Proposition d'un traitement émotionnel pour un STI
"conscient"
Mohamed GAHA, Daniel DUBOIS, Roger NKAMBOU
UQAM,
Montréal
RÉSUMÉ : De
récentes études ont montré que les émotions jouent
un rôle important dans tout processus d’apprentissage. Dans le but
d’optimiser de tels processus, nous faisons l’hypothèse que
les Systèmes Tuteurs Intelligents (STI) gagnent à prendre en
considération les émotions. Nous présentons ici
l'architecture d’un agent cognitif appliqué au tutorat, CTS. Le
fonctionnement du système CTS s’apparente à celui du cerveau
humain selon la théorie neuro-psychologique de Baars sur l'esprit et la
conscience. Ses compétences hautement distribuées lui permettent
de tenir compte de multiples sources d'information et d'analyser la situation
à partir de plusieurs points de vue. Dans cette analyse, notre apport
central est de proposer une extension aux capacités émotionnelles
de CTS. Nous décrivons une extension à CTS dont l’objectif
est de permettre à l’agent à la fois de tenir compte de
l'évolution cognitive de l'apprenant pour sélectionner et moduler
les actions déployées et gérer l'état
émotionnel de l'apprenant afin d'optimiser son apprentissage.
MOTS CLÉS : agent
cognitif, émotion, conscience, modèle de l'apprenant, cognition,
décision, adaptation.
ABSTRACT : Recent
studies reveal that emotions have much to do with learner's performances.
Consequently, e-learning systems should integrate emotional capabilities in
order to optimize learners' experience. This paper presents CTS, our cognitive
agent as it is applied to tutoring. Based on Baars' Global Workspace theory on
mind and consciousness, CTS mimics the processing accomplished by the brain. Its
highly distributed competence lets the agent consider concurrently multiple
information sources and analyse a situation from various points of view. Central
to this paper is a proposed extension to CTS' emotional processing. It should
allow CTS to take into consideration manifestations of learners' emotions along
with his evolving knowledge. This aims both at adapting its pedagogical or
didactical interventions, and at playing on learner's emotional state to obtain
better proficiency.
KEYWORDS : cognitive
agent, emotion, consciousness, learner model, cognition, decision,
adaptation.
1. Introduction
2. Émotions et cognition
3. Exemples de systèmes STI
4. CTS, notre agent cognitif "conscient"
5. Les aspects architecturaux spécifiques aux émotions
6. Description fonctionnelle
7. Conclusion
BIBLIOGRAPHIE
1. Introduction
Pour les théoriciens
interactionnistes, le succès de tout processus d’apprentissage
dépend grandement des prédispositions émotionnelles de
l’apprenant. En effet, selon eux, l’intelligence dépend
étroitement de l’émotion. Daniel Goleman
(Goleman, 1995)
fut l'un des premiers à attirer l'attention du grand public sur la
théorie de l'intelligence émotionnelle et à soutenir que
les émotions nous pilotent jour après jour. Les
émotions tiennent ainsi un rôle fondamental dans tout processus
cognitif et se révèlent primordiales lors de
l’apprentissage. Elles influencent les états psychologiques et
biologiques de l’individu et, comme le soutiennent Alvarado et ses
collègues
(Alvarado et al., 2002),
elles agissent sur l’attention de l’apprenant et sur ses
capacités de compréhension et de mémorisation. Un apprenant
vivant une détresse émotionnelle (craintes d'échouer, peur,
pressions psychologiques de diverses natures, sentiment d'incompétence,
etc.) voit ses performances d’apprentissage réduites
(Thomas et al., 2001).
Par contre, s’il est émotionnellement soutenu,
l’apprentissage fonctionne mieux et l’apprenant présente des
résultats meilleurs.
Pour toutes ces raisons, plusieurs Systèmes Tuteurs Intelligents (STI)
prennent aujourd’hui en considération les aspects
émotionnels de l’apprenant. Des systèmes tuteurs tels que
STEVE
(Elliott et al., 1999),
COSMO
(Lester et al., 1999),
PAT
(Augustin et al., 2004)
et DARWAR
(Johnson et al., 2006)
prennent appui sur des recherches en psychologie et/ou en neurologie pour
dispenser des enseignements qui tiennent compte de la dimension
émotionnelle. Notre agent CTS (Conscious Tutoring System)
(Dubois et al., 2007),
développé au laboratoire GDAC de l'université du
Québec à Montréal, s’inscrit dans la même
perspective et se présente comme un agent cognitif
"générique", capable de multiples applications et extensible.
Flexible, l’architecture de CTS permet le traitement des données
émotionnelles. Il lui manquait cependant la définition de
mécanismes modélisant les états émotionnels de
l'apprenant et affectant les décisions de l'agent. Nous proposons ici une
telle extension.
Le présent article se fixe comme objectif premier de répondre
à la question de recherche suivante : comment étendre
l’architecture de CTS afin de dispenser un apprentissage
personnalisé qui tienne compte des aspects émotionnels ? Pour les
besoins de l’analyse, nous examinons dans la prochaine section le lien
entre émotion et cognition. Nous étudions dans la section 3
comment certains systèmes tuteurs utilisent actuellement les
émotions pour améliorer leurs interactions avec l'apprenant. Dans
la section 4, nous présentons l’agent CTS et décrivons ses
opérations internes. Par la suite, nous présentons notre
proposition d'extension de l'aspect émotionnel chez CTS, pour
enchaîner, dans une section finale, avec l'explication des interactions
internes entre processus cognitifs et processus émotionnels.
2. Émotions et cognition
2.1. L’émotion et la cognition : des liens dialectiques
continus
Historiquement, les émotions et la cognition
ont souvent été considérées comme deux notions
indépendantes. Pour plusieurs philosophes et auteurs classiques, les
émotions sont plutôt récusables ; elles affectent
négativement la cognition et altèrent l’exercice de la
raison. Platon, décrivait les émotions comme des désirs
irrationnels qui doivent être contrôlés lors de
l’utilisation de la raison puisqu’elles affectent
négativement la cognition et altèrent l’exercice de la
raison. Ce point de vue est resté dominant. On le retrouve chez Kant, qui
affirme que les émotions sont une maladie du cerveau
−d’après
(O'Regan, 2003).
Cette acception négative des émotions est toujours présente
dans la littérature. Elle a caractérisé les recherches et
les théories afférentes à l’éducation
jusqu'à très récemment.
Or, de récentes recherches menées en sciences cognitives et en
neurosciences ont démontré que les émotions jouent un
rôle central dans l’apprentissage et dans la prise de
décision
(Ahn et al., 2005),
(Adam et Evrard, 2005),
(Chaffar et al., 2006),
(Ahn et al., 2005).
