trouver un cadre dans lequel cette validation sera à peu près homogène... qu’il n’y ait pas une trop grande... différence entre la validation en sciences et en français ».

Dans l’enquête auprès des stagiaires sur les calculatrices (Assude, 2007), plusieurs résistances sont aussi évoquées. L’introduction des calculatrices à l'école primaire se heurte à une forte résistance symbolique : la représentation sociale des mathématiques enseignées à l’école primaire à travers deux rituels, celui de l’apprentissage des tables de multiplication et celui de l’apprentissage des techniques opératoires traditionnelles. Cette ritualisation des mathématiques enseignées est très ancrée dans la culture des enseignants et même des parents - l’introduction des calculatrices casse cette ritualisation : « nos enfants vont-ils apprendre à calculer ? », « comment allons-nous reconnaître que nos enfants ont bien appris à calculer ? ».

Une représentation sociale, aussi partagée par certains professeurs et parents, est celle qui associe l’utilisation des calculatrices au fait d’empêcher les élèves d’apprendre à calculer. Cette représentation peut se transformer en résistance sociale ou personnelle surtout de la part des professeurs qui ne sont pas du tout convaincus du gain apporté par l’usage des calculatrices et estiment qu’il faut continuer à enseigner les techniques opératoires. Cette résistance se focalise sur la question « Les élèves vont-ils mieux apprendre à calculer avec les calculatrices ? », question à laquelle il est difficile à répondre sans faire des travaux de recherche. Une autre réticence correspond à une résistance éthique. La disponibilité des calculatrices et la responsabilité du choix d’utilisation par l’élève se heurtent aussi au mode de fonctionnement de l’école primaire où le partage des responsabilités entre le maître et l’élève est bien délimité. Cette résistance s’oppose à ce changement éthique impliquant que l’élève ait plus de responsabilités dans son apprentissage.

Ces résistances suscitent des oppositions très fortes à l’introduction des calculatrices en raison des effets que cela impliquerait du point de vue des rituels, des représentations et de la responsabilité.

Certaines résistances viennent de l’implémentation dans les classes et de l’organisation du travail mathématique. Les techniques opératoires ont montré leur efficacité, leur stabilité dans le curriculum. Ces techniques, lorsqu’on les apprend sans difficulté, sont assez concises et sont communes à tous les élèves. Or utiliser des techniques personnelles implique qu’il peut y avoir une multitude de réponses pour le même type de tâches. Le professeur ne peut pas faire alors l’économie de solliciter la parole des élèves sur leurs techniques personnelles, pour instaurer un partage et une communication. Cette multitude de réponses introduit une complexité dans la gestion du travail mathématique de l’élève. Ces difficultés de gestion nourrissent autant de résistances institutionnelles et personnelles au changement car tout cela implique de changer le style pédagogique (Sauvé et al., 2004).

La prise de risque et la peur de l'échec évoquées par ces auteurs sont des obstacles au changement. Par exemple il semble difficile pour un enseignant de pouvoir accepter qu’on puisse ne pas savoir tout de suite donner une réponse aux élèves s’ils demandent comment utiliser certaines touches de la calculatrice ou certains savoirs pour lesquels on n’a pas la réponse. Par exemple, que répondre aux élèves sur les nombres négatifs qu’ils vont rencontrer probablement avec les calculatrices ?

Il y a aussi des résistances personnelles au « trop de changements » : si la distance est trop grande entre ce qui est fait jusqu’alors et ce que les changements induisent, beaucoup de professeurs peuvent s’avérer réticents.

Dès lors, l’émergence d’usages professionnels des TIC doit pouvoir s’appuyer et se fonder sur la connaissance de telles résistances. En cela, les conditions didactiques nous paraissent avoir un rôle à jouer, dans la mesure où ces éléments négatifs par rapport aux genèses d’usages ne peuvent manifestement pas être écartés d’un revers de main.