Bechara et ses collègues
(Bechara et al., 1997)
soutiennent que l’acteur raisonne, décide et agit à partir
et à la lumière des expériences émotionnelles
vécues. Dans la même perspective, Postle
(Postle, 1993)
développe un modèle multimodal où les actions à
entreprendre et l’apprentissage à réaliser dépendent
de l’état émotionnel de l’acteur. En neurobiologie,
LeDoux
(LeDoux, 1996)
démontre, à travers des tests cliniques, la relation entre
l’émotion et certains aspects de la cognition. Enfin, les travaux
de Lisetti
(Lisetti, 2004)
confirment, de manière empirique, l’étroite relation entre
cognition et émotion ; ils recensent neuf aspects où la
cognition serait directement influencée par les émotions, parmi
lesquels l’apprentissage. Lisetti affirme que la qualité de
l’apprentissage est fortement liée à l'état
émotionnel. Augustin et ses collègues
(Augustin et al., 2004)
ajoutent que l’induction d’émotions plutôt
“favorables” autorise un meilleur déroulement des processus
d’apprentissage et une efficience plus élevée en relation
avec des objectifs cognitifs. Ainsi, un système tuteur capable de tenir
compte de l’état affectif de l’apprenant pour ajuster et
construire une approche pédagogique appropriée serait à
même de mieux soutenir l’apprenant dans la réussite de son
apprentissage
Aujourd’hui, plusieurs systèmes d’apprentissage cherchent
à inclure dans leur mode opératoire une telle dimension. Nous en
rappelons les plus significatifs mais, auparavant, nous définissons
brièvement ce que nous entendons par émotion.
2.2. Qu’est-ce qu’une émotion ?
L’émotion est une notion floue, difficilement
définissable
(Alvarado et al., 2002).
Elle est idiosyncrasique et socio-historiquement caractérisée. En
d'autres termes, elle est particulière à chaque individu et propre
à un espace-temps donné
(Picard, 2003).
Ainsi, l’émotion est approchée de plusieurs façons
et, selon les auteurs, plusieurs définitions, rôles et attributions
lui sont donnés
(Michaud et al., 2001),
(O'Regan, 2003).
Selon des études neurobiologiques, les émotions sont à
la base de nos réactions physiologiques et comportementales et impliquent
plusieurs facteurs biochimiques, socioculturels et neurologiques
(O'Regan, 2003).
Elles se traduisent par des réactions spécifiques : motrices
(tonus musculaire, tremblements, etc.), comportementales (agitation,
fuite, agression, incapacité à bouger etc.), et
physiologiques (pâleur, rougissement, accélération du pouls,
palpitations, sensation de malaise, etc.). Selon Damasio
(Damasio, 2002),
les émotions représentent respectivement le début et le
terme d’une progression. Émouvoir, c’est mettre en mouvement,
changer d’attitude. Ainsi, ajoute-t-il, l’émotion serait
l’ensemble des modifications transitoires de l’état de
l’organisme. Elle serait indispensable à tout système
intelligent, qu’il soit naturel ou artificiel. Bien que cette approche ait
fait l’objets de critiques, entre autres par Sloman
(Sloman, 1999),
qui soutient que les émotions sont non requises au contrôle et
à l’intelligence, l’approche de Damasio tend à se
vérifier dans de récentes études
(Alvarado et al., 2002).
De ces idées, nous retenons, d’une part, la possibilité de
détecter les émotions par des manifestations comportementales et,
d’autre part, le pouvoir des émotions, qui “changent
l’attitude et mettent en mouvement”.
3. Exemples de systèmes STI
L’un des premiers systèmes
d’apprentissage qui intègre un agent virtuel doté
d’émotion est STEVE (SOAR Training Expert for Virtual
Environments)
(Elliott et al., 1999).
C’est un agent virtuel pédagogique qui a pour principal objectif
d’aider les apprenants à réaliser des tâches physiques
et procédurales. L’agent STEVE est appelé à
contrôler et à agir sur l’état émotionnel de
l’apprenant dans la formation à la maintenance
d’équipements navals complexes. Pour ce faire, il dispose de 26
types d’émotions et de 70 expressions faciales. Il peut
démontrer des tâches, répondre à des questions et
fournir de l’aide pour résoudre certains problèmes. Les
membres de l’équipe de Conati
(Conati, 2002)
utilisent, quant à eux, un modèle probabilisable de réseau
de décision dynamique (Dynamic Decision Network) pour
décider quand intervenir en tenant compte de l’apprenant et de son
état émotionnel. Cette approche trouve application dans les jeux
éducatifs et se présente comme un modèle
évolué d'OCC1
(Ortony et al., 1988).
Le laboratoire multimédia de l’Université de la Caroline du
Nord a créé un agent pédagogique virtuel qui se nomme COSMO
(Lester et al., 1999).
Pour aider l’utilisateur dans des activités de résolution de
problèmes, COSMO affiche différents comportements émotifs.
Ceux-ci proviennent d’une série de comportements
préenregistrés touchant sa posture, son visage et sa voix.
L’équipe d'Augustin
(Augustin et al., 2004)
a développé, quant à elle, un agent de médiation qui
a pour mission de motiver l’apprenant en lui octroyant un comportement
émotif “favorable”. À la lumière des
manifestations émotionnelles exprimées, le système prend
connaissance de l’état affectif de l’apprenant puis choisit
une approche pédagogique conséquente. En 2002, Faivre, Nkambou et
Frasson ont développé un système composé de deux
agents émotionnels. L’agent Émilie-1 exhibe
l’émotion du tuteur exprimé par un mannequin, et le second
agent, Émilie-2, tente d'inférer l'émotion de l'apprenant
par le biais de réseaux de neurones
(Faivre et al., 2002).
Tout récemment, Johnson
(Johnson et al., 2006)
a développé un STI nommé DARWAR destiné à
l’apprentissage d’une langue étrangère.
L’apprenant pratique les concepts linguistiques nouvellement appris dans
un environnement virtuel.. Tout au long de son apprentissage, un agent virtuel
l’aide, le conseille et le soutient émotionnellement en le motivant
(Johnson et al., 2005).
Tous ces systèmes visent à mettre à
l’épreuve l’hypothèse que des STI tenant compte des
émotions des apprenants augmentent les performances
d’apprentissage. Toutefois, à ce jour, il n’existe pas un
système capable de remettre en cause sa manière
d’opérer au regard des émotions exprimées par
l'apprenant. Les systèmes actuels agissent d’une manière
prédéfinie vis-à-vis d’une classe
d’états émotionnels préformés. Pour pallier
cette insuffisance majeure, nous avons cherché à développer
un STI ayant certaines capacités de délibération, un
STI capable de détecter certains échecs relatifs à
l’approche pédagogique adoptée et, surtout, de mettre en
action une approche alternative d’apprentissage mieux adaptée aux
conditions émotionnelles spécifiques de l’apprenant.
4. CTS, notre agent cognitif "conscient"
CTS est fondamentalement appuyé sur la
théorie de l'atelier global (Global Workspace theory)
proposée par Baars
(Baars, 1988),
(Baars, 1997).
Cette théorie psycho-neurologique propose un cadre général
décrivant l'esprit humain et le rôle essentiel qu'y jouent
l'attention et la conscience. Afin de comprendre l'architecture de CTS et son
fonctionnement, nous rappelons les principaux éléments de cette
théorie.
4.1. La théorie de l'atelier global
Dans sa théorie, Baars explique que la conscience est l'aboutissement
de l'évolution, en accord avec d'autres auteurs tels Sloman et Chrisley
(Sloman et Chrisley, 2003).
Il soutient d'autre part qu'il existe dans le cerveau un "espace de rencontre"
pour l'ensemble des processus et des informations, un mécanisme capable
de lier les ressources de manière pertinente permettant ainsi de recourir
à des processus complémentaires si des situations imprévues
se présentent
(Dehaene et Naccache, 2001), (Crick et Koch, 2003), (Tononi et Edelman, 1998).
L’apport essentiel de Baars consiste en l'organisation d'un cadre complet
expliquant le fonctionnement de l'esprit de manière simple et uniforme.
Sa théorie propose une structure qui assemble diverses hypothèses
en un tout cohérent.
La base de la théorie de l'atelier global tient dans le traitement
réparti effectué par une vaste collection de processeurs neuronaux
très efficaces, mais spécialisés et aux capacités
limitées. Parce que la tâche pouvant être accomplie par
chacun reste très simple, élémentaire même, il leur
faut habituellement collaborer entre eux, s’organiser en coalition, pour
traiter les divers aspects d'une situation. Chacun des processeurs accomplit
"silencieusement", dans l'inconscient de l'esprit, la tâche
spécialisée qu'il sait accomplir, puis il rapporte ses conclusions
en mémoire de travail. L'attention est attirée par
le groupe neuronal le plus actif dans la mémoire de travail. Nous
arrivons ici au cœur de la théorie. En émergeant au niveau de
la conscience, l’information sélectionnée se voit
“publiée” globalement au vaste auditoire que forment les
processeurs inconscients. Certains reconnaissant l'information, la traitent ou
font savoir en mémoire de travail qu'ils ont besoin de l'assistance
d'autres processeurs pour traiter l'information. De nouveau, l'information la
plus importante se voit sélectionnée par l'attention, puis
publiée. Ce mécanisme est celui qui permet les mouvements
volontaires, qui autorise à faire bouger un doigt, à ouvrir la
bouche, à diriger un regard ou à effectuer le rappel d'une
information. De fait, nous ignorons exactement comment nos muscles se trouvent
activés, comment chacun des éléments qui les composent se
met en action, mais il suffit de "mettre dans notre esprit" la volonté
d'effectuer l'une de ces actions pour que celle-ci s’accomplisse
normalement.
Selon Baars, la conscience rend possible des opérations mentales de
multiples natures. Il dénombre, à cet effet, un grand nombre de
rôles et fonctions auxquelles elle participe : fournir
accès aux ressources inconscientes (les activateurs des muscles, nos
mémoires déclaratives, nos mémoires procédurales,
nos capacités d'analyse et de création, etc.) ;
gérer la priorité des informations (par le mécanisme
complémentaire de l'attention) ; compléter
l'interprétation des stimuli (proposer le problème au reste
de l'audience des processus inconscients lorsque les mécanismes
perceptuels ne suffisent pas) ; compléter la détection
et la correction inconsciente des erreurs (lorsque le stimulus se
révèle en porte-à-faux aux attentes) ;
résoudre des problèmes, créer et éditer des plans
(adaptation des plans selon le contexte et modification des étapes
inappropriées) ; permettre l'abstraction ; rendre
possible la réflexion et la référence au Soi, soutenir le
contrôle volontaire. Sans la conscience, ces opérations (et
plusieurs autres non énumérées ici) ne peuvent se produire.
Franklin a sélectionné la riche théorie de Baars comme
fondation pour cons-truire les agents cognitifs Conscious Mattie
(Zhang et al., 1998),
IDA
(Franklin et al., 1998)
et LIDA
(Franklin et Patterson, 2006).
Profitant du tremplin, nous avons choisi d'utiliser IDA comme point de
départ pour notre propre agent tuto-riel, CTS (Conscious Tutoring
System). Calquée sur cette description du cerveau humain et les fonctions
qu'il inclut, l'architecture de CTS reproduit et utilise plu-sieurs de ces
rôles et processus (nous en abordons certains dans les sections 4.2 et
4.4). La section 5 décrit comment plusieurs de ces processus (appel aux
res-sources "inconscientes", priorisation des informations, réflexion,
référence au Soi, délibération et perception) se
voient impliqués dans la gestion émotionnelle de CTS. Des
expériences menées en psychologie ainsi que de nombreuses
recherches entreprises en neurosciences confirment les rôles que nous
venons d'énoncer (voir par exemple
(Crick, 1993),
(Debner et Jacoby, 1994),
et le livre de Baars
(Baars, 1997)).
Elles démontrent l'utilité de la conscience dans l'adaptation de
l'humain à son environnement et dans la gestion de sa complexité.
Nous présen-tons ci-après l'architecture qui en résulte,
son domaine d'application actuel et les possibilités qu'elle
autorise.
4.2. L'architecture conceptuelle de CTS
Nous allons tout d'abord décrire
l'architecture conceptuelle globale du système ainsi que ses
mécanismes2. Nous reviendrons
sur les aspects spécifiques aux émotions de l'apprenant dans la
section 5.
Le fonctionnement global de l'architecture repose sur deux
éléments : les microprocessus, et le triplet
[Mémoire de travail-Attention-Conscience
d'accès]3. Les microprocessus
tiennent le rôle des processeurs de la théorie de Baars. Ils
accomplissent des fonctions diverses : perception, représentation,
transport d'information, recherche d'informations spécifiques entrant
dans la Mémoire de travail (MT), actions motrices, gestion
métacognitive, etc. Certains tiennent leur rôle isolément,
mais généralement, du fait de leurs capacités
limitées, ils s'associent avec d'autres. D'autres encore peuvent
collaborer séquentiellement d'une manière automatisée. Les
microprocessus travaillent toujours dans "l'inconscient", à l'exception
des microprocessus d'information. Ces derniers échappent à
cette règle puisqu'ils représentent et contiennent l'information
qui transite entre les divers modules et la Mémoire de travail,
d'où ils peuvent éventuellement être élevés au
niveau de la Conscience. La Conscience
d'accès4 publie et
communique à toutes les ressources de l'architecture (microprocessus et
modules) l'information sélectionnée par l'Attention dans la
Mémoire de travail. Le passage à la conscience est ainsi
transitoire.