4.3. Les apports des TICE : valeur ajoutée, conditions didactiques et épistémologiques

L’enquête menée auprès des formateurs par l’équipe AEP montre un certain nombre de freins qui peuvent limiter l’utilisation des technologies. Le facteur principal est lié aux difficultés techniques et logistiques, mais aussi l’absence de formation adaptée et la méconnaissance de l’intégration en situation apparaissent également de façon significative. Concernant l’intégration en situation, c’est-à-dire les usages, voire la conception d’outils, l’enquête montre par contre que les aspects didactiques et pédagogiques sont des facteurs très peu cités comme posant des difficultés au développement des pratiques TIC. Nous aurions pu penser à une contradiction dans ces résultats, entre le fait que les facteurs didactiques et pédagogiques ne sont pas beaucoup cités et la méconnaissance de l’intégration en situation. Or il nous semble avoir mis en lumière un point essentiel concernant les conditions facilitant les usages réels qui apparaît aussi dans les autres enquêtes. Nous pourrions dire qu’il y a là un point aveugle dont les formateurs ne sont pas conscients de l’importance et des difficultés. Une façon d’aborder cette question est de s’intéresser à la valeur ajoutée des technologies pour les apprentissages et pour l’enseignement, même si, pour Alain Chaptal, la question de l’efficacité des technologies est une question à repenser (Chaptal, 2003).

Dans les discours recueillis pendant l'enquête sur le C2i2e menée par le CREAD, la question de l'intérêt des TIC dans l'éducation a souvent été abordée en termes de valeur ajoutée « Il faut que chaque discipline s’empare de cette réflexion et se dise... où est-ce qu’il y a un plus à utiliser l’informatique, ou l’audiovisuel numérique, ou la recherche documentaire par rapport à ce qu’on faisait traditionnellement... ? Est-ce que ça amène un plus d’utiliser un outil bureautique comme Excel ou comme Word...? ». La valeur ajoutée évoquée renvoie clairement dans les discours à l'amélioration de la réussite scolaire comme la mise en place de situations didactiques visant à surmonter certains obstacles épistémologiques ou des situations nouvelles visant à surmonter certaines difficultés de la discipline comme le montrent les exemples donnés par plusieurs participants sur l’utilisation des logiciels de traitement de texte dans les projets d’écriture longue en lettres ou la dissertation en philosophie : il y a, de la part des enseignants, une recherche de sens en relation avec une pertinence pédagogique. L’importance accordée au sens par les participants est conforme à ce qui a été observé dans la littérature (Mallein et Toussaint, 1994), l’insertion sociale des technologies dépend moins des qualités techniques ou des performances de l’objet que des significations d'usage que les usagers projettent et construisent sur le dispositif technique.

Or, on peut voir des comportements d'opposition aux attentes institutionnelles « On peut faire court car la juste place c’est la place de la pertinence. Il y a une pression sociale, une injonction ministérielle, mais en même temps, je suis partisan de ne pas l’utiliser si ce n’est pas pertinent », et, à l'opposé, un développement de pratiques qui paraissent pertinentes même si elles ne sont pas institutionnellement attendues « On n’a jamais ciblé les maternelles, or, on s’aperçoit qu'on fait beaucoup de choses en maternelle parce que c’est un outil qui est parfaitement adapté, or B2i®, ça concerne pas les maternelles... ». Cette recherche de pertinence est profondément inscrite dans la professionnalité des enseignants qui doivent mettre en œuvre un enseignement permettant d'atteindre les objectifs d'apprentissage visés par les programmes scolaires, or, précisément, la valeur ajoutée des TIC en terme d'apprentissage par les élèves, n'a encore jamais été prouvée de manière incontestable. Les enseignants se sentent donc balancés entre des attentes de plus en plus fortes en termes d'efficacité et des attentes sur l'intégration des technologies dans leurs pratiques dont ils ne perçoivent pas clairement l'intérêt. En conséquence, on reste dans une approche mesurée « Un outil parmi d’autres, à ne pas employer systématiquement ni à mettre au placard systématiquement ».

Il semble que l’intégration des technologies dans l’enseignement pourrait jouer un rôle non négligeable dans la transformation des pratiques et renforcer ainsi le caractère professionnel du métier d'enseignant (Loisy, 2007). Certaines sources de changement apparaissent dans les discours recueillis lors de la recherche IPE menée par le CREAD. Une remarque de l’un des participants nourrit cette réflexion « Depuis que je suis dans les TICE, j’ai toujours constaté que l’arrivée de l’informatique, ces choses qui viennent de l’extérieur, qui perturbent les formateurs,... sont souvent révélateurs de leur conception de la formation. Ça met en lumière certains désaccords... J’ai aidé des collègues à faire de la FOAD sur la géographie, les plus gros problèmes n’ont pas été les problèmes techniques mais des problèmes sur le fond et ça a violemment modifié, pas trop leur aptitude à utiliser les TICE, mais leur vision de la géographie elle-même... Ça va reposer le problème des apprentissages et de la manière de les faire acquérir. » Dans sa formulation, ce participant laisse entendre que ce sont les choses externes qui amènent des transformations assez radicales, en l’occurrence l’arrivée de l’informatique et son intégration didactique. On peut aussi considérer que, dans la situation décrite, ce n’est pas tant par la présence de l’outil informatique lui-même, ou ses caractéristiques, que le fait qu’il provoque des échanges entre les formateurs qui peut jouer un rôle dans la mise en place d’une réflexion et d’une transformation des pratiques. Vraisemblablement, la confrontation des points de vue des enseignants joue un rôle clé dans le questionnement didactique, ainsi, l’intégration de l’informatique pourrait être le moment où, contraints aux échanges, les enseignants pourraient questionner, voire transformer, leurs pratiques et moderniser leur professionnalité.

Ces résultats montrent que la valeur d’usage des TICE est vraiment importante, en tant que valeur ajoutée professionnelle aux pratiques classiques, dans les situations d’enseignement et d’apprentissage où la technologie est mise en usage effectivement et efficacement. Ainsi, les TICE pour se développer doivent représenter des apports à différents niveaux pour améliorer des usages pédagogiques classiques déjà existants qu’elles ont pour charge d’épauler, sinon de renouveler.

5. Conclusion : des genèses d'usage sous injonction paradoxale

Les résultats des trois équipes qui ont travaillé dans le même projet GUPTEn, au travers de différents objets, acteurs, méthodologies, montrent des convergences qui permettent de conclure que certaines représentations sociales autour des TIC commencent à se stabiliser. Elles sont en cela révélatrices de la genèse d’usages dans le milieu de l’enseignement et des formateurs. Mais le problème de l’intégration des TIC à l’école est complexe, sans solution unique et simple.

Or les acteurs (formateurs et enseignants) sont soumis à ce que nous pouvons appeler une injonction paradoxale. Celle-ci consiste à formuler des attentes ou des ordres contradictoires, et/ou impossibles à réaliser, ce qui génère une nocivité psychologique mise en lumière par Gregory Bateson et l'École de Palo Alto (Bateson, 1980), (Winkin, 2000). L’injonction est paradoxale quand les demandes/ordres sont contradictoires ou si leur réalisation ne dépend pas de la volonté de la personne. Elle permet d’appréhender la mise en évidence des impasses de la communication ordinaire, en particulier dans la sphère familiale ou dans le monde de l'entreprise, comme le "double bind" (double contrainte) à l’exemple de l'injonction : « soyez autonomes ! » : si j'obéis à une telle injonction, je ne suis pas autonome ; si je m'y refuse au contraire, je nie mon autonomie...