Figure 1 Architecture conceptuelle de CTS
Quoique cette description simple, mécaniste et de haut niveau des
opérations ne puisse rendre compte d'aspects difficiles
liés à la conscience
(Chalmers, 1995),
elle semble néanmoins coller aux phénomènes
observés, et s'avère en harmonie avec les recherches en
neurosciences (voir par exemple
(Crick et Koch, 2003)).
Elle nous fournit un mode opératoire reproductible dans un agent
artificiel et utilisable pour former, par exemple, un agent tuteur sensible
à divers aspects et hautement adaptatif. Revenons, à
présent, à notre architecture pour en présenter les autres
modules.
La Mémoire de travail (MT) se trouve au cœur des communications.
Toute source d'information (microprocessus et modules) y dépose ce
qu'elle souhaite faire connaître. Par exemple, les percepts construits par
les microprocessus perceptuels y rencontrent les informations proposées
par le Modèle de l'apprenant (qui renferme les sous modules Connaissances
de l'apprenant et le Modèle psychologique et émotionnel de
l'apprenant) et par l'Expert du domaine. Des informations proviennnent aussi des
mémoires déclaratives. La MT constitue ainsi un “lieu”
de rencontre, un point de convergence où se tissent des liens entre
microprocessus d'information pour former une description plus riche et plus
complète sur un état ou sur une décision en
élaboration.
Des fonctions de haut niveau s'ajoutent au travail des microprocessus sous la
forme de modules autonomes, principalement : la Perception, la
Mémoire de travail (MT), la Conscience d'accès, le Réseau
des Actes (RA), le Modèle de l'apprenant (MA), l'Expert du domaine (ED),
et les mémoires déclaratives (sémantique, autobiographique
et épisodique transitoire). Le RA équivaut au recueil du
savoir-faire de l'agent. Il s'agit d'un réseau plus ou moins
hiérarchique de séquences d'actes partiellement
spécifiés.
Chaque séquence vise l'atteinte d'un but et/ou le traitement d'une
Émotion de l'agent. Les Actes qui composent les séquences
précisent les préconditions requises à leur
déclenchement et les effets attendus suite à leur
exécution, d'une manière similaire à un système de
règles de production (Figure 2). Ils apparaissent dans le diagramme sous
forme de rectangles arrondis.
Des liens relient les Actes, allant des effets de l'un aux
préconditions de l'autre, et réciproquement (les liens sont
doubles). Ces liens n’indiquent pas seulement la logique du
réseau ; ils servent aussi à la circulation
d'énergie (une valeur numérique) entre nœuds
interconnectés. La circulation d'énergie différencie notre
réseau d'un système conventionnel de règles de productions.
Le prochain Acte à déclencher s'établit à la fois
sur la base des préconditions présentes, et selon l'accumulation
de l'énergie dans les nœuds d'acte.
Cette énergie provient d'une part de nœuds particuliers qui
représentent soit les "émotions" de l'agent, soit ses
"désirs professionnels" (tous deux schématisés ici
sous forme de ronds) ; l'énergie provient d'autre part des
nœuds d'état (les États) qui représentent les
préconditions à satisfaire (schématisées par des
triangles).
La structure de prise de décision est donc influencée par deux
aspects complémentaires : les Désirs et Émotions
pilotent la prise de décision en fonction des aspects propres à
l'agent, et les États, parallèlement, pilotent la prise de
décision en pure réaction à l'état de la situation
(état de l'environnement et faits internes à l'agent). Les
décisions prises dans le Réseau des Actes résultent ainsi
d'une combinaison des buts poursuivis par l'agent, de ses "émotions", et
de l'état de l'environnement. Les Émotions et les États
“écoutent” les publications de la Conscience d'accès.
Ceux qui reconnaissent une information les concernant s'activent plus ou moins
intensément selon leur sensibilité préformée aux
diverses informations reçues.
Figure 2 : Une séquence du Réseau
des Actes
Les nœuds d'acte produisent leurs effets grâce aux microprocessus
qui les composent. En effet, faisant partie d'une structure de prise de
décision, ils n'effectuent aucune opération par eux-mêmes,
hormis le transfert d'énergie. Chaque acte est donc relié à
un ou plusieurs microprocessus. Par exemple, la tâche "Choose
manipulation task" contient un microprocessus d'information qui amène
en Mémoire de travail la sollicitation pour une tâche de
manipulation à offrir à l’apprenant. Comme tout nœud
d'acte, il contient aussi au moins un microprocessus de confirmation dont
le rôle est de surveiller si les effets attendus adviennent tel que
prévu, et dans les délais spécifiés. Si les effets
ne surviennent pas ou divergent des attentes, ce microprocessus dépose
dans la MT un microprocessus d’information indiquant cet état de
fait afin de solliciter la collaboration d'autres processus.
Dans la section 5, nous analysons les émotions et décrivons
leurs rôles. Auparavant, nous illustrons le domaine d'application de CTS,
l'utilité de cet agent, et les défis que son architecture
relève.
4.3. Le domaine d'application de CTS et les services fournis
Notre agent CTS a reçu comme premier domaine d'application
l'encadrement des astronautes qui doivent s'entraîner à la
manipulation du bras robotique Canadarm2 (voir Figure 3). Déplacer des
charges ou simplement manipuler le Bras implique une liste imposante de
connaissances factuelles et procédurales ainsi que l'acquisition de
nombreuses habiletés. L'astronaute doit atteindre un grande
habilité perceptuelle de la situation. Il doit savoir utiliser au mieux
la dizaine de caméras fixes qui lui permettent d'observer le Bras et la
station spatiale sur trois écrans d'ordinateur.
Les consignes de sécurité et les procédures exigent un
respect des procédures et une attention sans faille. Considérant
les enjeux (le risque de heurter un module et d'occasionner sa
dépressurisation ou même sa destruction), l’apprentissage et
la maîtrise de l’ensemble des consignes s'avèrent
primordiaux. Un tel apprentissage s'effectue présentement sous
l’œil vigilant d'entraîneurs humains. L'offre d'un STI aux
astronautes vient leur permettre de s'entraîner en dehors de
l’enclos des simulateurs et en tout temps. Ces raisons nous ont
poussés au développement d’un CTS qui reprend les fonctions
présentement remplies par les tuteurs : sélection
d'exercices théoriques et pratiques, réponse aux questions
factuelles et procédurales, conseils et suggestions lors des
entraînements pratiques (Figure 4), évaluation des manipulations et
résultats.
Figure 3 : Situation d’opération
réelle que reproduit le simulateur
Figure 4 : CTS intervient (fenêtre du bas) lors d’une
procédure incorrecte
Conçu au sein de notre laboratoire, CTS analyse les opérations
de l'astronaute, construit une représentation de ses connaissances et
compétences, sélectionne la prochaine activité sur la base
des succès et échecs observés chez l'apprenant
(Dubois et al., 2006),
(Dubois et al., 2007).
La présente proposition vise à y inclure une prise en compte de
l’état émotionnel des astronautes
4.4. Le cycle cognitif de CTS
Le cycle cognitif de CTS ressemble à celui
d'IDA5. CTS effectue le traitement de
ce qu'il capte de l'environnement par les étapes globales
Sentir-Traiter-Agir avec un découpage cependant plus nuancé de ces
trois blocs globaux (voir Figure 5). Pour les besoins de la
compréhension, nous décrivons ci-après les étapes 4
à 8 du cycle.
Toutes les informations provenant des diverses sources (Perception, Expert du
domaine, Modèle de l'apprenant, mémoires, Réseau des Actes,
microprocessus attentionnels, etc.) se retrouvent en Mémoire de travail
(étapes 2, 3b et 4a) en un ou plusieurs microprocessus
d’information organisés en structures appelées coalitions.
Selon l’importance de l'information qu'elle représente, chacune
d’elles se trouve plus ou moins activée. Les émotions du
tuteur, lorsque nous aurons développé cet aspect
complémentaire de la gestion émotionnelle, pourront venir ici
s'attacher à une coalition
(4a)6, la renforcer et augmenter la
probabilité qu'elle soit sélectionnée par l'Attention (4b).
À l'étape 5, la Conscience d'accès transmet à toutes
les ressources l'information sélectionnée par l'Attention parmi
toutes celles se trouvant dans la Mémoire de travail.
Cette phase de publication crée des réactions chez les
ressources qui reconnaissent l'information. Entre autres, dans le Réseau
des Actes, certaines Émotions s'activent et versent de l'énergie
(ou en versent davantage, si elles étaient déjà actives)
dans les séquences qui leur correspondent (étape 6). Certains
États de même reconnaissent l'information et se déclarent
satisfaits (en devenant actifs), puis transmettent de l'énergie à
l'Acte (ou aux Actes) dont ils sont préconditions.
Figure 5 : Cycle cognitif de CTS
Cette énergie favorise certaines séquences, exerçant
ainsi une pression, par exemple, pour la sélection d’un choix
didactique plutôt qu'un autre. L'Acte le plus activé du
réseau et dont tous les États préconditions sont
vérifiés est choisi (étape 7) et déclenche ainsi
tous les microprocessus qu’il contient (étape 8).
5. Les aspects architecturaux spécifiques aux émotions
Afin d’optimiser le
processus d’apprentissage, CTS tente d’induire des émotions
opportunes chez l'apprenant, des émotions de nature à l'aider
à mieux apprendre. Pour ce faire, notre système opte pour une
approche pédagogique/didactique appropriée qui s’adapte au
mieux à l’état émotionnel de l’apprenant. En
outre, il est en mesure de délibérer quant à la pertinence
d'appliquer l’approche pédagogique/didactique adoptée, et
éventuellement en considérer une autre, plus adaptée.
Dans CTS, la prise en compte des émotions revêt deux
aspects : la détection de l’état émotionnel de
l’apprenant et l'adaptation à cet état. En premier lieu,
nous décryptons l’état émotionnel de
l’apprenant via une modélisation de l’apprenant ainsi
qu'à l'aide du modèle OCC
(Ortony et al., 1988).
En deuxième lieu, nous positionnons une collection
d’Émotions qui s'impliquent dans le choix des actions
du tuteur au niveau du planificateur qu’est le Réseau des
Actes. De l’interaction entre la représentation de
l’état émotionnel de l’apprenant et des
Émotions du planificateur de tâche résulte un schéma
d’apprentissage conséquent en même temps que plus
personnalisé. Pour mieux comprendre cette approche, nous analysons en
premier lieu, les fondements théoriques du système
émotionnel. Dans un second lieu, nous donnons un exemple
d’exécution en citant les avantages de cette approche en
comparaison à CTS dans son état original, sans la gestion
émotionnelle.
5.1. Description théorique
Pour tenir compte de l’aspect émotif de l'apprenant, CTS est
appelé à traiter deux ensembles d’excitateurs à
l'aide d'une mécanique émotionnelle qui se compose (1) des
Émotions du tuteur CTS, implémentées sous forme de
nœuds spéciaux dans le Réseau des Actes (RA) (voir la
description du RA de la section 4.2), et (2) du Modèle de l'apprenant
(MA). Ces excitateurs couvrent deux champs : les excitateurs externes,
qui sont des événements émotionnels/cognitifs captés
de l’apprenant
(Ahn et al., 2006),
et les excitateurs internes provenant des conclusions inférées par
le Modèle de l’apprenant.