L’introduction des TIC dans l’organisation renouvelle et amplifie l’impact de la notion d’injonction paradoxale dans les nouveaux contextes de travail et les organisations. En effet, le discours dominant actuel reconnaît le modèle de l’échange comme une valeur pour des motifs de performance économique. Les TIC viennent renforcer et étayer ce nouveau critère d’efficacité légitimé. Il faut alors regarder les articulations entre contraintes gestionnaires, contraintes économiques et constructions identitaires des salariés. Il en résulte une double injonction d'échange/coopération et de concurrence/compétition constitutive d’une "injonction paradoxale", le plus souvent insoluble pour le salarié. En réponse, les salariés adoptent des comportements d'adaptation dont la typologie est bien connue : le conflit, les arrangements et les alliances, les évitements et l'anomie (D'Iribarne, 2000). Ces décalages sont présentés comme une résistance au changement. Il s'agit plutôt de la rencontre de rationalités différentes entre managers et salariés qui ont chacun leur propre système de représentations.

Pour Frédéric de Coninck (Coninck de, 2005) les nouveaux mots d’ordre managériaux, à l’exemple des TIC, fonctionnent comme des injonctions qui contribuent à mettre les individus sous pression dans la mesure où le management ne fournit pas de modèle à suivre pour organiser le travail. Les personnels peuvent ainsi être soumis à une double injonction, c’est-à-dire des mots d’ordre contradictoires (ex. utiliser les TIC et garantie de la liberté d’enseignement). Ces mots d’ordre aboutissent à une pression constante avec une multiplication des exigences. Dès lors, l’ensemble des personnels, salariés et enseignants, subit une pression liée à l’exigence de performance qui est devenue un critère commun du fonctionnement des organisations, d’abord au sein du secteur concurrentiel et maintenant à l’ensemble des organisations.

Aussi, tant l’IUFM que l’école représentent des organisations qui à leur tour sont concernées par la généralisation des TIC dans les processus de travail, pour des motifs d’efficacité, de décloisonnement, voire de productivité à l’instar des administrations centrales. Les TIC sont, en ce sens, révélatrices des mutations de la société qui se généralisent dans les organisations. Elles sont un dénominateur commun des nouvelles formes de professionnalisation et de normes d’efficacité, à ce titre, incontournables.

Dans notre étude, l’injonction paradoxale à laquelle les acteurs (formateurs et enseignants) sont soumis est la suivante : « faites ce que vous voulez mais intégrez les TIC dans vos classes ». Or il nous semble que nous sommes en présence d’ordres contradictoires dans le sens qu’il s’agirait d’intégrer une chose pour laquelle on ne sait pas forcément quoi faire faire aux élèves mais qui devrait être assumée par les acteurs « seuls » dans leur classe.

Nous sommes là en présence de plusieurs types de changements importants : des changements épistémologiques et didactiques car les contenus et le travail sur ces contenus doivent être repensés ; des changements cognitifs et personnels car les technologies modifient les attitudes et motivations des formateurs, des enseignants, des élèves ; des changements pédagogiques et des modifications dans le partage des responsabilités entre enseignant et élèves. Ces changements impliquent plusieurs acteurs : les formateurs, les enseignants, les élèves essentiellement mais les parents peuvent avoir aussi un rôle à jouer. Le degré des changements joue aussi un rôle plus ou moins grand selon la distance entre ce que l’enseignant faisait auparavant et ce qu’il va faire par la suite (« juste distance » entre l’ancien et le nouveau). Les résistances sont plus difficiles à anticiper. Loin d’être des manifestations de « conservatisme », elles font souvent apparaître des contraintes du système d’enseignement ou de formation. Les formateurs ou les enseignants peuvent ne pas vouloir abandonner des stratégies de formation ou d’enseignement qui ont fait leur preuve et que l’usage d’une technologie rend obsolète et ce d’autant plus qu’ils pensent ne pas disposer de stratégies aussi assurées avec les technologies. Ils peuvent ressentir des difficultés à rendre visibles et crédibles auprès des parents et plus largement des observateurs de l’école, des apprentissages nouveaux obtenus à l’aide des technologies. Identifier ces résistances permet de mieux comprendre les contraintes des systèmes de formation et d’enseignement, les évolutions possibles.