5.1.1. Excitateurs externes
Les excitateurs externes apparaissent habituellement en conséquence
directe de la stratégie pédagogique ou du soutien
émotionnel adopté par le tuteur. Ils représentent alors les
signes d'un état émotionnel/cognitif particulier attendu
chez l’apprenant. En effet, certaines actions de CTS prévoient
l’apparition des manifestations d’un état
émotionnel/cognitif particulier chez l’apprenant (telles que
l’augmentation du taux de succès dans les manœuvres de
l'astronaute, une séquence de réponses majoritairement justes sur
un sujet qui semblait mal maitrisé au départ, ou
l'accélération des prises de décision). Dans le cas
où cet excitateur externe attendu est détecté, le tuteur se
reconnaît satisfait et conforte l’action qu’il a prise. Par
contre, en l’absence de l’effet escompté, le tuteur est
insatisfait. L’état d’insatisfaction du tuteur peut le mener
à la recherche soit d’une autre stratégie pédagogique
pour atteindre l’état cognitif attendu, soit d’une nouvelle
manière de faire en vue d’induire un état émotionnel
plus approprié. Pour mieux expliciter cette idée, prenons le cas
où le Modèle de l’apprenant amène le tuteur à
supporter l’apprenant en favorisant, dans le RA, l’exécution
des sous séquences d’Actes pour motiver l’apprenant. Des
microprocessus de confirmation sont alors lancés et viennent à
l’affût d’événements extérieurs
spécifiques. Ces événements de nature émotionnelle
ou cognitive représentent les excitateurs externes attendus. Ils sont des
manifestations révélant que l’apprenant a été
correctement soutenu. En l’absence de ces excitateurs externes
après exécution de la séquence d’actes prévus
dans le réseau, le tuteur conclut que la stratégie s'avère
inefficace, inappropriée ou incomplète. De ce constat
d’absence découle un état émotionnel
d’insatisfaction chez CTS. Si cet état atteint un
seuil prédéfini, CTS peut alors amorcer une phase de
délibération afin d'identifier la cause probable de
l'échec, puis modifier son comportement futur et mettre en œuvre une
nouvelle manière de faire pour s’adapter à
l’apprenant. Ainsi, le tuteur peut décider, après analyse,
d’opter pour trois actions possibles : il peut (1) décider de
s’y prendre autrement pour tenter d'induire un autre état
émotionnel, (2) décider de ne plus chercher à induire un
état émotionnel particulier, car il ne fonctionne pas, ou
(3) décider de rester sur les mêmes conclusions, en signalant
l’échec de l’approche.
Bien entendu, en l'absence de détecteurs biométriques ou de
systèmes d'interprétation visuelle des expressions faciales de
l’apprenant, la détection des manifestations émotionnelles
demeure limitée. Pour ces raisons nous préconisons
d’utiliser le modèle OCC pour approximer les états
émotionnels de l’apprenant. Ces conclusions serviront
d’entrées au Modèle de l’apprenant, qui détient
des informations plus complètes sur l’apprenant (son profil
psychologique, l’historique de ses émotions, ses forces et
faiblesses, ce qu’il aime et ce qu’il n’aime pas, les
connaissances qu'il possède sur le domaine, le succès des
interventions passées, et ainsi de suite). Ainsi, c’est au
Modèle de l’apprenant que reviendra la délicate tâche
de déterminer dans quel état émotionnel se trouve
l’apprenant. Ce module n’étant pas encore
implémenté dans CTS, il reste sujet à exploration.
5.1.2. Excitateurs internes
Les excitateurs internes trouvent leur source
dans les modules de CTS, principalement dans le MA et parfois dans les
microprocessus métacognitifs. Au fur et à mesure de
l’avancement de la séance d’apprentissage, le MA a comme
responsabilité première de faire connaître ses conclusions
sur l’état émotionnel de l'utilisateur ainsi que sur son
état cognitif, sur les causes probables de ces états et sur les
tendances vers un état émotionnel. Les excitateurs internes
proviennent à la fois d'un traitement statistique, d'une analyse causale
(diagnostic) et de perceptions immédiates de l’état
émotionnel/cognitif de l’apprenant. Le fait que le Modèle de
l’apprenant crée et dépose en continu dans la MT des
microprocessus d’information est un processus indispensable. Il cherche
à informer aussitôt que possible le Réseau des Actes de ses
constats et conclusions. La certitude de l'information, son importance ou la
répétition d'un constat établissent l'urgence
d’exécuter les actes correctifs. Les émotions de
l’apprenant se répercutent ainsi sur le réseau des actes et
par conséquent sur les décisions du tuteur.
Pour illustrer ce fonctionnement, supposons que l’apprenant ait connu
plusieurs revers et difficultés (selon les observations d'erreurs
récentes accumulées par le MA), que son comportement
révèle un état émotionnel qualifié de
« Affligé » (selon l'évaluation
effectuée par le modèle OCC du MA) et que cet état d'esprit
fait obstacle à son apprentissage (selon des observations historiques et
selon la tendance déterminée par le
MA7). Tous ces microprocessus
d’informations soumis en MT forment des excitateurs internes qui
résultent d'analyses effectuées par les modules de CTS. Ils
pourront amener le tuteur à décider de fournir un soutien
émotionnel. Pour ce faire, le RA dispose de plusieurs sous
séquences d’Actes. Le fait que le RA soit à
l’écoute des différentes informations a pour
conséquence d’activer variablement diverses portions du
réseau. Ainsi, certaines sous séquences se retrouvent plus
activées que d’autres, selon l'état de stimulation des
diverses Émotions et des divers nœuds d'état dans le
réseau. Si le Réseau "conclut" qu'il faut apporter davantage de
soutien affectif à l’apprenant, il opte pour l'option la plus
favorisée (la sous séquence la plus activée) dont les
préconditions sont toutes satisfaites. Les observations sur les court et
moyen termes et les évaluations statistiques du MA auront ainsi
généré des excitateurs internes valables pour soutenir
l'apprenant. Ainsi, le traitement émotionnel que nous proposons pour CTS
vise autant l'induction d'émotions favorables chez l'apprenant que
l’exécution d’actes pédagogiques appropriés
à l’état émotionnel de celui-ci.
6. Description fonctionnelle
6.1. Prise d’action
Dans cette section, nous analysons le mode de
fonctionnement du système ainsi que l’interaction de certains
modules qui composent CTS.
Les informations, sous forme de microprocessus d'information, transitent
habituellement par la Mémoire de travail, où elles forment
éventuellement des coalitions. Selon leur importance, les coalitions
peuvent ou non accéder à la Conscience. Dès l’instant
où une information devient consciente, elle se voit diffusée
(publiée) et, de ce fait, connue de l’ensemble des modules et
microprocessus formant CTS. Prenons un exemple de l'effet d'une publication. Au
fur et à mesure des actions et du cheminement de l’apprenant, le
Modèle de l’apprenant prend connaissance des informations
publiées. Celui-ci traduit cette information en état
émotionnel/cognitif de l’apprenant ainsi qu'en intensité de
cet état. À travers l’étude des actions
passées de l’utilisateur, le Modèle de l’apprenant
détermine si l’état émotionnel/cognitif actuel de
l’apprenant est opportun ou non à l’apprentissage. Le MA
transmute cette conclusion en une coalition de microprocessus
d’information qu'il dépose dans la Mémoire de travail.
Ceux-ci renferment les informations relatives à l’état
émotionnel/cognitif ainsi qu’à l’intensité de
celui-ci, et forment ainsi des excitateurs internes. Dans le cas où elle
est sélectionnée pour devenir consciente, cette coalition
d’informations est publiée à tous les modules qui composent
notre système. Par cette action de publication et de diffusion, tout le
système prend connaissance de cette information, dont le Réseau
des Actes.
Tous les Désirs et toutes les Émotions du Réseau des
Actes qui reconnaissent l’information publiée deviennent
excités, élèvent leur niveau d'activation puis
déversent de l’énergie proportionnellement à leur
niveau d'activation. L'énergie se transmet de nœud en nœud et
s'accumule progressivement dans ceux-ci. Les Désirs déversent leur
énergie en passant nécessairement par les Buts (qui peuvent ne
chapeauter qu’un seul Acte), mais les Émotions peuvent viser
directement des Actes. Il faut voir l’énergie comme un
critère de discrimination qui favorise l’exécution d'une
séquence ou d’un Acte spécifique par rapport à un
autre. Ainsi, plus un nœud d'acte a accumulé de
l’énergie, plus il a de chances d'être
sélectionné pour exécution par rapport aux Actes d'autres
séquences. Au fur et à mesure des publications, plusieurs
Émotions dans le Réseau des Actes s’excitent
différemment, ce qui a pour conséquence d’activer
différemment les séquences. Ce principe permet de donner
priorité à certains Actes par rapport à d'autres.
Or, dès l’instant où le tuteur (plus
spécifiquement, le RA) "décide" comme prochaine action
pédagogique d’apporter du support émotionnel à
l’apprenant, il doit choisir entre plusieurs approches qui aboutissent
à la même finalité (celle de donner du support
émotionnel ; voir figure 6). Reprenant la situation
décrite à la section5.1.2, lors de la publication de
l’excitateur interne qu’est le microprocessus d’information
“Affligé”, tous les liens issus de l’Émotion
concernée transmettent de l'énergie, favorisant en
conséquence l’exécution des sous séquences auxquelles
ils aboutissent.
Figure 6 : Pouvoir discriminant des
émotions
Dans le cas où le tuteur décide de soutenir l’apprenant
et de tenter de lui insuffler des émotions plutôt favorables,
l’agent CTS s’attend à ce que son action ait un impact
positif sur l’apprenant. Il revient au Modèle de l’apprenant
de reconnaître les signes concernant les émotions de l'apprenant,
de les interpréter et d’informer de la concrétisation ou non
de l'émotion attendue chez l'apprenant. Dans le cas où
l’apprenant paraît plus disposé, avec une meilleure
disposition à l’apprentissage, l’agent conforte sa prise de
décision et se considère comme satisfait ; les
Émotions concernées perdent rapidement leur activation. Dans le
cas contraire où l’effet attendu ne se produit pas, tel que
souligné par le microprocessus de confirmation qui espère
l'événement, l’agent CTS augmente son niveau
d’insatisfaction vis-à-vis de cette action.
Évidemment, d’autres facteurs de discrimination dans le choix de
l’acte pourraient aussi entrer en jeu. Le Réseau des Actes
présente la particularité d’être très flexible
et permet d’intégrer des aspects tels que la personnalité du
tuteur et ses émotions, les préférences de l'apprenant, son
profil, ses cheminements, ses progrès, etc. (voir figure 7).
Figure 7 : pouvoir discriminant du réseau
amélioré par un niveau supplémentaire
d’émotions
6.2. Délibération et remise en cause
Le STI que nous avons mis en place ne se limite pas seulement au choix de la
meilleure action pédagogique/didactique compte tenu de
l’état émotionnel de l’apprenant. Nous avons
cherché à profiter des possibilités qu’offre CTS
telles que la délibération. Nous définissons la
délibération comme la capacité de notre système
à poursuivre explicitement un raisonnement itératif. Elle octroie
à notre agent, entre autres, la capacité de rectifier ses plans et
de réajuster une approche ne produisant pas les résultats
attendus. Requérant des passages fréquents par la Conscience,
elle correspond bien à ce que soutient la théorie de Baars
en l'occurrence.
En effet, les actions prises par le tuteur peuvent être sujettes
à rectification, car elles proviennent d'inférences et de
conclusions souvent incertaines Ces évaluations peuvent être
inefficientes, ce qui nécessite de délibérer pour trouver
une alternative plus prometteuse. Ainsi, nous conférons au tuteur une
capacité de remise en question quant à la pertinence de ses
propres actions et de proposer, le cas échéant, une autre
manière de faire apprendre.
Les excitateurs externes prennent ainsi toute leur importance. Ils permettent
de comparer les attentes aux constats, en comparant les excitateurs externes
attendus aux excitateurs internes. Dans le cas où le système
apporte du support émotionnel positif à l’apprenant, le
système s’attend à un retour d’information de la part
de l’apprenant indiquant que celui-ci présente une meilleure
disposition. De même pour les choix pédagogiques, le tuteur
s’attend à ce que l’apprenant démontre des
compétences meilleures. Nous utilisons des microprocessus de
confirmation pour surveiller l'apparition en MT de certaines informations
spécifiques confirmant ou non l'effet souhaité. Dans le cas
où l’excitateur attendu ne se présente pas, un message
à cet effet est émis en MT par le microprocessus de confirmation
concerné. La publication éventuelle du message se traduit
initialement par l'augmentation de l'activation d'une ou de plusieurs
Émotions concernées dans le RA. Une répétition de
l'échec produit dans CTS un état d’insatisfaction
grandissant. Nous confions à des microprocessus métacognitifs le
rôle de superviser les performances de l'agent, et de permettre à
ce dernier d'établir son niveau de satisfaction par rapport à ses
processus et actions. Il leur revient de faire déclencher des mesures
appropriées lorsqu’ils le jugent nécessaire. Arrivé
à un certain seuil, le microprocessus métacognitif concerné
n'a d'autre recours que d'enclencher une réflexion plus profonde, une
délibération devant mener à de nouvelles options, voire
à des modifications structurelles dans l'agent.
Tous les modules composant CTS sont appelés à participer
à la délibération et à émettre leurs
propositions en ce qui concerne l’état d’insatisfaction (ou
tout autre objet visé par la délibération). Une
délibération est un processus qui consiste à examiner avec
d’autres modules (la Métacognition, le Réseau des Actes, le
Modèle de l’apprenant, le Modèle du domaine, Réseau
des Actes) les différents aspects d’un problème en vue de
prendre une décision. Concrètement, pendant un nombre de cycles
prédéfinis dans CTS, une coalition décrivant
l’état d’insatisfaction effectue une boucle allant de la MT
à l’ensemble des ressources par le jeu des publications de la
Conscience d’accès, et revenant en MT. Itérativement, les
modules enrichissent ou s’opposent à certaines informations de la
coalition, et ce jusqu’à établissement d’un consensus
entre les divers modules.
Au final, il peut arriver qu’aucune solution ne soit trouvée.