Or ces évolutions doivent être assumées par la profession et pas seulement par les individus (Baron, 2001). Les différentes représentations sociales qui sont en train de se constituer en lien avec les usages, comme nous l'avons vu dans la partie 3, sont des guides pour l’action car elles permettent de créer une identité professionnelle, de justifier la valeur ajoutée des usages des technologies.

Nous avons mis en lumière des conditions de développement des usages des TICE en terme d’usages professionnels au sein des organisations de formation, lesquelles intègrent plusieurs niveaux de préoccupations, professionnels, managériaux, étatiques et sociétaux. Notre originalité repose ainsi sur la mise en lumière des enjeux professionnels et communicationnels organisationnellement contextualisés pour donner un sens à ces évolutions appelées à se renforcer.

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(1) Action Concertée Incitative 2005-2009.

(2) L’idéologie est un système de représentations doué d’une existence et d’un rôle historiques au sein d’une société donnée (Althusser / Encyclopédie Universalis).

(3) Compétence A.1.5 du C2i2e, compétence du champ A « Compétences générales liées à l’exercice du métier » et du domaine 1 « Maîtrise de l’environnement numérique professionnel »

(4) Enquête réalisée par Dominique Bessières, Pierre-Yves Connan, Delphine Combrouze, Jean Vincent, avec la participation d’Eric Laplace et de Benoît Verdier – AEP (Analyse et Evaluation des Professionnalisations)


A propos des auteurs

Teresa ASSUDE est professeure des universités en didactique des mathématiques à l’université de Provence et membre de l’UMR P3 ADEF (Université de Provence & INRP). Ses travaux de recherche portent sur l’étude du curriculum de mathématiques dans son historicité, dans son actualité et dans son devenir. En particulier, ses travaux portent sur les conditions et contraintes d’intégration des TICE dans l’enseignement et la formation mathématique.

Adresse : UMR P3 ADEF – Université de Provence, Case 49, 3 place Victor Hugo, 13331 Marseille cedex 03

Courriel : t.assude@aix-mrs.iufm.fr

 

Dominique BESSIÈRES est maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, Université de Reims Champagne-Ardenne / Institut d’études politiques de Lille. Ses recherches portent sur les conditions des usages TICE en lien avec les enjeux de professionnalisation, de politiques publiques et managérielles. Il s’intéresse également à la professionnalisation de la communication publique et à la normalisation des communications professionnelles dans les contextes publics.

Adresse : IUT de Reims, rue des Crayères, BP 1035 – 51687 REIMS CEDEX 2

Courriel : dominique.bessieres@univ-reims.fr

 

Delphine COMBROUZE est maître de conférences en Sciences de l’Information et de la Communication à l’Université de Reims Champagne-Ardenne. Ses recherches portent sur l’impact des TIC sur l’identité professionnelle ainsi que l’évolution des modalités sociales d’usages. Ses travaux portent également sur la détermination et la catégorisation des modalités d’acceptation ou de rejet des technologies numériques.

Adresse : Laboratoire d’études et de recherches sur les professionnalisations - IUT de Reims - rue des Crayères, BP 1035 – 51687 REIMS CEDEX 2

Courriel : delphine.combrouze@univ-reims.fr

 

Catherine LOISY est maître de conférences en psychologie cognitive. Membre du Centre de Recherche de Psychologie, Cognition et Communication (CRPCC – EA 1285), elle est actuellement détachée dans l'équipe EducTice de l'INRP. Ses recherches portent sur l'articulation des intentions de professionnalisation émanant des institutions et du développement professionnel des acteurs dans ces contextes.

Adresse : EducTice – INRP Lyon, 19 allée de Fontenay – BP 17424, 69347 Lyon Cedex 07

Courriel : catherine.loisy@inrp.fr