Dans ce cas, le système signale l’échec de la
délibération et l’action qui la sous-tend n’est plus
exécutée. Toutefois, dans le cas où la
délibération fournit une autre proposition possible pour
dépasser l’insatisfaction, cette proposition est traduite en
actions dans le Réseau des Actes afin de soutenir l’apprenant.
7. Conclusion
En interagissant avec l’apprenant, le tuteur
cherche à faire de l’apprentissage une coaction qui produit
efficacement la construction du savoir ; il s'efforce d'obtenir une
meilleure adéquation entre contenu, une méthode pédagogique
et un apprenant particulier. Pour atteindre une telle dynamique
d’apprentissage prenant en compte l’état émotionnel de
l’apprenant et son évolution,, nous avons cherché à
concevoir un système qui, en prenant en charge les multiples
manifestations émotionnelles de l’apprenant, sait réajuster
conséquemment son approche et mieux finaliser son action.
L’extension que nous proposons à CTS, présente
l’intérêt d’intégrer les aspects
émotionnels dans une architecture cognitive riche ici appliquée
à l’e-formation. Les nœuds émotionnels viennent
s'insérer au Réseau des Actes existant pour en moduler la prise de
décision. Ils ajoutent à la richesse de l'architecture en
permettant maintenant à CTS de considérer les émotions de
l'apprenant dans son effort d'adaptation et d'encadrement.
Les prochaines étapes de notre recherche nous
orientent vers les multiples expressions de l’émotion avec le but
de mieux saisir ses significations, ses circonstances et ses mouvements pour les
traduire et en faire usage. Nous souhaitons nous focaliser davantage sur
l'impact des émotions dans la délibération, ainsi que sur
les autres opérations cognitives connexes telles la mémorisation,
les réactions d'urgence, etc. Dans une première étape, nous
avons cherché à concevoir un système qui, en tenant compte
des expressions émotives des agents avec lesquels il interagit,
infère des solutions d’apprentissages de meilleure portée ;
dans une deuxième étape nous souhaitons qu’il soit capable
d'apprendre par lui-même et de s'auto-corriger. À travers ses
essais et erreurs, un tel système sera amené à
élargir ses possibilités et à parfaire par lui-même
ses interventions tutorielles.
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1 OCC est un modèle de
simulation de vingt-deux émotions. Il détermine, en fonction de
trois critères et d'une variable centrale, l’état
émotionnel dans lequel se trouve probablement l'agent humain
observé. Par extension, on l'utilise pour déterminer l'état
émotionnel qu'un agent artificiel devrait démontrer dans une
situation spécifique.
2 Plusieurs modules et autres
ressources constituant l'architecture n'existent actuellement qu'au niveau
conceptuel, ou de manière simulée dans le prototype, ou n'ont
pas encore été intégrés à
CTS : Modèle de l'apprenant (simulé), Expert du domaine
(reste à intégrer), mémoires déclaratives (à
développer), microprocessus métacognitifs (à
développer). Néanmoins, afin d'alléger la lecture et donner
un aperçu plus compréhensible, nous écrivons nos
descriptions au présent.
3 Pour éviter les confusions
dans nos explications, qui touchent parfois aussi bien aux agents humains
qu'à notre agent artificiel CTS, nous dénotons les modules de CTS
avec une majuscule initiale. Par exemple, son module "mémoire de travail"
se voit désigné comme "Mémoire de travail" ou l'acronyme
correspondant MT.
4 Nous utilisons le terme
Conscience à l'intérieur de notre agent pour
désigner les mécanismes qui remplissent les rôles
proposés par Baars pour la conscience. Nous visons une reproduction
fonctionnelle des fonctions de la conscience, c'est-à-dire
reproduire les services sans s'attacher à reproduire les
éléments sous-jacents. De ce fait, nous ne prétendons pas
recréer une conscience “ réelle ”
5 Les différentes
améliorations et changements que nous lui avons apportés sortent
du cadre du présent article.
6 En ce qui a trait aux
"émotions" éprouvées par CTS, nos développements
informatiques n'ont jusqu'à maintenant couvert que les mécanismes
émotionnels insérés dans le Réseau des Actes sous la
forme de noeuds motivateurs (Désirs) ; ceux-ci influencent la
prise de décision d'une manière qui demeure "inconsciente".
7 Le MA analyse ainsi l'apprenant
de plusieurs manières et sous plusieurs angles, et non pas uniquement par
le travail du modèle OCC
A
propos des auteurs
Mohamed GAHA est un étudiant en
maitrise en informatique à l'Université du
Québec À Montréal depuis 2006. Il s'est
spécialisé dans les Systèmes Tuteur Intelligent cognitifs.
Il travaille dans le laboratoire GDAC sur un projet
pluridisciplinaire qui vise à produire un logiciel
pour assister les astronautes dans la manipulation
du bras robotisé CANADARM2. Il s'intéresse aux architectures
cognitives, aux émotions durant la phase d'apprentissage et aux modules
pédagogiques
Adresse : SH5717, 201, avenue du
Président-Kennedy, Montréal (Québec)
H2X 3Y7
Courriel : mohamed.gaha@gmail.com
Daniel DUBOIS a soutenu sa thèse doctorale en
informatique cognitive en avril 2007. Elle portait sur le développement
d'une architecture cognitive fondée sur des mécanismes de
conscience, et son application à un système tuteur intelligent.
Dubois s'intéresse aux mécanismes de l'esprit humain, à
certains phénomènes neuropsychologiques telles les
émotions, et à la modélisation de processus de haut niveau
tels ceux impliqués dans le tutorat. Il poursuit leur intégration
dans l'architecture CTS qu'il a développée en collaboration avec
plusieurs membres du laboratoire GDAC de l'Université du Québec
à Montréal.
Adresse : Laboratoire GDAC, 201, avenue
du Président-Kennedy, Local PK, 4150, Montréal (Québec)
Canada, H2X 3Y7
Courriel : dubois.daniel@uqam.ca
Roger NKAMBOU est professeur au département
d'informatique de l'université du Québec à
Montréal et directeur du laboratoire de recherche GDAC (Gestion,
Diffusion et Acquisition des Connaissances). Il est titulaire d'un doctorat en
informatique de l'université de Montréal (1996). Ces
intérêts de recherche portent sur l'ingénierie des EIAH, les
systèmes auteurs pour le développement des systèmes
tutoriels intelligents, la représentation des connaissances, le
développement et l'intégration des architectures d'agents
cognitifs en contexte de résolution de problèmes. Depuis
2000, il s'intéresse aussi à la dimension affective des EIAH.
Adresse : UQAM, 201 avenue du
Président-Kennedy, Montréal (QC) H2X 3Y7 Canada
Courriel : nkambou.roger@uqam.ca |